Rechercher : La femme à la clé
Petit clin d'oeil aux libraires (et à leurs clientes)*
"Ma meilleure amie est à Saint A., où on lui a fait une doublemastectomie.Elle adore les romans policiers, mais uniquement avec desdétectives femmes, et dans lesquels on ne fait aucun mal ni aux animauxni aux enfants.Oh, à la réflexion, peut être pas d' histoires decouteaux..." Jours de juin (p.128).
Voici une de ces "demandes incongrues" qui, d'après Fenno lelibraire, l'un des personnages principaux du roman de Julia Glass,"Comme la climatisation [...]semblent inhérentes à ce pays." (LesEtats-Unis).
Et vous, amies libraires ou clientes de librairie avez-vous déjàentendu ou formulé de telles demandes ? J'ai hâte de vous lire !
Evidemment, tout ceci concerne aussi les bibliothécaires et ceux qui fréquentent les biblios!
18/08/2006 | Lien permanent | Commentaires (5)
”Ma mère claqua deux bises à mon mari sans aller vomir. Elle n'avait jamais pu le sentir.”
Ajoutons pour que la citation prenne toute sa saveur que la narratrice de cette nouvelle trouve que son mari sent la mort...
Le ton est donné, ça fouraille sec, dans La preuve par neuf , neuf nouvelles où Dorine Bertrand donne libre cours à sa fantaisie parfois acide, peignant avec une jubilation sans pareille les rapports de couple, les rapports parents/enfants, quel que soit l'âge de ces derniers, de celui à peine conçu à l'ado rebelle qui troque un déguisement bcbg contre sa panoplie gothique et cultive le goût du suicide : "On voulait tous sauter par la fenêtre seulement la chambre de Tramber, c'est la cave de ses parents."
L'auteure se glisse avec délectation dans les circonvolutions du cerveau de ses personnages , nous les montrant partir en vrille , ainsi cette femme qui croit que son couple est en danger à cause d'une amie trop attirante (mais pour qui? ...)ou celle qui s'astreint à une relation sexuelle hebdomadaire avec son mari pour préserver son couple et ne pas sombrer dans les statistiques du divorce...ça grince, c'est revigorant et ça vient de sortir en poche, pourquoi s'en priver ? !
L'avis de Clarabel.
13/06/2008 | Lien permanent | Commentaires (11)
”Elle s'était demandé si quand elle n'aurait plus personne à qui parler, elle écrirait.”
Une petite annonce fonctionnant comme un aimant et commençant par ces mots: J'aimerais tant te retrouver. Une bouteille à la mère lancée par un homme abandonné à sa naissance. Un texte qui va attirer l'attention de deux femmes très différentes et nouer les destins de ces trois personnages.
L'une de ces protagonistes est Rose-Marie, une femme "naturelle" qui vit en compagnie de chiens et de chevaux, sans oublier un âne tonitruant et qui, ayant perdu l'homme aimé ,affirme : "Je crois que je me suis davantage employée à me suffire à moi même qu'à rencontrer quelqu'un."
Jouant le rôle de la briseuse de solitude,Claire va débouler dans la maison et l'existence de Rose -Marie, pleine d'énergie et de vie mais décidée à faire une pause dans sa série d'hommes- divorcés- avec- enfants, condition sine qua non car "Face à la maternité, [elle] était objecteur de conscience."
Avec jubilation et tendresse, Fanny Brucker va tricoter les destins de ces trois personnages, destins qui se nouent autour des thèmes de la maternité et de la perte. Ces pertes nécessaires qu'il nous faut apprendre à accepter comme Rose-Marie"désormais habituée à devoir rendre à la mort des êtres qu'elle avait empruntés le plus longtemps possible à la vie, comme un livre de bibliothèque qu'on aurait aimé pouvoir garder toujours."
