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Rechercher : l'invention des corps

Nue sous la lune

"J'étais ton inséparable jouet, ton yo-yo, et tu me maniais à la perfection."

Une femme a tout abandonné, son talent de sculpteur en particulier, pour se mettre au service, dans tous les sens du terme, d'une sorte de géant de la sculpture. Ce dernier, à la tête d'une communauté artistique où il accueille ses disciples, règne sans partage sur son cœur et son corps.
De cette emprise, elle tente de se défaire au début du roman.violaine bérot
Récit à la première personne, Nue, sous la lune, est un texte à la fois fiévreux et maîtrisé où une femme analyse avec minutie son enfermement volontaire dans une relation toxique. Il est parfois difficile de  faire prendre la mesure de tels liens mais Violaine Bérot,  en 118 pages denses , y parvient avec brio.

Nue, sous la lune, Violaien Bérot, Buchet-Chastel 2017, 118 pages piquetées de marque-pages.

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La chance de leur vie...en poche

Quelle drôle de femme que cette Sylvie ! Elle ne réagit jamais comme on s'y attendrait et n'aspire qu'à une chose aux États-Unis où , avec leur fils, Lester, elle a accompagné son mari, Hector: redevenir invisible.
Expatriée dans des conditions confortables, Hector a été nommé professeur dans une université de Caroline du Nord où il va enchaîner les conquêtes sans que cela trouble le moins du monde son épouse, elle pourrait accéder à une petite notoriété artistique mais ne le désire pas vraiment.agnes desarthe
C'est finalement par Lester que, d'une manière étonnante, le trouble se répandra.
Agnès Desarthe brosse ici le portrait d'une famille expatriée qui vivra, de loin, les attentats meurtriers de novembre 2015, mais aussi celui du corps d'une femme vieillissante et surprenante.

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17/08/2019 | Lien permanent

Chambre 2

"J'assiste à la naissance d'une mère. C'est presque plus émouvant que la naissance d'un enfant."

Quand on passe dans le couloir d'un hôpital, on entr'aperçoit des fragments de vie, et l'on se sent un peu gêné, un peu voyeur. Rien de tel dans le roman de Julie Bonnie où Béatrice nous fait partager son quotidien, parfois émouvant, parfois douloureux, dans une maternité. julie bonnie,maternités
Mais plus qu'une galerie de portraits de mères en devenir, c'est aussi le récit de'une tentative de normalisation d'une femme, la narratrice qui, quittant le monde du spectacle où elle mettait en scène son corps , affronte une réalité où la nudité, si elle est prise maintenant au sens figuré, est beaucoup plus cruelle : "Douze heures dans la chair humaine, nue dans la neige, nue dans le feu, nue quand il est vital de se couvrir."
Les souvenirs de son passé artistique ne sont en rien enjolivés mais s'opposent néanmoins à un quotidien où la violence et le silence s'imposent aux corps des femmes. Une écriture puissante et charnelle. Un grand coup de coeur !....

Chambre 2, Julie Bonnie, Belfond 2013, 187 pages piquetées de marque-pages !

Lu dans le cadre de l'opération On vous lit tout chez Libfly ! Merci à Libfly, au Furet du Nord et à l'éditeur !julie bonnie,maternités

Le billet de Clara, elle aussi conquise !

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Le chauffe-eau (épopée)

"Dans un coin sombre du garage, le chauffe-eau existait, impénétrable et muet comme un Moloch stoïque."

Une épopée contemporaine en cinquante -six pages format poche, tel est le défi ,relevé haut la main, par Antoine Martin.antoine martin,ah mon dieu quel bonheur d'avoir un mari bricoleur
En lice, deux combattants : le chauffe-eau , dont le démon s 'éveille en plusieurs étapes, et un père de famille doté de deux mains gauches , d'une caisse à outils réduite à sa plus brève expression mais prêt à lutter jusqu'au bout :" ...le père hésita très peu avant de se lancer dans l'inégal corps à corps. Y avait pas , ça serait lui ou lui.
Il n'était pas au bout de ses peines."
Vous l'aurez compris les hauts faits dont il sera ici question sont des plus quotidiens et des plus triviaux. Mais Antoine Martin, à coups d'allusions littéraires, de vocabulaire volontairement excessif , tour à tour, familier ou soutenu, crée un décalage des plus efficaces pour faire naître le sourire.
Le style est  impeccable, la dérision au rendez-vous et on suit, captivé, les péripéties de ce combat entre le chauffe-eau et l'homme. Promis vous n'ouvrirez plus votre robinet d'eau chaude sans avoir une pensée émue pour cet appareil ! Un délice à s'offrir dans plus tarder !

Le chauffe-eau, Antoine Martin, le Diable Vauvert 2012, 56 pages, 5 euros.

 


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27/06/2012 | Lien permanent

Mort d'un jardinier

"...tu n'es plus connecté au serveur de la réalité ici et maintenant, tu glisses dans un autre monde, dans les débris de ton cerveau en capilotade..."

