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30/01/2012

Banquises

"...une terre qui s'efface, une femme qui disparaît."

 Sarah en 1982 a quitté la France pour le Groenland. Elle n'est jamais revenue. Sa soeur Lisa part, vingt-sept ans plus tard , sur les traces de celle dont l'absence , pendant des années, a influé sur sa vie et celle de leurs parents.valentine goby
"Les lieux ne retiennent rien, il dit. Lisa n'a pas envie de le croire." Et pourtant cette banquise qui disparaît , sous l'effet du réchauffement climatique et que l'auteure décrit longuement ,est bien le symbole de cette quête vouée à l'échec mais pourtant nécessaire pour clore une histoire qui n'en finit pas de ne pas finir. En effet les parents , surtout la mère ne peuvent se résoudre à admettre la disparition de leur fille aînée.
Valentine Goby peint avec acuité les révélations qui se fraient un chemin dans les paroles échappées, les souhaits impossibles à réaliser, la vie qui continue malgré tout, chacun adoptant des stratégies différentes pour supporter cette situation , peignant "les minces frontières [qui] commencent à séparer le père, la mère, Lisa. De fines cloisons par lesquelles ils se préservent les uns des autres, de la contamination, délimitant des territoires distincts et des espaces ténus pour se frôler."
Le père, peut être encore plus que la mère m'a infiniment touchée, dans sa manière pudique , poétique et pragmatique de trouver une issue de secours. Une écriture sur le fil du rasoir, un roman qui appuie là où ça fait mal.Une douleur exquise.

Banquises, Valentine Goby, Albin Michel 2011, 247 pages .

Déniché à la médiathèque.

 L'avis de Cuné.

Celui de Choco.

de Clara.

et d'Aifelle.

03/11/2011

Jeu de pistes

"La maison était un traquenard."

La vie de Damien March , passablement ennuyeuse, va basculer quand il apprend la mort de son oncle, Patrick, dont il avait quasiment oublié l'existence.Abandonnant Londres et son travail à la BBC, Damien va s'installer dans la maison dont il vient d'hériter, sur une île au large de Cape Cod. Lui reviennent alors en mémoire toute une flopée de souvenirs de cet oncle , ancien écrivain à succès qui vivait au milieu de tout un bric à brac, au sein duquel Damien va dénicher un manuscrit inachvé , mettant en scène Mycroft Holmes, le frères aîné du célèvre détective. Ce texte le mènera par bien des chemins détournés à la découverte d'un secret de famille.marcel theroux,frères
Le jeu de pistes dont il est question est extrêment plus subtil que ce à quoi on pourrait s'attendre. Il s'agit en fait plutôt d'une évolution du narrateur qui explore sa propre personnalité à travers celle de son oncle. Les rencontres, les souvenirs, les découvertes, en apparence anodines ,les péripéties forment un ensemble fort plaisant car le style est fluide, plein d'humour (et de métaphores comme je les aime!). Qaunt aux ellipses, elles surprennent agréablement le lecteur.
Un livre enthousiasmant à plus d'un titre et par dessus le marché, un séjour fort agréable par personnage interposé dans une maison en bord de mer, que demander de plus ?!

Marcel Theroux, Jeu de pistes, traduit de l'anglais par Stéphane Roques, Plon 2011, 238 pages addictives.

Cuné a aimé aussi !

27/10/2011

Betty

"C'est le genre de scrupule qu'elle avait perdu depuis longtemps."

Les histoires de femme fatale m'agacent plutôt. Trop prévisible, trop convenu. Aussi avais-je dans un premier temps abandonné Betty. Mais bon, ce roman , même sans lien avec le commissaire Erlendur Sveinsson reste quand même un roman d'Indridason. Alors, je lui ai redonné une chance et j'ai bien fait !
Car, délaissant rapidement tous les figures imposées du roman noir, le récit ménage une sacrée surprise au lecteur et explore, en outre, la face nettement moins glamour de Betty. Ces "coulisses", ce arnaldur indridason,femme fatalebackground, plus que la manipulation en elle même, m'ont vraiment intéressée et j'ai lu d'une traite ce texte . Un cran en dessous de la série du commissaire islandais mais un bon moment quand même.