Evitant tous les écueils de la facilité, l'auteure réussit à établir un subtil équilibre entre ses personnages qui ne se contentent pas de subir ou de regimber contre leur destin mais apprennent à l'apprivoiser petit à petit.Parfois traversé de violence, ce texte , bourré d'énergie et de tendresse jamais mièvre, nous fait souvent frémir et même si la fin , un peu télescopée à mon goût, vient un tantinet gâcher notre plaisir, je le range sans hésitation dans la catégorie des romans confortables et sensibles. Un livre bien évidemment tout hérissé de marque-pages !
Fanny Brucker, J'aimerais tant te retrouver, Jean-Claude Lattès, 333 pages.
Billet sur le premier roman de l'auteur qui se déroulait aussi au bord de l'Atlantique, Far Ouest
18/03/2009 | Lien permanent | Commentaires (16)
”Nous devons faire face à ces choses-là avec force d'âme et un doigt de sherry.”
Si comme moi vous n'avez pas aimé , malgré le battage médiatique qui avait accompagné sa sortie,Sourires de loup de Zadie Smith, sans doute aimerez vous 26A de Diana Evans.
Ce pourrait être l'histoire d'une famille anglo-nigériane en Angleterre dans les années 80 et de leurs difficultés à s'intégrer mais c'est mieux que ça. Ce pourrait être l'histoire de jumelles et de leurs relations dominante/dominée mais c'est beaucoup plus subtil que ça. C'est l'histoire d'une famille où la mère,exilée volontairement ,converse par l'esprit avec sa propre mère restée au pays. C'est l'histoire d'une communauté de soeurs, d'une communauté de femmes à la fois hypersensibles et courageuses.
Bessi et Georgia se réfugient dans le grenier de la maison familiale, ce fameux 26 A qui n'a pas d'existence légale mais une intensité extrême et où elles acceptent parfois leur soeur aînée, la ravissante Bel ou la cadette Kemy. Nous suivons leur passage de l'enfance au début de l'âge adulte et partageons leurs craintes et leurs émois amoureux. Sans oublier un passage au pays maternel, l'occasion de découvrir qu'au Nigeria il n'y a pas si longtemps "Les jumeaux étaient une malédiction"....
Diana Evans dont c'est ici le premier livre évite avec un art consommé tous les clichés inhérents à ces thèmes et nous peint avec tendresse les hauts et les bas de cette famille haute en couleurs.
Il faut accepter de se laisser perdre au début du texte par les prénoms et les liens de famille pas toujours faciles à établir et par le parti-pris des bribes de poésie qui émaillent le texte et suivre ainsi sur la pointe des pieds le chemin de ces jumelles qui au collège suscitaient "la curiosité générale éveillée par leur cosmopolitisme apparent, leur être-deux et leur bizarrerie." Se laisser saisir par l'émotion et terminer le coeur serré ... Un vrai et grand coup de coeur.
Ps: il vient de sortir chez "Pocket" avec la même couverture.
06/08/2008 | Lien permanent | Commentaires (15)
Un peu, beaucoup...à la folie C'est en poche et c'est indispensable !
"Il est vingt heures. En moins d'une journée, j'ai tué, j'ai ri, j'ai aimé. Il faudrait que je dorme. Une nuit de huit ou neuf heures. Douze serait l'idéal. C'est la difficulté quand on possède un champ de bataille en guise de cerveau et une cocotte-minute à la place du corps. Émilie Guillaumin"
"Maman est folle", chante William Sheller. Mais ici, il n'y pas qu'elle qui soit touchée par la maladie mentale, quelle que soit sa forme, identifiée, ou non.
Sans pathos, mais sans gommer la violence qui parfois l'accompagne (sans omettre celle de la société qui prône la résilience à grands cris, comme le rappelle Emilie Guillaumin dans "La fabrique des fous"), chaque texte nous dépeint de l'intérieur ou de l'extérieur, via des proches, les addictions, la bipolarité , la dépression, bref les formes variées de ce qu'on appelle familièrement "folie".
