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31/08/2010

Babyfaces

"Tu n'es pas grosse. Tu es puissante."

Pas facile la vie de Nejma. Même si elle n'est pas violente, tout le monde la craint  dans son école primaire, car moche, mal habillée et renfrognée, ça fait beaucoup pour une seule fille . En plus, la voici accusée d'avoir salement amoché Jonathan Suyckerbuck, grand amateur de catch !
Il lui faudra accepter l'aide  de son ami, le freluquet Raja et d'Isidore , le vigile du supermarché, pour se sortir de cette sale affaire et même se sortir du marasme qu'est sa vie.31fm1bkQZNL._SL500_AA300_.jpg
Marie Desplechin prête toujours une attention particulière aux habitants de ce qu'on appelle "les quartiers", ces ensembles clos, excentrés, qui enferment les populations et les isolent. D'où l'importance d ela passerelle qu'emprunte Nejma et qui exerce parfois sur elle une fascination un peu morbide.
L'auteur s'est ici penchée sur le phénomène du catch , nouvel engouement des enfants, en particulier dans les quartiers populaires. Pas question pour autant de cautionner un phénomène qui peut s'avérer dangereux -voir l'accident de Jonathan et la fermeture (un peu trop) providentielle de l'école de catch. C'est dans un autre sport que Nejma trouvera sans doute sa rédemption.
Malgré la gravité de la situation décrite, Marie Desplechin parvient toujours à montrer à ses personnages une lueur d'espoir, reposant sur la solidarité et la fraternité. Seule, Nejma ne peut rien. C'est en s'ouvrant sur les autres et en acceptant leur aide qu'elle parviendra à s'en sortir. Un livre généreux et chaleureux. On n'en attendait aps moins de l'auteur de La prédiction de Nadia ,qui se déroulait aussi dans ces quartiers d'Amiens.

Babyfaces, Marie Desplechin, Ecole des Loisirs, collection neuf, 2010, 139 pages

30/08/2010

L'arbre du père

"La maison se désintégrait, tout comme nous; ça méritait bien une fête."

Une famille australienne subit brutalement un deuil, celui du père de famille. Simone, la narratrice , âgée de neuf ans à l'époque, trouve refuge dans le flamboyant qui pousse devant la maison et y entend la voix de son père. La mère qui ne peut accepter la disparition de son époux, va elle aussi voir dans ce symbole un moyen de faire face . Mais les racines du flamboyant menacent la maison et il faudrait couper l'arbre...
Dans ce roman tour à tour poétique et fantastique, Judy Pascoe analyse avec finesse les sentiments de cette famille qui doit affronter le deuil. Chacun se débrouille comme il peut pour arriver à supporter l'absence paternelle. La narratrice qui prend en charge  ce récit a postériori le fait sans se donner le beau rôle et revient sur les événements avec lucidité, évoquant les souvenirs d'une année marquée par la chaleur et la solitude malgré la sollicitude de l'entourage, voisinage compris.51suZfTqdnL._SL500_AA300_.jpg
Chaque personnage, même secondaire,  est croqué avec une justesse confondante et devient aussitôt partie intégrante de l'univers que Judy Pascoe réussit en un peu moins de deux cent pages à créer.
Quant à la nature australienne, elle tient un rôle exceptionnel, tour à tour réconfortante ou dévastatrice, donnant lieu à des scènes très visuelles qui n'ont pu qu'inciter à l'adaptation cinématographique du roman.
Un concentré d'émotions qui chahute le lecteur mais une écriture qui ne verse jamais dans le pathos, un texte très visuel et captivant.

L'arbre du père ,Judy Pascoe, traduit de l'anglais par Anne Berton, 10/18 2010, 191 pages


29/08/2010

Vivement l'avenir

"La vie m'apprend de force, et c'est tant mieux."

