03/03/2015
Six fourmis blanches
"Quelle horrible impression , celle de nos propres limites: jamais dans la vie ordinaire, nous n’avons besoin d'aller aux frontières de ce dont nous sommes capables, à l'extrême de nos forces. Ce sentiment d'arriver au bout nous est étranger."
"Ignorants et dilettantes, et bruyants et bavards". Tels sont les membres du petit groupe de français partis faire une course en montagne sous la férule de de Vigan, un guide expérimenté. Très vite , la montagne va révéler sa nature inquiétante et l'élimination progressive des membres de l’expédition, sous -entendue dans le titre, va pouvoir commencer.
Alternant les récits, en montage alterné, de Lou, une jeune femme inexpérimentée et d'un sacrificateur de chèvres, Six fourmis blanches tient son lecteur en haleine jusqu'aux trois quarts du récit, jusqu'au twist un peu fanfaronnant (je vous ai bien eus !).
Le dernier quart se traine un peu et, faute de personnages bien croqués et de décor vraiment planté, l'action se situe en Albanie mais aurait pu se situer dans un no man land sans aucun problème, l'ennui guette le lecteur. Une lecture en demi-teintes donc.
Merci, Clara !
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : sandrine collette
02/03/2015
Quand vient le temps d'aimer
"La beauté est un état éternellement hors de portée."
Vacances d’hiver à Erdenfield, petit village du Sud de l'Angleterre. Les étudiants, harassés, rentrent dans leurs foyers, les adultes règlent des problèmes domestiques mais tous,quelque soit leur âge, se débattent avec des problèmes amoureux.
Qu'ils soient tiraillés par le démon de midi, découvrent l'infidélité d'un conjoint , souhaitent se venger, tombent amoureux de la mauvaise personne ou tentent de briser une solitude qui leur pèsent, tous les personnages sont envisagés avec la même bienveillance par l'auteur.
Les portraits sont bien campés, du chirurgien esthétique au scénariste en butte aux demandes les plus absurdes en passant par la femme au foyer qui souhaite renouer avec une vieille flamme (ce qui nous vaut une scène de sexe hilarante dans un hôtel !) jusqu'au vieil artiste atrabilaire dénonçant le vide de l'art conceptuel.
On retrouve avec bonheur les personnages de L'intensité secrète de la vie quotidienne (clic) (qu'il n'est pas nécessaire d'avoir lu), la capacité de l'auteur à inscrire ses personnages dans un quotidien criant de vérité, son humour parfois vachard (les hommes ne sont pas épargnés ! : "-[...] que suis-je censée offrir à Tom pour Noël ? Une ceinture de chasteté ?
- Je ne crois pas que cela existe pour les hommes.
-Si je lui achetais une gaine ? Ce ne serait pas mal pour lui tenir le ventre. Sans compter que j'aimerais le voir porter une gaine avec une tr... bien raide.")
et on passe un excellent moment dans ce roman 100 % british !
Quand vient le temps d'aimer, (All the Hopefull Lovers), William Nicholson, traduit de l'anglais par Anne Hervouët, Éditions de Fallois 2015, 333 pages délicieuses.
06:04 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : william nicholson
27/02/2015
La lettre à Helga...en poche
"Si la vie est quelque part, ce doit être dans les fentes."
Bjarni va passer l'été dans une chambre avec vue plongeante sur la ferme où vécut Helga, celle pour qui il brûla toute sa vie d'un amour impossible. Le vieil homme rédige alors une longue lettre à celle qui emplit chacun des moments de son existence et la rend ardente: "Tu as mis en moi une attirance qui ne fit que s'exacerber et qui pouvait se transformer en brasier à tout moment., sous le moindre prétexte. Si je voyais une bosse de terrain rebondie ou une meule bien ronde , leurs courbes se confondaient avec les tiennes, de sorte que ce n'était plus le monde extérieur que je percevais , mais toi seule dans toutes les manifestations de ce monde."
Comment ce fermier islandais, en complète osmose avec la nature, s'est-il astreint à se priver d'un bonheur à portée de la main et à gâcher délibérément, semble-t-il, sa vie ?
