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L'apparence du vivant

"Je pourrais achever tous les gens qui le méritent. Je préfère les laisser pourrir.  "

Parce qu'elle cherchait des personnes âgées acceptant de poser nues devant son objectif, la narratrice fait la connaissance de Madame Martin, propriétaire d'un ancien funérarium à Liège.
Fascinée depuis l'enfance par la mort, un tel décor ne pouvait que plaire à la jeune femme qui entre alors au service de cette dame et de son tranquille époux. Entre les deux femmes s'établit une connivence , une relation de tendresse, mais aussi la transmission d'un savoir-faire: celui de la taxidermie. Un art dont Madame Martin veut repousser les limites à l'aide de sa protégée. charlotte bourlard
Pour un premier roman, c'est un coup de maître car Charlotte Bourlard évoque, avec beaucoup de tranquillité et quasiment sans affect, le parcours de ces deux femmes  qui entretiennent de bien curieuses relations avec la mort. Sans coup de théâtre, mais par petites touches , nous entrons dans un univers où l'on frémit d'avance pour tous les êtres encore vivants qui côtoient ces deux femmes. Les descriptions techniques de la taxidermie, j'avoue les avoir juste survolées tant le texte nous pousse dans nos retranchements. Le corps, humain ou animal, est bien évidemment au cœur de ce roman qui évoque avec un grand naturel toutes les dégradations que la vieillesse et/ou la mort lui infligent.
Aucun excès dans l'écriture qui reste toujours très sobre, même quand elle décrit les pires vengeances, et on finit par s'attacher à ces personnages qui devraient susciter l'horreur. Tout reste feutré et mesuré avec quelques pointes d'humour noir. Du grand art.

Éditions Inculte 2022, 130 pages vénéneuses.Et zou sur l''étagère des indispensables, mais attention aux âmes sensibles.

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Réparer les vivants

 "... c'est la première fois qu'ils nidifient une cavité de repli au sein de leur anéantissement..."

Réparer les vivants est "la somme des actions et la somme des mots, la somme des espaces et des sentiments" qui, partie du cœur de Simon Limbres, jeune surfeur de vingt ans, aboutira -ou non -à sauver la vie d'une receveuse en attente de transplantation.maylis de kerangal
Le roman de Maylis de Kerangal n'a rien d'un récit journalistique. Il acquiert une dimension quasi mythologique, brassant l'espace et le temps, replaçant l'organe dans sa dimension à la fois affective et symbolique. Il ne s'agit pas ici de réparer un organe défaillant mais bien de s'interroger sur les mots qui manquent pour exprimer l'émotion, les mots qui devront sonner juste pour convaincre les proches, mots qui parfois se mueront en chant pour mieux saluer le corps qui a encore une apparence de vie même si l'activité cérébrale a signalé sa mort, car il s'agit de creuser "ensemble dans cette zone fragile du langage où se déclare la mort.".
Cette trajectoire alterne les points de vue, y compris celui de la receveuse potentielle qui n'est pas sans interrogations, détaille aussi le ballet des intervenants médicaux, ne les réduisant pas à une fonction mais les inscrivant dans une humanité pleine de justesse.
Nous ressentons pleinement toutes les sensations , tous les sentiments qui bouleversent de fond en comble les personnages !
Le style précis, imagé et élégant,le récit tendu comme un arc et empli d'émotions sans jamais verser dans le pathos, font qu'une fois levés les a priori susceptibles d'entraver notre lecture, on ne peut quitter ce roman qui pulse et fait battre le cœur.

Et zou, sur l'étagère des indispensables !

Un grand merci à Clara !

Réparer les vivants, Maylis de Kerangal, Verticales 2014.

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Appâts vivants

"C'est là ma place, parmi les asticots, au lieu de m'obstiner à fréquenter les êtres humains."

