01/03/2024
Migrations...en poche
Par amour pour ces oiseaux, Franny Stone parvient à embarquer sur un bateau de pêche et faisant fi de ses convictions écologiques, propose un marché au capitaine du Saghani : les sternes les mèneront aux poissons et elle pourra les suivre dans leur périple.
Commence alors un double voyage : l'un sur mer en compagnie d'un équipage haut en couleurs , l'autre dans le temps qui nous permet de découvrir une héroïne marquée par un passé douloureux, par son amour de la mer et enfin par une irrépressible bougeotte qui la force à quitter ceux qu'elle aime.
Charlotte McConaghy sait nous tenir en haleine, tant dans son récit d'aventure maritime que dans la découverte des failles de son héroïne. On ressent parfaitement aussi son amour de la nature et les craintes que la sixième extinction annoncée génère chez ses personnages, personnages dont elle brosse le portrait avec beaucoup d'empathie. On frôle parfois le pathos mais la conclusion, juste parfaite offre une lueur d'espoir bienvenue. Un roman qui séduira tous les amoureux de la nature.
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29/02/2024
Qui a peur des vieilles ?/ essai sur l'invisibilisation des femmes ...en poche
" Si elles restent sous-représentées dans l'art, les femmes mûres y montent en puissance depuis quelques décennies. Elles sont les pionnières. Les vibrionnantes. Plusieurs d'entre elles montrent que la vieillesse n'est pas le naufrage dont parlait de Gaulle. Qu'elle peut aussi être indocile, déraisonnable, se muer en espace de réflexion sur la société. En bulle de subversion et de révolte: une liberté dans et par l'acte de créer. "
S'il n'est guère original pour qui a déjà lu par exemple Vieille peau de Fiona Schmidt,clic,l'essai de Marie Charrel permet néanmoins de balayer un large éventail de domaines concernant les vieilles femmes et de refaire des piqûres de rappel dans certains domaines. Ainsi souligne-t-elle très justement l'importance économique que représente l'industrie des cosmétiques : "Selon Cosmétique Mag, les soins antirides pesaient 162 millions d'euros en 2017 en France (dont 9, 4 million pour le bio) et les soins du visage au sens large, 274 10 millions d'euros. "
Quand on sait que seules les bonnes crèmes hydratantes sont vraiment efficaces et que les visages des actrices peuvent être retouchés numériquement...Il y a là de quoi faire de sérieuses économies.
Un essai plaisant à lire malgré tout.
06:00 Publié dans Essai, le bon plan de fin de semaine | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : marie charrel
28/02/2024
Fille en colère sur un banc de pierre...en poche
Profitez de votre enfance, le monde se chargera de vous briser le cœur bien assez tôt. "
Parce qu'elle a été estimée responsable de la disparition de sa petite sœur, alors qu'elle même n'était qu'une enfant,Aïda a été ostracisée par son père et ses deux sœurs ainées, puis exfiltrée par sa mère.
La paria sera néanmoins contactée par ses sœurs lors du décès du père de famille, le Vieux. L'occasion de se confronter au passé et de peut-être trouver la vérité...
L'action se déroule sur une île italienne écrasée de soleil, au sein d'une famille atypique comme les affectionne Véronique Ovaldé, tout à la fois baroque et tragique.
Malgré l'atmosphère très réussie, je n'ai pas vraiment apprécié ce roman dont l'intrigue m'a rappelé celle d'Une souris bleue de Kate Atkinson et j'ai trouvé le temps long.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : véronique ovaldé
17/02/2024
A quoi rêvent les étoiles...en poche
"On a tous besoin de se raconter une histoire qu'on trouve cohérente, de s'arranger une vérité à partir de fragments de fabriquer des liens de cause à effet. Même lorsqu'ils n'existent pas vraiment. Surtout lorsqu'ils n'existent pas vraiment. "
Roman Choral, A quoi rêvent les étoiles met en scène cette fameuse théorie qui veut que nous soyons reliés à n'importe qui dans le monde par une chaîne de six relations individuelles.
Ici, le territoire est plus circonscrit car il se limite à la Bretagne, mais l'ambition n'en est pas moins grande car Manon Fargetton va relier des êtres qu'en apparence tout oppose (par l'âge, la profession, le passé...). Il y aura des surprises (et non des moindres) mais rien de télescopé.
Quel que soit l'âge de ses personnages, elle les dépeint avec beaucoup de sensibilité et de véracité se glissant aussi bien dans la peau d'un ado refusant de sortir de sa chambre que dans celle d'une veille dame refusant de vivre sans son mari, décédé. La maladie mentale, l'emprise ou le parent qui refuse de donner son indépendance à sa fille sont aussi évoquées mais les personnages sont aussi animés par leurs passions, aussi différentes soit-elle. Faisant le lien entre eux, un peu à la manière d'un chœur antique à lui tout seul, un marchand ambulant de crêpes haut en couleur commente ce qu'il voit et ce qu'il devine. Un excellent moment de lecture pour ados- mais pas que- car l'écriture est fluide, els personnages complexes et la structure très maîtrisée.
