Rechercher : l'invention des corps
L'amour après ...en poche
"Il faut déserter les modèles, fuir leurs pièges, leurs barbelés invisibles. L'important, c'est d'avoir de l'air, alors tout peut commencer."
Années 50, Marceline Loridan -Ivens qui est "une fille de Birkenau" est rentrée en France et ne tarde pas à prendre son indépendance vis à vis de sa mère.
La jeune femme dont le corps a été figé dans l'adolescence par le camp a soif de vie et de culture. Elle enchaîne aussi les aventures amoureuses ,même si son corps ignore toute sensation de plaisir, de désir ,et restera à jamais "sec", c'est à dire stérile, sans que Marceline le regrette, bien au contraire.
La nudité reste attachée au regard d'un médecin décidant de la vie ou de la mort et Marceline aura toujours des difficultés à se dénuder, y compris dans un contexte médical.
Un récit rare qui évoque le corps, les sentiments d'une jeune femme fracassée par les camps mais qui est pleine d'ardeur, de vie, d'énergie et d'une formidable liberté.
06/02/2019 | Lien permanent | Commentaires (2)
#Maquillée #NetGalleyFrance !
" En ne voyant qu'une manifestation de notre décadence dans la culture de la beauté, dans ce qui a trait à l'ornementation des corps, on enferme le maquillage dans une vision sexiste qui associe les ravages du capitalisme à la femme, et plus particulièrement aux soins du corps.
La galaxie du maquillage , que ce soit sur internet ou dans la vie quotidienne, m'est totalement étrangère mais j'ai été très intéressée par ce livre qui multiplie les points de vue sur cet artifice, souvent décrié , mais qui existe apparemment depuis la préhistoire.
Daphné B. ,sous forme de courts chapitres, évoque à la fois sa vie personnelle, convoque la sociologie mais aussi la poésie, la philosophie , sans oublier le féminisme pour brosser par petites touches un ensemble ma foi très convaincant , bien mené et qui m'a permis de voir le maquillage sous de nouveaux angles.
Grasset 20210
08/09/2021 | Lien permanent
La patience de Mauricette...en poche
"Je recycle la souffrance."
Un cahier jaune où elle écrit pour sa thérapeute.Un panier vert dans lequel elle trimballe de drôles de trésors. La tentation serait grande de résumer Mauricette à ces deux objets. Mais quand elle disparaît de l'hôpital où on soigne sa santé mentale, son ami Christophe Moreel va prendre conscience de la richesse de la personnalité de cette femme de soixante quinze ans, beaucoup moins ordinaire qu'il n'y paraît à première vue...
Entrecroisant passé et présent, Lucien Suel brosse le portrait d'une personne, marquée par la souffrance dès l'enfance mais qui trouve refuge dans les mots et dans la poésie en particulier. Débusquant les alexandrins dans les phrases de la vie quotidienne, jouant avec les mots, les triturant, les faisant rouler dans sa bouche, tout comme son "noyau de souffrance. Je le suce et le roule entre les gencives depuis des années. Quelquefois je le prends dans ma main et je la referme. Il est caché dans ma paume je regarde les taches de vieillesse sur le dos de ma main et je remets le noyau dans ma bouche." ,Mauricette recèle bien des trésors et des originalités littéraires...Ses mots partent parfois en roue libre, comme ses pensées, mais l'humour n'en n'est jamais absent : "Le mou des veaux, les mots de vous" et ce n'est certainement pas un hasard si Mauricette avait entrepris une anthologie regroupant les phrases où apparaît le mot "veau" comme un écho au livre de Lucien Suel et Patrick Roy Têtes de porcs moues de veaux (merci, Cath!). L'émotion est aussi au rendez-vous avec cette personnalité aux multiples facettes, qui "se conduisait dans l'univers moderne comme une femme des cavernes. Une femme d'avant l'invention des horloges et des tranquillisants ."Je marche avec les yeux au plafond.""et qui s'estime elle même être son pire tribunal...Ce pourrait être lourd et étouffant, c'est poignant, lumineux et plein de joyeuses surprises car l'écriture de Mauricette est d'une richesse poétique inouïe Un livre aux très nombreuses pages cornées, bien sûr. Un livre qui résonne longtemps en nous et qu'à peine fini on a envie de rouvrir pour mieux le savourer, plus lentement cette fois. Un gros gros coup de coeur !