L'ambition du roman de Fabio Genovesi est de nous présenter de manière pittoresque la vie haute en couleurs de certains habitants d'une bourgade endormie de la province de Pise, Muglione, de nos jours.
Commencé sur les chapeaux de roues, faute d'intrigues vraiment intéréssantes et originales , le récit s'essouffle vite et on n'a qu'une hâte: venir à bout de ce pavé indigeste de 367 pages.41X+yevGDvL._SL500_AA300_.jpg
L'auteur dont c'est ici le premier roman a pêché par gourmandise et comme souvent, a voulu mettre un maximum de personnages et d'informations.Il aurait gagné à élaguer son texte et à se concentrer sur quelques personnaeges qui auraient ainsi acquis plus d'épaisseur. Dommage.

Appâts Vivants, Fabio Genovesi, traduit de l'italien par Dominique Vittoz,  Fayard 2012.

Lu dans le cadre d el'opération On vous lit tout organisée par  Libfly  et le Furet du Nord.(merci !) .1795.jpeg

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05/09/2012 | Lien permanent

Et rester vivant

"Avoir vingt-deux ans , apparemment une malédiction temporaire."

Le narrateur, très jeune,  a d'abord perdu dans un accident de voiture, sa mère et son frère. Au début du roman, il vient de perdre son père et, à vingt-deux ans, décide de partir , sur la foi d'une chanson, visiter la côte ouest des États-Unis en compagnie de son ex et de son meilleur ami. Improbable triangle et improbable voyage pour  se débarrasser d'un héritage à la fois pécuniaire et émotionnel trop encombrant.jean-philippe blondel
Le préambule du roman nous informe du très fort aspect autofictionnel du texte et quand j'ai lu l'entretien  croisé entre Laurence tardieu et Delphine de Vigan dans le Monde du 19 août 2011, j'ai enfin pu mettre le doigt sur ce qui explique que je sois restée totalement extérieure au roman de Jean-Philippe Blondel :

"Quand on part d'un matériau autobiographique, on se pose sans cesse la question -et Delphine de Vigan se la pose aussi : est-ce que cela peut faire un livrb ? Est-ce que les autres peuvent y entrer ? la condition , c'est justement ce combat mot à mot. Sinon, ils sont face à une matière figée et restent en dehors. Oui, il fait que le combat se fasse matière vivante pour que les autres puissent y entrer." (Laurence Tardieu).

A trop vouloir éviter le pathos d'une situation extrêmement violente, à coups de phrases juxtaposées qui tiennent le lecteur à distance, Blondel  a raté son coup avec moi. J'ai lu ce roman sans déplaisir jusqu'au bout mais en restant totalement en dehors.

Et rester vivant, Jean-Philippe Blondel, Buchet-Chastel  2011.



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Nous étions des êtres vivants

"On aime notre métier et notre métier ne nous aime plus."

Soulagement au sein d'un groupe de presse pour enfants: ils ont trouvé un acquéreur. Mais soulagement de courte durée car le repreneur, bientôt surnommé Gros porc, n' a que faire de leurs compétences, de leur humanité et ne recherche que le profit à court terme.1428620358.jpg
En trois étapes, commentées par un choeur, la tragédie ira crescendo, révélant les mesquineries banales , les cruautés ordinaires et les retournements de veste discrets au fur et à mesure que la peur s'installe.
Plusieurs personnages prendront aussi successivement la parole, révélant leurs faiblesses, leurs problèmes quotidiens ou moraux et cette plongée dans leur intimité permettra de nuancer leur comportement.
De rebondissements en coups fourrés, de coups de folie en désespoir, c'est toute une palette de sentiments qui nous les rend si proches et si désespérement humains dans une société où "Aujourd'hui, manoeuvrer, dénoncer, flatter, , faire preuve de cynisme  et jouer les forts en thème suffit à accéder au rang de supérieur. Les compétences passent au second plan." ça ne change peut être rien de l'écrire mais ça fait du bien, car on se sent moins seuls , comme ne cesse de le répéter le choeur, comme pour mieux s'en convaincre.

Nous étions des êtres vivants, Nathalie Kuperman, Gallimard 2010, 203 pages pas si désespérantes que ça.

L'avis de Cuné,,Aifelle, Kathel, qui vous mènera vers plein d'autres.