Betty, Arnaldur Indridason, traduit de l'islandais par Patrick  Guelpa.Métaillié 2011, 206 pages.

14/10/2011

Veuf

"Tu as été ma plus belle qualité, j'espère ne pas avoir été ton plus gros défaut."

Jean-Louis Fournier et moi c'est une longue histoire d'amour, teintée d'humour et de mélancolie. Je l'avais trouvé un peu acrimonieux dans son dernier opus mais on ne se refait pas , j'ai craqué quand j'ai vu Veuf en librairie.jean-louis fournier
Et j'ai bien fait. Car le récit de la vie après le décès de sa femme Sylvie est une merveille de délicatesse. Fournier y navigue à vue," souvent  au cap Horn, au fond de [son] petit bateau malmené par la mer"entre humour- politesse- du -désespoir du veuf qui doit affronter le quotidien lui rappellant sans cesse l'absente et "les mots doux et légers" pour" ranimer nos souvenirs heureux" de ces textes courts .
Courts mais fertiles en formules et les post-it ont émaillé quasiment chaque page de ce récit où Fournier ne se présente jamais à son avantage et se montre d'une sincérité désarmante.
Il égratigne au passage les "veuvages mode d'emploi" et toutes les manifestations stéréotypées entourant la mort, soulignant pourtant les marques d'affection qui l'ont touché. On le sent écorché vif et l'humour noir est son bouclier favori contre la douleur.
Pas de panégéryque obligé et figé de la défunte ,même si on voit bien qu'elle fut une belle personne à travers ce qu'il nous en dit.Fournier la célèbre d'une façon bien plus élégante et vivante ,soulignant aussi la complicité qui les unissait.
Un livre qui nous rappelle aussi qu'il faut chérir les moments partagés avec ceux que l'on aime, tant qu'il est encore temps.

"Tu étais le pôle positif, j'étais le pôle négatif. ça faisait de la lumière , et souvent des étincelles."

 

Veuf, Jean-Louis Fournier Stock 2011, 157 pages qui font beaucoup de bien.

13/10/2011

De vieux os

"La présence de Murray était une brève distraction, une rencontre sur la plage avant que la marée de mots ne le remporte."

Quand un universitaire écossais, Murray Watson, se pique de mettre à l'honneur Archie Lunan, un obscur poète noyé à vingt-cinq ans , et donc de fouiller dans sa vie, il ne sait pas qu'il va mettre à jour un passé que les  amis d'Archie, hippies des années 70 devenus d'ennuyeux professeurs de facs ,préfèreraient oublier...
Des ruelles de Glasgow aux landes d'une île coupée du monde ou presque, Murray nous entraîne dans une enquête tortueuse à souhait, fertile en rencontres pittoresques voire menaçantes...Pas de tout repos  la vie d'universitaire, surtout quand on entretient des relations clandestines avec l'épouse de son directeur de thèse !louise welsh
Un roman d'atmosphère qui se lit comme un policier et nous entraîne dans un univers plein de charme et de rebondissements , tout en s'interrogeant sur les relations entre l'oeuvre et l'artiste, sans jamais sombrer dans le jargon. Très agréable et fluide.

De vieux os, Louise Welsh, traduit de l'anglais par Céline Schwaller, Métaillier 2011, 392 pages fascinantes à savourer.





10/10/2011

Fauna

"ça ne faisait rien, la grâce a fini par revenir."

