Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

11/09/2015

La vie selon Florence Gordon

 "La croulante scandaleuse."

brian morton

 

Florence Gordon, 75 ans, est une icône féministe à l'esprit aussi acéré que la langue.Plus penseuse qu'épouse, mère ,voire grand-mère, elle entend bien, vu son âge, se consacrer tranquillement à ses mémoires, mais le monde conspire pour qu'il en soit autrement.
Forcée de faire appel à sa petite fille, Florence entend bien ne pas lâcher le cap et ne pas changer d'un iota son comportement, tout sauf agréable.
Magnifique portrait de femme au crépuscule de sa vie, La vie selon Florence Gordon est aussi un récit de transmission. C'est plus par l'exemple que par les paroles que la grand-mère, tout sauf gâteau, montrera la voie à sa petite-fille.
Allez savoir pourquoi, tout au long de ma lecture, j'ai visualisé Florence sous les traits d'une romancière, non pas new-yorkaise ,mais britannique, la grande Doris Lessing, regrettant au passage que Brian Norton n'ait pas su donner davantage d'épaisseur à ses personnages. Un bon moment de lecture néanmoins.

 

L'avis de Cuné qui m'avait donné envie.brian morton

10/09/2015

Une main encombrante...en poche

Avant de pouvoir ne serait-ce qu'envisager de vivre dans une maison, il devait aimer les sons qui l'entouraient. Si le bruit du vent ne lui convenait pas, ou la qualité du silence, il pouvait aussi bien tourner les talons immédiatement. Mais ce qu'il entendit lui inspira une sensation de calme."

Son père est mort, sa fille, Linda, devenue policière habite avec lui et Wallenberg, voudrait être tranquille: "Je voudrais me mettre en congé de moi-même , pensa-t-il. De cette pesanteur que je traîne et qui me mine. Je n'en peux plus."
L'opportunité d’acheter une maison à la campagne se présente mais le sort s'en mêle et Wallenberg, explorant le jardin, bute sur une main qui dépasse légèrement du sol. Adieu havre de paix, une enquête est ouverte...henning mankellCourt roman (156 pages ) nous dit l'éditeur, nouvelle pour Mankell, Une main encombrante a d'abord été un texte dont s'est inspiré la BBC pour un scénario de sa série Wallander avec Kenneth Branagh. L’écrivain l'a ensuite relu et enrichi, ce qui donne cette version.
Cet épisode, nous précise l'auteur se situe avant L'homme inquiet qui clôt la série.
Retrouver Wallander est toujours un bonheur et la réflexion de l'auteur sur son personnage est extrêmement intéressante. On y apprend entre autres les étapes de la genèse de la série, les objectifs de l'auteur et surtout la raison pour laquelle il a décidé d'arrêter la série : "Après La lionne blanche, j'ai compris que Wallender était réellement devenu un instrument. Il m'est alors apparu que j'avais tout à craindre de ce personnage car désormais , je serais sans cesse confronté au danger de privilégier le soliste. Or mon mot d'ordre était toujours: l'histoire d'abord."

Quant à des épisodes mettant en scène Linda, l'auteur n'en exclut pas l'éventualité , tout en soulignant : "à mon âge, les frontières rétrécissent. Le temps, qui manque toujours, manque encore plus. Je dois prendre des décisions de plus en plus fermes sur ce que je ne veux pas faire ."

09/09/2015

à parts égales

"Il me semble que la place de chacun a bougé, dans ce petit ballet."