Dans une langue charnelle, Bergsveinn Birgisson peint le portrait de cet amour par delà les années, un amour qui s'inscrit dans un paysage âpre auquel son héros prête une attention particulière car "Habitués à l'isolement, les gens des péninsules ont les sens plus développés que les autres." Un roman captivant , qui nous emporte très loin...
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine | Lien permanent | Commentaires (6)
25/02/2015
Road tripes...en poche
"J'étais en train de comprendre ce grand sentiment de liberté qui suintait des road movies américains."
Parce qu'il n'a plus grand chose à perdre, parce qu'il a ,de son propre aveu, toujours été incapable de faire des choix, le narrateur va embarquer dans la voiture (volée) de Carell qu'il connaît à peine. Commence alors une folle équipée entre Bordeaux et Montélimar. 4 000 kilomètres durant lesquels nos deux paumés se mettront à dos un passionné de Renault 16, une secte annonçant la fin du monde, froisseront de la tôle (une Clio, une C4 , entre autres), soigneront des blessés de manière bien peu orthodoxe, bref accumuleront les conneries avec un bel enthousiasme !
Sébastien Gendron crée ici un duo improbable comme on les aime, s'empare de tous les ingrédients du road trip, les secoue , les épice, alternant l'outrance et la nuance ,ne se départissant jamais d'un humour féroce et jubilatoire. Il ne fait pas dans la dentelle mais on s'en fiche car on ne lâche pas ces deux loustics , l'un fan de Johnny Hallyday, l'autre féru de musique classique, de cinéma et de littérature ( un grand écart annoncé dès les citations mises en exergue , à ne louper sous aucun prétexte ). De quoi glaner entre deux braquages foireux quelques références
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine | Lien permanent | Commentaires (4)
23/02/2015
Chers voisins...en poche
Ils étaient réunis sous le lustre central, les hommes discutant football et voitures pendant que les femmes bavardaient sur ce ton faussement intimes des gens qui ne s’aiment pas beaucoup et sont néanmoins obligés de se fréquenter."
Pepys Road, une rue de Londres d'un quartier autrefois peu élégant a maintenant grimpé dans l'échelle socio-économique. En décembre 2007, y résident aussi bien Petunia Howe, qui y a toujours vécu que des familles de traders où les enfants sont "gâtés mais négligés" ou encore une famille pakistanaise dure au labeur.. L'argent semble couler à flots dans Londres mais pas forcément pour tout le monde. Et dans Pepys Road ne font que passer des réfugiés apatrides, coincés dans d'inextricables situations administratives, des ouvriers du bâtiment polonais ou encore un petit génie du football sénégalais. Bref, un microcosme représentatif de la société londonienne dont la tranquillité va être mise à mal par de mystérieux courriers avertissant: "Nous voulons ce que vous avez"...
John Lanchester dans ce bon gros roman de 567 pages où alternent les points de vue nous dépeint avec acuité une société sur le point de basculer. Des personnages attachants, une écriture sans fioritures mais efficace font qu'on ne s'ennuie pas une minute dans ce roman qui tient ses promesses, même s'il lui manque une pointe d'originalité. Idéal pour un dimanche d'hiver
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : john lanchester
20/02/2015
Blog en pause...
Il y aura quelques billets (livres de poche) mais je fais une pause internet , donc vos comm' attendront mon retour pour être publiés ! :) !
à bientôt !
19:04 Publié dans Bric à Brac | Lien permanent | Commentaires (10)
La femme à la clé...en poche
"Je m'étais fait une idée trop simpliste de ce travail: j'entre, nous parlons, je lis à haute voix , nous parlons encore un peu après, je dis bonne nuit, porte ouverte, porte fermée ou entrebâillée , et je pars."
Veuve depuis peu, Nettie, pour des raisons économiques, propose un service à la personne plutôt novateur : faire la lecture à des personnes avant leur coucher.Rien d'ambigu car elle insiste sur son apparence maternelle. Mais tous ceux qui lui confient leurs clés vont livrer aussi un peu voire beaucoup de leur intimité et Nettie sera peut être dépassée par les situations.
Il y a une dizaine d'années ,Raymond Jean nous proposait La lectrice*, roman où l'accent était davantage mis sur le trouble qui s'établissait entre les personnages au fil des lectures. Sans doute ce souvenir a-t-il nui à ma lecture de Vonne van der Meer. J'ai trouvé son personnage un peu trop guindé et les passages de textes cités un peu trop longs. L'émotion qui pourrait naître au vu des situations évoquées reste brimée par l'aspect trop en retrait de Nettie. Un bon moment de lecture néanmoins..
