21/02/2022
La fille parfaite
" A force de ne pas vouloir être des filles comme les autres, on devait avoir endommagé certaines commandes cérébrales. "
Amies depuis l'enfance, Adèle et Rachel constituent la fille parfaite, unissant pour l'une la passion des mathématiques, pour l'autre celle des Lettres. Leurs familles respectives y sont aussi pour beaucoup, il faut bien l'avouer.
Même si chacun d'elles semble avoir atteint, adultes, les objectifs qu'elles se sont fixées, Adèle collectionnant les prix mathématiques et Rachel écrivant des romans, au début du roman, Adèle s'est suicidée.
La raison de ce geste d'une brutalité extrême (elle s'est pendue) ne jouera un rôle qu'à la toute fin du livre, le roman retraçant plutôt le parcours de cette amitié parfois en pointillés , qui ne faisait pas l'économie de la compétition. L'occasion aussi d'enchaîner des joutes oratoires sur les mérites respectifs des maths ou de la littérature, qui m'ont parfois semblé plomber le roman. Une lecture en demi-teintes donc mais le portait d' une amitié originale car non idéalisée.
POL 2022
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : nathalie azoulai
17/02/2022
La vie ordinaire...en poche
Roman ? Essai ? Autobiographie ? Est-il vraiment nécessaire de poser une étiquette sur ce texte qui fait la part belle certes à la vie de l'autrice, philosophe de formation.
Son existence devient le point de départ d'une questionnement qui n'apporte pas toujours de réponses, tel n'est pas le but , mais permet d'envisager les choses sous un angle différent.
L'écriture est fluide, les propos concernant la grossesse souvent fort bien écrits et le tout reste plaisant à lire même si j'ai bien compris ce que n'était pas la vie ordinaire, mais pas vraiment ce qu'elle était.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : adèle van reeth
12/02/2022
Les Enchanteurs
"Elle est une somme de personnes, un palimpseste de conscience non reliées les unes aux autres. "
Nouk, double fictionnel de Geneviève Brisac , jeune adulte, milite à gauche, milite pour les droits des femmes, obtient l'agréation et entre dans le monde de l'édition, le tout avec une déconcertante facilité.
La rebelle qu'elle affirme être va néanmoins devoir dès lors composer avec un monde d'hommes où l'on entretient sciemment la compétition entre les femmes. Femmes qui composent un, je cite" harem" où les éditeurs, présentés comme charismatiques, n'ont qu'à piocher au gré de leurs envies...
Favorite un temps, puis délaissée et passée au crible lors de séances dignes des procès staliniens, Nouk semble enchaîner les situations traumatiques, situations qui ,de plus ,la renvoient à son adolescence.
Je me réjouissais de prendre des nouvelles de Nouk mais je suis un peu déçue par ce texte qui se focalise uniquement sur les relations au sein du milieu de l'édition, sans qu'on comprenne vraiment en quoi consiste le métier d'éditeur, tant tout semble survolé.
La vie personnelle de Nouk , en dehors du travail, n'est que peu mentionnée, ce qui donne peu de chair à son personnage et c'est dommage.
Il n'en reste pas moins que la violence des relations de pouvoir est clairement décortiquée et qu'on sort un peu groggy devant tant de sexisme, d'âgisme pleinement assumés au nom de la sacro-sainte rentabilité.
Éditions de l'Olivier 2022.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : geneviève brisac
11/02/2022
Tant qu'il y aura des vaches
"Dès cette époque, une bulle s'était formée entre elles et moi, qui comme par une clôture, nous séparait du reste des hommes."
Larguée brutalement, une jeune journaliste free lance se passionne soudain pour les vaches et dévore jusqu'aux ouvrages les plus techniques les concernant.
Pourquoi une telle passion? Est-ce juste pour détacher son esprit de son ex amoureux ou cette fixation sur les bovidés remonte-t-elle à une source plus lointaine ?
Nous suivons dans les plus intimes méandres de son esprit cette jeune femme dont la passion soudaine risque fort de lui faire perdre contact avec la réalité...Un roman fort plaisant qui s'amuse au passage avec les expressions ayant trait aux vaches dans ses titres de chapitres.