Créatrice d'une entreprise familiale de céramique, Susie Moran ,l'âge venant, entend bien continuer à mener sa barque comme elle l'entend.joanna trollope
Ses trois filles, aux caractères et aux talents très différents, son mari, toujours accommodant, sans oublier les pièces rapportées, comprendre les beaux-fils, toute cette constellation bien huilée va voir son fonctionnement   remis en question par les aspirations de chacun et surtout par l'arrivée surprise du père quasi inconnu de Susie, l'excentrique Morris.
Joanna Trollope a le chic tout à la fois pour raconter des histoires et croquer des personnages,bien ancrés dans une réalité quotidienne, ce qui nous les rend proches.Elle aurait pu faire de son héroïne un personnage tyrannique mais tel n'est pas le cas. Ses personnages sont nuancés et proposent des choix de vie parfois atypiques mais satisfaisants .Les dialogues sont francs mais jamais agressifs et l'on prend beaucoup de plaisir à cette lecture tout à la fois facile (et ce n'est pas condescendant de ma part) et agréable.

à parts égales, Joanna Trollope, Éditions des Deux terres, traduit de l'anglais par Johan-Frédéric Hel Guedj, 345 pages confortables.

Merci à Albertine Proust et aux Éditions des deux Terres.

07/09/2015

La vérité et autres mensonges

"Elle se souvint avoir entendu Henry dire un jour que celui qui réalise ses rêves doit ensuite vivre avec."

Sa maîtresse est enceinte de lui mais Henry ne peut évidemment quitter sa femme. En effet,  elle est la véritable auteure des romans à succès dont il a endossé, impunément jusqu'à présent, la paternité.
Mais la situation est plus nuancée qu'il n'y paraît et ce personnage, qui avait tout pour nous paraître odieux, n'est pas dénué de qualités humaines.sascha arango
Magnant avec brio vérités et mensonges, Henry va donc tenter de préserver sa vie de rêve, coûte que coûte.Et sa formidable capacité de résilience va l'y aider.
On se laisse avec beaucoup de plaisir prendre au piège de ce thriller bien huilé qui s'amuse à surprendre son lecteur, balançant,mine de de rien, des vérités au milieu d'un tas de mensonges. Henry tente toujours d'avoir un coup d'avance, mais la situation devient de plus en plus inextricable et on se surprend à vouloir qu'il s'en sorte, alors que de prime abord cette empathie n'allait pas de soi ! Un excellent moment de lecture

Merci à Cuné et Clara qui m'ont donné envie.

 Déniché à la médiathèque.

 La vérité et autres mensonges, Sascha Arango, traduit de l'allemand par Dominique Autrans, Albin Michel 20115, 332 pages captivantes.

06/09/2015

Un jardin dans les Appalaches...en poche à nouveau, avec une nouvelle couv'

'aimerais pouvoir raconter de situations dramatiques, des contes à glacer le sang de familles réduites à ronger les lanières de leur birkenstocks."

Conscients de l'étendue du problème que représente le "simple " fait de manger, l'ognorance crasse de la plupart des gens concernant les produits agricoles , des dégâts occasionnés par l'agrobussiness aux États-Unis et dans le monde, Barbara Kingsolver, son scientifique de mari et leurs deux filles se osnt installés dans les Appalaches pour vivre pendant un an une expérience de locavores.
Locavores, késaco ?  cela signifie tout simplement ne consommer que des aliments produits par leurs soins ou par des producteurs locaux, distant au maximum d'une heure de route.41WW8bdxaSL._AA160_.jpg
Récit à plusieurs voix de cette expérience, Un jardin dans les Appalaches n'est ni un mode d'emploi ni un plaidoyer (meêm si les interventions de Steven L. Hoop, l'époux sont fort bien argumentées.), ni un moyen de culpabiliser le lecteur en le confrontant à un exemple parfait.
Non, c'est le récit plein d'humour, de doutes, d'échecs et de réussites d'iune famille tout sauf modèle qui nous montre, sans chichis, mais recettes de cuisine à l'appui, que oui, c'est possible de savoir ce que l'on mange, même en hiver

05/09/2015

Décapage #53

Huit jours du journal littéraire d'Alice Zeniter, une lettre de Valérie Zenatti à une de ses idoles, Charlotte Delbo (que je ne connaissais pas du tout, honte à moi), Nathalie Kuperman et Carole Fives qui (entre autres) racontent comment elles ont appris qu’elles allaient être publiées (Carole, on est avec toi, dans ta voiture sur le périph de Lille !), sans oublier un formidable dossier* Maylis de Kerangal par elle-même , voici ce que pour l'instant j'ai dévoré dans cette revue  au format atypique !