02/07/2011 | Lien permanent | Commentaires (9)
La patience de Mauricette
"Je recycle la souffrance."
Un cahier jaune où elle écrit pour sa thérapeute.Un panier vert dans lequel elle trimballe de drôles de trésors. La tentation serait grande de résumer Mauricette à ces deux objets. Mais quand elle disparaît de l'hôpital où on soigne sa santé mentale, son ami Christophe Moreel va prendre conscience de la richesse de la personnalité de cette femme de soixante quinze ans, beaucoup moins ordinaire qu'il n'y paraît à première vue...
Entrecroisant passé et présent, Lucien Suel brosse le portrait d'une personne, marquée par la souffrance dès l'enfance mais qui trouve refuge dans les mots et dans la poésie en particulier. Débusquant les alexandrins dans les phrases de la vie quotidienne, jouant avec les mots, les triturant, les faisant rouler dans sa bouche, tout comme son "noyau de souffrance. Je le suce et le roule entre les gencives depuis des années. Quelquefois je le prends dans ma main et je la referme. Il est caché dans ma paume je regarde les taches de vieillesse sur le dos de ma main et je remets le noyau dans ma bouche." ,Mauricette recèle bien des trésors et des originalités littéraires...Ses mots partent parfois en roue libre, comme ses pensées, mais l'humour n'en n'est jamais absent : "Le mou des veaux, les mots de vous" et ce n'est certainement pas un hasard si Mauricette avait entrepris une anthologie regroupant les phrases où apparaît le mot "veau" comme un écho au livre de Lucien Suel et Patrick Roy Têtes de porcs moues de veaux (merci, Cath!). L'émotion est aussi au rendez-vous avec cette personnalité aux multiples facettes, qui "se conduisait dans l'univers moderne comme une femme des cavernes. Une femme d'avant l'invention des horloges et des tranquillisants ."Je marche avec les yeux au plafond.""et qui s'estime elle même être son pire tribunal...Ce pourrait être lourd et étouffant, c'est poignant, lumineux et plein de joyeuses surprises car l'écriture de Mauricette est d'une richesse poétique inouïe Un livre aux très nombreuses pages cornées, bien sûr. Un livre qui résonne longtemps en nous et qu'à peine fini on a envie de rouvrir pour mieux le savourer, plus lentement cette fois. Un gros gros coup de coeur !
La patience de Mauricette, Lucien Suel, La table ronde, 233 pages lumineuses.
L'avis des viles tentatrices Pagesàpages et Bellesahi
Le site de l'auteur.
Un coup de coeur passion pour Ptitlapin !
L'avis de Dasola, qui en dit un tout petit peu trop sur le livre !:)
28/09/2009 | Lien permanent | Commentaires (10)
Notre vie dans les forêts
"Ils nous traitent comme du bétail, je me suis dit. Ils nous infantilisent au point qu'ils ne nous avertissent pas de la procédure, même pas quand il s'agit de nos corps ! De mon corps !"
Après un essai sur une peintre allemande, revoici Marie Darrieussecq aux commandes d'une dystopie se déroulant dans un futur très proche, voire ayant peut être même déjà commencé.
Marie est psychologue, spécialisée dans le traitement des traumatismes, mais elle doute de plus en plus de l'efficacité des méthodes qu'elle applique. Tandis que dans son cabinet elle s'efforce de soigner, autour d'elle la société se délite et les libertés rétrécissent dangereusement. Mais un de ses patients va lui donner la possibilité de se rejoindre une bande d'humains et de clones libérés qui vivent au cœur des forêts.
