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21/09/2009

La donation

"Et nous lui en voulions de démolir chaque jour notre vie."

A l'occasion d'une donation entre vifs, la narratrice commence  une lettre à ses parents pour les remercier.N'y parvient  pas. En effet lui reviennent en mémoire  les souvenirs d'une enfance sous le signe de la Psychose  Maniaco Dépressive maternelle, où la narratrice et sa soeur souffraient en quelque  sorte de "PMD passive, un peu comme on parle de tabagisme passif." Et de s'interroger sur les sens de ce don :51-rCcAaVqL._SL500_AA240_.jpg
"La donation est-ce aussi  cela? La transmission du gène du doute. Du doute de soi, vertigineux. Je me suis toujours interrogée sur la  réalité de ce sombre héritage. J'ai souvent voulu lire une étude sur le psychisme des enfants de mères maniaco-dépressives". Sondant les mots, citant des auteurs comme autant de  bornes sur un chemin marqué par le doute, la narratrice interroge aussi sa propre filiation: quelle mère est-elle pour ses filles ?
Une écriture toute en retenue, l'auteure tient à distance ses sentiments par différentes stratégies, qui peuvent parfois agacer, mais réussit ici un roman à la fois cruel et tendre.

La donation, Florence Noiville. Livre depoche.  118 pages.

L'avis de Solenn

 

22/08/2009

Regarder le soleil

"Nous avons trop de respect pour le chagrin, dit-il .Il faut que ça s'arrête un jour."

Ce pourrait être en dehors du temps tant ce qui est décrit est intemporel. L'histoire se déroule dans un ranch de l'outback australien où un fermier vient de faire une chute de cheval. Sa femme devient progressivement aveugle et si elle parvient dans un premier temps à faire  tourner  l'exploitation, à la mort de son époux, sa maladie empirant aussi, elle perd  tout à la fois le contrôle de sa vie et de sa fille, Chloé. cette dernière en profite alors pour  explorer toute cette étendue sauvage qui les entoure.
C'est par une série de chapitres que nous découvrons progressivement l'histoire de cette famille atypique où les émotions passent plus par le regard que par les  mots. "Je n'arrive pas bien à ne pas  la regarder ."pense Chloé  de sa mère  tandis que  sa demi-soeur affirme  : "Son oeil te suit, même si  elle ne regarde pas . Sans que tu le  remarques, elle l'accroche à toi  et il se balade  avec toi,  où  que tu ailles,  comme la bardane."arton13959-2a885.jpg
Intensité des sensations, observation tout aussi intense de la mère dans ce qu'elle a de plus intime, de plus charnel: "ça se  passe maintenant , je le sais.  En ce   moment-ci se  forment  les nouveaux petits vaisseaux. Ils se développent  le long  de  l'humeur vitrée, se ramifient en tous  sens, mais  ne valent  rien."Amour absolu qui ne dira jamais son nom.
Il se dégage du roman d'Anne Provoost une poésie étrange et sourde sans que pour autant on verse dans l'abstraction.On s'attache à ces personnages qui acquièrent progressivement un arrière plan, une histoire qui nous les rend plus proches,moins éthérés et c'est beaucoup trop vite qu'on termine ce roman sur une image à la fois banale, dans sa quotidienneté, et forte. Un roman puissant.

Regarder le soleil,  Anne Provoost, traduit du néerlandais (Flandre) par Marie Hoogje, Fayard,  266 pages intenses. Parution le  26 août.

Ce roman vient de recevoir en Flandre le prix triennal de la prose.