01/09/2022
Les enfants sont rois...en poche
"Comment se faire des amis quand on ne partage rien de leur vie et qu'ils regardent la nôtre à travers un écran? On était seuls. On était à part. Admirés ou détestés; adulés ou insultés. "La rançon de la gloire", disait-elle. ..Mais ce n'est pas le pire. le pire, c'est que nulle part on n'était à l'abri. Nulle part hors de sa portée."
Avec Les enfants sont rois, Delphine de Vigan se penche sur un phénomène de société qui, comme souvent, nous vient des États-Unis, celui des chaînes YouTube, potentiellement très lucratives, mettant en scène des enfants et célébrant la société de consommation dans ce qu'elle a d'excessif et d'addictif.
Que des milliers de personnes regardent des bambins en train de déballer des cadeaux, fournis par des marques, ou se lançant des défis plus idiots les uns que les autres peut laisser pantois, voire incrédules, mais tel est bien le cas.
Le risque avec un tel sujet est que l'autrice se pose en donneuse de leçons, voire néglige l'aspect romanesque de son texte. Il n'en est rien ici car Delphine de Vigan ne stigmatise jamais la mère de famille qui livre ainsi ses enfants en pâture, sans en mesurer les conséquences , à court ou à long terme, ne se rendant même pas compte qu'elle les met en danger et quand la petite Kim disparaît, la police entre alors en scène. Il s'agit ici de comprendre , non de juger, sans pour autant sombrer dans l'angélisme à tout crin.
Un roman haletant qui dénonce l'exploitation d'enfants que la loi n'est même pas capable, semble-t-il de protéger.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : delphine de vigan
31/08/2020
les gratitudes...en poche
"Je chéris le tremblement de leurs voix. Cette fragilité. Cette douceur. Je chéris leurs mots travestis, approximatifs, égarés , et leurs silences."
Même s'il y a bien eu des signes avant coureurs, c'est venu d'un coup: Michka la vieille dame chérie par Marie, ne peut plus rester seule. Les mots lui échappent de plus en plus et elle est tombée dans son salon.
Placée en Ehpad , la vieille dame reçoit régulièrement la visite de Marie,ainsi que celle d'un orthophoniste, Jérôme.
Leurs points de vue , ainsi que celui, biaisé de Michka, qui raconte de manière cauchemardesque des événements dont on ne sait s'ils sont réels ou rêvés, alternent pour brosser de manière sensible et tendre le portrait de cette femme qui s'éloigne de plus en plus de celle qu'elle a été.
Tourmentée par une gratitude qu'elle n'a pu exprimer, Michka sera aidée par ses deux amis pour mener à bien cette mission.
On ne peut qu'être séduit par la délicatesse dont fait preuve à son habitude Delphine de Vigan.
Seul bémol : la volonté de vouloir à tout prix terminer sur une note trop optimiste, ce qui gâche un peu le plaisir du lecteur.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : delphine de vigan
06/03/2019
#LesGratitudes #NetGalleyFrance
"Je chéris le tremblement de leurs voix. Cette fragilité. Cette douceur. Je chéris leurs mots travestis, approximatifs, égarés , et leurs silences."
Même s'il y a bien eu des signes avant coureurs, c'est venu d'un coup: Michka la vieille dame chérie par Marie, ne peut plus rester seule. Les mots lui échappent de plus en plus et elle est tombée dans son salon.
Placée en Ehpad , la vieille dame reçoit régulièrement la visite de Marie,ainsi que celle d'un orthophoniste, Jérôme.
Leurs points de vue , ainsi que celui, biaisé de Michka, qui raconte de manière cauchemardesque des événements dont on ne sait s'ils sont réels ou rêvés, alternent pour brosser de manière sensible et tendre le portrait de cette femme qui s'éloigne de plus en plus de celle qu'elle a été.
Tourmentée par une gratitude qu'elle n'a pu exprimer, Michka sera aidée par ses deux amis pour mener à bien cette mission.
On ne peut qu'être séduit par la délicatesse dont fait preuve à son habitude Delphine de Vigan.
Seul bémol : la volonté de vouloir à tout prix terminer sur une note trop optimiste, ce qui gâche un peu le plaisir du lecteur.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : delphine de vigan
07/01/2018
D'après une histoire vraie...en poche
"Coiffées, maquillées, repassées. Sans un faux pli. Combien de temps pour parvenir à cet état de perfection, chaque matin, et combien de temps pour les retouches, avant de sortir ? "
En couverture ,des photos d'une jeune fille qui pourrait être l'auteure. Le titre. De multiples références à la vie privée/publique de Delphine de Vigan (son précédent roman basé sur l'histoire de sa mère, son médiatique compagnon, François Busnel), autant de références qui semblent accréditer l'idée de réalité. Et on entre de plain-pied dans l'histoire de cette narratrice(Delphine) qui ne parvient littéralement plus à écrire une ligne (pas même pour une liste de courses), qui va tomber sous l'emprise d’une femme , "plume" pour des people en mal de confidences.
Roman d'une amitié toxique, mais aussi roman qui interroge la soif d’histoires "vraies" de notre époque, le texte de Delphine de Vigan m'a bluffée dans sa première partie. J'ai été moins enthousiaste pour la fin, moins convaincante, même si placée sous les auspices d'un maître du genre, Stephen King. Il n'en reste pas moins que j'ai dévoré ce livre.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : delphine de vigan
02/01/2018
#LesLoyautés #NetGalleyFrance
"Il est l'enfant de la séparation des corps et des biens, de la rancœur, des dettes irréparables et de l'alimentation pension : il connaît les règles de la diplomatie."
