12/11/2018
13 à table ! 2019
"Il parle d'une certaine organisation du temps, d'une certaine portion de temps laissé à autre chose que le travail ou le repas. Il parle des heures passées à cuire de la viande, à s'affaler dans l'herbe et à trinquer. Il parle d'une propension à rassembler des chaises autour d'une table en lançant aux amis de passage: "Serrez-vous de ce côté -là, ça fera de la place à Michel." Alice Zeniter
Il y a les fêtes auxquelles on voudrait assister pour se sentir enfin acceptée ou juste vivante. Quand on est une ado et qu'on se prénomme Perpétua, c'est pas gagné d'avance, comme nous le montre Véronique Ovaldé dans sa nouvelle "Je suis longtemps restée une clématite", nouvelle où elle analyse avec sa finesse habituelle les relations entre un père et sa fille vivant dans un environnement très particulier.
Quand on est une femme sous emprise cloitrée chez elle par un mari sans amour, La fête des voisins de Leila Slimani peut déboucher sur une folle envie de libération à tout prix.
Il y a aussi les fêtes l'on donne pour se convaincre qu'on est une famille joyeuse , même si amputée, pour retrouver "Le goût des fraises sauvages" chez Alice Zeniter.
Celles qui tournent mal, par exemple quand l'obsession de la perfection risque de gâcher tout plaisir ou quand le passé rattrape les pestes chez Tatiana de Rosnay . Y aurait-il une justice ? Philippe Jaenada semble montrer que non, revisitant , non sans humour, l'histoire d'une femme demeurée dans les mémoires comme étant la Pompe funèbre...
Il y a enfin les fêtes que l'on donne avec un objectif clairement assumé: se trouver un amoureux chez Françoise Bourdin, nouvelle où j'ai appris le nom des figures du rock, ou un financier comme chez Romain Puertolas . Objectifs atteints ou non ? à vous de le découvrir en dévorant cet excellent cru, couverture illustrée par Plantu.
Philippe BESSON • Françoise BOURDIN • Maxime CHATTAM • François d'EPENOUX • Éric GIACOMETTI • Karine GIEBEL • Philippe JAENADA • Alexandra LAPIERRE • Agnès MARTIN-LUGAND • Véronique OVALDÉ • Romain PUÉRTOLAS • Jacques RAVENNE • Tatiana de ROSNAY • Leïla SLIMANI • Alice ZENITER
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, Nouvelles françaises | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : philippe besson • françoise bourdin • maxime chattam • françois
09/11/2018
La femme brouillon ...en poche
"Le bébé siphonne notre tendresse. On s'adresse l 'un à l’autre comme deux vieux collègues exaspérés."
Entre bonheurs et inquiétudes, "Le père du bébé aurait fait une bien meilleure mère. Son instinct de sacrifice est plus développé, et c'est toujours lui qui fait les crêpes.", mais toujours avec beaucoup d'humour et d'énergie, la narratrice nous raconte les étapes obligées de sa grossesse, de l'annonce à une conclusion qui évoque très joliment la transmission.
Celle qui se définit successivement ou simultanément comme "la gosse qui n'a pas les mots, l'ado blessée, la femme-lézard, la féministe, l'écrivaine et la demi-mère", une femme brouillon donc, dont on devine que le rapport à sa propre mère est plutôt douloureux, pose des mots très justes sur cette grossesse.
Si elle souligne l'attendrissement de certains devant son gros ventre, elle n'en oublie pas néanmoins que, bizarrement, ce dernier semble devenir invisible dans les files d'attente ou les transports en commun...Avec lucidité, elle décrit ses propres contradictions de féministe et de mère en devenir, tiraillée entre le fait qu'on veuille la limiter à ce rôle et l'acceptation de ce rôle, trop normatif à son goût.
Ne perdant jamais son regard critique, dénichant la violence sous la guimauve, la narratrice s'en tire haut la main, ne reniant jamais son aspect revendiqué de Femme brouillon, bien loin des mères parfaites qui nous sont imposées comme modèles.
Un livre qui pose un regard décapant, drôle et intelligent sur la grossesse, voilà qui ne se refuse pas, quel que soit son âge !
Un grand coup de cœur, constellé de marque-pages !
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : amandine dhée
08/11/2018
Le jardin arc-en-ciel ...en poche
"Mais peut être certaines choses s'offraient-elles à notre regard justement parce que nous étions en marge."
Izumi, jeune mère célibataire, rencontre une lycéenne en classe de Terminale au moment où celle-ci se prépare à se jeter sous un train. Les deux jeunes femmes vont tomber amoureuses et se réfugier dans un village de montagnes retiré.
Là, elles ouvriront une maison d'hôtes qui accueillera tout le monde, mais particulièrement ceux qui souffrent ou se sentent rejetés.
La famille créée par ces deux femmes et leurs enfants ne sera pas toujours bien accueillie mais saura faire face aux préjugés, tout en préservant sa bienveillance.
