12/12/2009
Je vais tuer mon mari...
"Vois-tu,la parole me fait autant que je la fais."
La résolution initiale, Je vais tuer mon mari , n'est pas le fait d'un coup de sang. Non, elle est le résultat logique d'une réflexion argumentée.Pourtant au fil de cette semaine sainte durant laquelle la narratrice, qui est aussi écrivaine, va dresser le constat d'un couple que tout oppose, cette volonté va peu à peu mollir et se transformer en une force de vie qui balaiera tous les reproches. "Regimber c'est vivre" affime la fugueuse, qui manifeste un féroce appétit de vivre , que ce soit dans les bras de ses amants ou dans son dialogue avec une mère quelque peu intrusive.
Alors, il ya quelques longueurs, il faut s'approprier ces paragraphes sans virgules,mais c'est aussi la découverte d'une vraie voix, d'une écriture pleine d'inventivité et d'énergie, en témoignent les (très ) nombreuses pages cornées.
Je vais tuer mon mari..., Claire Fourier ,Omnia 2009,( 10 euros) paru pour la première fois en 1997.186 pages ardentes.
Ps: réaction sentencieuse de mon macho en herbe à la lecture du titre : "Il faut censurer ce livre ." :)
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : claire fourier, à glisser sous le sapin?, rapports hommefemme, écriture
11/12/2009
cahin-caha
"S'il paraît que le bonheur c'est du chagrin qui se repose, le blues pourrait être son hamac."
Une petite troupe de croches et de bancals, dont le narrateur, La Tremblote, part en stage d'équitation en Armorique.
Drôle d'idée apparemmment pour ces éclopés de la vie qui font face, chacun à leur manière, au mauvais tour que leur a joué la loterie génétique.
L'occasion pour le narrateur de se débarrasser des vieux schémas qui sclérosent sa vie et de découvrir que , même s'il aime se noyer dans le blues"...on n'est jamais à l'abri d'un joli feu d'artifice."
Sur un sujet casse-gueule, des ados atteints de pathologies lourdes, Anne Lenner a écrit un premier roman alternant émotion et humour, rempli de jolies formules, sans jamais tomber dans le pathos. Elle aborde avec une justesse confondante la manière dont les jeunes mais aussi leur famille vivent avec la maladie, parfois avec cynisme mais jamais avec auto apitoiement. Il faut accepter de se couler dans le langage familier du narrateur et une fois ceci admis, on est bel et bien ferré. Un roman qui ne va pas Cahin-caha mais qui file, pan, droit dans le coeur !
Cahin-caha, Anne Lenner, Pocket 2009, 191 pages et une larmichette au bout !
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : anne lenner, adolescence
10/12/2009
Les visages
"Mais vous ne pourrez jamais tout à fait comprendre à quel point cet hiver m'a changé en profondeur, car encore aujourd'hui je ne le comprends pas moi-même."
Ethan Muller, directeur d'une galerie d'art ignore qu'en révélant au public une seérie de dessins à proprement parler géniaux, il va mettre en branle toute une mécanique qui bouleversera totalement sa vie, le mettant sur la piste d'un tueur d'enfants.
Plus qu'un énième roman sur un serial killer, Les visages traite à la fois du monde de l'art et des secrets familiaux. le narrateur, il le reconnaît lui-même, n'a rien d'un détective traditionnel et son récit pointe du doigt avec humour les principaux écueils du genre, entraînant une distanciation des plus heureuses.
Un roman qui alterne passé et présent, avec des personnages à multiples facettes et qui n'est jamais complaisant. Un style agréable et élégant pour passer un bon moment de lecture.
Les visages, Jesse Kellerman; Editions Sonatine, 472 pages traduites de l'anglais(Etats-Unis) par Julie Sibony.
Merci à Amanda et
à Cuné !
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (19) | Tags : jesse kellerman, art, suspense
09/12/2009
Manhattan
"A force de bâtir le discours sur moi, je n'y suis plus vraiment."