Comment résister à cette magnifique couverture quand on est ,comme moi ,une fan des vaches ? Merci donc à Babelio et à l'autrice (qui a accompagné cet envoi d'une très gentille lettre et de timbres choisis avec soin).
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : patricia martel
04/02/2022
Histoire du fils...en poche
"Ce don qu'il avait toujours eu de se sentir partout à sa place, légitime et désiré, venait de là, de Chanterelle, du nom, de la mère, de la maison, des terres, de l'air cru."
Se jouant de la chronologie, Marie-Hélène Lafon retrace l'histoire de deux familles qui n'apprendront que bien plus tard comment leurs destins se sont imbriqués et incarnés en la personne de ce fils qui donne son titre au roman. Deux familles, mais aussi deux terroirs et deux noms, car tout est ici fortement lié.
Cette structure éclatée déroute un peu le lecteur, au début, mais la langue drue de l'écrivaine nous soutient et nous emporte au fil du récit et nous nous attachons à ces personnages que nous apprenons peu à peu à identifier au sein du schéma familial.
Si le plaisir de lecture était bien présent, j'ai néanmoins eu l'impression d’être tenue à distance par ce roman, dont à mon avis, la vraie héroïne est la figure forte de la mère biologique, femme atypique mais qui nous demeure néanmoins quelque peu opaque.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : marie-hélène lafon
03/02/2022
#LeGangdubiberon #NetGalleyFrance !
"Cependant j'avais une règle d'or: je ne me laissais jamais atteindre par le pessimisme des autres (seulement par le mien, c'est ce qui faisait ma force) . "
Envie d'une virée en voiture sur les chapeaux de roues ? Alors embarquez avec Hank le dépressif impulsif, sa femme, (non surtout pas cette formule, Alma est une féministe radicale et parfois Hank se perd un peu dans ses injonctions contradictoires...), disons la mère de leurs enfants , Marnie, huit ans, Lilirose quatre ans et le petit dernier Lino, neuf mois. Une semaine sans téléphone ni GPS sur les routes d'Espagne pour se retrouver en famille, pour se retrouver en couple (mission quasi impossible) sur les routes d'Espagne.
Toute l'épopée est relatée du point de vue du père et sa vision des enfants, à la fois pleine de tendresse mais aussi de lucidité est follement réjouissante Ainsi parlant du bébé : "Une splendide bedaine d'un demi-litre me garantissait son innocuité pour quatre bonnes heures".
Mais Hank ne se donne pas le beau rôle pour autant et sa description des différentes tentatives pour renouer charnellement avec Alma ,tout en ayant auparavant tenté de neutraliser ses enfants ,est hilarante.
J'ai d'ailleurs beaucoup ri (et cela m'arrive rarement) à la lecture de ce roman qui fonce à toute allure et fustige au passage nos illusions et notre société pour le moins décadente : "Un groupe de supporters de foot, vêtus de vert et blanc, maniant drapeaux, fanions et banderoles, venait droit sur nous en braillant à pleins poumons. Une vision qui donnait toute sa signification à la thèse du suicide de l'humanité à l'ère de l'anthropocène. "
Car la noirceur de la vision est sous-jacente dans ce roman qui reprend les codes du voyage à l'étranger pour mieux critiquer ce que nous croyons être "normal". Un roman mémorable et jouissif.
Buchet-Chastel 2022.
06:00 Publié dans Humour, romans français | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : philippe ségur
24/01/2022
#LesJourssuivants #NetGalleyFrance !
"Comment passer ce temps qui d’ordinaire était avalé par le travail, les écrans, les courses. Il supportait le train-train en se focalisant sur des objectifs agréables, des rendez-vous, des promesses de bons moments vers lesquels il tendait, glissant sur un quotidien vécu comme une attente un peu impatiente. "
Imaginez : en plein hiver, à la campagne, une panne d'électricité qui s'éternise. Voilà qui risque sérieusement de chambouler nos habitudes et de pas mal nous perturber.
C'est la situation dans laquelle Caroline Sers plonge ses personnages et en particulier son héros , Pierre,installé depuis quelques temps à la campagne où il a eu le temps de tisser des amitiés , en particulier grâce au café associatif . Un endroit qui va jouer un rôle essentiel dans le maintien des liens et le partage des informations.