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine | Lien permanent | Commentaires (4)
19/02/2015
J'aimerais tellement que tu sois là ...en poche
"Devenir le propriétaire de l'exact opposé de cette ferme profondément enracinée."
Jake a troqué la ferme familiale du Devon contre un parc de caravanes sur l'île de Wight, qu'il administre de manière plutôt débonnaire. L'instigatrice de ce changement radical ? Ellie, à qui il était promis depuis l'enfance.
Pourtant, cette vie en apparence plus douce semble avoir viré à l'aigre : Jake se retrouve seul avec un fusil à attendre l'hypothétique retour de sa femme.
Le roman de Graham Swift possède le rythme placide des vaches et son personnage principal en a l'apparence rustique. Mais s'il mâche et remâche-comme les bovidés- les événements passés, c'est pour les analyser avec une finesse quasi chirurgicale. Les relations familiales, les non-dits, les jalousies tues mais vivaces, tout ceci constitue la matière de cette rumination qu'il faut prendre le temps de savourer.
Un roman qui analyse aussi l'évolution des campagnes anglaises et la disparition de tout un pan de sa population. très subtil et prenant.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : graham swift
18/02/2015
7 jours...en poche
"Tellement plus facile quand la cible ne bougeait pas.ça ne venait pas du fusil.ça venait de lui."
Une avocate d'affaires assassinée. Un tueur qui menace d'abattre un policer par jour tant que le meurtrier n'aura pas été arrêté. Et qui commence à tenir sa promesse.
Benny Griessel , héros de 13 heures et de Le pic du diable, tout en se débattant avec des problèmes personnels et une piètre estime de soi va devoir faire face à la situation.
Roman classique, efficace et c'est tout. Je n'ai aps retrouvé la tension des précédents épisodes etc 'est un peu dommage. un très beau personnage de femme alcoolique néanmoins, traité sans pathos ni voyeurisme: "Vous devez savoir, Alexa va essayer de vous manipuler.Elle va se mettre en colère, elle va pleurer, elle va tenter de vous amadouer, elle va user de tout son charme. Elle aura des symptômes de manque cet après-midi, elle va vous crier dessus, elle va essayer de vous faire du chantage émotionnel. (Il vit les yeux d'Alexa qui lançaient des éclairs) Ce n'est pas Alexa, c'est l'alcool. Vous devez comprendre ça ."
06:02 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : deon meyer
17/02/2015
L'isolée suivi de l'isolement
"J'ai pris en haine le ciel bleu, le beau temps. Je préfère la pluie et ses grilles liquides. C'est pour ça que j'ai commencé à écrire."
Séduite par l'écriture de Gwenaëlle Aubry (clic), j'ai décidé de poursuivre ma découverte de cette auteure par ces deux courts textes, inspirés par un fait-divers très violent, associant deux noms :Rey-Maupin.
Gwenaëlle Aubry s’attache dans un premier temps à retracer l'itinéraire d'une très jeune femme que rien ne prédispose à dériver de l'aide aux sans -papiers à une violence aux accents anarchistes.
C'est la rencontre de Pierre qui entraînera Margot dans cette volonté de vivre "une vie aiguisée" mais la jeune femme comprendra trop tard les accents mortifères des "passions tristes " qu'ils partagent.
Le second texte est lui centré sur l'enfermement et l'isolement absolu auquel aspire Margot. Le silence auquel elle s astreint , comme espace de liberté ultime, l’effacement dont elle rêve , les hallucinations qu'elle entretient à dessein pour conserver un espace de liberté, sont ici rendus de manière fine et puissante.
On oublie très vite l'affaire de départ pour mieux se laisser séduire par l'écriture lumineuse de Gwenaëlle Aubry, qui nous fait ressentir de l'intérieur, avec intensité, ce qu'est le monde carcéral bien mieux que n'importe quel documentaire sur le sujet ( je pense ici à un essai non transformé de lecture de Orange is the new black). à découvrir absolument !227 pages piquetées de marque-pages !
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : gwenaëlle aubry