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Fugitives

"Mais à ce moment-là, les sentiments étaient altérés, l'homme éprouvait de la gratitude, elle de la bonne volonté, les deux une espèce de nostalgie décalée."

Une jeune femme sous l'emprise d'un homme plus âgé,  un raté  pur jus, ce qu'elle s'obstine à ne pas voir, va tenter d'échapper à son emprise dans la première nouvelle de ce recueil de huit textes. On a le coeur qui bat tout au long de notre lecture , on a envie de l'interpeller cette naïve amoureuse et on finit, le coeur broyé, à la fin du texte.alice munro
Nous suivons ensuite durant trois époques de sa vie, de la jeunesse à la maturité, Juliet qui possède, non une difformité physique, mais une maîtrise de lettres classiques, ce qui revient quasiment au même dans le coin paumé où elle a grandi. Aux prises avec des parents vieillissants, puis avec sa propre fille en quête de spiritualité, Alice Munro la décrit avec beaucoup d'empathie.
Jeunes ou vieilles, le point commun entre toutes les femmes évoquées est qu'elles sont toujours en décalage avec le monde et l'époque dans lequel elles ont eu la malchance de naître, mais ne  présentent pourtant jamais en victimes : "Elle espère comme les gens espèrent sans se faire d'illusions des aubaines imméritées, des rémissions spontanées, des choses comme ça !".
Dans ces histoires, les hommes sont relégués au second plan, même si d'une manière ou d'une autre, ils influent sur l'existence féminine. Mais au final, ce sont elles qui choisissent, mènent leur vie comme elles l'entendent, s'en accommodent plutôt bien même si parfois la vie a été cruelle envers elles.
Une pointe d'humour, de l'émotions contenue et une lucidité aigüe, voilà qui rend particulièrement savoureux ces textes intemporels.

 

Fugitives, Alice Munro, oints Seuil 2009, traduit de l'anglais (Canada) par Jacqueline Huet et jean-Pierre Carasso.

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Dictionnaire ouvert jusqu'à 22 heures...en poche

Dictionnaire et humour font souvent bon ménage (cf le Dictionnaire superflu à l'usage de l'élite et des biens nantis de Pierre Desproges (1958) ou, plus ancien le Dictionnaire du diable, D'Ambrose Bierce), les contraintes inérentes à la forme permettant sans doute par contraste de libérer le fond.
C'est le cas pour ce Dictionnaire ouvert jusqu'à 22 heures (ça tombe bien après je dors de toutes façons).9782757831847.jpg
Ils sont une quarantaine à avoir mis en commun leur humour , dans l'esprit du maître Alphonse Allais , pour nous concocter ce dictionnaire, parfait en tous points puisque comprenant des Noms (plus ou moins) communs et des Noms (plus ou moins) propres, séparés, non par des pages roses, mais couleur absinthe , du meilleur goût,  en hommage à la boisson favorite d'Allais.
Nonobstant les différentes méthodes de lecture préconisées en début d'ouvrage, le mieux, je crois est de piocher au hasard et de naviguer au gré de notre humeur, faisant une escale en Bas-Liverne : ex-département français, partie méridionale de l'actuelle Liverne. Sur cet ancien territoire françias, on dit n'importe quoi. Ou nous régalant du détournement des traductions d'expressions latines. Ainsi  la définition de Corpus delicti devient-elle: Elle fait des délices de son corps; ce qui donne une  allure nettement plus sexy à ce terme de juris-prudence !
Évidemment, bien des formes d'humour se donnent ici rendez-vous (normal vu la diversité des auteurs) et toutes ne seront pas forcément à notre goût , mais chacun pourra faire son miel et revenir à loisir feuilleter ce dico pour se dérider un peu !

Une dernière définition, pour la route :

Absentéisme n.m. : Fléau scolaire qui ne doit plus avoir cours.

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Trop de bonheur

"A croire qu'il existe en apparence on ne sait quel savoir-faire fortuit et bien sûr injuste dans l"économie du monde puisque le grand bonheur -aussi provisoire, aussi fragile soit-il -d'une personne peut sortir du grand malheur d'une autre."

