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16/05/2024

Je pleure encore la beauté du monde

Quand on parle de préservation, de sauver cette planète, il faut commencer par les prédateurs. Parce que tant qu’on ne les aura pas sauvés eux, on n’aura aucune chance de sauver le reste. »
Moi, je vois leur puissance subtile, leur patience immense et leur beauté incomparable.

Ayant beaucoup aimé le premier roman, Migrations, de cette autrice, je me faisais une joie d'ouvrir celui-ci. Il avait en effet tout pour me plaire: une histoire de réintroduction de loups dans une forêt des Highlands (une pure fiction , apparemment) et j'étais déjà ravie.
Hélas, le défaut que j'avais déjà évoqué comme bémol pour son précédent ouvrage se donne ici libre-cours: le pathos. charlotte mcconaghy
On accumule les personnages torturés, les situations prévisibles (voire invraisemblables) et à trop vouloir accumuler les thèmes (violence faites aux femmes, loups accusés de tous les maux, y compris de meurtre sur humains) l'autrice m'a totalement déçue. Dommage.Il n'en reste pas moins qu'on sent ci un véritable amour  de la nature et des loups.

 Éditions Gaïa 2024. Traduit de l'anglais (Australie) par Marie Chabin.

15/05/2024

Géographie de la peur

"Le pire n'est pas d'être quittée par tous ou par tout le monde. Le pire est de ne pas pouvoir vivre avec soi. "

Maureen, 19 ans souffre d'agoraphobie et de Trouble Anxieux Généralisé. A l'orée de l'âge adulte, alors qu'elle devrait aller à l'université, toute sortie devient une expédition dangereuse car son cerveau la maltraite et lui fait envisager le pire.
Petit à petit, l'incompréhension de ce qui lui arrive réduit le cercle de ses amis et/ou les incite à interpréter son comportement d'une manière totalement inappropriée. claire castillon
Le roman relate de l'intérieur le ressenti à la fois psychologique, mais aussi physique , et ce de manière très réaliste. L'humour n'est pourtant pas absent car Maureen, mine de rien, alterne entre autodérision et auto-apitoiement.
 Un roman qui permet de comprendre une pathologie qu'on aurait trop facilement tendance à prendre à la légère: il/elle n'a qu'à prendre sur soi.

 

Scripto, Gallimard 2024, 165 pages .

14/05/2024

Je m'appelle Australie

" Le ton de sa voix provoque une secousse chez elle, quelque chose rompt, une corde usée, une digue, un château de sable, elle ne sait pas ce que c'est , ça se brise et autre chose prend la place, se répand dans son ventre. "

Dix nouvelles composent ce recueil. Dix nouvelles aux tonalités très différentes où des femmes, d'âges différents tentent de trouver leur place dans le monde. En ouverture, il y a cette adolescente qui s'est rebaptisée Australie à qui une sorte de sorcière bienveillante va confier un précieux conseil. Celle dont la fratrie se réunit autour d'un feu de camp pour évoquer, de manière impressionniste, des souvenirs d'enfance, évocation qui vire peu à peu au cauchemar. Celle qui aide sa tante à vider le chalet d'un oncle pour le moins particulier.
A chaque fois, on est saisi par l'écriture de l'autrice, par son acuité,sa capacité à susciter le malaise ou l'émotion de manière apparemment ténue mais diablement efficace. zoé derleyn
Zoé Derleyn prête  une attention extrême aux détails, détails que l'on retrouve en écho au fil des textes et son écriture , fluide, nous entraîne toujours plus profondément dans des zones inattendues. Un grand et beau coup de cœur. Et zou, sur l'étagère des indispensables.

 

 Éditions du Rouergue 2024, 132 pages à lire et relire.

 PS: dans la foulée, j'ai commandé les deux autres livres de cette autrice.

13/05/2024

Ne jetez pas les sirènes avec l'eau du bain

"J'aimerais tellement, comme disait maman, qu'il pousse dans mon jardin ce que je n'ai pas semé."

Elles sont trois femmes, et un petit garçon, Elliott, sept ans, à se croiser dans une piscine municipale. La piscine comme une parenthèse dans leurs vies, parenthèse appréciée ou non. L'occasion de revenir sur leur enfance, dont Sidonie ne semble pas être sortie, mais aussi sur leurs corps (Laure n'a pas oublié qu'avant elle était dodue) ou leur relation avec leur compagnon (celui de Marion régente la vie familiale).
Rien de bien original ? Peut- être. Mais tout l'art de l'autrice de Du vent dans mes mollets, que nous retrouvons ici avec beaucoup de plaisir est de procéder par petites touches, de ne jamais forcer le trait et de doser au plus juste les émotions, sans oublier quelques traits d'humour dont elle est spécialiste. raphaële moussafir
Elle donnerait presque envie à ceux qui ,comme Sidonie,envisagent la piscine comme un enfer chloré d'aller y faire un tour. Un très agréable moment de lecture.

Robert Laffont 2024, 198 pages pleines de sensibilité.

