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29/02/2024

Qui a peur des vieilles ?/ essai sur l'invisibilisation des femmes ...en poche

" Si elles restent sous-représentées dans l'art, les femmes mûres y montent en puissance depuis quelques décennies. Elles sont les pionnières. Les vibrionnantes. Plusieurs d'entre elles montrent que la vieillesse n'est pas le naufrage dont parlait de Gaulle. Qu'elle peut aussi être indocile, déraisonnable, se muer en espace de réflexion sur la société. En bulle de subversion et de révolte: une liberté dans et par l'acte de créer. "

S'il n'est guère original pour qui a déjà lu par exemple Vieille peau de Fiona Schmidt,clic,l'essai de Marie Charrel permet néanmoins  de balayer un large éventail de domaines concernant les vieilles femmes et  de refaire des piqûres de rappel dans certains domaines. Ainsi souligne-t-elle très justement l'importance économique que représente l'industrie des cosmétiques : "Selon Cosmétique Mag, les soins antirides pesaient 162 millions d'euros en 2017 en France (dont 9, 4 million pour le bio) et les soins du visage au sens large, 274 10 millions d'euros. " marie charrel
Quand on sait que seules les bonnes crèmes hydratantes sont vraiment efficaces et que les visages des actrices peuvent être retouchés numériquement...Il y a là de quoi faire de sérieuses économies.
Un essai plaisant à lire malgré tout.

 

16/01/2024

Courir l'escargot

"85 % des escargots font moins de cinq millimètres de diamètre. En automne, dans la forêt,en soulevant n'importe quelle brassée de feuilles mortes, on prend dans ses mains sans le savoir des centaines d'escargots minuscules. "

 

Lauren Bastide a fait tatouer sur son avant-bras droit, en majuscules, "RALENTIS".Il est donc normal qu'elle se penche sur le cas de l'escargot, ce champion de lenteur, de repli et de résilience car elle affirme: "En écrivant sur l'escargot, je voulais écrire sur la lenteur, l'étrangeté, sur la solitude et la mort, sur l'hibernation et l'estivation. Estiver, c'est comme hiberner, sauf que c'est l'été. "
Sous forme de courts paragraphes, au début de ce journal poétique , se croisent donc souvenirs traumatiques , informations sur l'escargot, bribes de vie quotidienne où j'ai déniché un paragraphe savoureux et très pertinent sur le beagle.lauren bastide
C'est un peu déroutant ,mais on s'habitue vite et peu à peu l'écriture prend de l'ampleur et on se surprend  à ne plus lâcher ce texte pudique et sensible où l'on croise aussi à plusieurs reprises un rouge-gorge.

Éditions JC Lattès 2024.

Les escargots, on les retrouve aussi au cœur de ce roman surprenant : clic

 

06:00 Publié dans Essai | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : lauren bastide

07/01/2024

Comment jouir de la lecture ?

"Moi, Lectrice, qu'est-ce que je ressens, et quel endroits du texte créent ce ressenti?
La jouissance est là, entre Texte et moi. "

Partant de l'idée que "les plaisirs sexuels que nous croyons naturels, immédiats et personnels, sont en réalité construits, conditionnés et culturels", Clémentine Beauvais élargit cette notion aux plaisirs engendrés par la lecture qu'il faut apprendre à élargir par une éducation au ressenti.
Elle commence par distinguer deux catégories établies par la société: le discours qui hiérarchise les livres (ceux qu'il faut avoir lus, "il n'appartient qu'à nous de nous hisser à leur hauteur") et celui, plus progressiste en apparence qui prône n'importe quelle lecture, l’important étant de lire.  clémentine beauvais
Soulignant les limites de cette division, elle rappelle la difficulté de parler des textes qui nous ont plu et dresse une liste non exhaustive des plaisirs suscités par les textes:  du délice addictif , aux enchantements rebelles, en passant par l'orgie de relectures, le tout émaillé de citations et de références. En tout une vingtaine de jouissances possibles, susceptibles d'évoluer au fil du temps pour un même lecteur.
Elle aborde enfin la dimension politique de ces plaisirs de lecture et la nécessité de les analyser.  Un texte revigorant.

 

Alt 2024. 3 euros 50

 

19/12/2023

Le danger de ne pas être folle

"La fiction est un voyage vers l'autre, et ce trajet est le plus fascinant que l'on puisse faire. "

En 288 pages, la romancière et journaliste Rosa Montero, forte de sa propre expérience et de sa formation en psychologie nous propose un voyage fascinant au cœur de la création littéraire.rosa montero
Elle dégage les lignes de force communes aux créateurs que d'aucuns qualifient de "fous" en s’appuyant sur de nombreuses références littéraires (gare aux liste de lectures qui vont s'allonger ! ) et scientifiques . C'est d'ailleurs de manière tout à fait incidente qu'elle découvrira elle-même que l’euphorie qu'elle éprouve quand elle est satisfaite de ce qu’elle a rédigé n'est pas ressentie par tous mais seulement par celles et ceux qu’elle nomme les "junkies de l’intensité".
 Par ailleurs, avec malice, Rosa Montero nous informe au détour d'une page que la fiction est elle aussi bien présente au cœur de ce qu'elle nous a présenté comme étant autobiographique. De quoi réaffirmer son goût de l'imaginaire... Un texte riche et enjoué qui file sur l'étagère des indispensables.

