13/06/2025
De si remarquables créatures...en poche
"Mon nombre de neurones s'élève à une demi-million , répartis entre mes huit bras. Quelquefois, je me demande si je n'ai pas plus d'intelligence dans un seul de mes tentacules qu'un humain dans son crâne entier."
Dans son bassin, le bien trop intelligent Marcellus, pieuvre géante du Pacifique , s'ennuie. Alors, il a trouvé le moyen de régulièrement prendre la poudre d'escampette, la nuit, avant de regagner ses pénates. La seule à être au courant de ces escapades est Tova, agente d'entretien zélée, mais qui est minée par la disparition inexpliquée de son fils , trente ans auparavant. Heureusement son groupe d'amies"les Tricotoquées" l'entoure chaleureusement.
L'arrivée d'un jeune homme intelligent, mais qui a le chic pour se fourrer dans des situations lamentables ,va perturber tout ce joli petit monde et changer la donne.
Un premier roman choral mettant en scène des vieilles dames pleines d'énergie et de vitalité et ayant comme narrateur un poulpe,voilà qui pouvait s'avérer extrêmement risqué, voire ridicule. Et pourtant le pari est gagné car les personnages sont riches d'humanité et d'expérience, la narration est fluide et les péripéties entraînent le lecteur à tourner les pages sans s'en rendre compte ou presque. Vous cherchiez une lecture estivale ? La voici !
05:55 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : shelby van pelt
12/06/2025
Les Loups de Babylone...en poche
"Dans une sorte de vertige, il s'aperçut qu 'il avait plongé dans un monde dont il ne connaissait rien. Un monde où le Mal était possible, non pas le grand Mal qui fait peur aux enfants dans les contes de fées qu'on lui avait lus, enfant. Mais un petit mal ordinaire, un peu sale, veule. Un Mal de tous les jours."
Une officière de gendarmerie qui, pour échapper à une relation toxique, a demandé sa mutation à Millau. Une adolescente fragile, Cassandra, qui atterrit, par hasard dans une famille d'accueil du coin et va se lier d'amitié avec Estéban Perrault, un enfant d'une communauté écolo radicale qui vit en autonomie sur les Causses du Tarn. Tels sont les personnages dont les destinées vont se croiser par l'intermédiaire d'une disparition inquiétante : celle d'une jeune zadiste vue pour la dernière fois dans l'estive où paissent les moutons de la communauté.
Il paraît que des loups rôdent la nuit sur les causses, mais le Mal prend des formes beaucoup plus anodines. Et si les références à la mythologie et aux contes sont semées comme autant de petits cailloux, c'est peut-être pour mieux nous rappeler que mieux vaut se fier parfois à ceux qui nous paraissent les plus cabossés, les plus fragiles pour se tirer d'affaire...
La nature joue un rôle essentiel dans ce récit . Ce sont d’ailleurs certains de ses habitants qui délivreront la solution d'un des mystères de ce roman qui ne ménage pas ses effets et fait la part belle à des personnages qu'on quitte à regret.
Un roman addictif.
05:45 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : anne percin
04/06/2025
Fantastique histoire d'amour...en poche
"-attendre quelqu'un dans un McDo un dimanche soir de pluie étant une démonstration redoutable de la nullité morale du capitalisme. "
Un homme, fasciné, observe une jeune femme qui, dans un parc de Lyon, nourrit, à la main, des mésanges.
Lui, c'est Bastien, inspecteur du travail . Il ne se remet pas d'avoir été quitté et supporte difficilement de ne pouvoir être efficace que pour une toute petite partie des salariés qui le contactent.
Elle, c'est Maïa, journaliste scientifique, elle assume pleinement ses envies charnelles et son célibat.
Pour que ces deux-là soient réunis-ou pas-, il faudra une tante physicienne au CERN qui vient de faire une expérience (ratée) sur un cristal scintillateur et une compacteuse "responsable" d'un accident de travail (ou serait-ce un homicide? ).
Explorant cette fois le territoire du thriller; Sophie Divry, nous livre un roman hautement addictif qu'on se réjouit de retrouver le soir tant elle joue avec nos nerfs mais sait aussi nous émouvoir avec ces deux bras-cassés de l'amour.
Une pointe de roman social, une critique du financement privé de la recherche scientifique viennent relever le tout et des personnages secondaires bien campés finissent de parfaire ces 512 pages sans aucune longueur et parsemées d'oiseaux..... Dès la scène inaugurale, j'ai su que j'étais cueillie.Une réussite qui file sur l'étagère des indispensables.
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : sophie divry
23/05/2025
Sur l'île...en poche
"-L'île que vous avez dans la tête...Je ne pense pas qu'elle existe. "
Une île galloise (imaginaire mais inspirée de plusieurs îles au large de la Grande-Bretagne et de l'Irlande) en 1938. L'existence est rude pour les pêcheurs et leurs familles. Manod, 18 ans, aux côtés de son père et de sa plus jeune sœur, rêve d'une autre vie sur le continent. Elle est vive, intelligente et sait parler anglais.
