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03/04/2015

Eux...en poche

"D'où viens-tu à la fin ? Pourquoi tiens-tu tellement à faire de nous des assassins ? La famille est un clan. La quitter est puni par une loi, celle du sang."

Être enceinte  c'est s'inscrire dans une lignée, faire bouger d'un cran tous les membres de la famille. C'est aussi réveiller ici les voix des héréditaires qui envahissent l'espace sonore de la narratrice. Par leurs commentaires, tantôt ils attisent ses craintes, tantôt se soucient d'elle et de l'enfant à venir, houspillent, tancent, bref incarnent les remous magmatiques de l'inconscient familial.
En effet, "Chez mes parents, une naissance est toujours considérée comme le présage d'un décès." Lourd héritage qui explique sans doute que la mère de la narratrice se montre tout sauf encourageante...claire castillon
 à cela s'ajoute les craintes de la future mère qui envisage toutes les variations concernant la mort de son compagnon ,son "gars".  Chargé ? Peut être.Mais tout cela est doté d'une formidable énergie, ponctuée d'humour " à cause de moi qui me fiche totalement de la baignoire en plastique qu'elle voudrait me transmettre pour mon enfant; si tu le laves, a-t-elle précisé ."et, sur le thème de la transmission et de l'identité familiale,  Claire Castillon  a écrit un roman qui incarne pleinement tout ce qui se joue d'inconscient (ou pas) dans une grossesse.

02/04/2015

Tom l'éclair

(Comment Thomas Leclerc 10ans 3 mois et 4 jours est devenu Tom l'éclair et a sauvé le monde)

"C'est que Tom n'est plus le même: il ne se demande plus ce que le Monde va faire pour lui, mais ce qu'il est prêt à faire pour le monde."

Au cœur des années 60, Tom est un enfant pas comme les autres,résolvant en un clin d’œil des problèmes de trains qui se croisent ,mais incapable de nouer des amitiés avec les autres collégiens.
Le déclic se fera par l’intermédiaire d'un comic book qui lui ouvrira les portes de l 'univers des super héros auxquels il s'identifiera immédiatement (ne sont-ils pas différents eux aussi ? ). Et Tom de s'inventer de super pouvoirs, pas toujours fiables, mais il fera avec les moyens du bord, pour aller petit à petit vers les autres et trouver des moyens bien à lui d'apprivoiser le Monde.paul vacca
Paul Vacca se penche à nouveau sur le monde de l'enfance et recrée avec bonheur,par petites touches,  les années 60, leur fraîcheur acidulée et leur optimisme confiant. Tout n'est pas rose, loin s'en faut, mais c'est un regard plein de bienveillance que l'auteur porte sur ses personnages et son récit coule tout seul , plein de tendresse et d 'émotion. On passe un excellent moment avec Tom , super héros ou pas  !
Une manière fine et sensible d'évoquer l'autisme.

Tom l'éclair, Paul Vacca, Belfond 2015, 280 pages  qui se tournent toutes seules !

Du même auteur : clic , reclic

01/04/2015

Quarante tentatives pour trouver l'homme de sa vie

"Tout le monde a le cœur fendu, l'âme vacante et le désespoir épinglé dans le dos comme un poisson d'avril."

Voici trois ans que Lucie, instit',a largué Pascal. La solitude commence à lui peser et elle se lance à cœur perdu, mais corps vaillant ,dans la quête de l'homme de sa vie. Où se cache-t-il ? Au supermarché avec son petit panier de produits solo ? Au club de tango, au boulot, sur internet ? Faut-il renouer avec les vieilles passions avortées ? Écrire une lettre lyrique à un agriculteur télégénique ? rachel corenblit
Rachel Corenblit passe en revue avec humour les us et coutumes des célibataires, pointant les ridicules et les travers avec une férocité réjouissante: "J'ai changé. Je ne suis plus le même homme. Une phrase avec laquelle on peut se balader en montgolfière tellement elle ne manque pas d'air."On s'émeut aussi devant le désespoir  de cette jeune femme qui affirme : "Elle ne recherche plus, elle ne croit plus en ces vaines agitations. Elle va juste fumer, boire, se droguer et mourir vieille et abandonnée."Mais Lucie a de la ressource !
Le premier chapitre , "l'amour en général" égrène des instantanés au masculin ("celui qui"), le dernier "L'amour en particulier" lui répond avec l'énumération de "celle qui"et se termine sur une note d'espoir. Malgré tout !

