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04/09/2014

Terminus Allemagne

"Nous étions obligés de regarder devant nous."

1948, Richard Kornitzer, après dix ans d'un exil forcé à Cuba, rentre en Allemagne et retrouve sa femme, Claire. Tous deux vont, pas à pas, en luttant contre une bureaucratie censée être dénazifiée, tenter de recréer leur famille (leurs enfants avaient été mis à l’abri en Grande-Bretagne), retrouver leur place dans la société et se reconstruire.ursula krechel
C'est ce parcours, basé sur une histoire vraie et nourrie d'archives, que Ursula Krechel nous raconte avec sobriété et émotion. Si elle s'intéresse (parfois un peu trop longuement) à la lutte acharnée que doit mener celui qui était à deux doigts d'être nommé juge pour retrouver son statut, elle dit aussi la rêverie, les corps qui doivent se réapprendre, les douleurs révélées à demi-mots (si Richard était considéré comme juif, Claire, elle, était aryenne mais du fait de son union a pâti elle aussi des lois nazies).
C'est tout un quotidien dans une Allemagne vaincue qui doit se rebâtir qui nous est dépeint, l'auteure opposant ainsi la ferveur avec laquelle on accueille le retour des cloches et l'indifférence quasi totale de la société pour les exilés comme Richard, la vie facile et confortable avant la guerre, la lutte  pour survivre ensuite.
Magnifique histoire d'amour aussi que Terminus Allemagne avec ses personnages ardents et discrets qui ne sont jamais décrits avec pathos. Une lecture qui serre la gorge.

Terminus Allemagne, Ursula Krechel, traduit de l’allemand par Barbara Fontaine Carnets Nord, Éditions Montparnasse 2014, 438 pages qui donnent le frisson.

Ce roman a obtenu le Prix du livre allemand (équivalent du Goncourt) en 2012.

Un coup de cœur !

 

02/09/2014

La chute des princes

"Peut être cette décadence était-elle à l'image d'un écosystème qui ne parvient pas à l'auto-suffisance; le regarder mourir est un spectacle d'une grande tristesse. Le virus mortel était si profondément ancré dans l'ADN de cette décennie qu'elle amorçait déjà sa chute à son apogée, dans sa gloire la plus resplendissante et la plus vibrante de vie."

Hâbleurs, arrogants "L'âme obscurcie par une insatiable avidité, on laissait notre moralité de plus en plus douteuse s'empêtrer, étouffer sous des couches et des couches d'objets, un amoncellement de choses, toujours plus, des costumes qui coûtaient davantage que ce que nos pères avaient déboursé pour leur première maison, des voitures d'un luxe indécent-sans parler des montagnes de PV que nous valaient nos petites pointes de vitesse quand on filait vers les paradis de Long Island East, où nous attendaient des piscines chauffées à l’année."Tels étaient les BSD. Comprendre les Big Swinging Dick, les grosses bites qui se la pètent, ceux qui décrochaient leur boulot dans les années 80 en gagnant au poker contre leur futur patron à Wall Street.robert goolrick
Le narrateur de La chute des princes était l'un d'entre eux. Il décrit de l'intérieur sa vie d'avant puis sa dégringolade, sans s'apitoyer, lucide aussi bien sur lui -même que sur les autres. Pas de rancœur, mais une acceptation progressive, étape par étape, au fil des rencontres et une reconstruction possible.
Robert Goolrick, par son écriture ample, son sens du détail et sa grande empathie réussit un pari quasi impossible: rendre sinon sympathique  du moins attachant ce trader passé de la lumière à l'ombre. Une première rencontre réussie avec cet auteur !

La chute des princes, Robert Goolrick, traduit de l'anglais (E-U) par Marie de Prémonville, Anne Carrière 2014, 231 pages piquetées de marque-pages.

 

 

01/09/2014

Je suis très sensible

"C'est dur de décider quand on a peur de se tromper de décevoir. [...] Chaque jour on fait des choix, dit Agathe...Donc chaque jour on peut se tromper . Si on se trompe chaque jour, c'est la vie entière qui est une erreur."

Le bonheur, pour Grégoire, c'est de pouvoir se coucher se bonne heure, nirvana qu'il a atteint depuis qu'il travaille. Le bonheur, c'est aussi de veiller sur Agathe, prof de philo, qu'il a séduite involontairement par sa simplicité et son sourire. Le jeune couple semble évoluer dans une petite bulle de bonheur mais la parfaite mécanique de leur univers va insensiblement se détraquer...index.jpg
Quel personnage attachant, Grégoire ! Délicat, sensible, il semble flotter au dessus du sol, ne voyant que la beauté du monde (ainsi admire-t-il les paysages d'un film et gomme la réalité de sa violence) et ne s'inquiète pas de ce que le lecteur repère immédiatement, le cœur serré.
Ce décalage, Isabelle Minière, le rend de manière subtile, ne faisant de son personnage principal ni un imbécile heureux ni un inadapté social. Pas d'étiquettes donc, mais un roman tout en nuances qui confirme ici tout le talent d’Isabelle Minière.

Du même auteur : clic, reclic !

Je suis très sensible, Isabelle Minière, Éditions Serge Safran 2014, 170 pages à part.

 Un très grand merci à Clara !

Le billet de Martine.