Parce que sa vie repose sur du vide et qu'une maladie la jette dans l'urgence, une jeune femme quitte tout pour lutter contre le chaos.
Beaucoup de billets ont déjà fleuri sur Manhattan , premier roman que l'auteure a eu la bonne idée de nous proposer.
Comme de nombreuses lectrices, j'ai beaucoup aimé le style de ce texte (en témoignent les nombreuses pages cornées) et les ruptures de ton ne m'ont pas dérangée outre mesure. Bien au contraire, elles témoignent du détachement progressif de l'héroïne de tout ce qui faisait sa vie.
L'adjectif "maternelle" n'intervient qu'une seule fois ,qui nous permet d'identifier le destinataire de la lettre ,celle qui sut si peu l'être qu'elle livra sa fille à des mains douces et perverses. Seule la propriétaire du logement loué, qui n'a pas eu d'enfants, paradoxalement , saura trouver les gestes et les mots pour accompagner l'héroïne.
Un beau livre donc, mais comme Laure, je regrette l'aspect un peu trop convenu du secret sur lequel repose en partie le vide de cette jeune femme et qui fait perdre un peu de sa force à ce récit tout en émotion contenue.
Manhattan, Anne Révah, Arléa, 90 pages qui résonnent encore en nous une fois le livre refermé.
L'avis d'Antigone.
celui de Sylire
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : anne révah, une femme quitte tout...
08/12/2009
L'âme soeur
"-Maman, est-ce que tu m'aimerais encore si je travaillais dans un pressing ? "
Fille unique, Angèle, qui n'a rien d'un ange, comme le dit avec tendresse De Gaulle le cuisinier de la maison, vit en Afrique en compagnie de ses parents. Son père est écrivain et sa mère vaccine à tour de bras pour le compte de la Croix Rouge.
La solitude ne pèse pas à la fillette car elle est dotée d'une imagination fertile et d'une précocité qui alarme un peu ses parents. Mais tout son petit monde va s'effondrer quand ses parents décident d'adopter une petite africaine, Gloria." C'est sûr, je ne comblais pas mes parents. A dix ans, j'étais déjà une fieffée ratée et ma vie promettait d'être un bel échec, si prévisible que mes parents avaient jugé bon de prendre une fille de rechange, au cas où. Une police d'assurance en cas de descendance défaillante."
Quand Gloria arrive, le duel commence car l'ex-orpheline ne correspond pas du tout aux idée toutes faites d'Angèle et va se montrer tout aussi retorse qu'elle. Un texte piégé comme ces bonbons qui pétillent soudain dans la bouche...
Un livre sur la magie de l'enfance et le pouvoir des mots, ces mots que le père ne trouve plus, ces mots qu'Angèle utilise comme des projectiles pour contrer les questions paternelles: " BLANC ! criais-je à tous les coups".
Humour, tendresse sont au rendez-vous dans ces 159 pages jubilatoires et pleines d'invention qui se dévorent d'une seule traite !
Emprunté à la médiathèque, sur la seule foi de la couverture !
L'âme soeur, Anne Lenner, Le Dilettante.
L'avis de Pagesàpages.
PS:Dans la foulée, j'ai lu le premier, autour duquel j'avais tourné sans me décider, la faute à une couv' peu engageante ,et paf! voir le blogit-express! Billet à venir!
06:00 Publié dans Les livres qui font du bien | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : anne lenner, afrique, soeurs, humour
07/12/2009
L'argent, l'urgence
"Votre vie perforée soudain d'un vide."
Une créatrice, parce qu'elle se soumet aux rêves des autres (L'argent, l'urgence), parce qu'elle aime un homme prétendument trop fragile , "un homme à élever" , intègre une grande entreprise qui va peu à peu laminer sa personnalité, la rendre au sens propre malade. Bientôt ses rêves se réduiront à cela :
"Errer, ne parler à personne, marcher jusqu'à tomber dans un sommeil qui guérit de tout,dormir jusqu'à ce que votre esprit se défroisse, se déplie, se détende, se remette à vivre. Vous souriez. Ce matin ça a marché. Debout tôt.Deux heures. Presque le voyage."