à la lisière de Toronto, la casse automobile de Guy abrite une buse blessée, une nichée de ratons-laveurs, sans compter un jeune ex-soldat, une ado (aux cheveux roses) en cavale avec un énorme chien, Billy. Un inventaire à la Prévert mais aussi un havre où tous ces éclopés de la vie peuvent souffler un peu et se recréer un semblant de famille en écoutant Guy lire "Le livre de la jungle". Mais cette paix va peut être se voir remise en question quand  la jeune Edal Jones, agent fédéral de la faune , en congé pour stres,s va découvrir le monde de Guy.à moins qu'elle aussi ne se laisse séduire par ce monde en marge...alissa york,un chien,une buse et quatre ratons -laveurs
Si vous êtes fan des livres mettant en scène des animaux, ce roman est pour vous !  En effet, l'auteure a su décrire avec précision et empathie les comportements de nos amis à deux ou quatre pattes et l'on suit, fasciné, les descriptions de cette faune sauvage qui vit à deux pas de la ville.
Si vous avez besoin d'un livre réconfortant qui vous fasse croire le temps de quelques heures que la résilience est possible et que les enfances les plus calamiteuses peuvent déboucher sur des années plus roses, n'hésitez pas non plus ! Un moment d'évasion, parfois cousu de fil blanc,mais pas grave, de temps en temps ça fait du bien de mettre ses pas dans des sentiers  balisés,et, au détour d'une page, de bien jolies surprises et des ruptures de ton bienvenues comme cette description parfaitement juste d'une scène d'après l'amour...
Un roman scandé par les lectures des différents personnages, lectures qui bien évidemment donnent envie de (re) découvrir les livres en question !

Fauna, Alissa York, traduit de l'anglais (Canada) par Florence Lévy-Paoloni, Editions joëlle Losfeld 2011, 333 pages qui donnent le sourire.

Un peu dans l'esprit de Vivement l'avenir...

06/10/2011

Ma soeur vit sur la cheminée

"Le poisson est tout seul. Je sais exactement ce qu'il ressent."

annabel pictcher,mort d'un enfant

La mort de Rose, tuée dans un attentat terroriste à Londres a détruit sa famille. Ses parents ne peuvent supporter leur douleur et négligent quelque peu leurs autres enfants: Jasmine la soeur jumelle de Rose et le petit dernier, Jamie.annabel pictcher,mort d'un enfant
Ce dernier,pour affronter les autres, se réfugie dans un monde de super-héros, ce qui lui permettra de s'allier à une petite fille tout aussi malicieuse que lui, Sunya. Oui mais voilà, la famille de Sunya est d'origine pakistanaise , ce qui ne plaît pas du tout au père de Jamie...
D'emblée, le lecteur sait qu'il entre dans un roman confortable, raisonnablement prévisible -et ceci fait partie de son charme. La narration est fluide, les personnages des enfants bien croqués mais on regrettera quelques scènes qui sonnent faux et une référence à une émission de télé réalité qui apporte bien peu à la tension dramatique. un roman plein de fraîcheur qui a les défauts de ses qualités, quand il tire trop sur les ficelles du pathos. Un bon moment de lecture cependant quand on a besoin de facilité (et ce n'est pas une tare !)

Deux couvertures au choix, pour la collection jeunesse ou adultes.

 

Ma soeur vit sur la cheminée, Annabel Pitcher, traduit de l'angalis par Amélie de Maupéou, Plon 2011 236 pages pleines de tendresse.

03/10/2011

Famille modèle

"-Si tu fais vraiment partie de la famille, il va falloir que tu apprennes à merder."

Warren Ziller, a décidé de transplanter sa famille du Wisconsin où tous profitaient d'un bonheur paisible, pour leur faire partager son rêve américain de richesse et de confort en  Californie . Las ! les ennuis vont commencer et s'aggraver d'autant plus vite que Warren ne peut avouer à sa parfaite petite famille que toutes leurs économies ont disparu dans le sable du désert...eric puchner,famille américaine
Eric Puchner brosse un portrait caustique de la société américaine,et de cette famille qui semble dans un premier temps échappée d'une publicité : la mère , toujours vêtue de pastel, surnommée par ses enfants "Pyrex, déesse des gratins" qui réalise des films éducatifs benêts, les enfants, tous très beaux mais qui, mine de rien, peinent à s'adapter à ce nouvel environnement qui ne leur semble pas forcément idyllique et le père , incarnation vivante de l'esprit d'entreprise.
Tout ce joli petit monde va se trouver sévèrement secoué dans le shaker du destin et les véritables personnalités vont se découvrir peu à peu,tandis que s'effilochent les rêves paternels. C'est à la fois cruel et drôle , on contemple tout à la fois effaré et troublé cette chute de la maison Ziller en croisant les doigts, juste au cas où...