Comme dans Truismes, la narratrice est empêchée dans son corps et se hâte de rédiger son histoire car la mort rôde. Mais là où le premier roman de l'écrivaine prenait son temps pour nous décrire les changements de la société, Notre vie dans les forêts est beaucoup plus court (189 pages) et le sentiment d’urgence encore plus grand.
Il y est beaucoup question de corps, augmenté par des implants et dont on change les organes comme autant de pièces de rechange si on est très riche. Le langage tient également une place importante, tout comme les clones dont la narratrice analyse avec finesse les interactions avec les humains.
Un roman surprenant, constellé de marque-pages.
Notre vie dans les forêts, Marie Darrieussecq, P.O.L 2017.
11/09/2017 | Lien permanent | Commentaires (4)
Notre vie dans les forêts ...en poche
"Ils nous traitent comme du bétail, je me suis dit. Ils nous infantilisent au point qu'ils ne nous avertissent pas de la procédure, même pas quand il s'agit de nos corps ! De mon corps !"
Après un essai sur une peintre allemande, revoici Marie Darrieussecq aux commandes d'une dystopie se déroulant dans un futur très proche, voire ayant peut être même déjà commencé.
Marie est psychologue, spécialisée dans le traitement des traumatismes, mais elle doute de plus en plus de l'efficacité des méthodes qu'elle applique. Tandis que dans son cabinet elle s'efforce de soigner, autour d'elle la société se délite et les libertés rétrécissent dangereusement. Mais un de ses patients va lui donner la possibilité de se rejoindre une bande d'humains et de clones libérés qui vivent au cœur des forêts.
Comme dans Truismes, la narratrice est empêchée dans son corps et se hâte de rédiger son histoire car la mort rôde. Mais là où le premier roman de l'écrivaine prenait son temps pour nous décrire les changements de la société, Notre vie dans les forêts est beaucoup plus court (189 pages) et le sentiment d’urgence encore plus grand.
Il y est beaucoup question de corps, augmenté par des implants et dont on change les organes comme autant de pièces de rechange si on est très riche. Le langage tient également une place importante, tout comme les clones dont la narratrice analyse avec finesse les interactions avec les humains.
Un roman surprenant, constellé de marque-pages.
08/06/2019 | Lien permanent | Commentaires (2)
Le Vieil Incendie
" J'ai de la peine à me rappeler que nous avons été indissociables. Nous avions les mêmes timidités, les mêmes craintes de la vie sociale. On ne se chamaillait pas. Notre langue de silences et de cris nous a réunies. "
A quinze ans, l'aînée, Agathe, a fui sa sœur cadette,Véra, aphasique, et son père. Elle a fait sa vie aux États-Unis où elle écrit des scénarios et des dialogues de films. Quinze ans plus tard, Agathe et Véra doivent vider la maison familiale qui sera abattue. Et pour cela , elles ont neuf jours.
Pas de disputes autour des objets ici, Agathe étant même prête à incendier le contenu de la maison dont elle ne veut rien garder. Elle apprend à redécouvrir sa cadette qui n'a plus rien de celle qu'elle se sentait obligée de protéger. Au fil des jours, des souvenirs reviennent et les secrets se révèlent.
Avec une infinie délicatesse, par petites touches, Elisa Shua Dusapin brosse le portrait de ces deux sœurs pour qui les silences sont peut être plus parlants que les mots. Car peut-on se fier aux mots ? Ils sont trompeurs, déformés, peuvent devenir le vecteur d’humiliations...Ils peuvent être difficiles à prononcer ou à écrire , même quand on en a fait son métier...
La nature joue également un rôle très important ici, ainsi que le corps des femmes, corps bridé, corps faillible ou corps retrouvé. Un texte magnifique dans sa concision parfaite et l'émotion intense qu'il dégage. Et zou, sur l'étagère des indispensables.
