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”La femme au loup les pieds dans le four”
La consolante aurait pu être le surnom d'une femme ou d'une maison. C'est celui d'une partie de boules et surtout le nom du dernier roman en date d'Anna Gavalda, qui au grand désespoir des critiques intello , caracole déjà en tête des listes de vente.
Certes, il faut un temps d'adaptation à ce style tout grêlé de points de suspension, mais le personnage de Charles, "un homme encombré, chargé, loaded en anagalis, comme leurs dés. Quand ils sont pipés" est si attachant qu'on le suit volontiers dans son effritement et sa rédemption. L'histoire ,c'est vrai , met un peu de temps à démarrer mais bon, on accompagne volontiers Charles dans ses pérégrinations ubuesques en Russie ou parmi les siens (le dîner de famille du début est une pure merveille, tout le monde en prend gentiment pour son grade, en particulier un specimen de beau-frère que chacun possède, j'en suis sûre! ).
L'atmosphère est plus noire, la vie plus dure mais on sent bien que la préférence de l'auteure va à ses gens que la vie a roué de coups et qui parfois n'en peuvent plus... Comme Anouk, celle qui vient de disparaître.
Gavalda croque avec un plaisir évident ses personnages, fustigeant au passage autant les clichés bobos en matière d'architecture , "un architecte d'intérieur, concepteur d'espace, créateur de volume, passeur de lumière et autres trouducuteries." que le mauvais goût de "la poubelle de table assortie à la nappe et la bobonne assortie à la poubelle de table" de la classe moyenne. Mais c'est avec les personnages de Kate ,des enfants pleins de vie qui l'entourent , voire des animaux qui gravitent autour d'elle que l'on sent que Gavalda s'est régalée. Quelqu'un qui est capable d'écrire que la cusinière Aga est "Une espèce de bonne grand-mère, chaude, gentille, présente" ou qu'un chien "quand j'avais le blues, se forçait à faire une connerie pour me changer les idée...Une petite poule en passant, un ballon, la jambe du facteur, le super rosbif du dimanche...Oh oui! Il s'en est donné du mal pour que je relève la tête! Voilà pourquoi je ...Je le porterai jusqu'au bout...", quelqu'un capable de nous dire que le monde est plein d'histoires et que personne ne veut les écouter, alors là , je la lis avec enthousiasme , le sourire aux lèvres, j'adhère à ses énumérations ,à ses interventions de l'auteur, à son humanité.
Un vrai, grand et beau coup de coeur ! merci Cuné !
L'avis de Bellesahi
18/03/2008 | Lien permanent | Commentaires (35)
”La désintégration et l'érosion peuvent être inversés”
Il ya quelque chose de pourri dans le couple que forment Julia et Brian depuis maintenant dix ans. Le début du Garçon dans la luneest d'une acidité réjouissante car chacun des personnages traverse unemini crise existentielle, se demandant comment il est perçu par lesautres.
"Il se dit: je me demande pourquoi je ne vais pas baiser un mouton mort à l'abattoir du coin
il cligna des yeux. elle se contracta. Il bâilla. Elle éternua. Il jouit. Pas elle.
(...)
il se dit: je pourrais divorcer pour moins que ça.
Elle pensa:en plus , il faut changer les draps."
Cettecrise latente, car non-dite, risque de s'exacerber car le couple,accompagné de leur fils, Sam doit partir en Irlande chez le père deBrian, ce que Julia envisage comme "un long purgatoire".Ce sera pireque cela car un terrible accident va survenir ...
Kateo'Riordan àpartir de là aurait pu faire sombrer le récit dans le mélo le pluslarmoyant, tirant partie des paysages et de tous les clichés embusquésdans un coin de notre tête sur l'Irlande. Balayant tout cela d'unrevers de main, elle lance ses personnages défricher le passé del'autre, jusqu'à ce que la vérité éclate. En effet, tant Julia queBrian se sont forgé une image qui ne correspond pas forcément àla réalité. "Elle se demanda pourquoi Brian, contrairement auxautres, trouvait si nécessaire de réécrire le passé, et quelle part deleur vie les autres couples gardaient cachée. Elle éprouvaune pointe de remords pour toutes les fois où elle l'avaitsciemment blessé par ses mots, où elle avaitintentionnelelemnt tenté de l'humilier parce que tant qu'il continuaità sourire de ce sourire exaspérant, si désinvolte, ses piques nepouvaient atteindre leur cible."
