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13/09/2025

Ne jetez pas les sirènes avec l'eau du bain...en poche

 

"Il y a la queue. c'est stupéfiant. Les gens se sont mis en file indienne et attendent leur tour. Ils veulent payer pour pouvoir s'immerger dans un grand bac aveuglant et strident d'hallucinations auditives générées par l'écho, hallucinations qui empêchent de distinguer un cri de détresse d'un éclat de rire. "

Elles sont trois femmes, et un petit garçon, Elliott, sept ans, à se croiser dans une piscine municipale. La piscine comme une parenthèse dans leurs vies, parenthèse appréciée ou non. L'occasion de revenir sur leur enfance, dont Sidonie ne semble pas être sortie, mais aussi sur leurs corps (Laure n'a pas oublié qu'avant elle était dodue) ou leur relation avec leur compagnon (celui de Marion régente la vie familiale).
Rien de bien original ? Peut- être. Mais tout l'art de l'autrice de du vent dans mes mollets, que nous retrouvons ici avec beaucoup de plaisir est de procéder par petites touches, de ne jamais forcer le trait et de doser au plus juste les émotions, sans oublier quelques traits d'humour dont elle est spécialiste.raphaële moussafir
Elle donnerait presque envie à ceux qui ,comme Sidonie,envisagent la piscine comme un enfer chloré d'aller y faire un tour. Un très agréable moment de lecture.

08/09/2025

DJ Bambi

"Les gens voudraient savoir ce qu'on ressent quand on ne fait partie d'aucun groupe, quand on en aurait envie mais qu'on  n'en a pas la possibilité, ils veulent par leurs  lectures se confronter à ce qu'ils craignent de vivre, connaître la souffrance d'autrui et découvrir ainsi de nouvelles facettes d'eux-mêmes. "

Depuis six décennies, celle qui a choisi comme nouveau prénom Logn, à savoir l'absence totale de vent, vivait dans un corps d'homme.  Il lui a fallu beaucoup de temps pour cerner son identité (était-elle homosexuelle?) et trouver le courage de le dire à sa famille.
Isolée quasiment de tous, seul son frère jumeau vient le voir quotidiennement, et même s'il est laconique, sa présence témoigne de son soutien et de son amour, la tentation du suicide n'est jamais bien loin.  L'attente de "l'opération du bas" et la rencontre d'une ancienne camarade de classe, journaliste qui veut écrire sur elle , conduit Logn à se plonger dans ses souvenirs.audur ava olafsdottir
La question de l'identité, mais aussi celle du temps car Logn considère qu'elle "n'[est]pas encore née"sont au cœur de ce roman tout en pudeur et poésie.
Le personnage de l'écrivaine, une certaine Audur T. , s'interroge beaucoup sur la pertinence de ce projet d'écriture qu'elle ne cesse de tourner dans tous les sens et finit par conclure:
"Pour être tout à fait honnête, Gudridur Logn,  tu es l'une des femmes les plus normales que j'aie jamais rencontrées. "
Audur Ava Olafsdottir n'a pas écrit un roman-dossier sur la transidentité mais un texte sensible, parfois humoristique, ni pessimiste, ni optimiste à tout crin, sur une quête d'identité qui a pris son temps pour aboutir. Un roman plein d'émotion et de justesse qui file sur l'étagère des indispensables.

 Traduction de l'islandais par  Eric Boury.

 Editions Zulma 2025

PS: Un roman qui donne envie de découvrir le roman de l'écrivain juif autrichien Felix Salten, Bambi, la vie dans les bois, publié en 1923, apparemment très différent de la version du dessin animé de Walt Disney...

07/09/2025

Assemblage...en poche

"La réponse: l'assimilation. Toujours, cette pression, pile à cet endroit. Assimilez-vous, assimilez-vous... Dissolvez-vous dans le melting-pot. Puis coulez-vous dans le moule. Pliez vos os jusqu'à ce qu'ils craquent, se fendent,jusqu'à ce que ça rentre. Forcez-vous à épouser leur forme. Assimilez-vous, voilà à quoi ils exhortent, à quoi ils encouragent. Puis ils froncent les sourcils. Encore. Et encore. Et toujours, en ligne de basse, sous le vocabulaire insistant de la tolérance et de la convivialité - disparaissez ! "

 

Elle a travaillé deux fois plus, su faire face à "cette course faite d'obstacles perpétuels", parce qu'elle est femme et parce qu'elle est noire dans un monde fait pour les Hommes Blancs.
Un monde où le racisme est soigneusement nié et où on exhorte les minorités à se fondre dans la masse, même si le vocabulaire , via ses connotations, porte la marque d'une Histoire et de ses préjugés. Un monde où on n'hésite pas à lui dire frontalement que si elle a été promue c'est parce qu'elle permet à l'entreprise de valoriser les minorités. Un monde où un employé d'aéroport, nonobstant le billet de classe affaire présenté, vous oblige à faire la queue au guichet auquel votre couleur de peau vous assigne.natasha brown
Cette violence larvée la narratrice s'en protège en se tenant à distance de ses émotions ,en apparence, mais la lave intérieure bouillonne et son regard acéré n'épargne personne . Même pas le jeune privilégié qui prétend l'aimer.
Un récit dense, sans concessions, qui file droit sur l'étagère des indispensables. 

