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22/06/2009

Les mots des autres

Les personnages de Clare Morrall sont souvent un brin décalés par rapport à la  réalité  (voir ici et ici). C'est aussi le cas de Jessica  dans Les mots des autres. Jessica qui mettra longtemps  avant de  mettre des mots sur son attitude par rapport aux autres .Jessica que la musique,  sa rigueur,  son aspect mathématique va d'une certaine manière sauver mais aussi perdre car c'est principalement à cause  d'elle que la jeune femme épousera Andrew  et  ira ainsi droit à la catastrophe que chacun pressentait...41l00lYC4BL._SL500_AA240_.jpg
Alternant passé et présent, Clare Morrall nous peint ici le portrait tout en finesse d'une femme qui  ressent un besoin vital  d'espace physique et émotionnel  mais parvient néanmoins , tant bien que mal, à s'insérer  dans la société: "Il y a  des années , le doute n'aurait pas été possible, je tenais toujours ma  parole,  quelles  que fussent les difficultés,  car il ne me venait même  pas  à l'idée de faire autrement. mais j'ai peu à peu compris  que le monde  ne fonctionne pas  comme je l'avais cru. les  gens font les choses  à moitié,  dérivent,  refusent  d'entrer dans le moule des  autres. cela m'intéresse.  Je me  suis efforcée  de  cultiver l'art d'être imprévisible."
Qu'elle  soit en butte aux agissements d'un mari  dépressif et harceleur ou  à l'attitude bizarre de son fils, Jessica s'est longtemps efforcée d'absorber leurs émotions , "je pouvais les leur  restituer, raffinée et agrandies, cirées et astiquées. S'ils étaient heureux, je l'étais aussi." mais  vingt-cinq  ans après son divorce quand Andrew réapparaît dans  sa  vie, Jessica  n'entend plus agir ainsi..."Faire semblant: cela  permet de  contourner les  obstacles  sans les  toucher et donne le  recul  nécessaire pour voir que  les gens ont d'autres facettes, pas  seulement l'attitude abrasive et provocatrice qu'on a du mal à supporter.  Il faut voir les  gens sous un nouveau jour, remarquer où tombe la lumière,  découvrir  quels angles ont été usés,  et adoucis par le temps. Sinon,  on se laisse  à  ce point obnubiler par les aspects négatifs qu'on ne voit plus rien d'autre."
Clare Morrall ne juge jamais ses personnages mais éprouve au contraire beaucoup d'empathie pour eux, son style  lumineux et si personnel éclaire  d'une manière originale  leur  évolution (j'ai beaucoup aimé par exemple le point de vue de  la famille de  Jessica  sur l'enfance  de celle-ci, point de vue dont  elle ne prendra  connaissance  que bien plus tard), évolution qui suivra une courbe inverse à celle de la maison de  famille, véritable personnage à elle toute seule.
Si vous aimez les  vieilles  demeures anglaises pleine de charme, l'excentricité si typiquement british,  l'humour teinté de  désenchantement, ce livre est pour vous !

Les mots des autres, Clare Morrall,  traduit de l'anglais par Françoise du Sorbier,  Fayard, 405 pages envoûtantes.

L'avis de Clarabel.