25/09/2009
En retard pour la guerre/ ultimatum
1991. Israël vit sous la menace d'une attaque chimique irakienne. Des masques à gaz sont distribuées à la population à qui l'on enjoint aussi de fabriquer des chambres hermétiques pour se protéger. Dans cette atmosphère de fin du monde, certains font la fête, d'autres s'apprêtent comme Tamar à donner la vie, d'autres enfin comme Constance, la narratrice, jeune étudiante française, se sentent en complet décalage , en retard pour la guerre. En retard pour tout d'ailleurs. A vingt-cinq ans, Constance n'a pas terminé ses études, vit de petits boulots, et n'arrive pas à se dépêtrer de l' "amour grimaçant" qu'elle éprouve pour un peintre, qui la malmène et voudrait se faire entretenir par elle.Peut être est-ce aussi parce que la jeune fille se sent engluée dans des souvenirs glauques...
De Valérie Zenatti j'avais déjà lu et aimé Quand j'étais soldate (pas de billet) et c'est avec plaisir que j'ai retrouvé une narratrice à la fois en empathie avec ce pays si particulier et en même temps en léger décalage, ce qui lui permet une vision à la fois amusée et tendre.On trouve dans ce roman une écriture à la fois légère et précise, de fort jolis passages comme celui-ci ""Il faudrait avoir le pouvoir de s'inventer des souvenirs, des vrais, on les créerait à rebours pour s'y blottir, et ce ne seraient pas juste des histoires racontées le soir, dans le noir, pour se consoler, se rassurer...", des personnages hauts en couleurs comme ce boutiquier qui appose sporadiquement cet écriteau sur la porte: "Fermé pour raisons personnelles qui ne regardent que le propriétaire", le tout scandé par des chansons de Serge Gainsbourg...Un roman tendre.
Ultimatum/En retard pour la guerre, Valérie Zenatti, Points Seuil 2009, 172 pages.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : valérie zenatti, guerre, israêl
24/09/2009
Loving Frank
"Quelle perte cela aurait été de ne pas l'avoir rencontré ou de ne pas avoir connu son amour ! pensa Mamah."
Quand Mamah Borthwick Cheney quitte son mari et ses enfants pour vivre son amour avec l'architecte Frank Lloyd Wright, lui même marié et père de six enfants, c'est le scandale. La presse s'en donne à coeur joie et l'Amérique puritaine se repait de ces articles outranciers. La vérité est toute autre: les amants sont certes emportés par la passion mais aussi taraudés par la culpabilité. Le tout se terminera d'une manière tragique et brutale, presque invraisemblable.
Rien n'a beaucoup changé entre le début du XXème siècle et notre époque. la presse est toujours à l'affût des histoires d'amour lucratives et semble toujours prête à tout pour vendre ses feuilles de choux. Mais c'est surtout le portrait , tout en nuances, que brosse ici Nancy Horan dans cette fiction historique de Martha (dite Mamah) Borthwick Cheney qui a retenu toute mon attention. Trilingue dès la maternelle, ayant fait de solides études, ayant enseigné, dirigé une bibliothèque, cette femme disposait d'un potentiel et d'une personnalité que son mariage semble avoir complètement mis sous cloche. Pourtant comme le lui dira sa soeur "Tu avais tout. Un mari fantastique qui t'adorait, deux beaux enfants en bonne santé. La liberté. Aucun souci financier. Une gouvernante et une bonne. Tu n'avais pas besoin de travailler et Edwin n'exigeait jamais rien de toi. As-tu conscience de tout ce que tu as abandonné pour Fank Wright ? Le genre d'existence dont rêvent la plupart des femmes, y compris les féministes !".
Mais à vouloir vivre selon ses convictions , Mamah, en tant que femme et en tant que mère, devra payer le prix fort, car être la compagne d'un génie de l'architecture ne va pas sans contreparties négatives...
Un livre puissant , plein de vie, mais aussi très pessimiste...
les avis enthousiates d 'Amanda, Cuné, Fashion.
un coup de coeur pour Esmeraldae !