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16/02/2024
Le lâche...en poche
"Suivant qui vous êtes, les handicapés vous apparaissent comme des memento mori, la bonne action de la journée à accomplir, un réceptacle pour votre pitié ou un motif de curiosité. "
Qui est le lâche dans ce roman ? Le fils qui a fugué il y a dix ans sans donner de nouvelles et se retrouve maintenant dans l'obligation d'appeler son père à la rescousse car il est paralysé et sans ressources à la suite d'un accident ; ou le père qui, à la mort de sa femme, a plongé dans l’alcool et la violence ? Peu importe au fond. L'essentiel est que, bon gré, mal gré les deux hommes vont devoir cohabiter , s'adapter l'un à l’autre , et cela n'ira pas sans mal car si le père a su gommer (en partie) ses aspérités, le fils est une boule de colère contre le destin, contre les autres, mais surtout contre lui-même.
Pas d'autoapitoiement, mais une bonne dose d'humour noir et un regard acéré porté sur le handicap, la manière dont il est vécu de l'intérieur ( le fait que l'auteur soit lui-même en fauteuil n'y est sans doute pas pour rien) et un magnifique portrait , très nuancé, des relations familiales. L'auteur qui signe ici son premier roman fait une belle entrée dans la littérature.
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09/02/2024
A prendre ou à laisser...en poche
"Elle refusait d'apparaître aux yeux de son assassin de mari comme un vieux tacot goulu en carburant dont il faudrait remplacer tant de pièces qu'il se révélerait moins onéreux de l'abandonner à la casse et d'acheter un véhicule neuf. "
Pour des raisons diverses (des antécédents de dégénérescences du cerveau ,le désir ne pas être un poids pour le National Health Service...) , Cyril et Kay ont passé un pacte: le jour du quatre-vingtième anniversaire de Kay, ils mettront fin à leurs jours.
Arrive le jour fatidique et tout n'est pas si simple.
Un point de départ, douze possibilités et autant de textes aux tonalités diverses qui nous permettent de réfléchir sur la vieillesse et la fin de vie. Le risque était de tomber dans une certaine mécanique, mais Lionel Shriver parvient toujours à nous surprendre, voire à nous effrayer. L'humour est toujours aussi grinçant et l'autrice n'hésite pas à brosser d'elle un portrait au vitriol , un clin d’œil bien venu pour éviter toute position surplombante. Un pur régal.
Traduit de l’américain par Catherine Gibert
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : lionel shriver
26/01/2024
Sortir au jour ...en poche
"Le deuil est devenu une affaire individuelle avec des étapes à franchir. Mais nous ne sommes pas des êtres linéaires. Il y a toujours des retours en arrière. "
Dans une librairie, Amandine Dhée rencontre une thanatopractrice, Gabriele. Pour cette dernière, en quête de sens , ce métier est une reconversion qui suscite bien des étonnements, voire des rejets.
Entre les deux femmes s'instaure un dialogue , entrecoupé par des extraits du verbatim d'une émission : Vis ma vie de thanatopracteur.
Quelle drôle d'idée un livre sur la perte, pourrait-on penser. Mais l'autrice, mêlant ses réflexions sur la mort, mais aussi la création et la volonté de transmission instaure un échange fécond , souvent surprenant, mais riche d'humanité.
Elle y évoque, souvent avec humour, aussi bien le confinement et ses conséquences ,"Ce soir , le président de la République nous pousse à l'intérieur de nos maisons et nous ordonne d'y rester. Il nous invite même à lire, c'est dire si la situation est grave. " que sa famille , "On parle de liens du sang, mais les familles sont d'abord faites de beurre et de sucre, n'en déplaise aux scientifiques et aux diététiciens. "
Le ton se fait parfois plus grave, mais la tendresse règne toujours quand il s'agit d'évoquer ses enfants ou de rendre un hommage à France Gall.
Quant à Gabriele, elle nous permet de voir l'envers d'un décor qui trop souvent est occulté .Elle aussi sait se montrer drôle mais se révolte aussi contre les hypocrisies sociales qui veulent passer la beauté de sa profession à la trappe.
Un livre plein de vie qui ferait presque la nique à la mort.
