26/08/2024
Alors c'est bien
"Face aux caprices de l'inconnu, nous tentons à l'aveuglette de faire de notre existence le meilleur film possible. pendant que nous sommes occupés à soigner le scénario, le décor et les accessoires, nous gagnons quelques instants de légèreté. Comment faire autrement ? "
Avec ce texte, Clémentine Mélois a entrepris de préserver les souvenirs liés à la vie et à la mort de son père, Bernard Mélois, sculpteur poétique, anarchiste, anticapitaliste, amoureux éperdu de sa femme (et de ses filles).
Beaucoup d'émotion, mais aussi d'humour , dans ce récit où se tissent le récit de l'enterrement "pharaonique" où mère et filles s'attachent aux plus petits détails pour faire de cette cérémonie un acte d'amour le plus fidèle possible aux volontés de Bernard Mélois qui n'appréhendait pas son décès et l'avait préparé depuis longtemps.
Un sacré personnage ce Bernard Mélois, dont Dali disait : "Mélois, qui fait des sculptures avec des seaux à caca. ", comprendre des objets émaillés que toute la famille allait récupérer dans des décharges. Sa fille lui rend ici un hommage plein de tendresse, sans cacher pour autant les défauts de celui qui, plein de fièvre créatrice, n'hésitait pas à empiéter sur les créations de ses filles !
Nous serons toutes et tous confrontés à cette situation (où l'avons déjà été) et je trouve que en dehors de ses qualités littéraires évidentes et très grandes, ce récit permet aussi de mettre en avant le déni auquel nous risquons d'être confrontés et d'en comprendre les motivations.
Ainsi l'autrice reconnaît-elle tenir "le réel à distance et pratique(r) une forme de judo existentiel où l'on se sert de la force de l'adversaire pour le renverser (même s'il est le plus costaud) Bien stable sur mes appuis, je transforme mon angoisse en action et, d'un geste souple, je fais basculer le chagrin sur le tatami de la vie".
Elle rappelle enfin que "Ceux qu'on aime souffrent et meurent , et on se surprend à rire encore . Le champ de lin n'a rien perdu de sa beauté, la clématite sauvage croule sous les fleurs. [...] Malgré tout. "
Un roman qui file, bien évidemment sur l'étagère des indispensables.
L’arbalète Gallimard 2024.
06:00 Publié dans Rentrée Littéraire 2024, romans français | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : clémentine mélois
06/01/2022
Dehors la tempête...en poche
"Comme après une jachère amoureuse, je me sentais à nouveau disponible pour une rencontre avec un livre, un genre ou un écrivain. Mais c'était décidé, jamais plus je ne lirais d'histoires. C'est ainsi que la poésie est devenue ma méthadone."
Nombreuses sont les métaphores marines qui irriguent ce livre appartenant à la collection Le Courage. Normal, l'un des romans préférés de Clémentine Mélois est Moby Dick.
Dans son panthéon personnel figurent aussi Simenon et son héros Maigret dont elle analyse avec finesse la consommation alcoolique, qui l'amènera à consommer un alcool démodé, car lire entraîne bien des expériences sensuelles.
Au gré des ses humeurs, de ses souvenirs , de ses digressions, nous partageons son amour tant pour les livres que pour la lecture.
Les livres addicts ne pourront que craquer pour ce livre où beaucoup se reconnaîtront, en particulier dans une liste où elle confesse certaines habitudes liées aux livres...
06:00 Publié dans l'amour des mots, le bon plan de fin de semaine | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : clémentine mélois
09/03/2021
Les six fonctions du langage
"Pendant des années , j'ai fait des efforts surhumains pour passer outre ces écarts de langage abjects. Je me disais "Le Français est une matière vivante, il faut t'habituer". Mais c'est au-dessus de mes forces, Bertrand. Je voudrais en finir."
Un étudiant en linguistique, qui, sur la seule foi du titre, ouvrirait cet objet littéraire qui emprunte aux codes du roman-photo pour mieux les détourner, risquerait d'être surpris.
Et pourtant, c'est bien du langage qu'il est question dans ce nouvel opus de l'impératrice du détournement, j'ai nommé Clémentine Mélois.
Avec humour, elle pointe nos tics de langage, nos jargons, nous apprend à draguer avec des mots rares et précieux, (mais attention toute faute de goût serait rédhibitoire !), le tout accompagné de photos tirées de romans photos sud américains des années 60.
On y voit donc un bellâtre blond au visage inexpressif dupliqué tandis qu'il écoute une litanie de mauvaises nouvelles ou bien encore des scène improbables comme cette femme qui étrangle par une clé de bras un homme de petite taille pour le désarmer. Les femmes (et parfois les hommes ) sont maquillés à la truelle, les vêtements sont à l’avenant des attitudes et des mimiques: outranciers.
Hautement réjouissant ce roman-photo est une pure merveille !
06:00 Publié dans l'amour des mots, l'étagère des indispensables | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : clémentine mélois
22/12/2020
Bon pour un jour de légèreté
"La Provence, 25 avril 2020 "Confinement: deux coiffeurs clandestins découverts dans des caves en Allemagne."
Au fil du premier confinement, la plasticienne et membre de l'Oulipo, Clémentine Mélois a tenu l'angoisse à distance en collectant des titres de presse et surtout en détournant avec tendresse, humour, irrévérence parfois, des images qu'elle nous livrait sur les réseaux sociaux.