Un mot honni par la mère de la nouvelle de Violaine Huisman "La vieille folle" mais célébré par la fille de celle-ci "parce qu’il recèle l'amour insensé que j'ai voué à maman".
D'amour, il en est beaucoup question dans ces textes. Amour entre un frère et une sœur dans la nouvelle d'Olivier Adam "De passage", nouvelle aux personnages plus vrais que nature où le mari de la sœur ne peut supporter le comportement de ce beau-frère instable à qui on pardonne tout et qui révèle de manière brutale les dysfonctionnements d'une famille.
Amour inquiet d'un père pour sa fille adolescente dont le corps est celui d'une femme et l'esprit celui d'une enfant, un père qui craint les prédateurs sexuels. Et dans cette nouvelle,"la flèche noire" Emmanuelle Bayamack-Tam est à son meilleur, peignant avec subtilité tous les sentiments contradictoires qui peuvent animer les parents de cette adolescente.
Bref, on sent que les autrices et auteurs se sont vraiment impliqués dans ces textes , ce qui nous donne un recueil de très grande qualité. Un indispensable donc.
27/10/2022 | Lien permanent | Commentaires (2)
La dame à la camionnette
"Il était rare qu'on lui rende le moindre service sans avoir en même temps envie de l'étrangler."
Nul doute que cette couverture jaune primevère aurait beaucoup plu à Miss Sheperd ! Cette vieille dame marginale et excentrique repeignait inlassablement de cette couleur les différentes camionnettes dans lesquelles elle vécut successivement à la fin de sa vie.
Victime de l'embourgeoisement de son quartier, mais dotée d'un grand sens de la manipulation et d'une mauvaise foi inébranlable, Miss Sheperd finit par établir ses quartiers dans l'entrée du jardin d'Alan Bennett. Une cohabitation improbable et chaotique, entre exaspération et volonté d'aider cette vieille dame soucieuse de préserver sa dignité et ses secrets ,qui dura une vingtaine d'années.
Une synthèse pleine d'humour des notes qu'Allan Bennett a prises au fil du temps sur cette vieille dame qui faisait tache et dont un des habitants du quartier se demandait si elle était vraiment excentrique... Une peinture d'une transformation en marche qui ne tombe jamais dans l'autosatisfaction ni dans l'apitoiement. 114 pages so british !
La dame à la camionnette, Alan Bennett, traduit de l'anglais par Pierre Ménard ,Buchet-Chastel 2014.
Du même auteur: clic
06/02/2014 | Lien permanent | Commentaires (12)
La lettre à Helga
"Si la vie est quelque part, ce doit être dans les fentes."
Bjarni va passer l'été dans une chambre avec vue plongeante sur la ferme où vécut Helga, celle pour qui il brûla toute sa vie d'un amour impossible. Le vieil homme rédige alors une longue lettre à celle qui emplit chacun des moments de son existence et la rend ardente: "Tu as mis en moi une attirance qui ne fit que s'exacerber et qui pouvait se transformer en brasier à tout moment., sous le moindre prétexte. Si je voyais une bosse de terrain rebondie ou une meule bien ronde , leurs courbes se confondaient avec les tiennes, de sorte que ce n'était plus le monde extérieur que je percevais , mais toi seule dans toutes les manifestations de ce monde."
Comment ce fermier islandais, en complète osmose avec la nature, s'est-il astreint à se priver d'un bonheur à portée de la main et à gâcher délibérément, semble-t-il, sa vie ?
Dans une langue charnelle, Bergsveinn Birgisson peint le portrait de cet amour par delà les années, un amour qui s'inscrit dans un paysage âpre auquel son héros prête une attention particulière car "Habitués à l'isolement, les gens des péninsules ont les sens plus développés que les autres." Un roman captivant , qui nous emporte très loin...