 

51mWC5jr9SL._SX324_BO1,204,203,200_.jpg

*On y apprend, entre autres que son héroïne c'est Fantômette (dans mes bras!) car elle est "agile, curieuse ,gymnaste, aventurière !"mais surtout , beaucoup plus sérieusement, on y découvre comment elle travaille, (elle associe à chaque roman une "collection" de textes divers "qui n'ont pas forcément un rapport avec ce qui m'occupe , ni en termes d'écriture, ni en termes de sujet, de thème ou de motif. Ce sont les liens que je forme entre ces livres qui créent la collection. si je les associe, c'est parce que chacun d'eux porte l'intuition de ce texte qui me travaille-parfois un mot, parfois seulement le titre, parfois une résonance plus visible, plus documentaire. J'écris ainsi à travers ces autres voix, à travers ces autres écritures qui émergent dès lors comme une seule matière, qui prennent corps comme un tout. Inventer la collection n'est donc pas seulement une phase de préparation, une prise d'élan: pou moi, c'est déjà écrire le livre." ), elle revient aussi sur chacun de ses livres et c'est passionnant !

31/08/2015

Quand le diable sortit de la salle de bain

"Il y avait bien entendu la question du crédit, ces satanées charges, mais je ne m'enlèverai pas entièrement du crâne que le travail, c'est aussi de la came, du chasse-conscience, c'est l'évacuation de soi par un moyen extérieur."

Sophie, trentenaire au chômage,connaît "la dèche" et en analyse avec précision les conséquences, l'une d’elle étant "de vous claquemurer dans vos soucis".à cet enfermement, à cette raréfaction des relations humaines aussi, s'oppose la grande liberté d'expression de la narratrice qui ne s'interdit rien ni les fantaisies typographiques, ni les remarques de sa mère qui commentent ses actions ( un peu comme une voix off), ni les longues énumérations foutraques  (je n'aime pas les hommes qui... ), les listes de synonymes, l'intervention d'un diable lubrique, sans oublier celles un ami tout aussi désargenté qu’elle qui connaitra un entretien surréaliste et hilarant chez Pôle Emploi. Quant au plaidoyer du grille-pain qui ne veut pas être vendu, en vers raciniens, s'il vous plaît, c'est un petit chef d’œuvre d'émotion, si si !sophie divry
Les ruptures de tons et la fantaisie débridée ne doivent pour autant pas faire oublier les descriptions très justes du monde de la restauration, la réflexion sur la manière dont ceux qui travaillent envisagent les chômeurs et l'impossibilité de partager avec sa famille, pourtant bienveillante, ses soucis.
Sophie Divry réussit un pari a priori fou: évoquer la pauvreté de manière extrêmement précise sans jamais tomber dans le pathos et en faisant tout à la fois sourire et réfléchir son lecteur.Jubilatoire.

Quand le diable sortit de la salle de bain, Sophie Divry, Notabilia 2015, 306 pages bourrées d'inventivité et d'énergie.

Cuné a aussi beaucoup aimé.

Yv, aussi !

 

30/08/2015

Petits plats de résistance

 "Personne à ce jour ne l'avait jamais pris en flagrant délit d'une quelconque activité salariée ou même de recherche d'emploi."