Violencedes mots, violence des émotions violence tout court, l'auteure ne nousépargne pas et montre bien l'ambivalence des sentimentsqui agitent ses personnages. Il serait tellement plus simple queles bons soient entièrement bons et inversement pour les autres...
Lepoids du passé, le poids des non-dits qui taraudent les générationssuivantes sont aussi au coeur de ce roman, bien plus que la mort d'unenfant.
Kate O'Riordan sonde les reins et les coeurs,elle fouilleles plaies, jouant avec les peurs de ses lecteurs (qui n'a jamaispaniqué , ne serait-ce que quelques secondes, après avoir perdu de vueson enfant dans un magasin?) dosant savamment l'espoir et ladésespérance...
Un livre qui vous colle une grosse boule d'angoisse , qui vous poursuit longtemps, mais qui est une expérience magistrale.Un livre qui brûle.
11/02/2008 | Lien permanent | Commentaires (13)
Index
A la demande générale d'une visiteuse qui se reconnaîtra, àdéfaut de mettre de l'ordre dans mes piles de livres, j'en mets(un peu)dans mon blog. Il était temps !
Je commence par les livres de 2008et je complèterai au fil du temps avec les lecturesantérieures, ce qui me permettra de ne surtout pas compter combien delivres j'ai lus !
Abasiyanik Sait Faik : Une histoire pour deux
anthologie:Mes 66 plus belles poésies
Beauchemin jean-françois:Le jour des corneilles
Behar Tonie :Coup bas et talons hauts
Beninca Lise :Balayer fermer partir.
Benni stefano :Margherita Dolcevita
Bienvenu Sophie : Lucie le chien
Bonotaux Gilles :Les la délégation norvégienne
Boyer frédéric : Far-Ouest
Bruen ken:Delirium Tremens
Cachin nathalie : Les trophées de Constance
Cayre Hannelore: Toiles de maître
Célarié Clémentine : Mes ailes
Chosson Martine : Parlez-vous la langue de bois ?
Clewlow carol :pas de mari, pas d'ennuis
Colwin Laurie : Accidents
Corenblit Rachel : shalom, salam, maintenant
Cusset Catherine:La haine de la famille
Delachair Lou: Boris Vian et moi
De peretti : nous sommes cruels
de Vigan delphine : No et moi
Desouches Thierry :Quand les poules auront des dents
Desplechin marie :Pome
Dessaint Pascal :Cruelles natures
Diwan Audrey :La fabrication d'un mensonge
Drabble Margaret :La mer toujours recommencée
El Ayachi Samira :La vie rêvée de Mademoiselle S.
Extebarria Lucia : Cosmofobia,
Eyre Ward Amanda :A perte de vue
Fougeray karine : Kerr Violette
Friot Bernard : agenda du (presque) poète
Gallay Claudie : dans l'or du temps
Gavalda anna : la consolante
Goby Valentine:le cahier de Leïla, de l'Algérie à Billancourt.
Indridason Arnaldur : la voix
Janicot Stéphanie : le privilège des rêveurs
Jeanney Christine :Charlémoi
Johnson pete :Croyez-moi, je suis un rebelle
July Miranda : Un bref instant de romantisme
Kavian Eva: la dernière licorne
Kérilis hélène : la magisorcière et le tamafumoir
Kurayanagami Tetsuko: Totto-Chan
Kuipers alice : Ne t'inquiète pas pour moi
Lackberg Camilla :La princesse des Glaces
Lafon Marie-Hélène: maison Santoire
Lesbre Michèle : le canapé rouge
Lewycka marina :Une brève histoire du tracteur en Ukraine
loe Erlend :Autant en emporte la femme
Malineau,jean-Luc :Proverbes et dictons farfelus
Marietta Agnès : N'attendez pas trop longtemps
Mazetti Katarina : entre le chaperon rouge et le loup c'est fini
Montero Rosa : la fille du cannibale
Moore Christopher: Le lézard lubrique de Melancholy Cove
Nessmann Philippe :Toutes les réponse aux questions que vous ne vous êtes jamais posées
mainard Doninique : Ma vie en dix-sept pieds
Manto Saadat Hasan : Viande froide
Minervudottir Gudrùn Eva :Pendant qu'il te regarde tu es la Vierge Marie
Mopurgo,Michaël :L'histoire de la licorne.