Elles sont ici rassemblées en un parfait petit album qui déridera les plus ronchons.
Mention spéciale aux pochettes de disques détournées !
Grasset 2020, 10 euros.
06:00 Publié dans Humour | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : clémentine mélois
17/03/2020
#Dehorslatempête #NetGalleyFrance
"Comme après une jachère amoureuse, je me sentais à nouveau disponible pour une rencontre avec un livre, un genre ou un écrivain. Mais c'était décidé, jamais plus je ne lirais d'histoires. C'est ainsi que la poésie est devenue ma méthadone."
Nombreuses sont les métaphores marines qui irriguent ce livre appartenant à la collection Le Courage. Normal, l'un des romans préférés de Clémentine Mélois est Moby Dick.
Dans son panthéon personnel figurent aussi Simenon et son héros Maigret dont elle analyse avec finesse la consommation alcoolique, qui l'amènera à consommer un alcool démodé, car lire entraîne bien des expériences sensuelles.
Au gré des ses humeurs, de ses souvenirs , de ses digressions, nous partageons son amour tant pour les livres que pour la lecture.
Les livres addicts ne pourront que craquer pour ce livre où beaucoup se reconnaîtront, en particulier dans une liste où elle confesse certaines habitudes liées aux livres...
Grasset 2020.
De la même autrice: clic
06:00 Publié dans Essai, l'amour des mots | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : clémentine mélois
12/07/2018
Sinon j'oublie
"Je me demande comment il perçoit les gens. Est-ce que , dès qu'il voit un homme , tout devient flou et imprécis, alors que quand c'est une femme, il la voit nette ? En tout cas, depuis le mariage pour tous, il ne me salue plus. Il m'a clairement dit que je faisais ce que je voulais de ma vie, mais que le mariage entre deux hommes, c'est non, point final. ça tombe plutôt pas mal, parce que je ne comptais pas lui demander de m'épouser. Il ne ressemble pas du tout à James Franco, Fournier. Même en voyant flou."(Serge)
Les listes de commissions trouvées et collectionnées par Clémentine Mélois sont ici le prétexte et le support à l'élaboration de textes où s'expriment des "Je" qui se libèrent du prosaïque (les courses) pour mieux se livrer à des réflexions éclectiques sur leurs préoccupations -grandes ou petites- du moment.
C'est aussi un portrait éclaté et en creux de notre société où l'on évoque en vrac le mariage pour tous, l'évolution de l'épilation du maillot, les souvenirs de pension, l’utilisation d'internet par les hypocondriaques : "Vivement mon rendez-vous chez le médecin tout à l'heure, qu'il me confirme les soupçons de cancer que j'ai pu déceler grâce à internet . Histoire que je ne me sois pas inquiété pour rien."
En vis à vis, le fac-similé de la liste, qui nous permet tout à la fois de relever les fautes d'orthographe, de jouer les apprentis graphologues et d'apprécier la manière dont l'auteure a su "interpréter" ses listes souvent révélatrices d'un mode de vie /et ou de pensée. Ainsi, celui qu'elle a baptisé "James" et qui a donné lieu au texte reproduit in extenso ci-dessus, a-t-il indiqué " -mozaréla"sur sa liste et a précisé en dernier item "-vérifier orthographe mozaréla". D'un clic à l'autre peut être en est-il en effet arrivé à s'autodiagnostiquer un cancer...
C'est souvent drôle, vif, plein d'invention, je me suis régalée.
Grasset 2017
Keisha m'avait donné envie
06:00 Publié dans Objet Littéraire Non Identifié | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : clémentine mélois
03/07/2018
Cent titres
Quand l'auteure nous fournit gracieusement une présentation de son travail, autant en profiter : "Clémentine Mélois est une artiste française née en 1980. Cent titres, publié en 2014, est une bibliothèque imaginaire faite d'images truquées. Ce jeu formel et sémantique amuse, et interroge notre attente et notre réception du livre, des mots et des images."
Page de gauche, Clémentine Mélois fournit les (éventuelles) clés nécessaires pour repérer les éléments combinés sur la page de droite présentant la couverture d'un classique de la littérature revisité d'une manière ludique.
Nul n'est besoin d'être fin connaisseur de la littérature, comme j'ai pu le lire ici ou là, mais aimer les jeux de mots, les approximations, les calembours et la culture populaire vous permettra de goûter pleinement ces cent titres et d'éclater de rire !
Les textes, eux aussi , possèdent un humour discret mais efficace.
On ne s’étonnera donc pas, jonglant avec les mots et les images, que Clémentine Mélois ait rejoint les rangs du OuLaOup, enfin de l'OULIPO bien sûr (Ouvroir de LItérature Potentielle)
Testé et approuvé par mon fils de bientôt 19 ans qui, n'étant pas un littéraire a néanmoins su apprécier Maudit Bic d’Herman Melville, Père et gay de Léon Tolstoï , Nuit Tranquille de Paul Verveine ou les décalages photographiques des couvertures de la collection poésies/Gallimard...(Rimbaud/Rambo...)
06:00 Publié dans Humour, Objet Littéraire Non Identifié | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : clémentine mélois