La lettre à Helga, Bergsveinn Birgisson, traduit de l’islandais par Catherine Eyjolfsson, Zulma 20113, 131 pages profondément émouvantes.
22/08/2013 | Lien permanent | Commentaires (17)
Place à prendre
"Ils se croient capables de mettre un terme à soixante années de colères et de rancœur avec quelques statistiques."
Le conseiller paroissial Barry Fairbrother vient tout juste de décéder et les notables de la petite bourgade de Pagford s'emploient à ourdir des plans pour prendre sa place. L'enjeu est de taille car depuis soixante ans un litige oppose la ville à sa voisine concernant un centre de désintoxication et un ensemble de logements sociaux dont les bien pensants de Pagford ne veulent plus assumer la charge financière.
En sous-main, les manigances des adolescents, leurs propres inimitiés, leurs ressentiments envers les adultes souvent présentés comme faibles , lâches , arrogants, pervers, voire violents, vont encore compliquer l'élection en révélant des secrets pour le moins embarrassants.
Ah, elle ne fait pas dans la dentelle J. K. Rowling dénonçant les hypocrisies, la violence domestique,l'indifférence et l'égoïsme qui règnent dans cette petite ville ! J'avais peur de me perdre un peu vu la multiplicité des personnages, mais pas du tout. Certes l'ensemble manque de nuances mais on passe un bon moment avec ce bon gros roman de 680 pages.
Merci Cuné !
Sortie en poche fin septembre.
05/09/2013 | Lien permanent | Commentaires (14)
Retour à la ligne
Maman solo d'un ado d'appartement, scénariste de télévison blacklistée, Clara Tallane en est réduite à rédiger les mémoires d'un industriel qui rêve qu'on lui invente une vie.
Si mon côté petite souris qui aime découvrir les coulisses d'un métier, en plus lié à l'écriture, a été plutôt satisfait, la comédie annoncée de manière dithyrambique sur la quatrième de couv', je la cherche encore !
Je croyais trouver du pétillant et je n'ai déniché que de l'éventé. On s'attend toujours à ce que , enfin, l'action démarre, mais on reste toujours sur sa faim. Par contre, la description de la vie quotidienne de l'héroïne et ses relations avec son grand dadais de fils sont très vivantes et enlevées. Du coup, on peut terminer le roman sans déplaisir, ce qui n'est déjà pas si mal !
L'avis de Cuné (merci !) qui m'a permis de satisfaire ma curiosité.
06/06/2013 | Lien permanent | Commentaires (6)
Mon hiver à Zéroland
"Le monde était encore en ordre, la douleur sous contrôle, ma mère, le chêne séculaire en haut de la colline, moi la graine chaude de l'hiver , entourée par le plus puissant des boucliers."
à la mort de sa mère, Alessandra, en dernière année de lycée, se réfugie à Zéroland, pour "annoncer que tout avait changé dans [sa] vie , pour toujours." Le roi de ce royaume imaginaire est Gabriele, surnommé Zéro par ses camarades qui l'ostracisent et à côté duquel la jeune fille choisit de s'asseoir.Une manière de tenir à distance ses anciens amis et de tisser petit à petit des liens avec ce garçon qui à la fois l'attire et la déstabilise.
Paola Predicatori peint avec sensibilité et délicatesse le portrait de cette adolescente au comportement parfois hésitant qui parviendra à surmonter cette saison douloureuse. Une atmosphère particulièrement bien rendue de bord de mer en hiver (qui m'a parfois fait penser à la nouvelle Lullaby de Le Clézio ) et une écriture fluide ont fait mon bonheur.Aucun pathos, tous les écueils du genre ont été évités et si je craignais le pire en ouvrant ce roman, je l'ai dévoré d'une traite. Une très jolie découverte !
Mon hiver à Zéroland, paola predicatori, traduit de l'italien par Anaïs Bokobza, Les escales 2013, 303 page sà savourer au coin du feu.
16/11/2013 | Lien permanent | Commentaires (8)