De la même autrice: Clic et reclic

12/05/2024

Croire aux fauves...en poche

"J'ai perdu ma place, je cherche un entre-deux. Un lieu où me reconstituer. Ce retrait-là doit aider l'âme à se relever. Parce qu’il faudra bien les construire, ces ponts et portes entre les mondes; parce que renoncer ne fera jamais partie de mon lexique intérieur."

Spécialiste des populations arctiques, l'anthropologue Nastassja Martin est attaquée par un ours le 25 août 2015. Tels sont les faits .
Mais la principale intéressée préfère évoquer l'événement en tant que rencontre et échange, car si l'ours l'a défigurée, emportant en lui une partie du visage de l'humaine , elle-même estime que les frontières entre humain et animal sont poreuses et qu'elle a donc gardé en elle quelque chose de l'ours.
 En effet, l'ours n'est pas n'importe quel animal, il faisait partie selon l'auteure de sa destinée, de son rêve et la rencontre était inéluctable.nastassja martin
L'animisme est au cœur de ce récit exigeant et poétique qui raconte tout à la fois une reconstruction mais aussi la nécessité d'instaurer "une négociation au sujet du monde dans lequel nous allons vivre."
Un récit enthousiasmant.

10/05/2024

L'heure des femmes...en poche

"Oui, pourquoi les femmes ne profiteraient -elles pas de ce formidable élan de vie pour prendre enfin leur place dans cette société en pleine mue ? "

De nos jours, une jeune femme est chargée par une amie éditrice de collecter des informations sur celle qui , à l'heure de la sieste, sut donner la parole aux femmes et surtout les écouter : Menie Grégoire.  En 1967, à la radio on dialoguait à propos"de thèmes sociétaux importants dont personne ne parlait publiquement à l'époque. Il y avait la sexualité bien sûr. Mais aussi la contraception, l'avortement , les problèmes de couple, de famille, l'éducation des enfants. Sans parler de l'inceste dans les familles. "
A une époque où les femmes , pour la plupart n'avait aucune éducation sexuelle, aucun accès à la contraception et enchaînaient les grossesses , où l'avortement entraînait la mort de très nombreuses femmes, c'était révolutionnaire.
Et pourtant, Menie était une femme d'origine bourgeoise, capable d'organiser de grands dîners , d’élever ses deux filles et d'écouter avec empathie, sans juger les femmes de toutes origines sociales. adèle bréau
C'est un grand plaisir de la retrouver par le biais de ce roman écrit par sa petite fille, Adèle Bréau. Ni hagiographie, ni portrait à charge, mêlant fiction et réalité, de l'aveu propre de l'autrice, ce roman nous rend Menie Grégoire proche et formidablement vivante. Les récits qui s'entremêlent et donnent à voir le destin de femmes modestes  qui croisèrent celle qu'on appelait "La dame de cœur" sont aussi très réussis , un peu moins celui-mettant en scène le personnage principal, car trop démonstratif à mon goût. Une réussite néanmoins qui permettra de (re) découvrir cette grand dame dont la voix résonne encore à mes oreilles.

Jean-Claude Lattès 2023.

09/05/2024

Printemps...en poche

"Si vous passez devant un buisson ou un arbre, vous ne pourrez pas ne pas l'entendre ce bourdonnement mécanique, la nouvelle vie déjà à l’œuvre, l'usine du temps. "

Le printemps est la saison où le temps semble parfois devenu fou, alternant froidure brutale et soleil estival , où la mort et la vie semblent  lutter pied à pied . Ce n'est en rien une saison mièvre et Ali Smith nous le démontre dans cet opus particulièrement déstabilisant, violent et captivant pour qui accepte de se laisser malmener dans sa lecture.611FQDnkX5L._SL1500_.jpg
Flots de paroles violentes anonymes (provenant des réseaux sociaux, des médias, de la rue ? ) captant bien la Grande-Bretagne contemporaine, claironnant la haine de l'Autre, de l’étranger, dévalent d'emblée sur le lecteur telle une avalanche étouffante.
Cette image de l'avalanche reviendra par ailleurs, sublimée par l'évocation des œuvres d'une artiste , Tacita Dean. car il est aussi beaucoup question d'art et de distorsion de la réalité.

Nous croiserons ainsi la route de Richard,réalisateur de télévision, qui ne se remet pas du décès de son amie Paddy, sur le point de participer, sans grand enthousiasme, à un projet mettant en scène Rilke et Katherine Mansfield. Comment rencontrera-t-il Bretagne , gardienne dans un centre de rétention et cette mystérieuse petite fille, Florence, qui semble hypnotiser tous ceux qu'elle croise et les plier en douceur à sa volonté ?
C'est tout l'art d'Ali Smith que  de flouter les frontières dans un pays qui les réaffirme avec force ,de générer le chaos ,afin de mieux souligner celui du monde dans lequel nous évoluons. Un roman éprouvant mais nécessaire. ali smith

Grasset 2022. Traduit de l'anglais par Laetitia Devaux. Un travail remarquable.

08/05/2024

Far Ouest...en poche

Quel plaisir de voir enfin en poche ce roman sorti en ...2008 !