Les conflits de loyautés, Hélène connaît bien. Dans sa chair même, ils se sont inscrits. Aussi quand cette prof de collège repère la pâleur excessive de Théo, jeune garçon de douze ans,son épuisement, elle essaie de tirer la sonnette d'alarme au sein de son établissement. Mais peut être son expérience personnelle a-t-elle biaisé son identification du problème et ses propres réactions.
Les loyautés dans le couple, dans les relations amicales, Delphine de Vigan les explore en un roman choral qui donne la parole à toute une constellation de personnages évoluant autour de cet enfant en danger. Ces loyautés, ajoutées à des difficultés de communication, elles nous empêtrent, elles vont peut être empêcher de sauver Théo.
Court roman qu'on ne peut lâcher, Les Loyautés ne donne jamais la parole à son personnage principal dont les actions, les réactions, les sentiments sont pris en charge par un narrateur extérieur. Comme s'il n'était déjà plus un sujet agissant , tout englué qu'il est dans une situation qui le le dépasse.
On s'identifie, on entre en empathie et on tourne sans s'en rendre compte les pages de ce roman aussi réussi dans son analyse psychologique que dans son écriture.
Les Loyautés, Delphine de Vigan, jean-Claude Lattès 2018
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : delphine de vigan
28/09/2015
D'après une histoire vraie
"Coiffées, maquillées, repassées. Sans un faux pli. Combien de temps pour parvenir à cet état de perfection, chaque matin, et combien de temps pour les retouches, avant de sortir ? "
En couverture ,des photos d'une jeune fille qui pourrait être l'auteure. Le titre. De multiples références à la vie privée/publique de Delphine de Vigan (son précédent roman basé sur l'histoire de sa mère, son médiatique compagnon, François Busnel), autant de références qui semblent accréditer l'idée de réalité. Et on entre de plain-pied dans l'histoire de cette narratrice(Delphine) qui ne parvient littéralement plus à écrire une ligne (pas même pour une liste de courses), qui va tomber sous l'emprise d’une femme , "plume" pour des people en mal de confidences.
Roman d'une amitié toxique, mais aussi roman qui interroge la soif d’histoires "vraies" de notre époque, le texte de Delphine de Vigan m'a bluffée dans sa première partie. J'ai été moins enthousiaste pour la fin, moins convaincante, même si placée sous les auspices d'un maître du genre, Stephen King. Il n'en reste pas moins que j'ai dévoré ce livre, même si j'ai beaucoup tardé à le chroniquer !
06:00 Publié dans rentrée 2015, romans français | Lien permanent | Commentaires (15) | Tags : delphine de vigan
13/11/2012
Nouvelles contemporaines
"Comme elle tenait à son mauvais caractère, elle avait refusé."
Trois auteurs ont été réunis dans ce recueil en principe destiné à la jeunesse. Un seul texte pour Delphine de Vigan, Comptes de Noël, assez prévisible, nouvelle qui accompagne d'ailleurs une édition spéciale en poche de No et moi.
Timothéede Fombelle, lui, fait la part belle à des textes personnel, très courts et dont certains évoquent une réalité contemporaine difficile, mais où il s'arrange (presque) toujours pour "laisser une échappée, un espoir, un trait de lumière." Je compte d'ailleurs utiliser certains de ces textes avec mes élèves très fâchés avec la littérature : leur brièveté et la qualité de l'écriture devrait leur plaire...
Mais c'est avec Caroline Vermalle et ses deux textes que j'ai dégainé le plus de marque-pages ! Deux nouvelles pleines d'émotion retenue, mettant en scène ceux que Pierre Sansot appelait avec tendresse les gens de peu , personnes qui luttent contre l'indifférence, se montrent solidaires, et entretiennent la chaleur humaine, vaille que vaille. La fille du déménageur a suscité ainsi chez moi le plus d'émotions. Le récit de ce père déménageur qui , aidé de ses amis, va tout mettre en oeuvre pour ramener vers la vie sa fille et renouer avec elle tout en délicatesse et en tendresse est une petite merveille !
Merci Antigone pour cette belle découverte!
Nouvelles contemporaines, regards sur le monde, Livre de poche 2012.
06:05 Publié dans Nouvelles françaises | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : delphine de vigan, timothée de fombelle, caroline vermalle
20/09/2011
Rien ne s'oppose à la nuit
"L'écriture ne peut rien. Tout au plus permet-elle de poser les questions et d'interroger la mémoire."
Plus que l'histoire de cette femme, très belle dès l'enfance, mais qui n'a jamais su s'ancrer dans l'existence car elle était bipolaire, c'est le rapport à l'écriture qui se donne à lire dans ce texte ouvertement autobiographique qui m'a intéressée.
L'écriture ici est un combat qui malmène physiquement Delphine de Vigan, ce n'est pas une entreprise de lissage qui prétend éclairer toutes les zones d'ombre, révéler la Vérité sur sa mère. Non, dans ce work in progress qui s'intercale avec le récit , l'auteure nous précise bien qu'il y a différentes versions, qu'il a fallu choisir, elle nous livre ses scrupules vis à vis des membres encore vivants de cette tribu hors-normes dont elle est issue.
Des pans entiers de l'histoire de l'auteure seront passés sous silence et c'est cela qui m'a plu. ça et l'extrême sensibilité qui domine ce texte emprunt de souffrance sans jamais tomber dans le pathos. On n'est ni dans l'hagiographie ni dans le règlement de compte mais dans une entreprise quasiment de salut familial: comment fonder une famille et avancer sans crainte avec un tel passé ?
à noter aussi une très jolie évocation des années 70.
Un grand merci à Clara !
L'avis de Mango
Qui d'autre ? :)
06:00 Publié dans rentrée 2011, romans français | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : delphine de vigan