24/02/2020
Les dessous lesbiens de la chanson
"Les chansons sont parfois bien utiles pour montrer ce que les yeux ne sauraient voir."
Qu'elles soient ouvertement des hymnes saphiques" comme "Ouvre" de Suzy Solidor (chanson dont les deux derniers couplets ont été censurés par sa maison de disques ), qu'elles avancent masquées (évoquant des thèmes qui parlent seulement aux initiées, la couleur mauve par exemple) ou laissent libre court à l'interprétation de l'ambiguïté d'un pronom ou d'une situation, les chansons véhiculent la réalité parfois cachée, parfois opprimée de l’homosexualité féminine.Classés en quatre grandes parties, ces textes sont analysés tour à tour dans leur individualité, faisant aussi la part belle à la personnalité de leurs interprètes ou de leurs auteurs ou autrices.
C'est ainsi que l'on croise sans surprise Marie-Paule Belle ou Hoshi, mais aussi Anne Sylvestre, Isabelle Mayereau ou Vanessa Paradis dont le fameux Joe le Taxi était en fait une femme liée au monde la nuit lesbienne. Plus surprenant encore, j'ai appris que "Comme un Ouragan " de Stéphanie de Monaco avait été annexé comme "hymne lesbien".
Mais cet ouvrage présente également le grand mérite de mettre en avant de grandes figures du passé, des éclaireuses, des frondeuses qui ont chanté aussi bien la naissance de l'amour que le coule lesbien âgé, comme Pauline Julien avec "Les deux vieilles" (paroles de Clémence Desrochers).
Les dessins, tout en délicatesse et en finesse de Julie Feydel accompagnent ce panorama exhaustif et diablement intéressant dont la bande son est accessible via un QR code. Une magnifique découverte !
Un grand merci aux Editions iXe et à Babelio
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15/06/2019
Des nuages plein la tête...en poche
"Le temps est un bien précieux. J'ai décidé de mener une vie de luxe alors qu'ici, en estive, il n' y a rien. Conditionné par cette nature sauvage, l'éloignement, le manque de tout, l'exceptionnel devient banal. Ici, tout semble couler de source."
Éleveur, vacher et adepte de la course en montagne, Brice Delsouiller nous livre ici un texte à la fois posé et exalté, plein de la belle énergie qui l'anime.
Arte ,ayant consacré un documentaire à cet homme atypique qui part, seul, garder 400 vaches durant les mois d'été en montagne (Haute-Ariège) ,a attiré l'attention sur cet amoureux de la solitude et de la liberté.
Brice Delsouiller ne nous cache rien des difficultés mais aussi des joies de cette vie ascétique, dure, mais riche d'émotions, que bien peu d'entre nous pourraient mener.
Un récit qui aère la tête et qui nous rappelle que tout le monde n'est pas fait pour entrer dans les moules que la société nous impose.
250 pages piquetées de marque-pages parce qu'en plus le bougre possède un joli brin de plume
06:00 Publié dans Document | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : brice delsouiller
11/02/2019
Dernières nouvelles de la science/éditos carrés
"Pour laisser une trace dans l'histoire,
Brossons-nous les dents matin et soir,
Car on pourrait un jour tomber entre les main
D'un paléogénéticien."
Si à 7h20 chaque matin, vous avez un billet d'excuse pour sécher l'édito carré matutinal de Mathieu Vidard sur France Inter, ,si vous en avez raté certains, ou si petits gourmands, vous en demandez davantage, réjouissez-vous celui qui arrive à faire aimer la science même à des littéraires pur jus vient de rassembler et d'enrichir ses chroniques.
Vous saurez ainsi que "Peu de temps après sa naissance, un poussin sait compter au moins jusqu'à cinq."(De quoi clouer le bec à la primipare persuadée qu'elle a engendré un surdoué...) ou découvrirez enfin pourquoi les enfants nous épuisent (Ils ont "Une disposition à éliminer rapidement certains déchets métaboliques, comme le lactate; en conséquence, l'apparition de la fatigue est retardée et la récupération se fait plus vite"). Inversement, la science nous explique également pourquoi nos adolescents sont tout le temps fatigués (non, ils ne mentent pas).
C'est éclectique, bien écrit, souvent passionnant, de quoi commencer chaque journée en étant un peu moins bête.