Il lui faudra longtemps pour admettre que ce travail que tous lui envient (ses amis, l'homme à élever), qui lui apporte une sécurité financière qu'elle ne recherche même pas, (elle sait se contenter de peu) mais qu'elle s'impose elle même pour apurer des dettes (dont on devine qu'elles ne sont pas forcément les siennes), que ce travail donc est en train de la détruire lentement mais sûrement.La description des rapports de force au sein de l'entreprise est d'une violence contenue mais par-là même totalement efficace.
Impossible également de trouver refuge dans son atelier "sa chambre à soi" comme disait Virginia Woolf, son espace intime ayant été colonisé par l'homme à élever dont elle mettra aussi longtemps à reconnaître la toxicité. Pas facile de lutter contre ce qui est présenté comme positif par la société et le discours ambiant, que ce soit le travail ou l'amour...
Hésitations, rythme haché , parenthèses enfermant la voix intérieure de l'héroïne, seul endroit où elle ose exprimer ses vraies pensées ,miment ici l'asphyxie qui peu peu la submerge et détruit sa force créatrice. Force créatrice qui, pourtant n'a pas dit son dernier mot...
Un récit hypnotique et salvateur simultanément. Une écriture à découvrir de toute urgence.
L'argent, l'urgence, Louise Desbrusses, P.O.L, 2006 170 pages denses.
Merci à Anne
ainsi qu'à Aifelle
et Antigone.
Laure n'a pas aimé, et c'est son droit !:).
05:54 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : louise desbrusses, argent trop cher, monde de l'entreprise, création
06/12/2009
Oh, deux tags en un !

Liliba et Aifelle ont eu la même idée: me taguer au nom de l'amitié et je les en remercie !
Par contre, il a fallu que je me mette la rate au court-bouillon (sisi) pour trouver 7 révélations nouvelles ...alors on tente le coup :
1/J'ai postulé pour travailler dans un sex-shop. Librairie spécialisée disait l'annonce.
2/Je ne suis jamais aussi bien coiffée que quand je ne me coiffe pas. De toutes façons, le vent est mon ami...
3/ Quand j'ai commencé à bosser, certains de mes élèves étaient plus vieux que moi. Ce n'est hélas, plus le cas .
4/ Je parle aux araignées et elles m'écoutent. Témoignages à l'appui.
5/J'ai été végétarienne (et pourrai très bien le redevenir sans problèmes).
6 et 7 j'ai toujours à proximité (dans mes poches, mon sac, ma voiture, la cuisine, la salle de bains, ma chambre, ouf !) une crème pour les mains et un baume pour les lèvres. Je les teste tous et toutes . Sans trouver l'idéal.
Ce sera mon dernier tag de l'année et je ne désigne personne car je veux éviter de faire souffrir vos p'tits coeurs fragiles en n'en désignant QUE 7 !:)
Ps:Bonne fête à tous les petits garçons ! Photo, ici !
06:00 Publié dans Bric à Brac | Lien permanent | Commentaires (27) | Tags : tag à tag à tag aïe aïe aïe
05/12/2009
Tour de terre en poésie
Quelle chance, ! Ce recueil paru initialement en 1998 n'était plus dispo et je l'ai vu en pile dans une librairie ! L'occasion de se précipiter pour découvrir, si ce n'est déjà fait cette anthologie multilingue de poèmes du monde entier qui proposent les textes dans leur alphabet d'origine à côté de leur traduction française.
Une grande variété de langues, du rromani* au basque en passant par le nahuatl ou le finnois, sans oublier le malgache ou le breton, entre autres !
Un livre plein d'émotions, illustré de manière très fraîche par Mireille Vautier. Editions Rue du monde
Et comme le temps est à la grisaille, un petit poème, anonyme , traduit de l'inuktitut**, langue que je regrette de ne pouvoir reproduire, tant elle est originale, comme pleine de symboles mathématiques !