06:00 Publié dans Rentrée 2009 | Lien permanent | Commentaires (16) | Tags : nancy horan, mamah borthwick cheney, frank lloyd wright, féminisme, passion, tragédie
23/09/2009
Petit éloge de la vie de tous les jours
"Ces gens dont je souris témoignent seulement de ce que je suis" est-il écrit en 4 ème de couv'. Et de nous infliger d'affligeants dialogues "croqués sur le vif" avec une mère qui se gargarise du prénom de son fils "Sean" prononcé "Chaune", d'un boucher qui fait preuve d'un humour lourdingue à devenir illico végétarien, sans oublier deux hommes endimanchés, qui dissertent à n'en plus finir sur la différence entre "cuit" et "à point". Entre temps, on sera allé voir un champ de pommes de terre, on aura écouté des gens éméchés opposer les mérites respectifs des vaches du département de l'Aisne contre celle des Ardennes, ou subi le dialogue d'un vacancier relatant un repas pantagruélique qui ne lui aura coûté que cent francs à un interlocuteur dont la principale intervention se résume à "tain".
On aurait juste envie de prendre à son compte un paragraphe de l'auteur et de l'appliquer à son livre : "Pendant ce temps, je me travaillais l'appétit aux boulettes maison.Elles étaient molles comme des chiques de bouse et contenaient moins de chair que de vieux pain trempé à l'eau. Chaque bouchée m'inspirait la même et unique pensée :
"Un pas de plus vers la mort."
Allez plutôt faire un tour Au bar des habitudes ou dans La belle maison !
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : franz bartelt, bof, mouais, on passe, schtroumpf grognon le retour
22/09/2009
La tournée d'automne
Cette fois, c'est décidé, il n'y aura pas de Tournée d'automne de la bibliothèque itinérante conduite par le Chauffeur. Plus de livres brinqueballant dans ce vieux camion laitier transformé en paradis des livres pour les petits villages de la Côte Nord québécoise. D'ailleurs le tuyau qui lui permettra d'en finir est soigneusement planqué dans un des coffres du-dit camion.Mais il y aura Marie, Marie tout en douceur qui va bientôt prendre place à ses côtés, Marie qui va lui réapprendre à regarder le monde et en particulier les oiseaux qu'elle peint.
Au long de ce récit nous croiserons une troupe de musiciens -jongleurs, des chats, un saint-bernard dans un side-car, un écrivain qui ne peut recommencer à écrire que quand il déteste son précédent roman et toute une flopée de lecteurs qui font circuler les livres pour le plus grand plaisir du Chauffeur...Le tout dans une Nature belle et sauvage qui donne immédiatement envie d'aller observer les baleines ou tout simplement d'admirer le Fleuve dont on ne peut toujours voir l'autre rive...Un enchantement !
La tournée d'automne, Jacques Poulin, Babel 1996 , 191 pages douces.
Oserais-je avouer que ce livre- emprunté de surcroît- était dans ma Pal depuis 2 ans !:)))
Vous avez été très nombreux à le lire, vous trouverez tous les billets ici !
Lu cet été dans le cadre du défi "objectif PAl" lancé par Antigone ,et de mon propre défi secret "soyons en phase avec les saisons", d'où la programmation !:)
06:00 Publié dans challenge des saisons | Lien permanent | Commentaires (14) | Tags : jacques poulin, amour des livres, amour tout court
21/09/2009
La donation
"Et nous lui en voulions de démolir chaque jour notre vie."
A l'occasion d'une donation entre vifs, la narratrice commence une lettre à ses parents pour les remercier.N'y parvient pas. En effet lui reviennent en mémoire les souvenirs d'une enfance sous le signe de la Psychose Maniaco Dépressive maternelle, où la narratrice et sa soeur souffraient en quelque sorte de "PMD passive, un peu comme on parle de tabagisme passif." Et de s'interroger sur les sens de ce don :
"La donation est-ce aussi cela? La transmission du gène du doute. Du doute de soi, vertigineux. Je me suis toujours interrogée sur la réalité de ce sombre héritage. J'ai souvent voulu lire une étude sur le psychisme des enfants de mères maniaco-dépressives". Sondant les mots, citant des auteurs comme autant de bornes sur un chemin marqué par le doute, la narratrice interroge aussi sa propre filiation: quelle mère est-elle pour ses filles ?
Une écriture toute en retenue, l'auteure tient à distance ses sentiments par différentes stratégies, qui peuvent parfois agacer, mais réussit ici un roman à la fois cruel et tendre.
La donation, Florence Noiville. Livre depoche. 118 pages.