Les différents narrateurs, dont les enfants de cette famille, offrent chacun leur ressenti face aux événements parfois dramatiques, mais toujours présentés de manière un peu ouatée. Une lecture où l'on retrouve toute la délicatesse de Ito Ogawa.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : ogawa ito
07/11/2018
Le 12ème chapitre
Un auteur à succès et son éditeur , amis d'enfance, reçoivent simultanément un manuscrit évoquant une tragédie ayant marqué leur jeunesse , rappel dont ils auraient bien aimé faire l’économie. Les envois se succèdent, seul le 12 ème chapitre diffèrera.
La culpabilité est au cœur de ce roman qui n' a pas su me captiver tant l'écriture est dissonante, l'auteur se permettant tantôt des facilités, tantôt faisant preuve de davantage de rigueur.
Quant à l'intrigue, elle m'a aussitôt évoqué d'autres textes, et pourtant je ne suis pas férue de polars.
Merci à l'éditeur et à Babelio.
06:00 Publié dans rentrée 2018, romans français | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : jerome loubry, schtroumpf grognon le retour
06/11/2018
les chants du large#netgalley
Finn, sa sœur aînée Cora et leurs parents vivent sur une île de terre-Neuve. Las, les morues et autres poissons ont disparu , l’île se dépeuple.
Finn et sa sœur dans un premier temps, puis Finn seul, sans jamais se plaindre, mais avec aisance et harmonie vont faire face à cette situation à leur manière.
Seul le nom de l'auteure, dont j'avais adoré le premier roman, m'a décidée à lire ce texte dont le thème n'avait rien d'emballant.
Bien m'en a pris car j'ai retrouvé l'écriture, toujours un ton au-dessous de ce à quoi on pourrait s'attendre, les ellipses tant narratives que stylistiques qui freinent juste avant de tomber dans le pathos ou le convenu.
Avec poésie, avec candeur, mais aussi détermination, les personnages d'Emma Hooper luttent contre la solitude, le chômage, sans jamais perdre de vue leurs sentiments.
Ces gens sont faillibles, mais les chansons de Terre-Neuve qu 'ils entonnent drainent à la fois le passé, irriguent le présent et ouvrent, si ce n'est vers un avenir, du moins vers une solidarité, une union à la fois poétique et fraternelle. Une atmosphère de fable et un grand coup de cœur.
Les Escales 2018. Poétiquement traduit par Carole Hanna.
06:00 Publié dans rentrée 2018, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : emma hooper
05/11/2018
Helena #MRL18
Partie s'entraîner en vue d'un tournoi de golf, Hailey, jeune fille versatile appartenant à une jeunesse dorée tombe en panne de voiture dans un coin paumé du Kansas.
Elle est recueilli par Norma, veuve de 39 ans, sur le point de conduire sa benjamine, Cindy à un concours de Mini Miss.
L'ambition, la volonté de réussir pourraient rassembler ces deux femmes mais Tommy, l'un des fils de Norma va, par sa violence et sa folie, changer la donne et tout faire basculer dans l'horreur.
Alternant les points de vue des principaux personnages, le roman de Jérémy Fel révèle leurs motivations les plus noires. Sous couvert d'être une mère tigresse prête à tout pour défendre ses petits, Norma n'est-elle pas en fait mue par a lâcheté et la peur du qu'en dira-t-on ?
L'intrigue, diabolique, enserre ses personnages dans des situations inextricables qu'ils sont les seuls à voir créées par leur violence et leur désir de se venger.
Un roman d'une noirceur absolue. Ou presque.
Éditions Rivages 2018. 732 pages parfois difficilement supportables.
Merci aux marraines , à Rakuten et à l'éditeur.
Leiloona a été conquise: clic.
06:00 Publié dans rentrée 2018 | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : jérémy fel
01/11/2018
Culottées ...en poche
"Accepte le fait que tu es beaucoup plus que tu penses être." Cheryl Bridges (athlète)
Un énorme merci à Pénélope Bagieu qui avec ces Culottées nous présente avec humour et délicatesse des femme connues ou pas (j'en ai découvert une flopée),originaires d'Europe, d'Amérique du Nord ou du Sud mais aussi d'Inde, d'Afrique ou d'Afghanistan.
Contemporaines ou non, elles ont pour point commun d'avoir dû lutter pour imposer leurs idées dans un monde d'hommes, lutter pour obtenir leur liberté,leur singularité ,lutter pour vivre tout simplement
.Nous en connaissons certaines, mais pas forcément sous tous leurs aspects. Ainsi Hedy Lammar, sex- symbole par excellence (elle a été l'héroïne totalement dénudée du film "Extase" en 1931 à l'âge de 17 ans) a-t-elle été à l'origine de plusieurs inventions, d'abord méprisées par l'armée américaine (une actrice, pfff)!J
J'ai particulièrement été touchée par la très discrète Giorgina Anzulata, (1908-2001) qui, avec très peu de moyens, mais beaucoup de bonnes volontés, a réussi à sauver un phare de l'ensablement. Quant au parcours de de la jeune rappeuse afghane Sonita Alizadeh qui a réussi à échapper à plusieurs mariages forcés , il est marqué par la réification du corps des femmes, qui n'est envisagé que comme marchandise.