Les femmes et leur quête de bonheur, dérisoire et courageuse à la fois sont au centre des nouvelles d'Alice Munro. Cruauté, résilience qui ne dit pas son nom, soumission au désir des hommes, voilà à quoi ces très jeunes filles, mères ou femmes plus âgées doivent composer.alice munro
Tout l'art d'Alice Munro est de ne pas porter de jugement, de décrire en une phrase tranchante et/ou férocement drôle, l'attitude, le comportement d'un personnage et vous le livrer en entier résumé : "Certaines suggestions, certaines idées, avaient le  pouvoir faire tressaillir  les muscles de son maigre visage tavelé, et alors son regard devenait noir et aigu, et sa bouche semblait remâcher un goût répugnant. Elle pouvait vous bloquer net dans votre élan, comme un féroce buisson de ronces."
Des textes qui possèdent juste le bon tempo et la bonne durée et ne nous laissent jamais sur notre faim. Des univers denses et intemporels. 316 pages piquetées de marque-pages.


Trop de bonheur, Alice Monro, Editions de l'Olivier 2013, traduit de l'anglais (Canada ) par Jacqueline Huet et Jean-Pierre Carasso

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Sur les ossements des morts

"Après tout, pourquoi devrions-nous être utiles ?"

 Ni émotive, ni sentimentale- c'est-elle qui le dit- Janina Doucheyko, ingénieure en retraite férue d'astrologie,passionnée par l’œuvre de William Blake, s'occupe des résidences secondaires d'un polar,olga tokarczukhameau niché dans les bois polonais. L'hiver, ils ne sont que trois à vivre dans ce lieu difficilement accessible, à un jet de pierre de la Tchéquie. Un soir, Matoga , l'un de ses voisins , vient donner l'alerte : le braconnier Grand Pied est mort. Pour Janina cela ne fait aucun doute: les animaux se sont vengés. La série de meurtres qui survient ensuite semble lui donner raison , mais qui va croire cette vieille toquée de Janina dans un microcosme où les chasseurs font la loi ? D'autant que les lettres qu'elle envoie aux autorités font état d'une théorie abracadabrantesque, mêlant influence des astres et vieilles légendes. L'amour inconditionnel de Janina pour la nature, sa forte personnalité qui se découvre au fur et à mesure, son humour iconoclaste ( Il fut un temps, en effet, où j'ai couché avec un catholique, mais le résultat n'a pas été fameux.) , son excentricité, ses certitudes farfelues ont tout de suite entraîne mon adhésion. Le récit est bien tenu, brosse de manière convaincante le portrait de cette petite communauté polonaise et le style fluide et élégant (bravo à la traductrice) ne fait qu'ajouter au plaisir de la lecture. Un roman dévoré d'une seule traite et un énorme coup de cœur ! Vite faites la connaissance de Janina !

Sur les ossements des morts, Olga Tokarczuk, traduit brillamment du polonais par Margot Carlier, Éditions noir sur blanc 2012, 299 pages enthousiasmantes!

 

Si vous avez aimé L'homme à l'envers de Fred Vargas, et/ou Julius Winsome (clic) de Gerard Donovan, vous aimerez Janina ! Déniché à la médiathèque.

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Blanc-Bleu Belge

"Une Vénus à la Fernando Botero."

Partie explorer le rayon "animaux"d'une librairie pour vérifier si le Père Noël(ou son avatar, je ne suis pas difficile) allait dénicher LE livre qui me fait saliver depuis plusieurs semaines, je suis tombée sur ce fascicule à la gloire de la Blanc-Bleu Belge et vu son prix ridicule (5 euros 50)...mary-gérard vaude,jérôme chabanne
La Belgique étant à un jet de pierre de chez moi, nombreuses sont les blanc-bleu belges qui paissent dans mon environnement.  D'ailleurs , comme le précise Mary-Gérard Vaude, vu ses qualités, "Un boucher ne peut rêver plus généreuses carcasses.", on en retrouve non seulement sur le continent européen mais aussi en Amérique (du Nord et du Sud) , en Asie et même en Australie !
Véritable panégéyrique, ce fascicule concentre un maximum d'informations sur l'histoire de la race, son évolution, ses qualités bouchères et l'on ne retrouve que par petites touches le style poétique et imagé de Mary-Gérard Vaude. L'énumération des noms des taureaux est pourtant à elle seule un vrai régal : "Gédéon du Vieux-Château de Maurennes, [...]Valseur d'Ochain, Ténor de la Reche Terre,(...) Lancier du Tilleul, (...)Pétulant d'Anixhe, Riant (...) Galopeur des Hayons."
L'aspect technique prononcé est sans doute lié au fait que ce livre a été édité grâce au soutien et à la collaboration d'associations d'éléveurs belges...Il n'en reste pas moins que ce fascicule est une somme et les photos de Jérôme Chabanne (visibles ici) lui conférent un charme certain. Un petit bonheur à lire et à feuilleter pour le plaisir de redécouvrir des détails malgré l'aspect un peu technique ! à noter que Jérôme Chabanne, en plus de magnifier la beauté des ruminants a su aussi capturer la beauté changeante des ciels du Nord !