Malgré un début un peu lent, des dialogues parfois empesés, je me suis prise au jeu et j'ai passé une partie de la nuit à dévorer ce roman (ce qui m'arrive rarement) tant l'autrice a le chic pour ménager le suspense et créer des personnages attachants. Si je n'ai pas été totalement convaincue par l' itinéraire d'un personnage féminin, il n'en reste pas moins que , sans édulcorer, ni dramatiser à l'outrance, l'autrice pose les bonnes questions et nous interroge sur un mode de vie qui bat sérieusement de l'aile...
Calmann-Lévy 2022,
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : caroline sers
22/01/2022
La reine des orties...en poche
"Cette fille possédait un don, elle voyait l'invisible.
Ou encore, je le comprends aujourd'hui, ce que nos refusions de voir."
Tous les habitants du Palais des orties, chat et chien y compris tombent sous le charme de Fred, jeune woofeuse venue aider Nora, Simon et leurs enfants , contre le gîte et le couvert.
Rien de glamour, rien de branché dans cette campagne triste où Simon a repris l'exploitation familiale mais l'a orientée vers la culture de cette plante que tout le monde rejette: l'ortie.
Mais ce que Marie Nimier peint, dans ce récit rétrospectif , est surtout l'histoire d'une passion amoureuse entre deux femmes.
Avec beaucoup de délicatesse, d'empathie, elle nous fait partager la vie de cette famille que Fred va bouleverser , sans nous livrer pour autant tous les secrets de ces personnages qui nous deviennent vite familiers.
Un roman où l'autrice semble se libérer des carcans où on la sentait parfois enfermée dans ses précédents ouvrages. Une lecture réconfortante et brûlante à la fois.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : marie nimier
20/01/2022
On noie bien les petits chats
"Cet enfant tombé de ton ventre, c'est par tes bras, ton regard, ta parole, qu'il consent à advenir. "
Renvoyée chez elle par une sage-femme violente tant en paroles qu'en gestes, Betty va accoucher sur le palier de son appartement dans des conditions atroces. Son enfant et elle ne devront la vie qu'à un chauffeur de taxi, père de famille nombreuse , qui aura su garder son sang-froid.
A la maternité, la jeune femme a tout oublié de ces événements dramatiques, mais le cauchemar ne semble pas fini pour autant. En effet , son mari reste injoignable, mais son enfant a été baptisé Noé par un inconnu qui prétend être le père auprès du personnel hospitalier.
Transférée dans un unité spécifique pour aider les mères à nouer une relation avec leur enfant, Betty va peu à peu lever le voile sur des traumatismes réveillés par cette naissance et surtout par le prénom de Noé.
Si j'ai apprécié l'intrigue, riche en rebondissements et anxiogène à souhait, j'ai encore plus aimé la description fine, pleine d'empathie et de bienveillance , autant pour les soignants que pour les soignés, de cette unité mère-bébé. On se doute que l'expérience professionnelle de l'autrice y est pour beaucoup et qu'elle nous fait partager sa vision pleine d'espoir et d'humanité. Une lecture haletante.
Éditions Eyrolles 2022.
06:01 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : françoise guérin
13/01/2022
Mathilde ne dit rien...en poche
"Mathilde se dit que si, elle imagine. Elle sait très bien ce que c'est d'être envoyé dans les marges par la force centrifuge du monde."
Le roman débute par une scène de violence psychologique à couper le souffle et se clôt par une scène de violence, physique cette fois qui laisse le lecteur groggy .
Le point commun de ces deux moments intenses ? Mathilde. Celle qui ne dit rien, essaie de passer inaperçue, mais c'est compliqué quand on a son gabarit. Travailleuse sociale , Mathilde fait son job de manière efficace, sans doute parce qu'elle a connu de près les galères de ces gens qu'une facture de trop peut faire valser dans la misère. Mais le passé douloureux de Mathilde nous ne le découvrirons que peu à peu.
Tristan Saule peint avec une précision d'entomologiste le quotidien de ces gens (voir en particulier la scène de la baguette chaude au supermarché de proximité qui s'organise comme une chorégraphie muette ) les rouages des aides sociales, les trafics, la violence...Il choisit de ne pas surplomber ses personnages mais se met à leur hauteur, analysant avec précisions les mécanismes de ce qui peut entraîner ces gens fragiles dans la misère. Un roman social d'une force extrême.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (2)