01/12/2014
L'Amérique des écrivains
"Il était chauffeur de taxi et agent littéraire ! C'était un combattant, il pourchassait les voyous dans Central Park. Un jour, il a été agressé par deux types armés d'un calibre 45 et il les a poursuivis ! c'est mon agent ! c'est cet homme qui a continué de soumettre Le Boogie des rêves perdus pendant neuf ans. J'ai eu cent onze refus." James Lee Burke
Un road trip d'un an en camping car avec aux manettes, Pauline Guéna, romancière, Guillaume Binet , photographe ,sans oublier leurs quatre enfants , pour rencontrer vingt écrivains et six écrivaines canadiens ou américains. "A la recherche de l'esprit des lieux".
Un voyage de formation aussi, dont les à côtés (interruptions des proches, inscription dans le quotidien...) apparaissent en filigrane au fil des longs entretiens, très souvent passionnants. On sent que les écrivains apprécient d'avoir en face d'eux quelqu’un du métier,qui comprend les difficultés inhérentes à l'acte d'écrire, même si être écrivain en France et aux États-Unis n'a pas grand chose à voir.
Jane Smiley s'étonne du petit nombre de romancières rencontrées, ce à quoi l’auteure rétorque qu'elles ont été nombreuses à refuser. Situation inverse pour Paul Auster qui a décliné l’invitation tandis que son épouse, Siri Hustvedt acceptait. Répondant à une question sur les liens entre maternité et création, cette dernière a d'ailleurs affirmé : "Lorsque ma fille est partie à l’université, une chambre émotionnelle s'est ouverte en moi. il n'y a aucun doute là-dessus. Il ne s'agit pas d'heures libres supplémentaires, mais d'un espace émotionnel. Pour être juste, je pense que c'est aussi vrai pour les pères , du moins ceux qui se sont beaucoup impliqués avec leurs enfants." De son côté, Laura Kasischke, romancière, poétesse, mère de famille et enseignante à l'université, classe ainsi ses priorités : " ma famille, mon travail*, mes poules, et enfin l'écriture"...
à la première lecture, j'ai privilégié les entretiens, en commençant par les écrivaines (on ne se refait pas), enchaînant avec les auteurs que je connaissais déjà et terminant avec ceux que j'ai découverts et, à chaque fois, j'ai appris plein d'infos qui m'ont évidemment envie donné de (re) lire , aidée en cela par une bibliographie très complète.
Il me reste à découvrir maintenant l'aspect iconographique de l'ouvrage en notant au passage que les fans de David Vann seront un peu déçus: si l'auteur a consacré un long entretien (diatribe vindicative et enflammée par moments), il n'a fourni qu'une photo d'enfance ,mais très révélatrice par ailleurs. un ouvrage enthousiasmant qui m'a fait retrouver le chemin de la lecture !
Un pavé coûtant 35 euros mais qui les vaut bien, à indiquer au Père Noël ?
06:02 Publié dans Document, Je l'ai lu ! | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : pauline guéna, guillaume binet écrivains américains
L'Amérique des écrivains /sommaire
Gilles Archambault Siri Hustvedt
Margaret Atwood Laura Kasischke
Russell Banks William Kennedy
John Biguenet Dennis Lehanne
Joseph Boyden Thomas Mc Guane
T.C. Boyle Dinaw Mengestu
James Lee Burke George Pelecanos
Craig Davidson Ron Rash
Patrick deWitt Joanna Scott
Jennifer Egan Jane Smiley
Richard Ford David Vann
James Frey John Edgar Wideman
Ernest J. Gaines Martin Winckler (installé au Québec depuis plusieurs années )
Sans compter tous les auteurs cités par les écrivains, le plus imagé étant Winckler qui n'hésite pas à affirmer : "Vous avec lu Le temps n'est rien ? Il faut le lire, c'est un merveilleux roman, je voudrais tuer cette femme, Audrey Niffenneger de l'avoir écrit. c'est l'histoire d'un voyageur involontaire."
05:55 Publié dans Document, Je l'ai lu ! | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : pauline guéna
30/11/2014
Remède à la mélancolie
Tous les dimanches sur France Inter à 10h et aujourd'hui cette émission accueille Pierre Rabhi.
Pierre Rabhi : "Cette douleur en l'accueillant change de nature"
09:41 Publié dans à vos oreilles!, Bric à Brac | Lien permanent | Commentaires (4)
26/11/2014
Les vieux fourneaux / 1 Ceux qui restent
"Et tu peux me dire pourquoi tu embarques du pain à une crémation ? Tu veux te faire des tartines grillées ? "
Le décès d'une vieille amie réunit des hommes âgés qui s'étaient perdus de vue. Hauts en couleurs, ces personnages très bien croqués , n'ont rien perdu de l'allant et de la verve de leur jeunesse. Si les corps ont vieilli, les convictions et les sentiments sont resté aussi vifs et la révélation d'un secret va jeter sur les routes nos papys pour régler quelques comptes...