Un jardinier, aimant autant les mots que les salades, est frappé d'un accident cardiaque dans son jardin. Tandis qu'il gît sur le sol, envisageant ainsi la réalité sous un autre angle, tous les artistes, écrivains , musiciens qu'il a aimés sont convoqués autour de lui. lucien suel
Mais ce sont aussi les mots, ceux qu'il a écrits, ceux qu'il a lus qui envahissent son corps, accomplissant ainsi une transsubstantiation finale : "ton corps est ton dernier volume."
De grands pans de plusieurs pages, le rythme va en s'amplifiant au fil du roman, répartis en courts chapitres, un flot par lequel il faut se laisser emporter, admirant au passage le travail toujours recommencé du jardinier, usant du vocabulaire imagé du potager mais aussi de celui de la modernité (le jardinier-poète ne se coupe pas de la technicité et accueille tous les mots), voici qui peut dérouter de prime abord. Mais très vite on se laisse séduire par cette vision et par cette écriture qui balaie tout sur son passage.
Un livre d'une densité aigüe, qui brouille les frontières entre roman et poésie.

Mort d'un jardinier, Lucien Suel, La Table Ronde 2008, Folio 2010, 159 pages que j'ai pris le temps d'apprivoiser (dans ma Pal depuis 1 an !) mais là c'était le bon moment et je l'ai dévoré d'une traite !

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Cabine commune

"Bande de vieilles taupes"

"Vestiaire de rugby",ring de boxe ? Non , Cabine commune d'essayage dans une boutique de luxe.
Sous forme de dialogues enlevés, sans une ligne de description, Delphine Bertholon réussit le pari de croquer sur le vif, les clientes (ou clients) et le personnel de ce magasin de vêtements féminins.9782290016145.gif
De bizarres tribus s'y croisent le temps d'un essayage: "Celle-qui-veut-tout-pareil-que-la- voisine", les "Princesses", celles qui ont un problème avec leur corps : elles vont perdre deux kilos, elles n'ont jamais mis de 40 de leur vie... Elles mettent les nerfs des vendeuses à rude épreuve , vendeuses qui prédisent que "Bientôt les meurtres en boutique par des vendeurs excédés vont se généraliser(...) Un mal nécessaire, quoi !".
Unité de temps, une semaine, unité de lieu, la cabine, ce cadre bien précis donne toute leur force à ces mini-drames qui se donnent à voir.
Beaucoup d'humour (et de patience) sont nécessaire au personnel du magasin pour faire face à ces clientes , telle celle-ci qui affirme tout de go:"-Le mohair ça gratouille l'angora ça peluche la soie c'est fragile le cachemire ça fait des bourres et le mérinos ça rétrécit.
- Vous êtes sûre que vous voulez de la laine? ".

Néanmoins ces cabines ont un avantage pour certaines: "Je ne viens pas pour acheter. mais voir tous ces corps défraîchis à côté du mien, ça me remonte le moral ! Vos cabines communes, c'est ma cure de jouvence!". On peut quasiment en dire autant du roman de Delphine Bertholon : on en sort le sourire aux lèvres, toute ragaillardie !

Vient de sortir en poche .

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”gourgandine des steppes !”

Après un premier roman très court mais plutôt réussi, j'attendaisavec impatience de lire le deuxième opus de CyporaPetitjean-Cerf (avec un nom aussi romanesque, comment ne pasécrire de beaux textes ?!  ).
Le corps de Lianetient toutes ses promesses  et nous entraïne cette fois dans ununivers presque exclusivement féminin car dans la famille de la jeuneLiane, les  hommes ont une fâcheuse tendance  à disparaître"avec une rapidité incroyable",   mais peut être n'est-ce pasplus mal.
Dans ce gynécée évoluent donc trois générations qui secherchent et s'efforcent d'être de bonne mères, car "ça ne tombait pastout cuit".9782234059450
Liane quant à elle voit son corps se transformer à touteallure et elle en souffre. Il lui faudra donc l'aide de celle qu'elle aélue comme meilleure amie parce qu'elle avait de plus gros seinsqu'elle, pour vaincre sa manie de faire des listes et sa peur de vomir.Roselyne, mais aussi Eva, la femme de  ménage, ainsi queles héroïnes du feuilleton "Dallas" aideront Liane à s'accepter femme...
Toutn'est pas rose cependant dans l'univers de Liane, on y croise aussi desfilles qui ne supportent pas -et à juste titre- leur mère, desfilles qui analysent très lucidement et finement le comportement de leurgénitrice mais chaque personnage évolue grâce aux autre, ce qui donneune tonalité très chaleureuse à ce roman.
Une mention particulièreau personnage de la grand-mère qui sort des clichés habituels et àcelui de l'insupportable et très précoce  Armelle quiconcurrence  le capitaine Haddock en lançant à tout unchacun  des bordées de jurons pas piqués des vers (cf letitre de  ce billet).

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Dernière adresse

"Il ne me reste que ça: la nature et les éléments."