06:10 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : amandine dhée
19/01/2024
L'été de la sorcière...en poche
"Son entraînement pour devenir sorcière était bien différent de ce qu'elle avait cru au début, mais tout était nouveau pour elle et amusant malgré tout. "
L'annonce de la mort de sa grand-mère, d'origine anglaise mais totalement intégrée à la culture japonaise, est pour la jeune Mai l'occasion de revenir sur ce séjour qu'elle avait effectué deux ans auparavant auprès de cette femme atypique, un peu sorcière selon les dires de la mère de la jeune fille.
Ce n'était pas une époque facile pour Mai, trop angoissée pour continuer à suivre ses cours au collège. Mais sa grand-mère avait su l'apaiser par un rythme de vie régulier au sein d'une nature tout sauf idyllique, où la mort avait autant sa place que la mort.
Grâce à une écriture en apparence simple, mais pas simpliste, des personnages aux caractères bien moins lisses qu'il n'y paraît à première vue, l'autrice réussit un tour de force: évoquer des thèmes puissants tout en apaisant ses lecteurs.trices. Voilà qui relève bien d'un peu de magie et donne bien sûr envie de découvrir d'autres œuvres de Nashiki Kaho.
Picquier 2021, traduit du japonais par Déborah Pierret-Watanabe.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : nashiki kaho
13/01/2024
Petite Sale...en poche
"Demest est semblable à ses champs: froid, dur à la tâche, gelé, animé par des projets plus grands, par des mouvements profonds."
Du 10 au 19 février 1969, la vie des habitants d'un petit village situé non loin du Chemin des dames va être bouleversée: la petite fille de 4 ans du potentat local a été enlevée. Une demande de rançon tombe. Des policiers parisiens sont envoyés en renfort . La dernière personne a avoir vu la petite Sylvie est Catherine. La Petite Sale c'est elle.
Ces qualificatifs expriment bien tout le mépris de classe envers cette jeune femme qui s'active à la ferme et à laquelle personne ne prête attention. Elle a d'ailleurs tout leur d'intérêt dans ce monde d'hommes à ne pas avoir un corps attractif...
Nous sommes donc en 1969 mais nous pourrions être un siècle plus tôt, comme le remarque un personnage, car la modernité ne semble pas être arrivée dans cette campagne où M. Demest fait la pluie et le beau temps , tenant les habitants sous sa coupe, étant le seul à leur offrir du travail. C'est aussi un tyran domestique contre lequel rares sont les membres de sa famille sont ceux qui osent regimber.
Ce nouveau roman de Louise Mey est un magnifique roman d'atmosphère, une plongée dans la boue et le froid, mais aussi un roman policier qui fleure bon les enquêtes à la Maigret, repas au café du village parmi les habitants taiseux.
C'est enfin une magistrale dénonciation du patriarcat, s'exerçant à différents niveaux, dans un monde où les femmes commencent à peine à se forer leur place.
Le style est également magnifique, la construction impeccable et une grande place est accordée à la description des corps marqués par le travail, de ses corps auxquels on ne prête pas attention mais qui pourront peut être un jour se déployer. Du suspense et de l'espoir, un excellent cocktail. Et zou , sur l'étagère des indispensables.
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : louise mey
11/01/2024
Bivouac...en poche
"Comme les humains, les arbres isolés n'ont pas grand chance de survie. La résilience du bois vient avec la force du nombre , la prise de ses racines entortillées à une société de semblables. "
Quel plaisir de retrouver Anouk, Raphaëlle et Coyote, leur chienne ! Cette fois , les deux amoureuses vont se confronter à la vie en communauté , d'abord dans une éco-ferme communautaire puis , par la force des choses, au cœur d'une tribu de guerriers écologistes.
En effet, Gros-Pin , l’arbre préféré de Raphaëlle , est menacé d'être abattu et avec lui toute une partie de la forêt que les protecteurs de la nature voudraient protéger en en faisant une réserve faunique. Mais les intérêts économiques et politiques priment et la construction d'un oléoduc ne s’embarrasse ni de la biodiversité, ni des conséquences catastrophiques à plus long terme.
Gabrielle Filteau-Chiba, à son habitude, maitrise à la perfection l'art du récit et c'est pourquoi nous retrouvons un personnage,Riopelle, avec qui Anouk avait connu une liaison aussi brève que passionnée. L'occasion pour le lecteur de découvrir la vie de ces "eco-Warriors" qui ont fait le choix de sacrifier leur vie personnelle pour tenter de sauver la Nature. L'occasion aussi de confronter ses personnages aux fluctuations du désir et au polyamour.
La langue est toujours aussi belle, l'intensité dramatique aussi forte et le lecteur ne sortira pas indemne de cette lecture qui fait la part belle aux descriptions de le la forêt et des vies qui s'y déploient. Une réussite qui file sur l'étagère des indispensables.
PS: peut se lire indépendamment des deux volumes précédents , mais ce serait se priver de grands bonheurs de lecture.
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : gabrielle filteau-chiba