L'odyssée de ces "vieux fourneaux" est à la fois pleine d'humour, de charme et de tendresse, sans pour autant tomber dans la mièvrerie. Les convictions politiques sont restées les mêmes, mais empruntent juste des voies différentes pour s'exprimer. Nos papys aiment jouer avec les mots et leurs expressions imagées, parfois prises au pied de la lettre, témoignent de leur esprit vif et acéré. un départ sur els chapeaux de roues ! j'attends avec impatienc ele deuxième volume à la médiathèque !
Un concert de louanges un peu partout ! Babelio.
06:00 Publié dans BD | Lien permanent | Commentaires (10)
22/11/2014
13 à table !
"Mais existe-t-il des repas anodins ? Ceux qui ont faim savent que non."(Gilles Legardinier)
Un livre acheté = 3 repas distribués par les Restaurants du cœur et en plus l'occasion ,pour moi, de découvrir certains auteurs populaires que j'avais jamais lus . Donc, j'ai craqué.
Une entrée classique,un peu démodée, lourde comme une bouchée à la reine: le texte de Françoise Bourdin.
Une nouvelle fantastique, flirtant avec le gore, façon Hannibal Lecter mal digéré: Maxime Chattam.
Un texte prenant comme lointain point de départ une vieille blague fade et l'assaisonnant façon "vengeance des nulles": Alexandra Lapierre.
"Un petit morceau de pain" d'Agnès Ledig, pour patienter en attendant la suite: trop sucré et formaté.
Une agréable surprise: Gilles Legardinier qui s'adresse directement au lecteur et le touche au cœur avec deux histoires autobiographiques, un peu mal fagotées, mais sensibles et touchantes.
"Une initiative" plutôt insipide: Pierre Lemaître.Je passe allègrement pour cause d'intolérance avérée sur les textes de Marc Lévy et Guillaume Musso.
Quant à Jean-Marie Périer il rate son mélange salé-sucré avec sa resucée de "Jules et Jim".Il faut attendre (et c'est longuet) Tatiana De Rosnay et son Parfait plein de bienveillance et de malice pour retrouver un peu d'appétit; ce qui permettra de faire passer le texte d'Eric-Emmanuel Schmitt, un peu inabouti à mon goût.
Bernard Werber se risque à l'exercice du narrateur animal et s'en tire par une pirouette qui peut faire passer la sauce. Ma foi, pourquoi pas.
Il faut attendre Franck Thilliez pour savourer un texte à la fois original, évoquant les ours, les saumons et un couple particulièrement touchant. Amour ,angoisse, un cocktail parfaitement réussi !
le billet d’Hélène .
Le billet, plus enthousiaste de Séverine, qui a fait de cet ouvrage une LC ! :)
L'avis de Mamzelle Melo !
10:11 Publié dans Nouvelles françaises | Lien permanent | Commentaires (17) | Tags : restaurants du coeur
18/11/2014
Une éducation catholique
"Je ne pouvais pas aimer un homme qui ne communiait pas avec moi dans la parole et les larmes."
Élevée dans une famille où le père est catholique pratiquant et la mère juive , baptisée en 1943 pour échapper à un sort funeste, la narratrice, Marie se détourne "classiquement "de la religion catholique à l'adolescence.Par le biais de son parrain, elle tourne alors vers "l'imaginaire et l'écrit" et va, au fil du temps donner d'autres identités à ce qu’elle appelle Dieu: "On ne pouvait vivre, et aimer, qu'en étant débarrassé de la peur -la peur d'être seul, la peur de vivre, la peur de faire du mal à l'autre, la culpabilité. cette peur que j'appelle Dieu."
Roman d'apprentissage, Une éducation catholique convoque les figures habituelles d'un parcours de vie, de la meilleure amie à la valse-hésitation entre deux amoureux sans vraiment convaincre . Tant d’auto dépréciation de la part de la narratrice en devient quelque peu suspect à la fin et je n'ai pas retiré grand chose de ce roman que j'ai lu avec aisance mais avec l'impression désagréable d'attendre , en vain, que "ça commence vraiment".
Merci, Clara !
06:00 Publié dans Rentrée 2014, romans français | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : catherine cusset
17/11/2014
Chemins de croix
"J'étais tellement soulagé de le savoir vivant que 'javais envie de le tuer. Peut-on trouver plus irlandais que ça ? "
Jack Taylor ne boit plus, avale encore quelques pilules au passage mais juste pour se sentir "détendu, un concept qui [lui ] était aussi étranger que la gentillesse".
Taraudé par la culpabilité, il veille au chevet de son fils spirituel , entre la vie et la mort. Trop de deuils ont assombri l'ancien garda et pour le détourner de ses démons, son amie Ridge lui demande d'enquêter sur un crime horrible commis à Galway : la crucifixion d'une jeune homme.
Même si les ans se font de plus en plus sentir sur le détective déjà passablement amoché, son auteur est en pleine forme et nous régale d'une festival de remarques acerbes et incisives. Jack déambule dans une ville de moins en moins irlandaise et de plus en plus touchée par la mondialisation, vitupère contre les prêtres actuels , conduit son enquête à son rythme (très lent d'abord, accéléré ensuite) et à sa sa manière si particulière.