Quarante tentatives pour trouver l'homme de sa vie, Rachel Corenblit, La brune du Rouergue 2015,189 pages toniques, piquetées de marque-pages, dévorées et que je vais prendre le temps de relire pour mieux les savourer !

Premier roman pour adultes d'une Toulousaine qui a beaucoup écrit pour la jeunesse: entre autres: clic et reclic.

31/03/2015

Mars et les femmes

Sans que cela soit volontaire, Mars aura été marqué pour moi par des portraits de femmes fortes, libres et plutôt heureuses. Cela change agréablement !

Commençons par States of Grace. Grace dirige d'une main à la fois ferme et sensible un foyer pour jeunes en difficultés. Une nouvelle venue va la renvoyer face à ses propres failles.
J'y allais vraiment à reculons, l'impression de faire des heures sup' en quelque sorte. mais on ressort de là gonflé à bloc et plein d'optimisme. Le compagnon de Grace est juste parfait , acceptant son côté féminin, ses propres fêlures et ne souffrant même pas d'être le subordonné de sa copine.un vrai bol d'air !

Deux films ensuite sur l’après seconde guerre mondiale.  Tout d’abord, The Phoenix, histoire d’une femme juive, ayant miraculeusement échappé à la mort dans un camp, et qui,  défigurée, subit une opération de chirurgie reconstructrice.
Pour reconquérir son mari (le traître qui l’a dénoncée) elle se prête à sa macabre mise en scène : comme il lui trouve une ressemblance avec sa défunte épouse ( !), elle endossera l’identité de celle qu’il croit morte pour toucher l’héritage. Jouant de l’opposition ombres et lumières, le réalisateur emprunte les codes du mélodrame  mais montre aussi les réajustements de la société allemande après la guerre.
Beaucoup moins de pathos dans le magnifique Ida, se déroulant cette fois en Pologne dans les années 60. Une jeune fille, à la veille de prendre le voile, découvre par sa  tante qu’elle va devenir une « nonne juive ».
Les deux femmes, vont donc partir à la recherche de la tombe des parents d’Ida, s’épaulant l’une l’autre pour aller au bout de cette quête d’un passé toujours affleurant. Pas de jugement, pas d’explications superflues, le réalisateur fait confiance à l’intelligence et à la sensibilité du spectateur pour combler les pointillés. L’image est magnifique, les paroles rares et Ida trace sa route, imperturbable et lumineuse. Un film magnifique et prenant.

My sweet pepper land, enfin, western improbable se déroulant au Kurdistan, où la violence le dispute à l’humour noir. On y voit la naissance d’un amour peu banal entre l’institutrice qui a volontairement choisi d’enseigner dans cette contrée reculée où elle n’est pas la bienvenue et le policier, ancien combattant, qui vient troubler la quiétude du « parrain » local. A noter que tous deux fuient une famille pour le moins envahissante…MY+SWEET+PEPPER+LAND+PHOTO1.JPG
Si l’actrice iranienne Golshifteh Faharani est très elle, son jeu emprunte parfois un peu trop à l’expressionnisme mais bon… quant à Korkmaz Arsla, son faux air de Stephan Eicher et son petit sourire le rendent parfaitement craquant…

30/03/2015

Les livres prennent soin de nous

"Ce n'est pas facile de dire à un tiers ce que l'on a vécu, et qui fait qu'on ne va pas bien. à qui en parler ? à un proche ? C'est prendre le risque d'être renvoyé au silence ou de l'entrainer dans son propre malheur. à un psychologue ou un psychiatre ? Mais le patient refuse souvent ce recours. Restent les livres et le bibliothérapeute."

