04/06/2012
L'autre moitié de moi-même
"Je suis devenue écrivain pour nommer les fantômes."
Panne d'écriture, séparation d'avec le père de ses enfants, Anne-Laure Bondoux traverse une période de crise quand, un soir, elle croit avoir renversé un enfant en voiture. Cet incident étrange, comme venu du passé, va l'entraîner dans une quête qui l'amènera à mettre à jour un secret de famille mais aussi à prendre conscience du pouvoir de la fiction et plus généralement de celui des mots.
Emaillé de citations, de fragments de journaux intimes, de photos même, ce texte ne donne jamais l'impression au lecteur d'être un voyeur. Juste une présence amicale qui accompagne cette démarche et en partage le "typhon émotionnel" avant d'atteindre la délivrance et la fin de la souffrance
On y glanera des provisions pour notre quête personnelle mais aussi la sensation précieuse d'avoir lu un texte vrai, sensible et juste.
Anne-Laure Bondoux s'est bien sûr posé la question de la nécessité de ce texte et y répond très justement: "Il a fallu que je rassemble , par la narration à la première personne, mon identité réduite en miettes. Que je me raconte autrement." car "Si j'en doutais encore, je suis désormais persuadée que le langage est un acte, et que le pouvoir des mots ne se restreint pas au domaine de l'imaginaire.Il s'exerce sur nous tous, dans notre vie concrète pour le meilleur et pour le pire..."
Un livre dérangeant et bienfaisant tout à la fois. je m'en vais de ce pas le relire et noter sur un carnet toutes les citations que j'ai repérées d'un marque-page.
Il a sauté dans mes mains à la médiathèque, sorry les filles !
Une présentation du texte par Anne-Laure Bondou,x ici.
L'autre moitié de moi-même, Anne 6laure Bondoux, Bayard 2011
06:00 Publié dans Autobiographie | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : anne-laure bondoux
30/05/2012
Pourquoi être heureux quand on peut être normal ?
"La fiction et la poésie sont des médicaments, des remèdes. Elles guérissent l'entaille pratiquée par la réalité sur l'imagination."
En 2003 paraissait en France la fiction Les oranges ne sont pas les seuls fruits* , roman dans lequel Jeanette Winterson revenait sur une enfance bien particulière: celle d'une enfant adoptée par un couple marqué par une religion sévère et exigeante.
Presque dix ans plus tard vient de paraître cet ouvrage qui n'emprunte plus les voies romanesques mais nous livre , avec beaucoup de pudeur et de recul, une autobiographie marquante à bien des égards. Madame Winterson, la mère adoptive , avait tout pour devenir une nouvelle Folcoche, n'hésitant pas , par exemple, à partir en vacances laissant Jeannette à l'extérieur d'un domicile complètement fermé. Mais tout l'art de l'écrivaine est dans la nuance. On sent qu'avec le temps, elle en arrive à jeter un regard presque apaisé sur cette mère si imparfaite.
C'est aussi le récit de la conquête d'une liberté, liberté qui passe par les études et par l'écriture, mais qui ne fera évidemment pas l'économie de la douleur, surtout quand Jeanette essaiera de retrouver sa véritable mère .
L'écriture est tout sauf fluide et linéaire, et l'auteure s'en explique, mais on ne peut qu'être touché à l'extrême par cette femme et par le pouvoir de l'émotion générée. En témoignent les nombreux marque-pages !
* vient d'être réédité chez l'Olivier, pas encore lu.
06:00 Publié dans Autobiographie | Lien permanent | Commentaires (13) | Tags : jeanette winterson