Il nous régale d'emblée avec une liste haute en couleurs : "Beaucoup de crimes figurent dans le lexique des actes étranges qui, au Royaume Uni, ne mériteraient même pas une mention, mais qui , ici, frôlent l'impardonnable",liste qui débute par "Le silence ou la réserve. Il faut être capable de parler de tout et de rien, de préférence sans désemparer. Que le discours se tienne n'entre même pas en ligne de compte."
Sa bibliothèque s'épure et, par la force des choses, il nous gratifie d'une seule référence d'auteur : Craig Mc Donald, dont il affirme " Il a écrit sur la souffrance un roman à vous arracher les dents de la mâchoire" mais sans le titre du livre en question ! Même Pierre Bondil, le traducteur, pourtant prodigue en notes éclairantes n'a pu assouvir la frustration du lecteur. Mais bon, pas grave, l'écriture est splendide et le livre se dévore à belles dents ! Un régal ! Ken Bruen parvient toujours à me remettre en selle quand tout me tombe des mains !
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : ken bruen
Jack Taylor, la série, récapitulatif
05:55 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : ken bruen
16/11/2014
Poésie du gérondif
"Comment s'en sort-on dans les langues qui ne distinguent pas ""être " et "avoir" ? Sans aucun problème dans l'immense majorité des cas." (p. 63)
"Linguistique" était autrefois synonyme pour moi de "pensum". Une matière aride, que mes profs de fac nous avaient fait considérer comme figée et centrée sur la langue française.
Fi de ces préjugés ! Jean-Pierre Minaudier, qui n'est pas linguiste , mais "s'est découvert sur le tard un amour pour les langues rares" et "Depuis [...] enseigne le basque et l'estonien (qu'il traduit aussi, on lui doit notamment la version française de L'homme qui savait la langue des serpents, d'Andrus Kivirähk)" (merci la 4ème de couv' !)nous fait partager son bel enthousiasme pour les idiosyncrasies d'une multitude d'idiomes (plus de 800 !), proposant tous une vison différente de l'univers.
Ainsi il existe,des langues sans adjectifs, d'autres où l'on compte en base 20 (se fondant sur les deux mains et les deux pieds), d'autres idiomes encore ne distinguent pas de temps verbaux (à commencer par les langues chinoises) tandis que "certaines langues d'Amazonie [...]possèdent la catégorie du passé non seulement pour les verbes, mais aussi pour les noms."
Jean -Pierre Minaudier est aussi un excellent pédagogue ,expliquant clairement des notions qui nous sont totalement étrangères. Ainsi "les impressifs (ou idéophones)"qui "sont le plus souvent intégrés à une phrase normale, comme des espèces adverbes -un peu comme si l'on pouvait dire : " Il sauta hop dans le ruisseau", sans faire de pause avant ni après le "hop". Dans les langues où ils existent, ils contribuent à colorer l'expression et à nuancer le sens, et leur saveur concrète, charnelle, est parfaitement intraduisible". Voilà qui est dit !
Toutes nos certitudes sont ainsi balayées , ainsi que notre ethnocentrisme , car il ne s'agit pas seulement de collectionner et d'aligner les bizarreries ,mais bel et bien de remettre en question tout ce qui nous paraît évident et acquis.
L'auteur en profite, au passage, pour tacler gentiment les journalistes et les linguistes , mais toujours avec beaucoup d'humour.
Un livre enthousiaste qui fait aussi la part belle -et j'adore ça -aux notes de bas de pages, particulièrement savoureuses,(clic) ,nous rend moins bêtes et réconcilie avec la linguistique. Que demander de mieux ?
Et zou, sur l'étagère des indispensables !
à recommander aux curieux et aux amoureux des mots !
Poésie du gérondif, Jean-Pierre Minaudier, le tripode printemps 2014, 157 pages piquetées de marque-pages !
06:00 Publié dans l'amour des mots, l'étagère des indispensables | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : jean-pierre minaudier
14/11/2014
Le livre du roi...en poche
Un jeune étudiant islandais parti étudier à Copenhague va se retrouver embarqué dans une chasse au trésor d'un genre particulier. En effet, dans cette Europe d'après guerre, il va aider un professeur aussi savant qu'atrabilaire à mettre la main sur Le livre du roi, "la plus ancienne source de la mythologie et de la poésie nordique ancienne." Par la même occasion , il s'agit aussi de réaffirmer la singularité de la culture islandaise, l'Islande étant à cette époque sous la coupe du Danemark.
à la croisée du Nom de la rose et d'Indiana Jones, Le livre du roi est un roman d'aventures et de formation qui tient ses promesses, ni plus ni moins. L'auteur s'offre même le petit plaisir d'y mettre en scène son propre père, journaliste à l'époque, ce dont nous informe une note en bas de page. Un livre qui plaira aux amoureux des livres car Arnaldur Indridason y affirme la nécessité d'apprécier la valeur des manuscrits anciens.
Un cran en dessous de notre policier préféré mais une lecture confortable car on y trouve tout ce à quoi on s'attend dans ce type d'ouvrage.
06:02 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : arnaldur indridasson