01/02/2016
Une famille normale
"Damien se fiche de la décoration, mais s'il avait un avis, bien évidemment, je l'écouterais .Je ne le suivrais sûrement pas (il ne sait pas quelles couleurs se marient bien ensemble), mais je l'écouterais"*
La vie de Cassiopée , Damien et de leurs enfants, sous des dehors de normalité aseptisée, est devenue un jeu de faux-semblants,révélés au lecteur par le biais de la narration alternée. La mort de la mère de Cassiopée, dont apparemment elle n'était pas proche va venir dérégler cette mécanique bien huilée.
Chacun des membres de la famille prend tour à tour la parole et révèle ses failles, ses espoirs.
Commencé avec un ton un peu grinçant (et réjouissant), le récit, bien mené par ailleurs, perd un peu en intensité en perdant toute aspérité.Les personnages, par ailleurs attachants, auraient gagné à avoir plus d'ancrage dans leur aspect professionnel (ils sont un peu désincarnés à mon goût) mais une voix se fait entendre dans ce premier roman et c 'est déjà beaucoup.
Une famille normale, Garance Meillon, fayard 2016.
*citation qui prend tout son sel quand juste auparavant Cassiopée, la narratrice a fustigé le fait que son propre père n'a jamais eu son mot à dire.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : garance meillon, premier roman
22/10/2009
La relieuse du gué
Mathilde a abandonné une carrière diplomatique pour mettre ses pas dans ceux de son grand-père ,récemment disparu ,en devenant relieuse. Installée dans une ruelle aux habitants hauts en couleurs, elle reçoit un jour en dépôt un livre particulier qui va l'entraîner à la recherche d'une famille et d'un temple de culte gallo-romain.
Anne Delaflotte Mehdevi dont c'est ici le premier roman, nous entraîne dans un univers plein de charme et de lenteur sans que jamais on ne s'ennuie. La description du quotidien de son héroîne, pleine de saveur, est rehaussée par l'utilisation que Mathilde fait de ses différents exemplaires de Cyrano de Bergerac. Ainsi pour elle:
"On peut lire Bergerac de Rostand comme on le fait d'une carte postale d'été, ou le dire haut, juste pour le rythme facile de la rime. On peut le lire pour rire, pour s'émouvoir, pour s'attarder sur le panache de son héros. Pour bien dormir, on peut prendre le soir un dialogue au hasard, et faire une toilette de chat de l'esprit, juste avant de sombrer. On peut le prendre au petit-déjeuner, pour se donner du coeur et une âme claire, juste une lampée avec son café."
Les dialogues sont parfois maladroits, l'intrigue cousue de fil blanc, on a parfois envie de secouer l'héroïne en lui disant d'ouvrir les yeux et de se secouer un peu mais la magie de La relieuse du gué opère et on savoure pleinement cet univers douillet dans lequel on se love avec bonheur.
Merci à Aifelle pour le prêt.
les avis de Cuné, Cathe, Erzébeth, Clarabel
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (16) | Tags : anne delaflotte mehdevi, reliure, premier roman
18/08/2009
La peine du menuisier
"Le Menuisier ne parlait pas."
Le Menuisier, nous l'apprendrons au fur et à mesure du récit, c'est le père de la narratrice, cette enfant née tardivement au sein d'un foyer où l'amour circule mais pas forcément les mots. Nous sommes dans les années cinquante, en Bretagne , dans une famille modeste , où la mort est toujours présente , que ce soit par les photos des disparus ,la proximité du cimetière ou les décès que l'on ne cache pas aux enfants.
La narratrice, devenue adulte et ayant réussi à devenir professeur, ce qui la place un peu en porte -à- faux par rapport à ses origines, ressent toujours un profond malaise par rapport à celui qu'elle ne désigne que par sa fonction, comme si elle voulait le tenir à distance. Pourquoi ?
Elle sent confusément qu'elle appartient à un lieu "où je n'ai pas vécu mais dont l'histoire circule ne moi, dans ce corps exhibé, élastique et souple, insolent de jeunesse et de fraîcheur." mais également qu'un secret pèse sur la famille paternelle, empesant leurs relations. Il lui faudra beaucoup de temps pour remonter au jour cette hstoire familale dont elle est prisonnière car "Nous ne sommes pas seulement les héritiers d'un patrimoine génétique, mais d'un nombre infini d'émotions transmises à notre insu dans une absence de mots, et plus fortes que les mots."
En phrases sobres, comme gravées dans le granite breton, Marie Le Gall nous emprisonne dans cette atmosphère étrange et envoûtante. On pense parfois au roman d'Annie Ernaux, La place, pour ce qui est du décalage entre la modestie des origines et l'ascension sociale de la jeune femme mais Marie Le Gall privilégie davantage cette recherche obstinée et patiente du secret familial afin d ecomprendre La peine du Menuisier., qui est aussi la sienne.Un premier roman lent et fascinant. Une langue superbe.
La peine du menuisier, Marie Le Gall, editions Phébus,282 pages denses et graves.
Sortie le 20 août .
Merci Cuné !
Le très joli billet que Cuné lui a consacré.
06:05 Publié dans Rentrée 2009 | Lien permanent | Commentaires (17) | Tags : marie le gall, premier roman, bretagne, relation père fille, secret familial