La tranquillité insulaire est bientôt rompue par une baleine morte qui s'échoue sur le rivage et l'arrivée de deux ethnologues qui lui feront envisager, non sans cruauté, la possibilité d'un avenir loin de l'île. Au loin, des rumeurs de guerre, mais les îliens se préoccupent surtout de leur survie.
Par petites touches, nous découvrons la beauté de l'île, mais aussi et surtout la rudesse de l'existence des insulaires, rudesse que ne semblent pas vouloir admettre les ethnologues et leur vision biaisée. L'autrice laisse deviner les sentiments de son héroïne et fait confiance aux lecteurs pour combler les ellipses. Roman de formation et d'émancipation, plein de poésie et de délicatesse, Sur l'île génère une sorte de magie dont on sort un peu étourdi et mélancolique. Un grand coup de cœur.
Traduit de l'anglais par Claire Desserey.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : elizabeth o'connor
16/05/2025
Comment enterrer son mari en toute discrétion...en poche
""Pourquoi j'ai fait ça, Sal ? Bon sang, pourquoi j'ai accepté la situation ? "
Je serre sa main dans la mienne.
"Nous ne l'avons pas acceptée, ils nous l'ont imposée. Et nous ne savions pas comment y mettre un terme. ""
Sur une impulsion, Sally met fin à vingt ans d'"accidents domestiques" en balançant un grand coup de poêle à son mari-bourreau. Mort.
Plaider la légitime défense lui paraît hasardeux et Sally veut préserver ses enfants qui viennent de prendre leur indépendance.
Comment se débarrasser du cadavre en plein confinement ? Heureusement internet est là . Bientôt Sally se rend compte , au vu de la quantité de litière pour chat qu'elle a dans son caddie, que sa voisine a sans doute consulté le même site qu'elle pour les mêmes raisons.
Au final, elles sont cinq femmes, d'âges et d'origines différentes, mais avec le même problème : Comment enterrer son mari en toute discrétion ?
Avec humour, l'autrice aborde un thème dont on ne veut pas toujours entendre parler, celui des violences domestiques. Parfois un peu trop didactique, mais avec un rythme enlevé et une célébration dans les actes de la sororité, ce roman ne fait jamais l'apologie de la violence féminine: "il pose tout au plus la question de la représentation des femmes qui, après avoir subi des années de violences aggravées ne voient pas d'autre issue à leur calvaire. "
Objectif atteint et dans la bonne humeur, ce qui est appréciable.
Traduit de l’anglais par Cécile Hermellin.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : alexia casale
15/05/2025
L'irrésistible appel de la vengeance...en poche
"Ce que je sais, en revanche, c'est que l'amour au temps d'internet est rapide et superficiel, autant dans les mécanismes que dans la prose: messages brefs, directs, clairs, transparents, pas de phrases complexes et surtout pas de ponctuation. Au mieux, un retour à la ligne.Imagine du Marcel Proust à l'envers et tu auras une idée assez précise de ce qui se passe à notre époque. "
Rien ne va plus pour Amanda , quinquagénaire un peu trop portée sur le gin, ni dans sa vie privée ni dans sa vie de romancière de polars , toujours pas adaptés sur Netflix, ce qui améliorerait singulièrement son niveau de vie.
Faute de mieux, elle anime un atelier d'écriture de polar devant un public hétéroclite , tant par son origine sociale que par ses objectifs cachés ou non. Amanda leur assène des règles d'écriture et tandis que la rédaction commune d'un polar classique se met en place, d'autres intrigues évoluent en dehors de l'atelier.
Double narration donc et avec de nombreux personnages mais Rosa Mogliasso ne perd jamais son lecteur en route et le divertit de manière efficace et très plaisante.
Traduit de l’italien par Joseph Incardona.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers, romans italiens | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : rosa mogliasso
14/05/2025
Le Baiser des Crazy Mountains...en poche
- Quels autres gibiers peut-on tuer en cette saison?
- Juste les dindes. Et les mecs infidèles . Ils font toujours de jolies cibles.
Le cadavre d'une jeune femme est retrouvé coincé dans une cheminée. Meurtre ou accident ? La shérif Martha Ettinger et le détective mateur Sean Stranahan se lancent dans un enquête qui les mènera à fréquenter, de près ou de loin, le monde des rodéos et des éleveurs de chevaux.
Bienvenue dans le Montana, ses paysages fabuleux, ses rivières à truite et ses cowboys . L'auteur bat ici en brèche les clichés de la virilité car son héros ne porte pas d'arme, pratique le "no kill" quand il pêche la truite et s'adonne à la peinture. Il se fait en outre mener par le bout du nez par sa comparse de dix ans plus âgée que lui. L'intrigue est très bien ficelée, non dénuée de d'humour et de suspense et j'ai dévoré d'une traite ce roman très divertissant.