Alex, jeune femme trentenaire volontairement sans amarres, a atterri un peu par hasard chez Marlène. Marlène , la forte en gueule qui malnène avec une belle ardeur la langue française et son mari , sans oublier celui qui lui pourrit un peu beaucoup ses rêves, son beau-frère handicapé, rebaptisé  affectueusement Roswell par Alex.7da8bf3429_roger.jpg
Bien qu'elle s'en défende, la jeune femme va s'attacher de plus en plus à ce Picasso en volume ainsi qu'à deux autres garçons de son âge , Cédric et le Mérou, qui font le désespoir de leurs parents à osciller entre glandouille et chômage.
Cette rencontre sera peut être le déclic qui donnera envie à ces trentenaires angoissés de se lancer car "Combien de gens s'abonnent au malheur, tout seuls, comme des grands, et ne résilient plus jamais l'abonnement ? "
Des personnages sans prestige mais pas sans panache , une vie quotidienne parfois tristouille mais qu'il suffit de bousculer un peu pour la faire briller de nouveau, redonner un peu de lustre aux rêves du passé, voici un joli programme que nous propose Marie-Sabine Roger. On y croit le temps du livre et on collecte avec plaisir les citations comme autant de gri-gri pour les jours sans.
La construction alterne les points de vue et génère le sourire qand on voit comment une même situation peut être interprétée différemment par les protagonistes.
J'ai particulièrement apprécié le rapport aux mots qu'ont les personnages: Alex qui mine de rien rectifie les expressions de Marlène, qui s'enferre de plus belle, Le Mérou qui dispose de certains mots  définitifs, mais aussi la poésie qui se fraie un chemin à travers le langage entravé de Roswell...Une écriture qui n'en fait jamais trop et ne tombe pas dans la joliesse, un très beau moment de lecture.

Vivement l'avenir, Marie-Sabine Roger, Editions du Rouergue, la brune 2010 , 302 pages  Sschuper ! comme dirait Roswell.

Un grand merci Dame Cuné !

 

 

28/08/2010

Une forme de vie

"Les pays de l'Est sont excellents pour l'ego, je l'ai souvent remarqué."

A l 'opposé d'Un artiste de la faim kafkaïen, le G.I qui écrit d'Irak à Amélie Nothomb veut mettre en scène son obésité monstrueuse , devenir en quelque sorte un artiste de la graisse. S'engage alors un étrange échange de missives qui va susciter l'intérêt de notre romancière belge préférée.
Je n'aime que les romans d'Amélie Nothomb où elle se met en scène (voilà qui est dit ) avec une justesse  et une attention aux autres tout à fait remarquables. 41WL5CVhL+L._SL500_AA300_.jpg
Ici, elle aborde avec finesse et précision les relations épistolaires qu'elle entretient avec ses lecteurs et cela nous vaut une description pertinente des vraies lettres qui ont "pour sens et mission l'épiphanie du destinataire."
La pirouette finale m'a un peu laissée sur ma faim mais j'ai retrouvé avec bonheur celle qui semble toujours être juste et ce quelque soit la situation (je l'ai vue dans ce qui s'est avérée être une émission littéraire qui tenait plus d'un jeu digne d'Intervilles que de Bouillon de culture et imperturbable, entre deux épreuves, parler sans faillir de son dernier roman !) .

Merci Cuné !

Mango a aussi été séduite.

Une forme de vie, Amélie Nothomb, Albin Michel 2010 , 169 pages, un assez bon cru .

27/08/2010

'Ta mère

Des fils, des mères, dont les destins s'entrelacent pour échapper à l'armée russe, pour échapper à la guerre en Tchétchénie, pour retrouver une mère dans une Saint-Péterbourg  étouffant sous la chaleur et sous les bâches de la grande rénovation en vue du tricentenaire de la ville.
Mais peut-on échapper à son destin et à la violence dans une ville conçue pour que chacun soit exposé au regard de tous ?41z7kw3aHxL._SL500_AA300_.jpg
'Ta mère tisse le destin de trois garçons qui peinent à trouver leur place dans un monde où toute échappatoire semble impossible. Des brèches semblent s'ouvrir mais c'est pour que les mâchoires d'un piège cruel se referment sur le fugitif . La violence est omniprésente, elle sature ce récit qui pourtant ne sombre jamais dans le voyeurisme ou la complaisance. Un récit qui orchestre différents points de vue , sans que l'on se perde, et établit un lien entre Brésil et Russie  , justifiant ainsi que ce roman se déroulant à Saint-Pétersbourtg été écrit par..un Brésilien ! Un roman âpre et fort, où l'amour et la tendresse ne sont que de faibles lueurs mais dont les pages résonnent longtemps en nous.
A découvrir absolument !

'Ta mère, Bernardo Carvalho, traduit du brésilien par Geneviève Leibrich,  Editions Métailié 2010, 216 pages ardentes.