Encore mal connue  en France, la bibliothérapie se propose de restaurer un espace à soi par l'intermédiaire des livres.régine detambel
Rien à voir avec le développement personnel "Car il faut qu'un livre soit plurivoque, un épais feuilletage de sens et non une formule plate, conseil de vie ou de bon sens, pour avoir le pouvoir de nous maintenir la tête hors de l'eau et nous permettre de nous recréer." Et Régine Detambel de célébrer la métaphore ainsi que l’aspect plurisensoriel du livre.
L'intuition doit présider au choix des livres, pas de systématisme dans les prescriptions ,car un même livre pourra se révéler remède ou poison selon son lecteur.
Telles sont donc les grandes lignes de cette thérapie que l'auteure, kinésithérapeute de formation , enseigne sous sa forme créative à Montpellier. Un avant-goût qui donne envie d'approfondir cette piste.

28/03/2015

Il faut beaucoup aimer les hommes...en poche

"Les étranges et merveilleuses traces sur ma peau sont le signe que je n'ai pas rêvé-non le signe c'est l'entaille, l'attente, la route ouverte."

Solange, actrice française installée à Los Angeles, rencontre un acteur dans une soirée. Cet homme,  en dépit d'une description extrêmement fouillée, nous ne l'apprenons pas immédiatement, est noir. Et alors ? , comme se demande la quatrième de couverture. Et alors, cela ne va pas de soi et Solange va en faire l'expérience.marie darrieusecq
Marie Darrieusecq place son roman sous l'égide de Marguerite Duras (par son titre, extrait d'une citation de l'auteure de L'amant) et effectivement on va retrouver ici certains des thèmes chers à Duras :  les relations amoureuses interraciales,  l'attente mais aussi la description de la Nature opiniâtre (la mer dans Un barrage contre le Pacifique, la forêt africaine ici).  Mais Marie Darrieusecq, si elle analyse finement tout ce qu'implique cette relation entre une femme blanche et un homme noir, met aussi en scène un créateur habité par une vision : il veut à toutes forces adapter au cinéma le roman de Conrad, Au cœur des ténèbres et le réaliser en Afrique, bien évidemment. S'en suit une description hallucinée du tournage où Solange devra lutter pour trouver sa place.
L'écriture de Marie Darrieusecq est à la fois puissante et lumineuse. Elle sait aussi bien s'attacher aux détails , de superbes pages sur l'attente, que décrire la puissance inexorable de la nature africaine. Un roman souvent cruel mais où l'héroïne parvient toujours à conserver sa dignité.
Un roman enthousiasmant,  tout hérissé de marque-pages ! Un énorme coup de cœur et un énorme merci à Clara !

Ps: Solange, adolescente ,était déjà l'héroïne de Clèves, un roman non chroniqué, au charme trouble qui m'avait moins convaincue.

27/03/2015

Les anges aquatiques

"Je n'ai jamais acheté de cochon, car aucun cochon au monde ne pourra jamais me tenir par la main ou rire aux éclats".

Pour les boxeurs, on parle parfois  au mieux de baisse de forme ou carrément de combat de trop. Il en est de même pour ce nouvel opus mettant en scène Malin Fors.mons kallentoft, schtroumpf grognon le retour
L'intrigue est indigente, suant les bons sentiments concernant l'adoption d'enfants étrangers. L'auteur tire visiblement à la ligne pour rendre le nombre de feuillets demandés et le final est digne du grand guignol. à oublier très vite.

26/03/2015

Mon challenge ...#1

...n'est pas un défi en fait, mais plutôt un compagnonnage.

Je lis, ponctue de marque-pages qui le font déjà ressembler au bout de trois mois à un Indien chamarré, Le journal des cinq saisons de Rick Bass, en en respectant la chronologie.
Mois après mois, l'auteur décrit les paysages,les animaux, ses filles, le passage des saisons dans le rude Montana. la vie au plus près de la Nature.rick bass
Émerveillements, réflexions sur les liens entre l'écriture et la nature, moments de pure joie mais aussi regrets devant la manière dont l'Homme exploite sans vergogne les forêts, détruisant un équilibre millénaire., ce journal de bord est une vraie mine !
Dans un premier temps, bonnes résolutions obligent, j'ai bien respecté la chronologie. Là, je viens juste de savourer févier et mars, mais c'est normal car comme l'observe Rick Bass :" Le "syndrome de février" est un phénomène beaucoup plus puissant que nos faibles tentatives pour l'accepter ou y résister. Au moins autant que n'importe quel autre, le plus court de tous les mois est une force de la nature et vous file une sacrée raclée."

