Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

06/06/2015

L'invité du soir...en poche

"Tout était calme, mais chacun des meubles avait l'air comme détaché de ses amarres dans cette lueur plate et insipide, comme s'il s'était égaré à force de vouloir paraître à l'ordinaire. Ruth a eu le sentiment que sa maison toute entière lui mentait."

Une maison isolée de la côte australienne. Une vieille dame de 75 ans dont la santé décline mais qui tient à son indépendance, Ruth, y habite en compagnie de deux chats. Un soir, elle entend un  tigre dans sa maison. Arrive alors un personnage tour à tour salvateur et rudoyant, Frida, aide-ménagère envoyée par le gouvernement.fiona mcfarlane
S'instaure alors un climat troublant , oscillant entre tendresse et inquiétude, manipulation et hallucinations. L'écriture fluide et poétique de Fiona Mc Farlane instille le doute, fait froncer les sourcils, battre le cœur. Tout à tour ,on frémit, on partage la douce rêverie amoureuse de Ruth, on croit avoir compris ,mais tout est beaucoup plus subtil et intriguant que prévu.
La description de cette emprise étrange, où tout peut basculer à la seconde, mais aussi de cette femme âgée qui avait appris "grâce à ce drôle de miroir qu'était le visage de Jeff, qu'elle en était au stade où ses fils s'inquiétaient pour elle", de sa relation au temps,  "Oh la douce étendue vertigineuse du jour, le remplissage plus ou moins réussi de toutes ces heures.",à la mort qu'elle espère "aussi extraordinaire que son commencement" sont tout à fait fascinantes.
En lisant, ce premier roman où la mer mais aussi la jungle de l'enfance fidjienne de Ruth ont la part belle, j'ai songé tour à tour à l'écriture de Virginia Woolf et Au barrage contre le Pacifique de Marguerite Duras , le tout relevé d'une pointe lancinante de soupçons hitchcockiens.  J'ai été soufflée !

Bravo à la traductrice, Carine Chichereau qui a su rendre l’atmosphère troublante de ce récit où d'une phrase à l'autre la tonalité peut changer.

29/05/2015

La ballade d'Hester Day...en poche

"J'imagine que quand tu épouses secrètement un poète qui veut t'exploiter comme matériel littéraire, il vaut mieux que tu prennes au moins une minute pour réfléchir à ce que tu dirais à tes parents s'ils venaient à découvrir le pot aux roses. Moi, je n'y avais pas pensé."

Capable de programmer l'adoption d'un enfant dès sa majorité toute proche, comme d'agir sous une impulsion, Hester Day se retrouve dans un road movie, brinquebalée entre son mari poète et son très jeune cousin. Qu'elle les connaisse tous deux à peine ne la dérange pas le moins du monde !9782253003403-T.jpg
Vouée d'emblée à l'échec cette épopée vaut pour les rencontres  que nos anti-héros vont effectuer et par la manière si particulière d’Hesther d'envisager sa vie. N'empêche qu'on n'aimerait pas être à la place de sa mère !

367 pages hérissées de marque-pages et un excellent moment en compagnie d'Hester Day !

28/05/2015

La dame à la camionnette....en poche

"Il était rare qu'on lui rende le moindre service sans avoir en même temps envie de l'étrangler."

Nul doute que cette couverture jaune primevère aurait beaucoup plu à Miss Sheperd ! Cette vieille dame marginale et excentrique repeignait inlassablement de cette couleur les différentes camionnettes dans lesquelles elle vécut successivement à la fin de sa vie.alan bennett
Victime de l'embourgeoisement de son quartier, mais dotée d'un grand sens de la manipulation et d'une mauvaise foi inébranlable, Miss Sheperd finit par établir ses quartiers dans l'entrée du jardin d'Alan Bennett. Une cohabitation improbable et chaotique, entre exaspération et volonté d'aider cette vieille dame soucieuse de préserver sa dignité et ses secrets ,qui dura une vingtaine d'années.
Une synthèse pleine d'humour des notes qu'Allan Bennett  a prises au fil du temps sur cette vieille dame qui faisait tache et dont un des habitants du quartier se demandait si elle était vraiment excentrique... Une peinture d'une transformation en marche qui ne tombe jamais dans l'autosatisfaction ni dans l'apitoiement. 114 pages so british !

27/05/2015

Beauté fatale...en poche

"Plus généralement, les femmes sont loin d’entretenir, comme les héroïnes de Sex and the City, un rapport hédoniste et insouciant à leur corps et à l'industrie qui les invite à l'embellir: le système , plutôt que de les combler de gratifications qu'elles n'auraient qu'à cueillir, telle Eve dans un moderne jardin d'Eden, attise leur frustration, leurs complexes, leur anxiété, leur autodévalorisation; il prospère sur les tourments physiques et moraux que leur inflige le souci névrotique de leur apparence. Et il le fait, comme on le verra , indépendamment de leur adéquation aux canons en vigueur : celles qui sont perçues comme les plus jolies peuvent très bien être aussi les plus flippées."