Qu'est ce qui va réunir Sandrine Cordier, "bras séculier du gouvernement contre la hausse du chômage" ,autrement dit employée de Pôle emploi, Antoine Lacuenta, agrégé d'histoire en rupture de bans et militant écologiste, un patron de presse, une "égérie sexo-psy", le directeur et les occupants d'un centre d'hébergement menacé de fermeture, une petite fille surdouée, une mamie à la page (et j'en oublie !) ?pascale pujol
La nourriture bien sûr(chaque chapitre porte un titre appartenant à ce champ lexical et l'on fait le grand écart entre "pâtée pour chiens" et "champagne" en passant par des plats beaucoup plus exotiques), mais aussi la résistance annoncée dans l'intitulé du roman. Résistance qui se manifeste à plusieurs niveaux et sous différentes formes, cocasses ou plus sérieuses.
Combinant des thèmes déjà envisagés dans d'autres romans (solidarité transgénérationnelle et/ou sociale, comme dans Bon rétablissement ou Ensemble c'est tout), réalisation de soi par le biais de la cuisine (Mangez-moi), Pascale Pujol donne à son roman la forme d'une ronde où vont se retrouver ses différents protagonistes. Ronde folle par le rythme, mais maîtrisée aussi (je ne me suis pas sentie perdue malgré le nombre de personnages) où l'auteure joue avec bonheur des possibilités qu'offre le récit, multipliant ainsi les surprises et les rebondissements. La plume est alerte et j'ai passé un excellent moment avec cette comédie enjouée.

Petits plats de résistance, Pascale Pujol, Le Dilettante 2015.

29/08/2015

Dans le silence du vent...en poche

Tu ne peux donc pas manger ? Tu te sentirais mieux. Tu n peux donc pas te lever ? Tu ne peux donc pas ...revenir à la vie ? "

L'été des treize ans de Joe est marqué par le viol de sa mère. Cet adolescent va brutalement faire l'expérience de la notion de justice car l'imbroglio des lois s'exerçant sur le territoire indien et le silence obstiné de sa mère ne facilitent guère l'identification du violeur et son jugement. Joe va donc devoir mener l'enquête de son côté et basculer irrémédiablement dans le monde des adultes.
Louise Erdrich dans ce nouveau roman décrit avec une acuité sans pareille la prostration de la victime et la difficulté à faire émerger la vérité. Une situation hélas représentative car,selon un rapport publié par Amnesty international en 2009, une femme amérindienne sur trois sera violée au cours de sa vie  et que, vu le "Labyrinthe de l'injustice", peu des violeurs seront poursuivis. Mais la romancière n'en fait pas pour autant un livre lourdement pédagogique. L'intensité dramatique est prenante et le style parfaitement maitrisé.louise erdrich
Les descriptions de la vie quotidienne de l'adolescent sont autant d'échappées belles loin de l'atmosphère étouffante de la maison familiale et l’occasion également de montrer la solidarité sans faille qui s 'exerce au sein de sa famille élargie.
Un roman que j'ai pris le temps de lire car, malgré quelques notes humoristiques et certains personnages hauts en couleurs, il y règne un climat lourd et poignant. Beaucoup de sobriété et d'émotion. à lire absolument.

Un roman récompensé par le National Book Award et élu meilleur livre de l'année par les libraires américains.

28/08/2015

Petites scènes capitales...en poche

"Son écorce est brunâtre, sillonnée de crevasses et rugueuse au toucher. Les feuilles plates et trapues, sont infusées de lumières, saturées de jaune franc; certaines sont tachetées de rouge-orangé, à peine. Au moindre  souffle de vent, le feuillage frémit et répand une formidable sonnaille de jaune, un cliquetis d'or , de soufre, de paille et de safran. Barbara est saisie d'une allégresse aussi plein et aussi nue, aussi pure que cette trémulation de lumière."

 

Comment ne pas être pétri d'admiration devant un style aussi ciselé et sensuel ? Ces Petites scènes capitales, vignettes pour dire les moments forts de l'évolution d'une d'abord toute petite fille orpheline de de mère qui va, sa vie durant, conquérir son identité et sa place au sein d'une constellation familiale pour le moins chaotique, sont un pur régal de lecture !sylvie germain
Néanmoins, je dois avouer que l'aspect un peu trop morcelé fait que je n'ai pas été aussi enthousiaste quant à la structure du livre. Elle nuit en effet un peu à l'attachement que l'on pourrait porter aux personnages. Un roman constellé de marque-pages !