Mais "En mars, on aurait du mal à dire si on assiste à la fin de l'hiver , au début du printemps, ou si on contemple un étrange pays de rêve entre les deux, où certaines choses s'agitent et se soulèvent, tandis que d'autres continuent de flotter dans le sommeil- déjà appelées mais pas encore tout à fait réveillées."

à suivre...

25/03/2015

Et je danse, aussi

"Ceci dit, la littérature n'est que mensonge, enfin invention, ce qui est la même chose, l'invention étant un mensonge avoué par avance, non ? "

Un écrivain à succès mais qui n'écrit plus, une lectrice qui lui envoie une mystérieuse enveloppe qu'il subodore,par habitude, être un manuscrit, un échange, un peu vif au début, de mails . Mais petit à petit, "Une complicité s'est établie, comme lorsque tu rencontres une personne dont tu sais au bout de quelques minutes seulement qu'elle te convient."
Cette même complicité  je l'ai ressentie d'emblée avec ce roman épistolaire, plein d'humour (la double relation en simultané d'une scène de séduction à un vieux couple partageant la même boîte mail m'a fait rire aux éclats !) , d'émotions et de rebondissements.anne-laure bondoux,jean-claude mourlevat
On sent que les auteurs se sont régalés à raconter cette histoire où le thème du mensonge et de la fiction s'entremêlent avec bonheur. Qui manipule qui ?
En tout cas, le lecteur prend un énorme plaisir de lecture à se laisser mener par le bout du nez par des personnages hauts en couleurs, dont les mails miment avec une grande véracité le flux versatile des thèmes abordés lors d'un échange au long cours par courriels interposés. Un livre plein de vie, de détails qui sonnent justes , où s'intercalent des poussins et un slip kangourou, ça ne se refuse pas  !

Un énorme Merci à Cuné qui m'a donné envie !

Et je danse , aussi, Anne-Laure Bondoux, Jean-Claude Mourlevat, Fleuve 2015 , 280 pages épatantes !

 Et si c'était le coup de cœur du printemps ?

J'ai dévoré ce livre d'une traite (et tant pis pour le repassage en retard !) , ralentissant juste mon rythme à la fin pour le faire durer un peu plus longtemps...

24/03/2015

Monologues de la boue

"Pour toi le but est de faire chemin, d’être en chemin, d'être chemin."

Des récits de marche, les  premiers, de frontière à frontière (de Boulogne-sur mer à la Belgique, du Nord de la France au Jura, des Ardennes à la Suisse), le dernier au delà de St Jacques de Compostelle. Une femme marche seule, pour se réapproprier un territoire, amalgamant  monologue intérieur, bribes de dialogues, impressions, sensations pour mieux "Devenir boue, s'enfoncer par les ongles, fouir, fouine, ronflement des fossés, pleurs des marcassins, des hérissons. Les bêtes qui ne parlent pas. "colette mazabrard
Elle capte le "travail de la forêt",ses "frémissements", tout comme elle engrange les émotions de ceux qu'elle croise, et tout nous devient intensément présent, sensible et fort , en quelques notations.
Deux préoccupations, aux antipodes l'une de l'autre, ponctuent  ces textes : pour les uns , la "Petite chanson de la peur: "Pardonnez-moi, je vais être indiscrète, mais vous n'avez pas peur toute seule la nuit ? ". à laquelle répond en écho celle de la narratrice : "éviter d'écraser les escargots".
Le dernier texte ajoute à ce flux de sensations et de dialogues, intérieurs ou non, celui adressé à une femme disparue, dont il faut apprendre à se séparer.
Une écriture  fluide et poétique qui épouse les contours du chemin, pour mieux nous le montrer sous un nouveau jour,plus riche, plus dense. Une révélation !

Merci à Clara de m'avoir donné envie !

 

06:00 Publié dans Récit | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : colette mazabrard