Emprunté à la médiathèque.

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Rester vivante

"Les mots ont été pires que les coups."

Coincée entre une mère passive et un père qui entretient une relation trouble à la sexualité, Josepha, fille unique, peine à ajuster son corps et ses idées. Elle bride ses mots car "Si je commence à dire ce que je ressens, ça fera un massacre." Il lui faudra aller vers les autres pour Rester vivante.41SW2eDDQbL._SL500_AA300_.jpg
Catherine Leblanc a su trouver les mots pour dire le mal-être de cette adolescente, la violence et la tendresse qui se succèdent à la seconde, la révolte et la léthargie qui caractérisent souvent cette période riche en montagnes russes. A plus de trente ans de distance, j'ai revécu au plus profond les sensations et les sentiments qui se bousculaient alors en moi. Une drôle d'expérience !
La couverture sobre, presque épurée de cette nouvelle édition s'ajuste parfaitement aux propos de l'auteure.

Rester vivante, Catherine Leblanc, Actes Sud junior 2007 , réédition 2010 , 109 pages qui sonnent juste.

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Nous étions des êtres vivants ...en poche

"On aime notre métier et notre métier ne nous aime plus."

Soulagement au sein d'un groupe de presse pour enfants: ils ont trouvé un acquéreur. Mais soulagement de courte durée car le repreneur, bientôt surnommé Gros porc, n' a que faire de leurs compétences, de leur humanité et ne recherche que le profit à court terme.nathalie kuperman
En trois étapes, commentées par un choeur, la tragédie ira crescendo, révélant les mesquineries banales , les cruautés ordinaires et les retournements de veste discrets au fur et à mesure que la peur s'installe.
Plusieurs personnages prendront aussi successivement la parole, révélant leurs faiblesses, leurs problèmes quotidiens ou moraux et cette plongée dans leur intimité permettra de nuancer leur comportement.
De rebondissements en coups fourrés, de coups de folie en désespoir, c'est toute une palette de sentiments qui nous les rend si proches et si désespérement humains dans une société où "Aujourd'hui, manoeuvrer, dénoncer, flatter, , faire preuve de cynisme  et jouer les forts en thème suffit à accéder au rang de supérieur. Les compétences passent au second plan." ça ne change peut être rien de l'écrire mais ça fait du bien, car on se sent moins seuls , comme ne cesse de le répéter le choeur, comme pour mieux s'en convaincre.

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Réparer les vivants ...en poche

Mais qui ne l'a pas lu ? !:)

 "... c'est la première fois qu'ils nidifient une cavité de repli au sein de leur anéantissement..."

Réparer les vivants est "la somme des actions et la somme des mots, la somme des espaces et des sentiments" qui, partie du cœur de Simon Limbres, jeune surfeur de vingt ans, aboutira -ou non -à sauver la vie d'une receveuse en attente de transplantation.maylis de kerangal
Le roman de Maylis de Kerangal n'a rien d'un récit journalistique. Il acquiert une dimension quasi mythologique, brassant l'espace et le temps, replaçant l'organe dans sa dimension à la fois affective et symbolique. Il ne s'agit pas ici de réparer un organe défaillant mais bien de s'interroger sur les mots qui manquent pour exprimer l'émotion, les mots qui devront sonner juste pour convaincre les proches, mots qui parfois se mueront en chant pour mieux saluer le corps qui a encore une apparence de vie même si l'activité cérébrale a signalé sa mort, car il s'agit de creuser "ensemble dans cette zone fragile du langage où se déclare la mort.".
Cette trajectoire alterne les points de vue, y compris celui de la receveuse potentielle qui n'est pas sans interrogations, détaille aussi le ballet des intervenants médicaux, ne les réduisant pas à une fonction mais les inscrivant dans une humanité pleine de justesse.
Nous ressentons pleinement toutes les sensations , tous les sentiments qui bouleversent de fond en comble les personnages !
Le style précis, imagé et élégant,le récit tendu comme un arc et empli d'émotions sans jamais verser dans le pathos, font qu'une fois levés les a priori susceptibles d'entraver notre lecture, on ne peut quitter ce roman qui pulse et fait battre le cœur.