 

C'est en feuilletant son dernier ouvrage, que j'ai découvert, juste à côté et au format poche, Beauté fatale, sous titré Les nouveaux visages d'une aliénation féminine.
Le projet est fort intéressant: en se penchant sur les discours publicitaires, les blogs, la presse féminine, les témoignages de mannequins (édifiants, à faire lira à toutes les jeunettes que ce métier fait rêver !), les séries télévisées, bref, le discours et les images dans lesquels nous baignons constamment, Mona Chollet montre comment les normes inatteignables qui leur sont imposées nuisent au bien être des femmes.mona chollet
On croit le savoir, bien sûr, mais on l'oublie trop souvent, moi la première, tant les injonctions qui nous sont martelées apparaissent comme la norme qu'il faut suivre "naturellement".
J'ai parfois sursauté , tant le discousr est parfois violent dans la manière dont l'auteure s'en prend à certaines personnalités( Sophie Fontanel, Elisabeth Badinter) ,mais la démonstration est implacable et les exemples nombreux et variés. Un texte roboratif qui donne un autre son de cloche à entendre et nous permet de prendre de la distance par rapport au discours dominant et de réveiller notre esprit critique engourdi.

 Beauté fatale, Mona Chollet, La découverte /Poche 2015, 289 pages

 

23/05/2015

Réparer les vivants ...en poche

Mais qui ne l'a pas lu ? !:)

 "... c'est la première fois qu'ils nidifient une cavité de repli au sein de leur anéantissement..."

Réparer les vivants est "la somme des actions et la somme des mots, la somme des espaces et des sentiments" qui, partie du cœur de Simon Limbres, jeune surfeur de vingt ans, aboutira -ou non -à sauver la vie d'une receveuse en attente de transplantation.maylis de kerangal
Le roman de Maylis de Kerangal n'a rien d'un récit journalistique. Il acquiert une dimension quasi mythologique, brassant l'espace et le temps, replaçant l'organe dans sa dimension à la fois affective et symbolique. Il ne s'agit pas ici de réparer un organe défaillant mais bien de s'interroger sur les mots qui manquent pour exprimer l'émotion, les mots qui devront sonner juste pour convaincre les proches, mots qui parfois se mueront en chant pour mieux saluer le corps qui a encore une apparence de vie même si l'activité cérébrale a signalé sa mort, car il s'agit de creuser "ensemble dans cette zone fragile du langage où se déclare la mort.".
Cette trajectoire alterne les points de vue, y compris celui de la receveuse potentielle qui n'est pas sans interrogations, détaille aussi le ballet des intervenants médicaux, ne les réduisant pas à une fonction mais les inscrivant dans une humanité pleine de justesse.
Nous ressentons pleinement toutes les sensations , tous les sentiments qui bouleversent de fond en comble les personnages !
Le style précis, imagé et élégant,le récit tendu comme un arc et empli d'émotions sans jamais verser dans le pathos, font qu'une fois levés les a priori susceptibles d'entraver notre lecture, on ne peut quitter ce roman qui pulse et fait battre le cœur.

Et zou, sur l'étagère des indispensables !

 

22/05/2015

Ce qui est arrivé aux Kempinski...en poche

"Une des particularités comiques de l'enfance est que l'on traverse une gamme infinie de sentiments dont on ignore les noms.  Tant que le mot n'a pas épinglé  la sensation, comme une aiguille perçant les thorax d'un insecte,  les impressions papillonnent en liberté autour de nous  et en nous, éblouissantes, féériques, mais aussi parfois menaçantes  car nous n'avons aucune idée de leur trajectoire, de leur taille,  de leur venimosité."

Dans les quatorze nouvelles composant Ce qui est arrivé aux Kempinski, la réalité fait un pas de côté et les rêves deviennent plus réels que la réalité. Le titre d'un roman apparaît différemment à sa lectrice, les identités sont faussées, fluctuantes. Usurpations, impostures, trahisons sont au rendez-vous et même le diable sera dupé par une femme. agnes desarthe
Le familier révèle ses double-fonds, les sentiments inavouables (que faut-il faire des cadeaux rapportés de l'école, ces "offrandes  [...]la plupart du temps ratées et mystifiantes de laideur"  ?, se demande une mère de famille éprise de perfection). On sourit, on admire aussi l'écriture éblouissante d'Agnès Desarthe qui traque au plus près le réel qui se dérobe sous nos pas.

« Mon âme, dit-elle. Mon âme, que vaut-elle ? Mon âme est une liste de courses. Mon âme est une déclaration d’impôts, un bulletin de notes au bas duquel ne figurent pas d’encouragements. Mon âme est le mode d’emploi du lave-vaisselle remplacé depuis huit ans, un bordereau de la poste datant de trois mois (le paquet est reparti, mais où, et que contenait-il ? Une rivière de diamants, sans doute). Mon âme est pleine de “Bonjour, madame”, “Au revoir, madame”, elle est salie par les corvées, corrompue par la fatigue de jours sans héroïsme, sans passion, sans péril. »

Et zou, sur l'étagère des indispensables !

