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01/04/2016

La carapace de la tortue...en poche

Disgracieuse, maladroite, Clotilde a vite compris qu'elle désespérait sa famille et l'a quittée très jeune. Quand elle revient habiter chez sa tante, surnommée la Vilaine, c'est pour reconquérir son estime de soi, fort mise à mal par son obésité et les agressions qu'elle suscite.

marie-laure hubert nasser


C'est grâce à l'art et à l'aide de certains des habitants de cet immeuble bordelais que Clotilde va commencer à s'épanouir.
J'ai passé un bon moment avec ce microcosme bordelais mais certains tics de style (phrases nominales courtes, voire très courtes), un peu trop de joliesse dans l'écriture, utilisation des italiques durant tout le journal intime de Clotilde (G. Delacourt est sûrement à l'origine de cette allergie !), manque d'une charpente narrative un peu plus solide ont fait que je n'ai pas été aussi enthousiaste que Laure.
Comme elle, j'ai pourtant apprécié que l'auteure ne cède pas à la facilité dans l'épilogue. Un premier roman prometteur et un joli moment de lecture .

31/03/2016

Le chemin s'arrêtera là...en poche

"Parfois,  c'est à se forger la certitude que quelqu’un en coulisse complote contre vous, s'obstine à faire de votre vie une comédie absurde."

Il n'y a pas que l'air qui soit vicié dans ce microcosme, cinglé par le sable, où le vent "mugit dans l'acier", paysage post-industriel traversé par d’énormes minéraliers.
"Condamnés à survivre" dans ce lieu mortifère, des êtres ,dont les destins sont liés sans qu'ils le sachent toujours, vivent loin des regards qui pourraient les contraindre à "contrôler [leurs] humeurs." Ils ne peuvent que constater : "Nous nous faisons du mal . Nous ne savons pas nous faire du bien . Nous n'y avons pas été habitués.  Et puis l’ambiance n'est pas favorable."pascal dessaint
Certains vont même plus loin et,particulièrement monstrueux, pratiquent une fausse logique pour justifier leurs débordements. L'humour noir vient  ainsi alléger quelque peu l'atmosphère plombante . Ainsi, un personnage se creuse la tête pour identifier, parmi la longue liste de ses méfaits, celui qui pourrait être connu et , bien évidemment, "oublie" celui qui lui paraît le plus normal. Ou bien encore quand il se compare à un autre qu'il détecte aussitôt comme étant : "Un vicelard, j'ai tout de suite compris parce que j'en suis un moi même . Je les flaire de loin et ça aiguise une sorte d'envie de compétition. Je ne crois pas aux signes que la Nature  pourrait nous envoyer mais ça devait être un vicelard doublé d'un malfaisant."
La Nature est elle -même bien malmenée dans cet univers saturé à la fois par la pollution et la cruauté des hommes. Seul un faucon parvient encore à faire rêver un adolescent, symbole d'un ailleurs auquel il pourrait, peut être, encore aspirer.
Atmosphère lourde, quasi asphyxiante, voire de fin du monde, personnages monstrueux ,on pense à Goya, au film Delivrance, mais bien vite ces références s'estompent car si Pascal Dessaint fore encore plus loin dans la noirceur, ce n'est jamais de manière complaisante mais avec une grande maîtrise dans la narration (chorale) et le style. Il peint un paysage et ses habitants "coincés de ce côté du vilain monde", broyés par la crise, mais chez qui subsiste néanmoins , pour certains d'entre eux, une vraie humanité. De quoi retrouver un peu d'air in extremis ! Du grand art !

26/03/2016

La femme d'en haut...en poche

"Les gens n'ont pas envie de s'inquiéter pour la Femme d'En Haut. Elle est fiable, organisée, sans histoires."