Si j'en crois la chronologie que j'ai déniché quelque part, nous avons ici le volume 4 des aventures de ce "couple" d'enquêteurs mais cela ne m'a posé aucun problème, juste donné envie de lire tous les épisodes !
Totem (Gallmeister).
Traduit par Marc Boulet.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : keith mccafferty
09/05/2025
Le vieil incendie...en poche
" J'ai de la peine à me rappeler que nous avons été indissociables. Nous avions les mêmes timidités, les mêmes craintes de la vie sociale. On ne se chamaillait pas. Notre langue de silences et de cris nous a réunies. "
A quinze ans, l'aînée, Agathe, a fui sa sœur cadette,Véra, aphasique, et son père. Elle a fait sa vie aux États-Unis où elle écrit des scénarios et des dialogues de films. Quinze ans plus tard, Agathe et Véra doivent vider la maison familiale qui sera abattue. Et pour cela , elles ont neuf jours.
Pas de disputes autour des objets ici, Agathe étant même prête à incendier le contenu de la maison dont elle ne veut rien garder. Elle apprend à redécouvrir sa cadette qui n'a plus rien de celle qu'elle se sentait obligée de protéger. Au fil des jours, des souvenirs reviennent et les secrets se révèlent.
Avec une infinie délicatesse, par petites touches, Elisa Shua Dusapin brosse le portrait de ces deux sœurs pour qui les silences sont peut être plus parlants que les mots. Car peut-on se fier aux mots ? Ils sont trompeurs, déformés, peuvent devenir le vecteur d’humiliations...Ils peuvent être difficiles à prononcer ou à écrire , même quand on en a fait son métier...
La nature joue également un rôle très important ici, ainsi que le corps des femmes, corps bridé, corps faillible ou corps retrouvé. Un texte magnifique dans sa concision parfaite et l'émotion intense qu'il dégage. Et zou, sur l'étagère des indispensables.
,L'avis d'Aifelle, moins enthousiaste : clic.
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : elisa shua dusapin
10/04/2025
Les doigts coupés...en poche
"La vérité , c'est que vous mourez de peur que l'on découvre que vous ne servez absolument à rien ! "
Oli,femme de la préhistoire, est féministe sans le savoir. Elle se rebelle contre ce qu'on appelle pas encore le patriarcat qui veut lui interdire de chasser, rationne la nourriture des femmes, les cantonne aux soins des enfants et à l'assouvissement des besoins sexuels.
Elle le paie au prix fort, comme toutes celles qui ont osé déplaire aux hommes et se retrouve avec une main mutilée. Ces mains aux doigts coupés dont a retrouvé les empreintes dans des grottes.Mais Oli n'a pas l'intention de subir...
Ayant été passablement échaudée par un roman ,qui voulait faire de la chick litt, se déroulant à la même époque, c'est avec un peu d'appréhension que j'ai ouvert ce nouvel opus d'Hannelore Cayre.
Mais pas de souci, l'autrice de La Daronne sait à merveille nous plonger dans cette période,en prenant soin d'étayer ses dires par des précisions historiques et scientifiques. Elle nous rend proches ces personnages , à la fois si éloignés et pourtant qui nous ressemblent tant. 185 pages qui se lisent d'une traite et balaient tous les clichés misogynes sur la préhistoire
06:45 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : hannelore cayre
18/03/2025
Ces femmes-là...en poche
"En réalité, les criminels qui passent entre les mailles du filet n'y parviennent pas forcément parce qu'ils sont brillants, mais bien souvent parce qu'ils sont trop bêtes ou trop fous pour s'inquiéter. Ce n'est pas la capacité intellectuelle qui compte, c'est l'indifférence. "
Si on lit la quatrième de couverture on aura peut être l'impression d’avoir déjà lu cent fois cette histoire : des prostituées sont assassinées, quasiment dans l'indifférence générale, dans un quartier pourri de Los Angeles.
Mais ici ce roman choral donne la part belle aux victimes, aux survivantes à leurs proches, à celles qui, par leur obstination, par-delà les années, parviendront à faire bouger la police, ici incarnée par une femme ostracisée elle aussi.
Ivy Pochoda nuance aussi la situation de ces femmes, ne les mettant pas toutes sous la même étiquette facile de "prostituée", ce terme équivalant pour la police à "quantité négligeable". Elle souligne leurs difficultés , leurs particularités.
Elle fait aussi de la ville un personnage à part entière et ne laisse qu'une place limitée au tueur en série qui ne brille ici ni par son intelligence , ni par sa personnalité.Bref, elle rebat les cartes et s'il faut accepter d'être un peu perdu au début, le temps que le puzzle se mettre en place, le résultat en vaut franchement le coup car la structure est millimétrée et s'agence parfaitement. Un grand coup de cœur.
Editions Globe poche 2025. Traduit de l'anglais (E-U) par Adélaïde Pralon.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : ivy pochoda