Et zou, sur l'étagère des indispensables !

 

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”Le corps cassé/toujours vivant/ je traverse l'été.”

Deux femmes issues de milieux sociaux tout à fait opposés.  L'une très jeune, mère involontaire, qui s'apprête à  accoucher sous X, Emilie. Judith, quant à elle, espère avec ferveur la naissance de son enfant,  enfant qui ne survivra pas.  Une  logique folle se met alors en marche...A ce moment là du récit (nous ne sommes qu'au tout début de l 'action) j'ai failli lâcher le roman de  Karine Reysset, Comme  une mère.
Envisager quasi simultanément les deux faits que redoute le plus une mère me semblait de l'ordre de l'insoutenable.41qFm7cTFLL
Il faut savoir passer outre et découvrir les merveilles que recèle ce roman. L'auteure, en effet, fore avec obstination ce thème de la maternité, traque les ressemblances entre ces deux femmes dans leur rapport à la  maternité. Toutes deux , pour des raisons  totalement opposées auraient pu prononcer ces  paroles : "Ma bouche lavée à grande eau de tous ces mots liés, ces mots tordus et râpeux comme  de la laine de fer."  le  récit rebondit sans cesse, même si le rythme semble volontairement ralenti, comme  si  nous évoluions dans un cauchemar ...
Le séjour dans la thalasso nous montre également une lutte des classes en sourdine, feutrée...Sous des dehors bien lisses, la réalité est plus râpeuse...
La langue de Karine Reysset, toute en retenue, sauf  quand explose la violence des mots enfouis depuis trop longtemps, nous fascine et nous entraîne dans sa poésie âpre et tendre.  A tenter absolument.

Un grand merci à Amanda qui a  fait voyager ce livre et a su me  donner envie de le découvrir.

Pour retrouver un autre titre de cette auteure en poche, c'est ici.

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”Tous avaient triomphé à leur façon. Simplement en vivant, en parvenant à leur âge.”

Les  héroïnes de Mary Gordon craignent souvent de se  faire rattraper par un passé qu'elles considèrent comme peu  glorieux, vaguement humiliant. Par conséquent , elles ne mentionnent même pas la présence , pourtant évidente,de celles qui  incarnent "Celle que nous craignons de devenir quand nous aurons perdu notre prospérité.
Celle  que nous sommes réellement."
Ce sentiment d'imposture les taraude  , tout comme les erreurs d'interprétation qu'elles commettent ou qu'on commet à leur encontre, même si cela leur serait favorable.51iA2K60hnL._SL500_AA240_.jpg
Elles  cherchent à se "créer un monde exempt de perturbations" mais  évidemment  se prennent la réalité en pleine figure. Il ne leur reste donc plus qu'à  se préserver un semblant de dignité pour continuer à avancer...
Les petites filles  des nouvelles de Mary Gordon débusquent  les intentions  cachées  derrière la bonté apparente des  adultes et ne se veulent  redevables de rien. Elles  observent le monde avec acuité , et leur vision parcellaire n'en est pas moins dérangeante pour  leur entourage.
Tout ceci  pourrait être  sinistre,il n'en est rien car la plume de Mary Gordon est alerte , pleine d'humour  et d'empathie pour  ses personnages.
Kathleen, Nettie,  et tous les autres, sans oublier Le mari  de la Traductrice, apprécient la douceur d'une pluie , s'entendent  comme larrons en foire et savent faire souffrir sans remords ou presque.
Fil rouge entre  tous ces récits,  une narratrice écrivaine , situation qui ne la préserve pas  du sentiment d'imposture  ,  qui donne à voir en action le travail de création littéraire.
Vingt et une nouvelles aux tonalités très différentes mais qui réchauffent le coeur.  Une écrivaine à  découvrir sans tarder, foi  de livre corné !

 

Mary Gordon.  Le  mari  de la  traductrice.  Quai Voltaire.408 pages

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