L'arrivée d'une jeune élève d'origine étrangère, Reza,  dans sa classe de primaire ,va bouleverser la vie bien rangée de Nora.
Abordant bientôt les rives de la quarantaine, cette institutrice modèle prend en effet conscience au contact de la famille de Reza de tout ce à quoi elle a renoncé: ambition artistique, maternité, amour; en bref,  la vie et son intensité. Nora tombe pour ainsi dire amoureuse à titres divers de Sirena, la mère de l'enfant, une artiste en passe d'être mondialement reconnue, de son époux, Skandar et bien sûr de Reza, qu'elle va chérir. Renouant avec une pratique artistique aux côtés de Sirena , Nora se prend à espérer d'une autre vie.claire messud
Récit a posteriori dont la narratrice est Nora, cette Femme d'En Haut,"invisible durant des décennies" , le roman de Claire Messud scrute avec précision les moindres remous intérieurs de cette femme qui a soif de vivre et qu'anime une colère monstrueuse.Ce texte à la structure circulaire, qui peut se lire comme la réponse de Nora à la trahison inévitable et extrême, souffre de quelques longueurs, comme souvent chez Claire Messud ,mais j'ai néanmoins pris beaucoup de plaisir à entrer dans l'univers de Nora, femme frustrée, bridée ,mais jamais caricaturale.

18/03/2016

Lola Bensky...en poche

"Pour sa part, Lola avait macéré dans le passé de ses parents , depuis toute petite."

De Londres à New-York en passant par Monterrey, Lola Bensky, 19 ans, interviewe les stars en devenir dans l'effervescence des sixties pour le journal australien Rock-Out. Mais, loin d'être un catalogue plus ou moins nostalgique de portraits sur le vif, c'est surtout à une quête identitaire particulièrement intéressante  que nous assistons.9782264066251WEB.jpg
En effet, Lola est la fille de deux rescapés d'Auschwitz et  interroger Mick Jagger ou Jimi Hendrix lui donne l'occasion de revenir sur son enfance si particulière, de poser en quelque sorte les questions qu'elle n'osera jamais poser à ses parents.
Se trouvant régulièrement trop grosse (elle est toujours en train de se programmer des régimes plus bizarres les une que les autres), Lola, cahin-caha, finira par trouver un certain équilibre et bouclera la boucle en retrouvant plus de quarante ans plus tard le chanteur des Rolling Stones à un dîner très chic.
Les portraits des rock stars sont extrêmement vivants, sensibles et sonnent très justes. On se prend aussi de sacrés chocs en découvrant les informations distillées plus ou moins clairement par les parents de Lola et la manière dont les enfants des rescapés développent des comportements psychologiques semblables. Mais Lola , vaille que vaille, conserve toujours l'équilibre et ne plonge jamais son lecteur dans la dépression. Un roman troublant.

 

Lola Bensky, Lily Brett, traduit de l'anglais par Bernard Cohen, la grande Ourse 2014, 271 pages marquantes.

10/18 2016.

 

 

17/03/2016

La nuit des princes...en poche

"Peut être cette décadence était-elle à l'image d'un écosystème qui ne parvient pas à l'auto-suffisance; le regarder mourir est un spectacle d'une grande tristesse. Le virus mortel était si profondément ancré dans l'ADN de cette décennie qu'elle amorçait déjà sa chute à son apogée, dans sa gloire la plus resplendissante et la plus vibrante de vie."

Hâbleurs, arrogants "L'âme obscurcie par une insatiable avidité, on laissait notre moralité de plus en plus douteuse s'empêtrer, étouffer sous des couches et des couches d'objets, un amoncellement de choses, toujours plus, des costumes qui coûtaient davantage que ce que nos pères avaient déboursé pour leur première maison, des voitures d'un luxe indécent-sans parler des montagnes de PV que nous valaient nos petites pointes de vitesse quand on filait vers les paradis de Long Island East, où nous attendaient des piscines chauffées à l’année."Tels étaient les BSD. Comprendre les Big Swinging Dick, les grosses bites qui se la pètent, ceux qui décrochaient leur boulot dans les années 80 en gagnant au poker contre leur futur patron à Wall Street.robert goolrick
Le narrateur de La chute des princes était l'un d'entre eux. Il décrit de l'intérieur sa vie d'avant puis sa dégringolade, sans s'apitoyer, lucide aussi bien sur lui -même que sur les autres. Pas de rancœur, mais une acceptation progressive, étape par étape, au fil des rencontres et une reconstruction possible.
Robert Goolrick, par son écriture ample, son sens du détail et sa grande empathie réussit un pari quasi impossible: rendre sinon sympathique  du moins attachant ce trader passé de la lumière à l'ombre. Une première rencontre réussie avec cet auteur !