26/08/2010

Un bûcher sous la neige

"De nos jours, qui prend le temps de soigner son âme ? "

"Gueuse", "malfaisante"mais aussi et surtout "sorcière" voilà quelques uns des mots qui stigmatisent Corrag, jeune fille qui s'apprête à subir l'ordalie par le feu au coeur de l'Ecosse du XVIIème siècle.41NgVKFn1mL._SL500_AA300_.jpg
Quel crime at-elle commis ? Aucun, hormis le fait d'avoir soigné par des plantes . Aucun , si ce n'est d'avoir vécu en dehors de la compagnie des hommes, solitaire et sauvage, les cheveux pleins de papillons et de toiles d'araignées, accordant son attention aux endroits, aux animaux sauvages, au moindre frémissement de la nature dans laquelle elle vit en osmose.
Elle a été aussi témoin d'un massacre et c'est à ce titre que le Révérend Charles Leslie l'interroge dans la prison où Corrag guette la fin de l'hiver , la saison dont elle se sent la plus proche, fin de l'hiver qui verra s'enflammer le bûcher que l'on construit pour elle.
Au fur et à mesure du dialogue qui s'instaure, nous verrons une réelle communication s'établir entre Corrag et le Révérend. Car si la jeune fille connaît les plantes et leurs bienfaits, elle a aussi le don de transmettre sa vision du monde, faisant fi des luttes intestines qui opposent les Hommes dans cette période troublée de l'Histoire.
Le bûcher sous la neige
est un roman où couve la braise, celle des sentiments de Corrag, analysés avec finesse et sensibilité par Susan Fletcher. C'est aussi un texte qui fait la part belle à la Nature en général et aux plantes en particulier, ces plantes dont les vertus inaugurent chaque chapitre.
Un roman qui s'inscrit dans la réalité historique d'une époque mais qui la dépasse aussi car la façon qu'a Corrag de se réjouir du gonflement d'un bourgeon ou de l'apparition d'un cerf pourrait être la nôtre. Un rythme un peu lent parfois mais un magnifique portrait de femme , une femme libre, malgré tout, ce qui réjouit le coeur du lecteur. La dimension historique, qui n'est pas vraiment ma tasse de thé, fait que j'ai moins été convaincue par ce roman que par les précédents.

Un bûcher sous la neige, Susan Fletcher, traduit de l'anglais par Suzanne Mayoux, Editions Plon 2010, 390 pages ardentes.

Marie a été séduite !

Du même auteur :

Avis de tempête.

La fille de l'Irlandais

 

25/08/2010

Un autre amour

"Certains soirs elle allait se coucher sans savoir qui elle serait en se levant le lendemain."

Un séjour à Rome en amoureux pour Connie et Matt Wilson. Pendant ce temps, leurs trois garçons sont gardés par la meilleure amie du couple, Mary. De cette escapade, Connie rentrera seule : son époux a décidé de rester en Italie.arton19016-4e85b.jpg
Commence alors une longue évolution de Connie qui n'accepte pas sans souffrance de voir remis en question sa vie de famille et un amour qui dure depuis ses quinze ans.
Sur un sujet des plus rebattus, Kate o'Riordan réussit un tour de force: contourner tous les clichés et tenir l'attention de son lecteur perpétuellement en éveil , ménageant des révélations jusqu'à la toute dernière minute.
Je dois avouer que même si j'aime beaucoup cette auteure, j'y allais en faisant un peu la grimace car le thème n'a rien de confortable (qui peut affirmer que son couple durera jusqu'à ce que la mort sépare les amoureux ? ) mais tant le style , très imagé, de Kate o' Riordan que sa peinture toute en finesse tant des rapports amoureux, familiaux (pas d'hypocrisie dans la manière de Connie de parler de ses trois garçons si différents) voire même amicaux (ah le portrait de Mary qui prie à toutes force Saint Antoine, le morigène avant de se tourner vers Saint Jude, peut être plus efficace !) ont su emporter ma totale adhésion et je freinais des quatre fers pour retarder au maximum de découvrir la fin...On sourit, on frémit, on s'identifie à l'une puis à l'autre et on retrouve ici tout le talent de cette auteure qui n'hésite pas à appuyer là où ça fait mal.

Un autre amour , Kate O'Riordan, traduit de l'anglais par Florence-lévy-Paolini, Editions Joëlle Losfeld 2010, 279 pages qui ne vous laisseront pas intact.

De Kate o'Riordan , j'avais aussi beaucoup aimé Le garçon dans la lune et Pierres de mémoire

24/08/2010

Corps

"Je suis pour elles une étrangère et une intime. Le paradoxe incite à la confidence."