Éditions Zoé 2023.
22/08/2023 | Lien permanent | Commentaires (6)
Nous sommes les oiseaux de la tempête qui s'annonce
"La Petite Fille au Bout du Chemin , de deux phrases taguées , a dégagé les mots et mis à nu la guerre."
Émilienne, dite Émile, jeune femme pleine de générosité et d'altruisme, est morte pendant quelques minutes, son cœur s'arrêtant de battre soudainement. Pendant qu’Émile dort d'un sommeil artificiel, la narratrice, danseuse classique passionnée, évoque les souvenirs de cette amitié qui s'est tissée dans des circonstances douloureuses.
Simultanément, elle entre en relation avec La Petite Fille au Bout du Chemin, jeune femme qui n'hésite pas à braver les interdits et avec laquelle elle vivra des "odyssées déglinguées" et libèrera son corps entravé.
Comme dans La petite communiste qui ne souriait jamais, ( clic) Lola Lafon parle sans pathos mais avec beaucoup de poésie et de sensibilité du mouvement, des corps des femmes et de la place qui leur est faite -ou non -dans une société marquée par l'ordre et le rigorisme. Les mots, eux aussi sont importants, ceux qui stigmatisent mais aussi ceux qui libèrent.
J'ai savouré et fait durer ces 428 pages marquées du sceau de la révolte et du désir de liberté. Un grand coup de cœur.
Nous sommes les oiseaux de la tempête qui s'annonce, Lola Lafon, Babel 2014.
16/05/2014 | Lien permanent | Commentaires (14)
Roulez jeunesse
"Bingo. Voilà qui va raviver les couleurs de ma journée."
Ils "litote[nt]à leur[s] heure[s]",surtout quand ils s'adressent à leurs parents, mais des paroles s'échappent :"Au secours. Mon corps s'échappe et je ne peux rien retenir.", "La plage naturiste, c'est la mort.",débordés qu'ils sont par les changements physiques de l'adolescence et par un trop plein d'émotions.
Séquences courtes, voire très courtes, pouvant indifféremment être jouées par "Filles et garçons, en alternance ou en même temps", il s'en dégage une grande proximité et une grande tendresse. Petites et grandes hontes, sentiments exacerbés ,attachement à des détails du corps de l'autre ne sont jamais tournés en dérision et se plonger dans ces textes c'est regarder ensuite d'un œil neuf tous les ados qui gravitent autour de nous. Un petit délice, même à la lecture , que j'ai hâte de découvrir mis en scène !
Roulez jeunesse !, Luc Tartar, Lansman éditeur, 2012, 43 pages sensibles .
Déniché à la médiathèque.
25/10/2013 | Lien permanent | Commentaires (2)
Que diable allait-elle faire dans cette galère...2/?
Flic, Floc, les bottes blanches de la poissonnière ponctuent chacun de ses pas. Son tablier blanc n'augure rien de bon. Son sourire sanguinolent non plus...
Douche pénétrante annonce le panneau.
Amis obsédés, passez votre chemin. Amis maso, prenez place. A plat- ventre sur une table, le menton coincé sur un boudin de mousse, les bras le long du corps, vous voici exposé aux jets d'eau chaude d'une série de douches placées au dessus-de vous. ça trépigne, ça marteau-pique, ça masse en profondeur, ça fait du bien c'est indéniable.
Mais le lendemain matin, vous avez juste l'impression qu'un tracteur (même pas conduit par le beau gosse de L'amour est dans le pré") vous est passé sur le corps et vos douleurs (oubliées, les coquines !) se rappellent à votre mauvais souvenir...Tiens j'avais des muscles là ?
C'est normal. Tout va bien et en arrivant juste un peu plus tôt vous trouvez même le temps de lire un peu...
13/08/2011 | Lien permanent | Commentaires (6)