La chute des princes, Robert Goolrick, traduit de l'anglais (E-U) par Marie de Prémonville, Anne Carrière 2014, 231 pages piquetées de marque-pages.10/18, 2016

12/03/2016

Un éléphant dans ma salle d'attente

Comme beaucoup d'entre nous qui avons suivi les aventures de Daktari à la télévision, Florence Ollivet-Courtois a voulu devenir vétérinaire d'animaux sauvages.
Dès l'âge de six ans, elle tenait une perfusion pour aider son père,lui même véto, puis son diplôme en poche a suivi des formations qualifiantes aux États-Unis, pour atteindre son rêve.florence ollivet-courtois,sylvie overnois
Seule libérale à exercer cette spécialité en France, Florence Ollivet-Courtois soigne les animaux sauvages et ceux de parcs zoologiques, faisant preuve tout à ll fois d'astuce et de robustesse face à ses patients pas toujours commodes et souvent plus fragiles qu'il n'y paraît.
On sent au fil de la lecture  son profond amour des animaux et l'on suit avec bonheur ce récit qui ne se contente pas d’aligner les anecdotes, drôles ou émouvantes mais nous fait plonger au cœur des relations hommes/animaux. Un pur régal !

Un éléphant dans ma salle d'attente, Florence Ollivet-Courtois  avec Sylvie Overnoy, Alpha éditions.

 

11/03/2016

Chiens perdus et coeurs solitaires...en poche

Rachel perd simultanément son amoureux, son boulot, son appart. De surcroit, cette quasi quadragénaire hérite de sa marraine, un refuge pour chiens à la campagne. Pour elle qui n'est pas cynophile, il semblerait que le sort s’acharne . lucy dillon
Avec le thème classique de l'héroïne détonnant dans un nouvel environnement, Lucy Dillon joue sur du velours. Il n'en reste pas moins que ses personnages sont pleins de vie, variés et avec des problématiques qui changent de la chick litt habituelle.Un soupçon de pédagogie concernant les rapports humains/chiens ne gâte rien et on prend beaucoup de plaisir à cette lecture qui vide aussi bien la tête qu’une balade avec son chien !
Vous avez envie de lire un bon gros roman romantique, sans prise de tête, pas trop sucré et donnant souvent le sourire ?
Si vous aimez les chiens , la campagne anglaise et ses pittoresques habitants, ce bon gros roman de 498 pages (qui se tournent toutes seules)  est fait pour vous !

Chiens perdus et cœurs solitaires, Lucy Dillon, Éditions archipoche 2016.

10/03/2016

La blancheur qu'on croyait éternelle...en poche

« Chez lui, l’affectif l’emportait souvent sur le pratique. »

Mathilde n’ose pas devenir chocolatière car elle  est  trop diplômée et décevrait son exigeante et envahissante mère.
Lucien, pédiatre, vit dans le même immeuble que Mathilde mais il va lui falloir des mois pour rencontrer sa jolie voisine à deux cents kilomètres de chez lui, tant le monde des sextos et autre facebook lui est étranger.
Joliment scandé par des citations de chansons et de films, La blancheur qu’on croyait éternelle crée un univers douillet où les personnages principaux évoluent à leur aise, en total décalage avec leur époque. En effet,  ces trentenaires célibataires se sont donné comme figures tutélaires pour lui Jean-Louis Trintignant et pour elle Romy Schneider (celle des « Choses de la vie », pas Sissi !) Maladroits et touchants, malmenés par leurs 9782253182665-001-T.jpegprétendus amis, ils peinent à trouver place dans les années 2000 qui leur demeurent totalement étrangères.
 Virginie Carton instaure une complicité immédiate et durable avec son lecteur qui se régale à voir les occasions manquées, à repérer les clins d’œil musicaux et cinématographiques (Bande originale pour ne rien manquer à la fin), nous gratifie même de bonus très drôles et d’une guest star surprise. Seul petit bémol : ses personnages principaux semblent parfois un peu trop candides. Une comédie romantique qui remplit parfaitement son contrat, nous divertir avec élégance et finesse.