Morton brian : une fenêtre sur l'Husdson
Morton Kate : Les brumes de Riverton
Neruda Pablo : le livre des questions
O'riordan Kate :Le garçon dans la lune
O'Farrell Maggie : L'étrange disparition d'Esme Lennox,
Pancol Katherine : la valse lente des tortues
Pélegrin Dominique Louise : Ciel! Ma prairie
Pelot Pierre : La croque buissonnière
Perkins Gilman charlotte : la séquestrée
PetitJean -Cerf Cypora :le musée de la sirène
Petitjean-Cerf :le corps de Liane
Pulsatilla :La cellulite, c'est comme la mafia, ça n'existe pas.
Phillips Marie : Les dieux ne valent pas mieux
Potter Ellen : Olivia Kidney
Olivia Kidney et l'étrange maison de l'au-delà
Pullman : les royaumes du Nord
Rey Georges-François : Sauter du coq à l'âne
Reyboz cécile : Chanson pour bestioles
Reysset karine :Comme une mère.
Romer Knud: Cochon d'Allemand
Roza Bruno:Leçons de choses
Rubin Gabrielle : pourquoi on en veut aux gens qui nous font du bien
Saumont Annie : Vous descendrez à l'arrêt Roussillon
Schneider Michel :Marilyn dernières séances
Sebbar Leïla : Louisa
Sheridan Peter : la guerre des légumes
Ternynck catherine: Chambre à part
Thibert Colin :Tirez sur l'ambulance .
Trollope Joanna : les vendredi d'Eleanor
Vanyda : l'immeuble d'en face
Varley Jane Elisabeth :les femmes et les amants
Vaude Mary-Gérard : Fous de vaches
Wharton Edith: Xingu
Watara Risa : appel du pied
Watara Risa: Install
Zalberg Carole : La mère horizontale
Zariâb Spôjmaï : Dessine-moi un coq
10/05/2008 | Lien permanent | Commentaires (19)
”Tout est bon chez elle, y a rien à jeter...”
Vous y croyez vous au coup de la fille qui n'a pasacheté de disque depuis que Kate Bush a sort son dernier album (jepréfère ne pas regarder la date) et qui, à l'écoute d'uneseule chanson à la radio, achète le Cd de quelqu'un dontelle n'avait jamais entendu parler? Hé bien, c'est moi et franchement,j'ai été é-pa-tée !
Je laisserai à Ch'ti 31 , quand il aura le temps,le soin de décortiquer les influences musicales d'AgnèsBihl,sachez quand même que dans les remerciements, elle cite en vrac,Jacques Brel,Anne Sylvestre qui l'a portée sur les fonds baptismaux dela chanson, Charles Aznavour dont elle a assuré la premièrepartie, Renaud Séchan( Clin d'oeil avec "You are fouting of my gueule")...et vous aurez une idée de la lignée dans laquelle elles'inscrit.
Quantaux paroles, c'est un régal ! Pas étonnant quedans la liste gigantesque de remerciements se niche le nom dePierre Desproges dont elle détourne au passage un aphorisme .Elle maniele zeugma comme une majorette son bâton , "moi qui fais la morale etla grasse matinée", elle oscille entre l'hystérie et la tendresse dans"La Complainte de la mère parfaite",égratigant au passage le père qui dort tranquillement au salon tandisque la mère débutante s'évertue à chanter"Dodo, l'enfant do,crise de nerfs , maman limite", balançant entre injures "espèced'antiféministe"et la menace "sinon je te déshérite",celle qui ne se reconnaîtra pas dans ce portrait est unementeuse ou une chanceuse qui n'entend pas le bébé pleurer ! Onrit mais aussi on pleure (et ce n'est pas une figure de style)avec une chanson sur l'inceste "Touche pas à mon corps" où Agnès Bihlréussit le tour de force de trancrire en quelques minutestous les sentiments éprouvés par l'enfant violée par son père.