 Éditions Métailié 2023.

 Traduit de l'espagnol par Myriam Chirousse.

 

01/10/2023

Eloge de la plage

"  Après la plage-salon, la plage -chambre-à-coucher, la plage-atelier, l'homme a donc créé la plage -dépôt-d'ordures. Et ici risque de s'arrêter l'histoire de notre littoral. Dégoûté, je suis sorti de l'eau et j'ai regardé la plage étouffer.

   Il y a deux siècles, les fous ont ouvert le bal des bains de mer, notre folie contemporaine y mettra bientôt fin. "

Mêlant sa pratique des plages, son ressenti mais aussi une approche tout à la fois historique, culturelle et écologique des plages, Grégory Le Floch nous propose un magnifique Éloge de la  plage.
Érudit dans jamais être pédant, l'auteur nous rappelle que les plages n'ont pas toujours été ces espaces voués au culte du corps et à l'hédonisme et que malheureusement, à cause des guerres et du changement climatique, cet état de fait risque de ne pas perdurer. On apprend par ailleurs que le sable est pillé ,dans la plus grande indifférence, ciment oblige, pour satisfaire, entre autres, les caprices des milliardaires de Dubaï. grégory le floch
Grégory Le Floch aime les plages et son amour transparaît dans chacune des lignes de cet essai, à la fois sensuel et documenté,  qui file sur l'étagère des indispensables.

 

 Éditions Rivages 2023.

08/08/2023

Ecrire comme une abeille/ La littérature jeunesse de la lecture à l'écriture

"Le parti-pris de ce livre tient en une phrase: apprendre à lire la littérature jeunesse peut aider à l'écrire. "

Même si je n'ai aucune intention d'écrire de la littérature jeunesse , cette dernière m'intéresse beaucoup , en particulier dans on évolution dans l'appréhension du monde et le travail de la langue qu'elle propose.clémentine beauvais
C'est donc pour cela que j'ai dévoré les 447 pages de cette somme , riche de l'expérience de lectrice, d'écrivaine et d'enseignante à l'université de Clémentine Beauvais.
Cette dernière ne se pose jamais en donneuse de leçons, ne prétend pas détenir la recette miracle pour écrire LE roman ultime mais propose de se pencher de manière très concrète aussi bien sur les albums destinés aux petits, qu'aux romans juniors ou destinés aux adolescents, en tant que lectrice voire autrice.
Elle ne nous vend pas du rêve (elle a commis des erreurs, bien que déjà éditée, certains de ses textes ont été refusés) mais on sent dans ces pages, où de la place a été laissée pour noter nos propres réflexions, un grand amour de la littérature et des lectrices. Avec beaucoup d'humour et de pédagogie pour présenter des notions parfois pointues, elle nous entraîne à sa suite dans ce texte qui se lit presque comme un roman, passionnant et donnant envie de découvrir plein de textes (aussi bien des romans que des ouvrages critiques).

Gallimard jeunesse 2023

02/08/2023

La clé des champs et autres impromptus

"C'est la joie qui est bonne, mais d'autant plus méritoire et belle qu'elle est souvent difficile. "

A l'exception du dernier texte, beaucoup plus intime car concernant le suicide de sa mère, tous les textes réunis dans ce recueil sont des préfaces, postfaces ou faisant partie d'ouvrages collectifs.
 Les thèmes ont plutôt une tonalité sombre : "le pessimisme, le tragique, la mort des enfants, le handicap, l'agonie, le bagne, le suicide, l’euthanasie" , mais , ne fuyez pas car l’auteur , par sa rigueur de raisonnement, sa clarté dans l'expression, réussit le pari de nous convaincre d'accepter ce qui participe forcément de notre existence avec  une certaine forme de joie. andré comte-sponville
Convoquant ses auteurs de référence, Spinoza et Montaigne en particulier, André Comte-Sponville avance pied à pied ses arguments , pleins de bon sens et de justesse . Il est l'un des rares penseurs à être aussi clair à l'oral dans ses interviews, qu'à l'écrit. Une lecture lumineuse.

PUF 2023. Merci à l'éditeur et à Babelio pour cette lecture enrichissante. andré comte-sponville

01/06/2023

#Êtreheureuxavecmoins #NetGalleyFrance !