Une vieille dame, dont nous ne connaîtrons pas l'identité-juste l'origine irlandaise- comme si le temps l'avait déjà gommée, comme si elle ne se définissait déjà plus que par rapport aux autres membres de sa lignée, revient sur sa vie et surtout sur ce que les autres interprètent comme un naufrage: la vieillesse.31GmFzoLWlL._SL500_AA240_.jpg
L'inexorable perte d'autonomie, le corps qui ne suit plus, la relégation dans ce que la narratrice préfère appeler un "nursing home", les liens familiaux qui se distendent, le corps qu'on ne caresse plus, les petites folies qu'on s'offre et qui sont interprétées comme des folies tout court...
Toute cette description intériorisée de ce glissement progressif, je l'ai beaucoup apprécié.
J'ai juste regretté les souvenirs d'enfance qui viennent perturber le récit en voulant lui apporter une tension dramatique qui n'arrive pas à exister vraiment et n'apporte donc rien au roman. L'héroïne n'avait guère besoin de cela pour marquer son détachement et son cheminement vers la sérénité. Un très joli style pour accompagner une vison juste et sensuelle, d'une calme lucidité. Premier roman qu'il faut lire en dépit de ces quelques maladresses.

Deux extraits en passant :

"Merveilleuse utopie: je rêve d'une maison de retraite où le personnel prendrait le temps  de gestes dérisoires pour maquiller les femmes en fin de vie, les vieilles peaux, les poches sous les yeux et les cous de chien.
Les femmes en fin de vie n'en demeurent pas moins des femmes.
Et la prochaine fois que qulqu'un me maquillera , je serai sûrement complètement refroidie."

"Je pleure sur tous les centimètres carrés de ma peau laissé à l'abandon et qui n'aspirent qu'à cette caresse affectueuse."

Dernière adresse, Hélène Le Chatelier, Arléa, 90pages.

 

L'avis de Clarabel.

Recommandé aussi par Patricia Martin de France inter.

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Manger dans ta main

"La scarification comme butée identitaire. Et ce corps flottant,que l'on ne sent vivre qu'au moment de l'entaille. Elle les comprenait tant. Il fallait que ça saigne, à l'adolescence."

Autant Sandra, jeune psychologue, apparaît dure envers sa mère, autant elle se sent proche des adolescents dont elle s'occupe dans un atelier d'écriture, au sein d'un hôpital  parisien accueillant des jeunes atteints de troubles alimentaires. sophie carquain,anorexie,rapports mère  fille,rapports hommes animaux
Ses parents ont pris leur retraite dans leur Portugal natal et on sent d'emblée qu'ils sont marqués par un drame. Pour redonner le sourire à sa femme, le fantasque Daniel offre à Luisa une cochette, promise à une mort certaine, car rejetée par sa mère. D'abord réticente, Luisa va se prendre d'affection pour la jeune truie, Rose, qu'elle engraisse , tout en la traitant en animal de compagnie, tant elle lui apparait intelligente et drôle.
Alternant les chapitres portugais et français, le roman traite d'une relation mère fille perturbée, évoque le thème d'un deuil impossible à faire , celui de la relation à la nourriture, au corps adolescent ou non, mais interroge aussi notre relation à un animal souvent honni ,mais très proche de nous, le cochon.
On sent d'emblée que l'autrice, qui a coécrit en compagnie de la regrettée Maryse Vaillant des ouvrages de psychologie, sait de quoi elle parle, sans pour autant tomber dans l'écueil de la vulgarisation à tout crin. Le propos est nuancé, les personnages proches de nous et nous entrons autant en empathie avec les humains qu'avec l'animal.
Un roman attachant que j'ai pris beaucoup de plaisir à lire et qui nourrit aussi la réflexion sur les thèmes évoqués.

Manger dans ta main, Sophie Carquain, Albin Michel 2017, 311 pages validées par Marie Desplechin.

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Amours

"Pas une seule pensée pour Céleste, pas uleonor de récondone seule sur la manière dont il l'a engrossée. pas un doute sur le fait qu'il soit le père. Non, une satisfaction totale dans laquelle il se prélasse."

Début du XXème siècle, en Province , une situation quasi banale: un notaire engrosse sa toute jeune bonne (17 ans). La solution serait de la renvoyer mais l'épouse du notable , stérile et peu portée sur le choses du sexe, découvrant la situation ,décide de s'approprier l'enfant, satisfaisant à la fois son mari et se dégageant ainsi de la pression sociale qui enjoint à chaque épouse de trouver son bonheur dans la maternité. 
Là encore, rien d'exceptionnel pour l'époque. Ce qui l'est beaucoup plus c'est la manière dont ces deux femmes vont découvrir à la fois leur corps (la bourgeoise n'a pu le découvrir que de manière parcellaire avant son mariage et ne s'est jamais, corset oblige, habillée seule) et leur sensualité.
Le corps féminin , et en particulier la peau sont au cœur de ce roman roman , tout à la fois récit d'une émancipation sociale et sensuelle.
Leonor de Récondo souligne bien les différences entre ces deux femmes: l'une, la bourgeoise à qui l'on a menti. L'autre, la bonne ,qui sait d'avance que son existence sera difficile et tente de s'en accommoder avec ses pauvres armes.
Un roman édifiant , à l'écriture tantôt coup de poing, tantôt caresse, que je n'aurais pas découvert sans les deux villes tentatrices , Clara et Cuné ! Merci à elles !

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