Rien de lourd rien de caricatural quand , tout en évoquant le monde del'école avec son prof de maths, sadique (pléonasme, bien sûr),elle traite mine de rien du problème des sans-papiers,"Liberté j'écris ton nom mais sans papiers, c'est pas pratique".Chanteuse engagée oui, mais sans rien de l'aspectcaricatural, l'humour et la virtuosité dans le maiement des mots. sontà pour alléger le tout.
le monde d'agnès Bihl, c'estaussi celui des régimes, des histoires d'amour (souventratées), des femmes qui se font belles, tellement libresque"j'suis libre tous les soirs", énumérant tous les types de garçonsrencontrés, mais aussi débinant avec une perfidie raffinée celledont elle voudrait prendre la place : "Après tout elle est tropmodeste, Elle cache si bien ses qualités...Et puis son âge, comme c'est curieux Vu qu'c'est pourtant ce qu'lle fait d'mieux". Vous l'aurez compris, Agnès vaut mieux êtresa copine ! :) Et ça tombe bien, j' l'adore !
04/02/2008 | Lien permanent | Commentaires (20)
Les femmes du braconnier
"...pourquoi cette hécatombe autour de l'écriture ? "
La vie ardente de la poétesse et romancière américaine Sylvia Plath, son mariage avec un poète tout aussi charismatique, Ted Hughes, son suicide enfin, ont déjà donné naissance à de nombreuses études, voire à des romans ( dont le magnifique Froidure de Kate Moses que je recommande vivement).
Claude Pujade-Renaud, à son tour, revisite cette existence marquée par de grandes périodes d'exaltation suivies de non moins importants épisodes dépressifs. Mais la maladie mentale n'explique pas tout ,loin s'en faut. En choisissant de multiples points de vue, ceux des principaux protagonistes bien sûr, mais aussi des personnages plus extérieurs , tels une concierge ou un voisin, Claude Pujade-Renaud effectue ainsi un tour le plus complet possible de ces personnages hors du commun.
Des chapitres courts qui s'enchaînent avec fluidité , portés par l'intensité de l'écriture, une écriture traversée par de nombreuses figures animales . Le livre commence ainsi sur la vision d'un cheval qui s'emballe et se clôt sur une guenon se laissant mourir ; animaux que l'on trouve au départ aussi bien dans les poèmes de Sylvia( en particulier les abeilles liées à l'image paternelle) que dans ceux de de Ted, car comme le montre l'auteure, il y a eu , même au-delà de la mort, durant trente ans "un travail de tissage entre les textes " de ces deux poètes.En outre, deux scènes , l'une d'harmonie totale entre les amants et la Nature, l'autre d'une violence extrême , montrant Sylvia, essoufflée, alourdie par ses maternités, détruisant avec furie les collets des braconniers, tandis que Hughes se tait mais prend secrètement le parti des ruraux, fonctionnent en écho et symbolisent la rupture en marche...
Le sang, celui de la morsure initiale qu'inflige Sylvia à Ted, celui des règles, qu'elle refuse avec horreur, la couleur vermillon qu'elle emploie à tour de bras, tout ce rouge court au long de ce roman charnel, marqué également par les odeurs fortes liées à l'animalité et à la puissance.
Sous le couvert des différents narrateurs , on devine parfois la voix de l'auteure, quand sont rectifiés certains détails ou bien quand est fustigée l'attitude des féministes qui n'ont cessé de vouer Hughes aux gémonies, lui reprochant en particulier la censure exercée dans l'édition de certains textes de Plath, voire leur destruction totale .
Mais il ne faudrait pas oublier également le portrait , tout en nuances, que brosse Pujade-Renaud d'Assia, souvent présentée comme la briseuse de ménage, mais qui fut elle aussi fascinée tout à la fois par Hughes mais aussi par Sylvia et qui en paya le prix fort.
Une oeuvre riche et puissante montrant aussi les ravages et les bonheurs de l'écriture : "S'ajoutait le cauchemar de ne pas dormir .Ou si peu : je me réveillais malaxée, concassée par les rêves. La sensation d'avoir été lapidée par une grêle de météorites oniriques. Peut être n'avais-je pas droit à un sommeil réparateur puisque je n'avais rien produit? Ou mal. Ou pas assez. La perfection ou rien !"Un roman que j'ai dévoré avec passion, même si je connaissais ou croyais connaître l'histoire de Sylvia Plath.
Les femmes du braconnier, Claude Pujade-Renaud, Actes sud, janvier 2010, 347 pages aussi ardentes que les personnages évoqués.
Directement sur l'étagère des indispensables, à côté de : Arbres d'hiver, de S. Plath en édition bilingue chez Gallimard et chez le même éditeur, mais là seulement traduites en français, Birthday letters de Hughes.
11/01/2010 | Lien permanent | Commentaires (20)