06/09/2025

Copeaux de bois...en poche

" contrôle silhouette: biceps pectoraux abdos
   jamais été aussi musclée
   ni aussi bronzée si tôt dans l'année
   la forêt est à la fois ma salle de sport et mon institut de
beauté
   en un peu moins safe"

 Écrivaine et bûcheronne, une double casquette un peu bizarre, mais c'est celle d' Anouk Lejczyk (dont j'avais adoré le premier roman Felis silvestris )  qui nous livre ici, consigné au jour le jour, le récit de son apprentissage pour devenir bûcheronne.Anouk Lejczyk
Le corps,  la nature sont bien évidemment au cœur de ce texte surprenant par les contradictions qui le hantent: comment peut-on aimer la nature et couper des arbres ? Comment être un femme dans un monde majoritairement masculin ? Les réponses qui nous ici livrées sont souvent humoristiques  (le portrait d'un formateur  livré brut de décoffrage vaut sacrément le détour et se passe totalement de commentaires) ,mais aussi nuancées et inattendues.  Un texte à découvrir absolument.

05/09/2025

Fabriquer une femme...en poche

"   Ils se promènent dans le monde. Mais le monde est posé sur une énorme  machinerie suppliciante qui utilise le corps des femmes comme des rouages pour autoriser l'humanité à se promener , à boire des cafés, à naître et à mourir dans le bruit des pistons. "

  Dans ce roman, Marie Darrieussecq retrouve le personnage de Solange, héroïne de Clèves.  Solange a quinze ans , elle est enceinte et semble totalement engourdie par cette grossesse que la mère de sa meilleure amie, Rose découvre accidentellement. Il est trop tard pour avorter.
Solange connaît un accouchement  apocalyptique et donne naissance à un fils dont elle ne se préoccupe guère. marie darrieussecq
Ce qui la fait revenir à la vie, c'est le théâtre, découvert au lycée. Dès lors la jeune femme enchaîner les relations sans lendemain, connaît d'abord Bordeaux, puis Paris et ses fêtes des années 80, tout en essayant de mener à bien sa carrière d'actrice.
En parallèle, Rose, issue d'un milieu plus favorisé, semble suivre une voir toute tracée: études de psychologie,mariage avec son amour de jeunesse, enfants dans la foulée. De loin en loin, les amies se retrouvent et  l'autrice s'amuse à raconter, mais par petites touches, des événements selon le point de vue de chacune.  Et souvent le fossé est énorme...
Rien ne semble les relier, mais pourtant ces deux jeunes femmes si différentes maintiennent leur lien d'amitié jusqu'au moment qui doit être un sommet pour Solange : la première d'un film américain dans lequel elle a tourné...
Les années 80 , l'arrivée du Sida, les fêtes, tout ceci est particulièrement bien rendu dans ce roman qui fait la part belle aux femmes. Souvent, les personnages nous demeurent opaques, mais c'est tant mieux, car qui peut dire qu'on agit toujours de manière sensée ? Un roman dont la structure est particulièrement bien maîtrisée.

04/09/2025

#Riendeplusillusoire #NetGalleyFrance !

"Bien que toutes les histoires aient un dénouement, aucune ne se termine vraiment, elles s'entrelacent comme l'ont fait celles qui vont suivre en espérant former ensemble une seule et même trame. "

Trois voyageurs ,dans un train de nuit ,vont entamer une conversation sur les liens entre fiction et réalité. En effet, faute d'avoir emporté un livre, la narratrice, Alicia, prête attention à la conversation entre Terry, écrivain américain et mentor du troisième comparse, son élève,  Bou. marta-pérez carbonell
Terry s'interroge sur les répercussions de son roman, inspiré de l'histoire ambiguë qu'il a eue avec un dénommé Hans. En effet,  ce dernier, furieux de voir sa vie transposée dans une œuvre de fiction, a disparu. 
Une situation de départ  plutôt classique, des réflexions sur les points de vue différents sur une même histoire, l'influence des lieux, envisagés comme des décors d'une fiction, tels sont quelques uns des thèmes abordés dans ce roman intéressant et fluide mais dont je conserverai pas grand chose au final, tant les personnages m'ont semblé manquer de profondeur.

Traduit de l'espagnol par Isabelle Gugnon.marta-pérez carbonell

 Editions les Escales 2025. 

28/08/2025

#Couplets #NetGalleyFrance !