21/05/2015

Dieu me déteste...en poche

"Être mourant, si on regarde bien, c'est plutôt lassant.ce qui est vraiment intéressant, c'est de vivre ici, beaucoup plus intéressant que je l'aurais cru , quand on m'a amené ici de force et que je jurais  et me débattais tout ce que je pouvais."

Celui qui s'exprime ainsi c'est Richard Casey, dix-huit ans dans quelques jours. Bien qu"otage des soins palliatifs" d'un hôpital New-yorkais, lui et son amoureuse Sylvie, quinze ans, malgré la maladie, la perte des cheveux, le corps qui lâche dans tous les  sens,  ont une furieuse envie de faire des conneries, de s'aimer malgré tout, de vivre quoi !hollis seamon
Halloween et l'intervention d'un oncle hors-normes vont précipiter les événements et entraîner nos héros dans un tourbillon joyeux, souvent émouvant, plein d'une féroce rage de vivre malgré tout. Roméo luttant contre le dragon qui veille sur sa bien-aimée, Richard nous fait vibrer et allume plein d’étoiles dans nos yeux.
Jamais de sensiblerie ni de pathos, le monde hospitalier est peint de manière très juste et la fin est juste époustouflante. Un livre bourré d'énergie , d'empathie et de pudeur qui glisse , zou, sur l'étagère des indispensables. On n’est pas prêts d'oublier cette galerie de personnages et cet amour ardent ! Un grand et beau coup de cœur !

19/05/2015

La femme au carnet rouge

61b18Ck8wjL lfcr.jpg"Laurent  se trouvait devant une femme-puzzle. Une silhouette floue, comme dernière une vitre pleine de buée , un visage semblable à ceux que l'on croise dans les rêves et dont les traits se brouillent dès que l'on tente de se les remémorer."

Laurent Letellier, libraire, découvre un jour un sac mauve, probablement volé,  sans indication de l'identité de la propriétaire. Il décide alors de mener une enquête , placée sous les auspices de Modiano (que nous croiserons ! ) de Sophie Calle et de Pessoa, afin de le lui restituer.
Se tissent alors entre l'apprenti détective et la victime du vol des liens qui vont très largement dépasser le simple acte civique...
Si je n'avais pas acheté ce roman en format poche, il est probable que j'aurais moins ressenti le charme  subtil, quelques fois un peu forcé, de ce roman agréable et léger qui fait un bien fou, car j'en aurais sans doute attendu trop. Mais là, nonobstant une couverture criarde (je sais que le jaune est à la mode cette saison, mais c'est définitivement non à cette couleur) , je me suis régalée à  lre cette romance qui s'élabore  quasi malgré les principaux protagonistes.

 Des avis très tranchés sur Libfly !

17/05/2015

Comment trouver l'amour à cinquante ans quand on est parisienne...en poche

"Et maintenant, se demandait Dimitri Diop, et maintenant, si c'est vraiment l'amour qui se présente à nous, sommes-nous capables de le vivre ? "

Six personnages, d'âge et de conditions sociales différentes, saisis à des moments clés de leur existence, élaborent , sans le savoir toujours, une chorégraphie qui les fait se croiser dans  Paris. La capitale devient d'ailleurs un personnage à elle toute seule et symbolise aussi la problématique essentielle de ce conte: l'exil et ses différentes formes.41GCqUZdaCL._AA160_.jpg
Ce roman, au titre faussement" chickenlittien", se lit sans déplaisir mais son style, quelque peu compassé, fait que je ne m'y suis pas toujours sentie à l'aise, un peu comme si j'avais endossé un habit trop étroit.
Les personnages sont attachants, en particulier celui autour duquel s'articulent tous les autres: Catherine, quinquagénaire prof de français résidant à Paris mais enseignant de l'autre côté du périph, mais on reste toujours un peu sur sa faim, l'auteur leur tenant la bride un peu trop courte.

16/05/2015

Vacances à l'anglaise ...en poche

"Qu'avait donc cette maison ? Elle détraquait tout le monde."

Après le décès de leur mère, Richard décide d'inviter la famille de sa sœur, dont il n'a jamais été très proche, pour des vacances au Pays de Galles. Mais la combinaison de quatre adultes ayant peu d'atomes crochus, trois ados en pleine explosion hormonale et un enfant bourré d'imagination, le tout largué au milieu d'une campagne somptueuse mais dotée d'un réseau peu favorable aux portables risque de provoquer un cocktail détonnant...mark haddon
Si l'ambiance de la maison de vacances est parfaitement bien rendue, le choix de l'auteur d’alterner les points de vue, même si l'on repère très vite l'identité du personnage ,donne au roman un côté par trop "haché", qui nuit à la fluidité du récit. Un bon moment ,mais rien d'exceptionnel.