Grasset France Inter 2019, un petit bréviaire à picorer de 379 pages.
06:00 Publié dans chroniques, Document | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : mathieu vidard
09/02/2019
Ces rêves qu'on piétine ...en poche
"Elle n'a jamais blessé personne. Elle n'a jamais haussé la voix. Elle a été à la hauteur. Elle s'est battue. Elle a menti. Elle a collé au personnage qu'on avait voulu faire d'elle. Digne de son rôle."
Montage alterné pour ce roman mettant en scène la fin de la Seconde Guerre mondiale: tandis que sont engagées les marches de la mort, Martha Goebbels et six de ses enfants se terrent avec quelques dignitaires nazis dans le bunker berlinois d'Hitler.
L'occasion de revenir sur le parcours de cette femme qui a bâti sa vie sur un mensonge (son père était juif) et a embrassé sans barguigner les thèses du nazisme pour livrer cours à ses ambitions.
L'occasion aussi de brosser un portrait saisissant et puissant des derniers massacres, tant par les soldats que par les populations civiles, des survivants des camps de la mort.
Faisant le lien entre les deux, les lettres (imaginées par l'auteur) qu’un père a adressées à la fille qui n'a rien fait pour le sauver.
Si le style de l'auteur est à la fois très évocateur mais sans pathos, je suis malheureusement restée à distance de ce texte, un peu pour me préserver et aussi parce que j'avais déjà lu plusieurs romans sur cette période historique .Ce dernier en a sans doute pâti.
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08/02/2019
Sur les chemins noirs...en poche
"Je préférais demander aux chemins ce que les tapis roulants étaient censés me rendre: des forces."
On l'a connu fanfaronnant sur les toits parisiens, mais c'est un chalet montagnard qui aura eu presque raison de lui. Rafistolé par des médecins dont il s'étonne qu'ils ne lui aient reproché, Sylvain Tesson, désormais sourd d'une oreille, paralysé du visage et doté de quelques vis dans la colonne vertébrale, décide de se soigner à sa façon.Pour cela , il parcourt ce qu'il appelle Les chemins noirs, cette "géographie de traverse" qui subsiste, loin de l'aménagement imposé au territoire.
Et c'est bien cette géographie, plus que le corps et l'âme en berne du narrateur qui sont au cœur de ce récit. Quelque fois sentencieux, mais le plus souvent poétique, Sylvain Tesson fait aussi quelques rencontres , parfois hautes en couleurs, mais le plus souvent fort modestes.
C'est cette poésie champêtre et cette modestie qui ont su emporter mon adhésion et me réconcilier avec le personnage et l'auteur.Le récit est bref et bien moins nostalgique que celui de Benoit Duteurtre, plus axé lui sur l'histoire.
06:00 Publié dans Document, le bon plan de fin de semaine | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : sylvain tesson
06/02/2019
L'amour après ...en poche
"Il faut déserter les modèles, fuir leurs pièges, leurs barbelés invisibles. L'important, c'est d'avoir de l'air, alors tout peut commencer."
Années 50, Marceline Loridan -Ivens qui est "une fille de Birkenau" est rentrée en France et ne tarde pas à prendre son indépendance vis à vis de sa mère.
La jeune femme dont le corps a été figé dans l'adolescence par le camp a soif de vie et de culture. Elle enchaîne aussi les aventures amoureuses ,même si son corps ignore toute sensation de plaisir, de désir ,et restera à jamais "sec", c'est à dire stérile, sans que Marceline le regrette, bien au contraire.
La nudité reste attachée au regard d'un médecin décidant de la vie ou de la mort et Marceline aura toujours des difficultés à se dénuder, y compris dans un contexte médical.
Un récit rare qui évoque le corps, les sentiments d'une jeune femme fracassée par les camps mais qui est pleine d'ardeur, de vie, d'énergie et d'une formidable liberté.
06:00 Publié dans Biographie, Document, le bon plan de fin de semaine | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : marceline loridan-ivens
10/12/2018
Dictionnaire amoureux du Nord
"Finalement, les gens du Nord, il sont comme les autres. Mais en mieux..."
Comment ne pas se sentir flatté, dans un premier temps, par cette citations de Jean-Louis Fournier, extraite de l'article "Gens"?