Famille modèle, Eric Puchner, traduit de l'anglais (E-U) par France Camus-Pichon, Albin Michel 2011, 523 pages à déguster.

Merci à Clara pour le prêt,

à Keisha qui a joué les passeuses !

Cuné a beaucoup aimé aussi.

22/09/2011

A vol d'oiseau

"La moitié se mit à pleurer, l'autre moitié à sangloter."

A vol d'oiseau est un roman qui bouscule les frontières. Frontière géographique d'abord: celle entre le Canada et les États-Unis, dont le tracé capricieux avait plus ou moins été oublié et qui, sur une partie du microcosme où se déroule l'action, est symbolisée par un fossé que l'on saute allègrement. Oui mais des trafiquants de drogue, des passeurs de clandestins , voire des terroristes,vont changer la donne et faire grimper la paranoïa du côté des États-Unis...jim lynch,argh ayé je craaque et j'ai déjà commandé le premier roman de ce
La frontière entre les catégories professionnelles est- elle aussi chahutée: qui aurait pu croire que le héros du roman, Brandon, 210 cm, dyslexique, un peu autiste sur les bords, passionné d'oiseaux (il les identifie et les compte sans arrêt) deviendrait l'un des meilleurs garde-frontières ? On n'aurait pas parié un dollar sur lui, pas plus qu'on aurait cru que ses oeuvres artistiques, inspirées du Land Art, possédaient une quelconque valeur...En tout cas, il est le seul , dans sa fraîcheur d'esprit à planer au dessus de toutes ces contingences et à poursuivre son chemin entre deux communautés , pleines de gens pittoresques, que la peur de l'autre fait partir en vrille.
Un roman plein d'humour et de tendresse (on ne peut que tomber amoureux de Brandon   (et pas seulement parce qu'il sait si bien comprendre les vaches !)), qui ne lésine pas sur les rebondissements et peint ce microcosme avec bonhomie et bienveillance, sans oublier néanmoins une petite touche acide... Un roman dont j'ai tourné de plus en plus lentement les pages pour le faire durer un peu plus longtemps ! "On n'oublie pas les moments passés avec Brandon."

A vol d'oiseau (Border songs) traduit de l'anglais (E-U) par Jean Esch, Éditions des deux terres 2011, 424 pages qu'on a peine à quitter !

20/09/2011

Rien ne s'oppose à la nuit

"L'écriture ne peut rien. Tout au plus permet-elle de poser les questions et d'interroger la mémoire."

Plus que l'histoire de cette femme, très belle dès l'enfance, mais qui n'a jamais su s'ancrer dans l'existence car elle était bipolaire, c'est le rapport à l'écriture qui se donne à lire dans ce texte ouvertement autobiographique qui m'a intéressée.delphine de vigan
L'écriture ici est un combat qui malmène physiquement Delphine de Vigan, ce n'est pas une entreprise de lissage qui prétend éclairer toutes les zones d'ombre, révéler la Vérité sur sa mère. Non, dans ce work in progress qui s'intercale avec le récit , l'auteure nous  précise bien qu'il y a différentes versions, qu'il a fallu choisir, elle nous livre ses scrupules vis à vis des membres encore vivants de cette tribu hors-normes dont elle est issue.
Des pans entiers de l'histoire de l'auteure seront passés sous silence et c'est cela qui m'a plu. ça et l'extrême sensibilité qui domine ce texte emprunt de souffrance sans jamais tomber dans le pathos. On n'est ni dans l'hagiographie ni dans le règlement de compte mais dans une entreprise  quasiment de salut familial: comment fonder une famille et avancer sans crainte avec un tel passé ?
à noter aussi une très jolie évocation des années 70.

Un grand merci à Clara !

L'avis de Mango

Qui d'autre ? :)