Blanc-Bleu Belge, Editions Castor & Pollux 2011.

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Le chapeau de Mitterrand

"Il avait triomphé de tous les obstacles, à la manière des héros de contes , qui traversent  royaumes, rivières, forêts et montagnes à la recherche d'une pomme d'or ou d'une pierre magique qui leur apportera la puissance et la gloire, ou tout simplement le sentiment du défi relevé."

Daniel Mercier, comptable,  s'approprie le chapeau du Président de la République que ce dernier a oublié dans un restaurant où leurs tables étaient voisines. Dès lors, hasard ou puissance de la projection qu'il fait sur cet emblème de pouvoir, la vie de ce français modeste va être transformée. Mais comme dans tout conte qui se respecte, l'objet magique va passer de propriétaire en propriétaire, influant sur leurs existences et permettant de brosser au passage une réjouissante rétrospective des années 80. à noter d'ailleurs que seul le premier "utilisateur" du couvre-chef est au courant de l'identité du propriétaire réel, ce qui donne encore plus de saveur à la projection qu'ils vont faire sur cet objet, l'utilisant comme un déclencheur, un levier providentiel qui vient donner une nouvelle impulsion à leurs vies.antoine laurain,années 80
Ah on peut dire que j'ai pris mon temps pour me décider à lire  ce roman ! J'ai traîné des pieds mais, une fois commencé, je n'ai plus lâché ce Chapeau de Mitterrand ! Une vraie fontaine de jouvence qui m'a ramenée trente ans en arrière , m'a fait sourire jusqu'à la pirouette finale qui remet en perspective tout le roman !  Une fable réjouissante et un style enlevé, que demander de plus? !

Merci Sylvie !

Le chapeau de Mitterrand, Antoine Laurain, Flammarion 2011.

Ce roman vient d'obtenir le prix relay SNCF.

L'avis d'Ys

Liliba qui vous envoie vers plein d'autres billets

Mango

Le blog de l'auteur

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11/07/2012 | Lien permanent

Nouvelles contemporaines

"Comme elle tenait à son mauvais caractère, elle avait refusé."

Trois auteurs ont été réunis dans ce recueil en principe destiné à la jeunesse. Un seul texte pour Delphine de Vigan, Comptes de Noël, assez prévisible, nouvelle qui accompagne d'ailleurs une édition spéciale en poche de No et moi.delphine de vigan,timothée de fombelle,caroline vermalle
Timothéede Fombelle, lui, fait la part belle à des textes personnel, très courts et dont certains évoquent une réalité contemporaine difficile, mais où il s'arrange (presque) toujours pour "laisser une échappée, un espoir, un trait de lumière." Je compte d'ailleurs utiliser certains de ces textes avec mes élèves très fâchés avec la littérature : leur brièveté et la qualité de l'écriture devrait leur plaire...
Mais c'est avec Caroline Vermalle et ses deux textes que j'ai dégainé le plus de marque-pages ! Deux nouvelles pleines d'émotion retenue, mettant en scène ceux que Pierre Sansot appelait avec tendresse les gens de peu , personnes qui luttent contre l'indifférence, se montrent solidaires, et entretiennent la chaleur humaine, vaille que vaille.  La fille du déménageur a suscité ainsi chez moi le plus d'émotions. Le récit de ce père déménageur qui , aidé de ses amis, va tout mettre en oeuvre pour ramener vers la vie sa fille et renouer avec elle tout en délicatesse et en tendresse  est une petite merveille !

Merci Antigone pour cette belle découverte!

 

Nouvelles contemporaines, regards sur le monde, Livre de poche 2012.

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Couché

- Il s'agit à la fois de ne rien faire et d'accomplir quelque chose d'exceptionnel, a-t-il résumé.