Paroles pour alléger ce qui est lourd
Je marcherai avec les muscles
des pattes du petit caribou
Je marcherai avec les muscles
des pattes du petit lièvre
J'éviterai d'aller vers la nuit,
j'irai vers le jour
* deux r pour commencer, oui ! Langue issue du sanscrit, langue des Rom ou "tsiganes".
**Langue amérindienne parlée par les peuples esquimaux du Groenland, du Labrador, d'Alaska et de Sibérie extrême-orientale.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine | Lien permanent | Commentaires (13) | Tags : anthologie multilingue de poème du monde, jean-marie henry, mireille vautier
04/12/2009
Tom Tom Tom
Tom, le père prodigue, parti refaire sa vie en Afrique vient de rentrer en Finlande et a décidé de rétablir des liens avec sa fille Kokko. Mais celle-ci a vingt-cinq ans , un corps qu'elle ne maîtrise pas, pas plus que sa vie d'ailleurs. L'hémiplégie soudaine du père va changer la donne et inverser les rapports père/fille.
Rien de bien original à première vue mais le style de l'auteure donne tout son relief à ce roman à l'atmosphère si particulière, à la fois brute de décoffrage et subtil.
Juste un extrait : "Kokko changeait la disposition des meubles en moyenne quatre fois par an. elle le faisait chaque fois que rien d'autre ne marchait. quand tout était coincé et la tête embrumée, elle se mettait à changer l'ordre, elle traînait la table vers le mur suivant, et le lit devant la télévision. Elle avait déjà changé tous les coins au moins une fois, foulé de ses pas tous les endroits du sol de la pièce, gravi toutes les marches jusqu'au troisième étage, chargé un caddie dans un supermarché dans chaque quartier de la ville, payé avec tous les moyens de paiement, traversé toutes les bandes des passages pour piétons , vu toutes les statues d'hommes, grandes et petites, humé les parfums dans les grands magasins, suivi des cours dans des lycées techniques, tracé en une séance toutes les lettres de l'alphabet, payé pour des timbres-poste, pour aller aux toilettes, pour des verres d'eau des sacs de terre des engrais des droits de douane des timbres fiscaux. gaspillé, payé , et évité adroitement des paiements."
Un très joli portrait de femme en devenir.
Tom Tom Tom, , Riikka Ala-Harja, traduit du finnois par Jean-Michel Kalmbach, Editions Gaïa.
Trouvé en médiathèque.
Le billet de Sybilline sur un autre roman de l'auteure, billet tentateur !
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : riikka ala-herja, roman finlandais, rapport pèrefille
03/12/2009
Exercices de la perte
"Je ne veux pas parler de la mort. Je veux parler de la vie."
"Glioblastome multiforme, la plus féroce des tumeurs au cerveau." C'est donc contre elle que la romancière Agata Tuszynska va livrer combat. Combat voué à l'échec car la tumeur dont est atteint le mari de la romancière "ne laisse aucune chance, elle tue en quelques mois."
C'est aussi le récit d'un amour qui se vit au jour le jour, dans la souffrance, la fatigue, mais aussi l'exaltation, l'énergie fournie par les amis dont va s'entourer le couple.
Face à cet anéantissement inéluctable, la romancière va puiser dans son histoire et celle de son compagnon quelque chose à quoi se raccrocher un peu. Les mots, les livres, quant à eux, sont tour à tour jugés inutiles puis nécessaires: poèmes récités, chansons, vont accompagner les jours sombres et les fêtes jusqu'au bout de la nuit.
Un récit chaotique, tendu par l'énergie désespérée de l'amour et de la fraternité.
Exercices de la perte, Agata Tuszynska, Grasset, 314 bouillonnantes de vie.
L'avis de Pages à pages
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : agata tuszynska, eros, thanatos, deuil, perte, amour