"[...] fin 2020: la masse totale des fabrications humaines venait de dépasser celle de l'ensemble des espèces vivantes de la planète. Le béton, l'asphalte, le gravier, les briques, le métal, le verre et les objets en plastique pesaient 1, 1 millier de milliards de tonnes, soit plus que la totalité des animaux et des plantes. Et au sein de ceux-là, le sauvage ne représentait plus que 4% de la biomasse des mammifères, nous compris. "

Partant d'exemples concrets montrant l'absurdité de notre mode de vie consumériste, Corinne Morel Darleux rappelle aussi que "De plus en plus d'animaux sont condamnés à partager les mêmes zones que les nôtres. " , ce qui ne va pas sans conséquences et pour eux et pour nous.
"En l'espace d'un éclair, l'être humain a consommé ou détruit la plus grande partie du monde naturel. " D'où la nécessité au moins de ralentir notre production d'objets le plus souvent inutiles. corinne morel darleux
Mais, comme le souligne l'autrice, "Tout est fait pour nous persuader du contraire. " via les influenceurs, les célébrités de tous poils qui nous persuadent de pouvoir partager avec eux , un peu , de leur mode de vie qu'on nous incite à envier, en achetant tel ou tel produit .
Pourtant, comme le rappelle le "paradoxe d'Easterlin", économiste des années 70, "la hausse de la richesse n'augment[e] le bien-être que jusqu'à un certain point" et ce aussi bien pour les pays que pour les individus.
De plus, les risques de pénurie de matière et  d'énergie sont réels et il est grand temps de réagir . Enfin, l'autrice en appelle à l'éthique et au discernement , "Faute de quoi, au rythme où le monde va, nous n'aurons plus le luxe de choisir entre sobriété et pénurie. Et les choix seront faits par d'autres que nous. "

Alt 2023, 29 pages . Dès 15 ans. corinne morel darleux

 

31/05/2023

Vieille peau#FionaSchmidt #NetGalleyFrance !

"Des vieux jeunes, en somme.
Des vieux "comme il faut", biologiquement âgés mais socialement jeunes, par opposition aux vieux embarrassants, qui ne sont pas ou plus ni autonomes, ni actifs, ni consommateurs, ni fortunés, ni imposables, ni utiles socialement, et pour lesquels on crée une nouvelle catégorie dans les années 1980 : le "4 ème âge". Celle-ci ne fait pas tant référence à l’âge de la personne qu'à sa dépendance[...] mais elle contribue à associer l'avancée en âge au handicap à la fois biologique et social, donc à nourrir l'âgisme institutionnalisé. "

L'épigraphe de cet essai décapant et sans langue de bois donne le ton : "Chère  Déesse : donne-moi le courage de marcher nue à tout âge. De porter du violet et du rouge, d'être disgracieuse, indécente, scandaleuse et inconvenante jusqu'à mon dernier souffle. " et elle est signée Gloria Steinem, figure majeure du mouvement  féministe américain.fiona schmidt
Quant à Fiona Schmidt, elle a d'abord travaillé dans la presse féminine (elle sait donc de quoi elle parle quand elle la critique) , avant d'opérer un virage féministe. Il est donc question ici d'abord des injonctions contradictoires concernant le corps des femmes qui doivent vieillir avec grâce, tout en supportant une mise à l'écart de la société, une invisibilisation de celles qui ne sont plus bonnes ni pour la reproduction , ni pour la sexualité.
Plus largement l'autrice s'en prend à l'âgisme  qui considère comme des meubles encombrants ceux qui n'ont plus d'utilité pour notre société de consommation. 
Fiona Schmidt ne se pose jamais en donneuse de leçons, elle souligne ses contradiction et ses erreurs passées, et son style vigoureux emporte l'adhésion. Un essai que j'ai surligné à tour de bras !fiona schmidt

 

Belfond 2023

06:00 Publié dans Essai, Récit | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : fiona schmidt

28/10/2022

Les femmes aussi sont du voyage...en poche

"Sans le concours des esclaves, domestiques, cuisiniers, interprètes et autres subalternes , un grand nombre d'explorations auraient été rendues impossibles. "

Aujourd'hui encore le voyageur est majoritairement un homme, blanc et occidental de surcroît. Pourtant, bien que reléguées dans la sphère domestique, des femmes ont enfreint les règles de la société et se sont lancées dans des voyages. lucie azema
Une femme ayant réalisé un périple suscite de nombreux avertissements avant, voire le soupçon après (a-t-elle vraiment réalisé cet exploit? ) et si elle part en couple ou en famille, elle sera reléguée dans l’ombre de son compagnon.
Changeant de perspective, étayant ses propos de nombreux exemples, Lucie Azema démontre en deux parties les liens du voyage avec la démonstration de la virilité et la misogynie qui lui est inhérente.
Elle pointe aussi du doigt la nécessité de décoloniser le voyage et la fétichisation du corps des femmes dans les récits de voyage, que ce soit dans l'évocation des harems ou des bordels.
Elle affirme enfin l'effet émancipateur du voyage pour les femmes ainsi que les mensonges et les approximations dont se rendent souvent coupables certains grands voyageurs dont la misogynie peut mettre en péril la vie de celles qu'ils accompagnent.
Un essai qui suscite l'envie de dévorer une brassée de récits de voyages ...au féminin !