"Et soudain c'était le futur. Tu étais libre d'aimer qui tu aimais. "

En couple depuis huit ans, la narratrice vit à Brooklyn avec son petit ami. Elle tombe follement amoureuse d'une femme et sa vie bascule. maggie millner
Toutes les étapes de la passion sont ici revisitées dans une langue  qui se joue de l'espace, des codes typographiques , multipliant les métaphores sensuelles. 144 pages denses et poétiques pour faire vibrer le langage de l'amour.

 Traduit de l'anglais par Julia Kerninon.

 Editions Les  Escales 2025. maggie millner

25/08/2025

En ces temps de tempête...en poche

Vous êtes une bulle dans une bulle dans une autre bulle. Votre ville, votre État, votre pays- pour l'instant, vous occupez une position privilégiée. Vous avez gagné à la loterie géopolitique. Et c'est dans la nature humaine de protéger ses acquis, qu'on les mérite ou non. "

 

Les tempêtes mentionnées dans le titre du dernier roman en date de Julia Glass peuvent se prendre aussi bien au sens propre qu'au sens figuré. Nous sommes en effet dans un futur très proche où le réchauffement climatique se fait de plus en plus violent , où les attentats continuent à faire des victimes, aussi bien physiques que psychologiques . julia glass
Pour rendre compte de tout cela , l'autrice se penche sur le microcosme privilégié de Vigil Harbor et offre tour à tour la parole à huit personnages, d'âge et de conditions sociales différents (on y retrouve d'ailleurs un jardinier apparaissant dans un de ces précédents romans). Communauté qui sera troublée par l'arrivée d'un homme et d'une femme qui ne sont peut être pas ce qu'ils affirment être...
Gros roman choral de 598 pages, En ces temps de tempête se dévore puis se savoure tout à la fois. A son habitude, Julia Glass y fait preuve d'un grand sens de la construction narrative, mais aussi d'une grande humanité, se penchant avec beaucoup de bienveillance sur ses personnages.  Suspense et humour sont au rendez-vous , il est grand temps de craquer !

Et zou, sur l'étagère des indispensables.

 

Gallmeister 2023, traduit de l'américain par Sophie Aslanides.

22/08/2025

Peau d'ourse

"J'attends plus qu'un truc: me faire avaler par la montagne. "

De son prénom, Nina, elle ne veut plus rien entendre. Elle s'est approprié le surnom peu glorieux attribué par les autres: "Mont Perdu":  "Un mont en forme de bouse. C'était parfait pour me rebaptiser. " 
Elle c'est donc Mont Perdu et elle résume ainsi sa vie : "16 ans, moche et village de merde." , village auquel elle est farouchement attachée car situé non loin de ses sœurs, les montagnes. grégory le floch
Son corps gigantesque, se couvrant de plus en plus de poils, son orientation sexuelle (la seule queer du village), tout cela l"isole et la victimise au lycée. Elle crache donc sa rage  et ses mots déboulent comme un torrent, adressés à une amie imaginaire à qui elle avoue son amour pour Kelly et son rêve de fusion dans la montagne. Cette montagne qu'elle souffre de voir martyrisée par les chasseurs et les hommes avides. 

 Flirtant avec le fantastique et l'univers du conte, ce roman évoque à la fois des problématiques écologiques mais brosse surtout le portrait d'une adolescente pleine de fureur face aux transformations de son corps, à son appétence sexuelle, fureur que seule la nature apaise. Cette violence contraste avec des passages poétiques où s'expriment des animaux, grands ou petits, des éléments naturels. Se livre aussi, pied à pied , un combat entre l'humain et l'animal car l'auteur inscrit un mythe lié à l'ours dans une réalité contemporaine. 
Un roman qui dépeint la férocité adolescente et en montre toute la ferveur.  Une écriture puissante et inspirée. Et zou sur l'étagère des indispensables. 

 Merci à l'éditeur et à Babelio. grégory le floch

 Editions du Seuil 2025. 

 

21/08/2025

#Lesvulnérables #NetGalleyFrance !

" Quelque chose manque. Quelque chose a été perdu. Je crois que ce questionnement est au cœur de mon  écriture. "

En pleine pandémie mondiale, une écrivaine s'interroge sur les relations entre les gens, sur les liens entre fiction et réalité, sur son écriture, elle revient aussi sur son passé. Sa pensée semble vagabonder, de digressions en digressions mais toujours pertinente et intéressante. sigrid nunez
Au cœur de cette réflexion également, le récit de gardiennage de perroquet qu'elle a vécu dans un appartement luxueux, en compagnie de l'étudiant velléitaire, qui, au départ était chargé de veiller sur l'animal. L'occasion d 'observer tout à la fois un animal surprenant et un échantillon perturbé de la jeunesse contemporaine. 
On s'attache à cette pensée qui avance toujours d'un pas sûr et on souligne à tour de bras les réflexions et les formules de Sigrid Nunez.

Editions Stock 2025.