Pénélope Bagieu ne se gêne pas pour tacler au passage certains hommes célèbres. Ainsi Haroun Tazieff qui , à plusieurs reprises rabaissa le travail des volcanologues Katia et et Maurice Krafft ou de souligner au passage que c'est sous Barack Obama que l'avocate Jesselyn Radack se retrouva au cœur d'un véritable cauchemar car elle avait été une lanceuse d'alerte.
C'est donc tout un panel de femmes courageuses, intelligentes et inventives qui s'offre à nous, de quoi offrir de beaux exemples à nos filles et garçons.
- Pénélope Bagieu a réalisé ici une œuvre d'utilité publique en nous offrant tous ces modèles valorisants de femmes.
Attention mon billet évoque les 2 tomes de la version initiale. Dans la version poche, le tome 1 est en deux volumes.
06:00 Publié dans BD | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : pénélope bagieu
31/10/2018
Traders, hippies et hamsters...en poche
"La façade de la normalité est intacte. Tout va pour le mieux."
Doro(thy) et Marcus, vieux hippies gauchistes , juste devenus excentriques aux yeux de leur progéniture, ont décidé de se marier.Une surprise pour leurs trois enfants : Serge (ne dites pas à ses parents qu'il est trader, ils le croient thésard en mathématiques); Clara, enseignante dans une école pour enfants défavorisés et Oolie, trisomique sur le chemin de l'indépendance.
Cette union est donc l'occasion de revisiter le passé, les idéaux égratignés par la réalité, mais sans rancoeur ni idéalisation a posteriori.
Roman polyphonique, Traders, hippies et hamsters est sympathique en diable, plein d'humour et fait confiance à l'intelligence de son lecteur. Voyez comment Marina Lewycka pratique l'ellipse narrative: "En l'espace de six mois, Julia et Pete s'étaient séparés et Julia étaient retournée à Merseyside, le coeur brisé et, dans la main, une touffe de cheveux auburn arrachée à Moira." Quant au personnage désinhibé de Oolie, il suscite à la fois humour et tendresse. Un roman chaleureux et attachant , plein d'humanité, de mixité sociale, et qui fait un bien fou !
Traders, hippies et hamsters, traduit de l'anglais, Éditions des deux terres 2013, J'ai lu 2018320 pages à savourer !
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : marina lewycka
30/10/2018
Bouche cousue
"Qui donc me rendra mon prénom ? "
En 93 petites pages, d'une efficacité pleine de délicatesse, isabelle Minière relate une rupture amoureuse, ses prémices et ses conséquences.
Elle centre son propos sur le pouvoir des mot, l'homme abandonné passant progressivement de son surnom "Tintin" à ...rien. "Elle ne m'appelait plus du tout. J'avais perdu mon prénom et mon surnom."La versatilité de Flora, l'ex-amoureuse ira même encore plus loin dans la cruauté désinvolte, n'hésitant pas à interchanger des appellation d'un destinataire à un autre.
Du coup, l’abandonné ,qui ne récupérera son prénom qu'à la toute fin du récit, en perd la voix au sens propre du terme. Il lui faudra suivre tout un processus personnel de réappropriation de son identité pour la récupérer; processus qui n'ira pas sans mal car "On veut changer, mais on a toujours un peu peur de se perdre en cours de route." , réalisant peut être la prédiction inscrite dans son prénom.
Un livre raisonnablement optimiste, léger en apparence , mais plein de finesse et dont il faut noter la délicieuse couverture de Vlou.
Un vrai plaisir que de retrouver Isabelle Minière , éditée ici chez Le Verger.
Merci à l'éditeur et à Babelio.
06:00 Publié dans rentrée 2018, romans français | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : isabelle minière
29/10/2018
Mon frère
" Sa première pensée, quand le diagnostic [Parkinson] tomba, fut pour l'épouse :
-Elle veut que je me secoue, elle va être servie."
Dans la fratrie, il ne reste plus que Daniel, le cancre, devenu écrivain qui se pose la question, des années après la disparition du frère préféré de la famille, Bernard : Qui était-il vraiment ?
Daniel Pennac, intercalant des passages de son spectacle consacrè à la nouvel Bartelby, revient ici sur la personnalité de ce frère dont il estime qu'il était un lointain cousin du héros de Melville.
Plein d'humour, d'amour et d'empathie, on devine, en filigrane que ce frère, sans jamais ce plaindre, n'a pas eu une vie totalement épanouissante, ni d'un point de vue personnel, ni conjugal.
On ne tombe pourtant pas dans le règlement de compte, le temps sans doute apaisé les esprits, et cela n'en rend que plus palpable l'émotion, contenue, certes, mais infiniment présente.
Merci à Cathy et Laurent pour le prêt.
05:40 Publié dans Autobiographie, rentrée 2018 | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : daniel pennac