Du corps de Monika, la narratrice qui travaille dans un institut de beauté, nous ne connaîtrons rien. Ou presque. Juste les souvenirs d'enfance, au seuil de l'adolescence ,quand la fillette mesurait sa féminité à l'aune des femmes qui l'entouraient, soeur, mère ou voisine.41d+ohHSWxL._SL500_AA300_.jpg
Aujourd'hui, c'est elle qui regarde et surtout qui écoute des clientes jamais satisfaites de leurs corps. Un corps qui n'est jamais en adéquation avec les critères en vogue. Des corps dont Monika interprète la matière, la langueur, et pour qui elle a beaucoup d'empathie, à de rares exceptions près.
En tissant les souvenirs de l'esthéticienne aux confidences de ses clientes, Fabienne Jacob évite l'aspect "succession de portraits" et confère une vraie chair à son roman. Son style , parfois rude mais aussi sensuel, peut parfois heurter mais j'en retiendrai surtout son adéquation avec l'exploration de ce territoire de l'intime. Une jolie découverte que j'ai envie de poursuivre en lisant les recueils de nouvelles de l'auteure. Un livre, pour lequel j'aurais eu un vrai coup de coeur s'il avait davantage développé l'aspect tactile du métier évoqué.

Corps, Fabienne Jacob, Buchet-Chastel 2010, 157 pages.

 

23/08/2010

Le chien boomerang

"C'était un sentimental inversé."

"C'est un vrai chien de chasse, un bleu bourru d'Auvergne" ainsi en a décidé , par intuition la mère d'Henri Cueco. Vrai chien de chasse ?  A vérifier ,car Le chien boomerang (je vous laisse le plaisir de découvrir le bien-fondé de cette appellation), s'il chasse ce sont surtout les clients du petit commerce familial. Une vraie terreur, ce Loulou, et moche avec ça,  mais pas question de le lui dire en face. Il se vexerait et se vengerait. Obsédé sexuel,voleur, mordeur,  compissant la maison et les trottoirs,  il se mêle de tout, dialoguant la nuit avec la seule qu'il aime et aux pieds desquels il est venu se coucher un beau jour, la mère de famille, veuve avec cinq enfants, qui lui passe tout, y compris les puces dont il infeste la maison.51H-ZEce-HL._BO2,204,203,200_PIsitb-sticker-arrow-click,TopRight,35,-76_AA300_SH20_OU08_.jpg
Mais il y a une solution à tout, y compris à Loulou qui va contribuer à assurer la pitance de cette famille nombreuse au sein de laquelle il joue un vrai rôle en bon chien dominant qu'il est...
Truffé de dialogues incisifs et caustiques, rappelant tout à la fois la Toutouque de Colette ou les saynètes campagnardes de Jules Renard, Le chien Boomerang est bien comme l'indique la quatrième de couverture "Une histoire de famille" car à travers les frasques de Loulou se lit en creux le portrait d'une tribu jugée bohême par son voisinage. Un  texte court où l'absurde le dispute à l'humour grinçant...

Mais après nous avoir fait rire avec cet inénarrable Loulou, Cueco enchaîne avec un deuxième texte, tout aussi savoureux mais consacré cette fois à un chat,Caramel, un fieffé voyou, rouleur de mécaniques , qu'un accident rendra plus tendre. Et le récit de se teinter de poésie et d 'émotion.
Seule la troisième partie, très courte, consacrée à l'explication d'une injonction maternelle énigmatique, m'aura laissée de marbre.
Bref, un livre destiné à tous ceux qui aiment l'humour caustique et pas seulement aux mérotes à chien et/ ou à chats !

Le chien Boomerang, Henri Cueco, JBz &  cie 2010, 155 pages pour avoir la larme à l'oeil, de rire ou d'émotion.

22/08/2010

Poésies des petit bonheurs

Surfant sur la vague des bonheurs du quotidien, ce recueil de morceaux choisis, organisés en chapitres aux noms évocateurs : Bonheur du câlin, bonheur de la sieste ...ne m'a pas vraiment pas convaincue ni par les illustrations, trop sages à mon goût, ni par les citations, bien trop courtes souvent.51csgBiAQ-L._SL500_AA300_.jpg

J'en retirerai juste ce poème d'Emily Dickinson :Il faut pour faire une prairie, traduit par Pierre Leyris .

"Il faut pour faire une prairie

Un trèfle et une abeille-

Un seul trèfle, une abeille

Et quelque rêverie.

La rêverie suffit

Si vous êtes à court d'abeilles."

De quoi me donner envie de découvrir cette poétesse...*

 

Emprunté à la médiathèque.

 

* Du coup je viens de dévorer La dame Blanche, de Christian Bobin... Billet à venir bientôt.