”Elle avait simplement voulu commettre un bonheur”

Oui, vous avez bien lu "Commettre" et non pas "connaître"  un bonheur.Mais bien évidemment, quand Sixtine adopte Dalton, croisé de setter gordon et de lévrier afghan, emprisonné dans un refuge depuis de trop longues années, c'est le début d'une très belle relation entre la jeune femme éprise de liberté et le chien apparemment inapte au bonheur.fanny brucker
On sourit quand Sixtine "se  dit qu'elle n'avait pas réalisé à quel point il était gênant de passer une soirée en tête à tête avec quelqu’un qu'on en connaît pas,qu'il fût humain ou pas. même s'il ne parlait pas, elle aurait au moins aimé qu'il manifeste plus d'enthousiasme en découvrant son nouveau confort, qu'il lui témoigne tout de suite plus de reconnaissance, qu'il  se comporte comme une sorte d'acteur hollywoodien qui traverse le séjour en décrétant qu'il va prendre une  bonne douche et se sert au passage un scotch on the rocks qui lui fait fermer les yeux de plaisir.". Ou quand elle trouve le moyen de contourner un règlement imbécile pour ne pas quitter son chien dans un magasin d'alimentation...On a les larmes aux yeux quand , enfin, Dalton "  manifeste du bonheur , qu'il se révèle capable de quitter son monde des morts sans expression."  Bien sûr le bonheur de l'un va déteindre sur l'autre car "Dalton était devenu un prétexte de bonheur. Ce que  Sixtine n'aurait pas fait pour elle-même, elle le faisait pour Dalton."
En contrepoint, un peu artificiel à mon goût, nous suivons le périple de la sœur aînée de Sixtine qui, veuve, quitte les États-Unis et rentre en France avec le vague espoir de renouer avec celle qu'elle connaît à peine. Un peu caricatural mais amusant ce personnage devient peu à peu pathétique...
Quant à la fin du roman, elle  m'a fait penser à celle, très poétique, du film "Crin Blanc"...
Les personnages de Far-Ouest ne sont pas être pas suffisamment fouillés mais en même temps cela nous donne tout le loisir de compléter à notre guise ce  été esquissé et de passer un excellent moment sur les plages de l'Atlantique , en mangeant des chouquettes,  en compagnie de  ceux qui sont devenus nos amis, Sixtine,Dalton et la jument Fidèle .
Un premier roman sensible et émouvant de Fanny Brucker ,dédié à ...Dalton !

07/05/2024

#Assisedeboutcouchée #NetGalleyFrance !

Mais si on accepte que la mort d'un animal nous plonge dans une telle douleur, ne doit-on pas aussi accepter la valeur de sa vie ? C'est peut-être pour ça que le deuil canin reste un impensé. Parce qu'il nous force à envisager la valeur de ces vies animales que nous concevons si volontiers comme mineures ou sacrifiables. 

Depuis l'enfance, La vie d' Ovidie est liée à celle des chiens. Le chien est en effet le garant de sa sécurité quand elle part faire des courses à vélo. Le chien est toujours le garant de la sécurité des femmes quand elles décident, ces insensées, de marcher seules en forêt, ou en campagne. Pourquoi croyez-vous que mon beagle et moi parcourons toujours ensemble les champs alentours ? ovidie
La thèse d'Ovidie, et j'y adhère volontiers est que si les chiens et les femmes ont créé un lien si fort c'est parce qu'ils sont tous deux, sous des formes différentes , victimes de la violence de la société patriarcale. Mêlant récit personnel et informations historiques, Ovidie nous offre ici un texte sensible et fort qui ne pourra que toucher (mais aussi instruire ) tous les ami.e.s des canidés. 

 

J-C Lattès 2024. ovidie

 

Merci à l'éditeur et à Netgalley.

 

06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : ovidie

06/05/2024

La théorie des ondes

La naissance d'un drame est indubitablement question d'ignorance. Tout au moins de perte: de soi, des autres, du passé oublié au profit d'un avenir sans cesse plus urgent, plus rapide, sans pieds ni jambes pour tenir debout. 

Chalon-sur Saône est en proie au monstre Carnaval. Mais un autre monstre a sévi laissant au bord de la rivière le cadavre d'une très jeune fille. Une découverte qui réveille de bien tragiques souvenirs car plusieurs assassinats de jeunes filles sont restés inexpliqués.31waBxFN8uL.jpg
Catherine Gauthier, ancienne flic devenue assistante d'un avocat entêté, Pierson,va mener l'enquête et tous deux vont tenter de faire rouvrir ces "cold cases".
Pascale Chouffot choisit une héroïne atypique (elle ne ressent plus la douleur) mais laisse la part belle à l'humanité de ses personnages. Remontant le temps, elle évoque d'autres monstres, d'autres ogres qui prennent des formes différentes (PDG soucieux de rentabilité mais pas d'humanité, par exemple) et nous fait découvrir la situation des "colons du Morvan", orphelins ayant subi les pires horreurs avant que justice leur soit rendue en 1911. Un roman haletant que j'ai dévoré en deux jours.

 Éditions du Rouergue Noir 2024, 426 pages .