Le jour de ses vingt-cinq ans, Malcom décide de rester Couché. Durant vingt ans, ce jeune homme qui rêvait de changer le monde, qui était la pierre angulaire de sa famille, va rester allongé, enflant démesurément dans la maison familiale où ses parents et son frère demeurent, prisonniers volontaires.
Alternant passé et présent, le frère cadet nous raconte la relation particulière,passant de l'amourdavid whitehouse inconditionnel à l'exaspération ou à la rivalité, qui l'unit à son frère. Il nous décrit aussi, de manière très fine, la manière dont chacun au sein d'une famille, essaie d'aider les autres tout en se préservant, ou pas.
Il ne s'agit pas ici du portrait d'un bon vivant à la manière d'Alexandre le Bienheureux,  film d'Yves Robert, pas plus d'ailleurs que d'un cas d'obésité morbide sortie tout droit d'une émission de télé trash. Non, dans ce premier roman, David Whitehouse nous livre un récit métaphorique et néanmoins ancré dans le réel, dans lequel les descriptions du corps de Malcom suscitent quasiment la nausée, sans pour autant tomber dans le sensationnalisme. L'écriture est toujours très maîtrisée, l'humour n'est pas absent et le récit ménage de nombreux rebondissements, un défi malgré le caratère statique du personnage central !
Un roman surprenant dans lequel chacun pourra projeter ses interprétations mais un vrai tour de force littéraire en tout cas !

Couché, (Bed), traduit de l'anglais par Olivier Deparis, Plon 2012, 264 pages qui nous laissent un peu sonnés !

L'avis de Clara.

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05/04/2012 | Lien permanent

Bon rétablissement

"Je suis pareil que lui, un constipé du coeur."

Sauvé de la noyade, Jean-Pierre Fabre, veuf, sans enfants, plutôt ronchon, est coincé dans un lit d'hôpital. Un sale coup pour celui qui toute sa vie a eu la bougeotte ! Mais finalement cette immobilisation forcée va lui permettre de cotoyer, voire même de se lier d'amitié avec des gens qui n'auraient jamais autrement fait partie de son univers. Un double rééducation donc: celle de ses membres fracassés par la chute et celle de son vieux coeur un peu rouillé...
On retrouve là un thème cher à Marie-Sabine Roger : des gens cabossés par la vie, qui n'ont en apparence rien en commun , arrivent non seulement à se comprendre mais à s'apprécier. Et c'est là que pour moi le bât blesse un peu. marie-sabine roger
En effet ici, si j'ai apprécié la vision caustique de Fabre du monde hospitalier, "Technique irréprochable, respect aléatoire, compassion en option.", je suis plus réservée quant quant aux personnages secondaires, un peu trop démonstratifs à mon goût (voir en particulier les commentaires sur la jeune Maeva). Un petit bémol qui ne m'a pourtant pas empêchée de dévorer ce roman et d'en surligner bien des passages ! Fabre a la dent dure parfois et c'est roboratif :"Chez ceux qui sont bornés, la bêtise est sans bornes."

Bon rétablissement, Marie-Sabine Roger, le Rouergue 2012, 205 pages qui donnent le sourire.

 

 Merci  à Clara, Aifelle et Fransoaz qui ont fait voyager ce livre et l'ont aimé.

Gwenaëlle est un peu plus réservée

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09/04/2012 | Lien permanent

Olive Kitteridge

"Je ne vois vraiment pas pourquoi je pleurerais."

Tantôt personnage principal, tantôt juste mentionnée, Olive Kitteridge nous apparaît dans un portrait kaléidoscope la suivant de l'âge adulte à la vieillesse. Mais qui est-elle réellement? Pour les uns, une prof de maths qui terrorise ses élèves , pour d'autres une femme avec son franc-parler mais qui sait aussi faire preuve de déroutants élans de bonté . Étouffante pour son fils unique qui n'aura de cesse de la fuir , compatissante pour une jeune femme souffrant d'anorexie ou pour un ancien élève dépressif, Olive nous surprend toujours.elisabeth strout
La construction, perturbante au début, on a l'impression de lire des nouvelles sans lien entre elles, bâtit en fait, de manière subtile, tout un univers qui nous devient vite familier. On guette l'apparition Olive et très rapidement on s'attache à cette femme et à ceux qu'elle côtoie.
Elisabeth Strout nous montre avec aisance aussi bien les drames que les joies, la solitude et la vieillesse mais aussi le nouveau comportement amoureux des personnes âgées , leur manière d'affronter les surprises du coeur. Un roman généreux et tout en finesse.

Olive Kitteridge, Elisabeth Strout, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Pierre Brévignon. Ecriture 2010, 375 pages revigorantes. Livre de poche 2012.

Prix Pulitzer de Littérature 2009.

le billet de Clara qui vous envoie vers plein d'autres !

Celui d'Anne.

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