05/03/2016

Une famille délicieuse...en poche

"Oh, comme les cachotteries et notre volonté de préserver l'image que nous avons de nous-mêmes peuvent faire de nous des prisonniers !"

Leur sœur Georgie, atteinte de démence sénile, va venir faire un court séjour chez Mina et Nest qui vivent dans une apparente quiétude au milieu de la lande, à deux pas de la mer.  L'occasion d'évoquer pour les trois sœurs leur enfance idyllique dans cette demeure familiale en compagnie d'une mère aimante et d'un père nettement plus distant , sans oublier une sœur et d'un frère aujourd'hui disparus ,mais aussi la crainte que Georgie ne révèle des secrets douloureux... 419Ol1q8FzL._AA160_.jpg
En contrepoint de cette tension , les relations avec leurs neveux et nièces apportent un ancrage plus contemporain et souvent plein d'humour. Les personnages de Lyddie, qui travaille dans l'édition et vit une relation amoureuse compliquée avec Liam, ou celui de Jack qui tente de tenir tête à son adorable tyran de petite fille : "-Merci. Il n'y a rien que j'aime davantage  que de me faire tordre violemment les deux oreilles pendant qu'un paire de petits talons d'acier me pulvérise la clavicule.", sans oublier quatre chiens, croqués de manière très vivante, sont des personnages qu'on n'oubliera pas de sitôt !
Un style enlevé, un brin d'excentricité , un soupçon d'ironie et beaucoup d'empathie, tous les ingrédients sont réunis pour nous régaler !

Une famille délicieuse, Willa Marsh, traduit de l'anglais par  Eric Mc Comber, autrement 2014 , 477 pages savoureuses ! J'ai lu 2016

 

03/03/2016

Le génie des coïncidences..en poche

"Il semblerait que je sois accablée par les coïncidences, Professeur Post."

Quand un spécialiste des coïncidences- qui prend un malin plaisir à les démonter et à les expliquer de manière rationnelle-rencontre fortuitement une jeune femme dont la vie semble marquée par un "enchaînement cruel d’événements" que se passe-t-il ? Hé bien cela engendre une série de joutes verbales, un maelstrom d'émotions et une flopée de rebondissements entre l'île de Man, l’Ouganda où sévit encore "un homme qui s'est bricolé une foi, un mélimélo de croyances, a décidé que Dieu lui avait parlé, et que tous ceux qui n'étaient pas d'accord pouvaient être abattus, ou amputés."et Londres. 51rYqadl4eL._AA160_.jpg
Usant -mais n'abusant jamais -des analepses* et des prolepses**, J.W Ironmonger joue en virtuose avec nos nerfs (deux scènes sont particulièrement éprouvantes),  fait monter l'émotion (j'ai plusieurs fois eu les larmes au yeux) avec beaucoup d'empathie et de sobriété. Il ne faut surtout pas  en dévoiler plus de ce roman  qui joue sur plusieurs registres  (romance, thriller, quête d'identité, réflexion philosophique) et nous offre des descriptions plus vraies que nature d'un continent qu'il connaît et aime profondément: l'Afrique. Pour ceux qui n'ont pas peur des montagnes russes émotionnelles. Et zou sur l'étagère des indispensables !

* correspond à un retour en arrière, au récit d'une action qui appartient au passé Il consiste à raconter après-coup un événement. On peut également parler de  flasback pour exprimer cette idée, mais ce terme ne s'utilise qu'à propos de cinéma ou de bande dessinée.

* *Clin d’œil à Cuné.

Le génie des coïncidences, J.W Ironmonger, traduit de l’anglais par Christine Barbaste, Stock 2014, 343 pages que j'ai fait durer le plus longtemps possible, gage de réussite s'il en est, et tout piqueté de marque pages bien sûr ! 10/18 ,2016.