Moi qui adore tout à la fois les dictionnaires, l'auteur de Où on va papa ? et ma région , je croyais dévorer à belle dents ce magnifique pavé d'un peu plus de 500 pages.
Comme le reconnaît lui-même l'auteur, il est d'abord plus habitué aux formats courts que longs, et ça se sent. De plus, le côté "informatif" (et plat, stylistiquement) du dictionnaire l'emporte parfois un peu trop sur le côté "amoureux" annoncé dans le titre de la collection, même si l'auteur n'hésite pas à distribuer coups de cœur et de griffes, ainsi qu'à évoquer ses souvenirs familiaux.
Mais, cette fois, hélas, le mélange des genres n'a pas pris , en ce qui me concerne. Il n'en reste pas moins que j'ai appris plein d’informations sur la région des Hauts de France (appellation digne d'un promoteur immobilier).
09:35 Publié dans Document | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : jean-louis fournier
18/06/2018
Des nuages plein la tête/ Un pâtre en quête d'absolu
"Le temps est un bien précieux. J'ai décidé de mener une vie de luxe alors qu'ici, en estive, il n' y a rien. Conditionné par cette nature sauvage, l'éloignement, le manque de tout, l'exceptionnel devient banal. Ici, tout semble couler de source."
Éleveur, vacher et adepte de la course en montagne, Brice Delsouiller nous livre ici un texte à la fois posé et exalté, plein de la belle énergie qui l'anime.
Arte ,ayant consacré un documentaire *à cet homme atypique qui part, seul, garder 400 vaches durant les mois d'été en montagne (Haute-Ariège) ,a attiré l'attention sur cet amoureux de la solitude et de la liberté.
Brice Delsouiller ne nous cache rien des difficultés mais aussi des joies de cette vie ascétique, dure, mais riche d'émotions, que bien peu d'entre nous pourraient mener.
Un récit qui aère la tête et qui nous rappelle que tout le monde n'est pas fait pour entrer dans les moules que la société nous impose.
250 pages piquetées de marque-pages parce qu'en plus le bougre possède un joli brin de plume.
Éditions Michel Lafon 2018
* à retrouver sur Youtube
06:00 Publié dans Document | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : brice delsouiler
04/04/2018
Dîner avec Edward
Sous l'amicale pression d'une amie, Isabel accepte de dîner régulièrement avec le père nonagénaire de cette dernière. Repas raffinés, nécessitant des préparations complexes, mais aussi réflexions sur l’existence sont au menu.
Un texte agréable à lire, mais qui , au fil du temps distille un ennui poli. Edward est charmant mais n'a pas su me séduire. On avait déjà eu "Mange, prie, aime", nous avons droit ici à Mange et aime. Un peu court non ?
Lu dans le cadre du Grand Prix des Lectrices de Elle.
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26/02/2018
J'apprends le français
"Ce que je leur devais aussi, c'est de dire que non seulement, ils nous apportent mais qu'ils nous rapportent. Si ce livre ne parvenait à persuader ne serait-ce qu'un seul lecteur, je n'aurais plus à rougir ni à regretter de m'y être dévoilée. L'accueil de l'étranger n'est pas une charité mais un échange. Il nous ouvre un monde dont nous n'avons pas idée. Il démultiplie nos points de vue, enrichit nos perceptions. Nous en tirons bénéfices."
Marie-France Etchegoin, journaliste de profession, s'est improvisée formatrice en Français Langue Étrangère auprès de migrants venus d'Afghanistan, d’Érythrée, du Soudan. Elle s'est très vite investie et a beaucoup appris, autant qu'elle a enseigné.
Tout dans cet enseignement est fluctuant car les migrants, en plus des épreuves tant physiques que morales qu'ils ont dû affronter, sont en butte aux rouages d'une administration kafkaïenne qui risque de les renvoyer dans le pays qu’ils ont fui.
Tout dans cet ouvrage généreux et engagé est intéressant au plus haut point. L'auteure y dévoile son propre rapport à la langue, car elle ne veut pas se tenir en retrait, comme une ethnologue distanciée, l'enthousiasme de ses élèves, leur foi en la France et en sa langue. J'y ai aussi découvert avec effarement la situation politique en Érythrée, un véritable enfer sur terre. Un livre nécessaire et passionnant, piqueté de marque-pages.
06:00 Publié dans Document, l'amour des mots | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : marie-france etchegoin