L'avis de Solenn
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (18) | Tags : florence noiville, psychose maniaco-dépressive, rapports mèrefilles
20/09/2009
Un copain de plus
Tout le troupeau est en émoi et se prépare avec fébrilité :trois nouveaux moutons vont arriver !Mais les réjouissances tournent court quand chacun se rend compte que les nouveaux-venus sont...noirs ! Seul Robert , l'agneau, ira à la rencontre d'Olga car il espérait trouver un nouveau copain et même si elle "n'est qu'une fille", il ne sera pas déçu par les aventures dans lesquelles l'agnelle va l'entraîner !
Réussir à traiter d'un seul coup du racisme et du féminisme , sans pour autant tomber dans le didactique ennuyeux, voilà qui n'est pas donné à tout le monde et Agnès Laroche gagne son pari haut la main! Ses personnages sont malicieux et astucieux et les dessins pleins d'humour et de fraîcheu de Philippe Bucamp accentuent l'aspect délicieusement champêtre de l'histoire.
A lire sans hésitation avant de l'offrir à un petit lecteur ! (5/ 7 ans).
Un copain de plus, Agnès Laroche, Philippe Bucamp, Editions Talents hauts, collection Livres et égaux.
16:30 Publié dans Jeunesse | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : agnès laroche, philippe ducamp, amitié, racisme, féminisme
19/09/2009
Jaune, dit-elle...
Il aura fallu qu'Antigone m'envoie une carte à fond jaune jaune pour que je me décide !
(Dans les pots jaunes des joubarbes, dans le pot vert, des doigts de sorcière...)
Jaune, dans la salle de bains, principalement
donc, pour commencer la journée de manière tonique !
La suite à qui veut !:)
14:16 Publié dans Bric à Brac | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : tag
18/09/2009
Charles Dickens
"Il faut que je fasse quelque chose ou je vais me ronger le coeur !"
Infatigable.Une force de la nature, ayant plusieurs romans en cours, plusieurs amours au feu aussi, une famille nombreuse à entretenir, des lectures publiques de ses oeuvres qui le laissent exténués -ce sont de vrais one man shows avant l'heure !- mais ravi, tel nous apparaît Dickens sous la plume alerte et fervente de Marie-Aude Murail.
Mais sous cette visible boulimie de vie , d'amour et de travail, il y a toutes les fêlures de cet ancien enfant qui dut assumer l'entretien de ses parents dès son plus jeune âge et qui n'oublia pas qu'il avait été pauvre , dénonçant sans trêve les injustices .
"- Personne n'est plus disposé que moi à reconnaître qu'il est dans son tort, dit-il un jour à un ami. Seulement je ne suis jamais dans mon tort.
Ce n'est pas tout à fait une plaisanterie. Entre les autres et lui, il y a un contentieux. il est l'enfant qu'on n' a pas aimé, l'adolescent qu'on a rejeté, le coeur qui n'a pas été compris. Les autres ont tort mais pas lui."
Ah elle l'aime et elle l'admire ce Charles qui a su la séduire très tôt et c'est cet amour sans doute qui nous le rend si proche et nous fait dévorer cette biographie qui file à toute allure, au gré de chapitres aux titres savoureux et pleins d'enthousiasme !
Charles Dickens, Marie-Aude Murail, Belles vies, Ecole des Loisirs 2005, 164 pages et de précieuses photographies du grand homme.
L'avis enthousiaste de Cuné.
Pour prendre le thé avec l'auteure autour de Charles Dickens, c'est ici !
Le site de l'auteure.
06:00 Publié dans Biographie | Lien permanent | Commentaires (16) | Tags : marie-aude murail, success-story
17/09/2009
Petit éloge de la rupture
"Coupé, pas dérapé"
Ayant commencé à rédiger pour ce Petit éloge de la rupture un récit de séparation, Brina Svit est victime de la rupture de son disque dur. S'en est dit :la forme du texte sera marquée par les interruptions. Ce qui ne va pas sans mettre parfois le lecteur en peine de s'y retrouver dans ces différents textes qui se brisent sans cesse.
L'existence de Brina Svit semble elle aussi aussi placée sous le signe de la rupture : l'auteure est slovéne , écrit dans cette langue mais aussi en français ; écrivaine, elle est aussi danseuse de tango et semble très liée à l'Argentine. Toutes ces fractures nous valent de très beaux textes juxtaposés sur la langue, l'écriture, sa relation -difficile- avec sa mère mais aussi l'amitié/rivalité entre elle et Elisabeth Barillé, sans compter les textes "bijoux sombres [...] de Gil Courtemanche".Un texte parfois déroutant mais où l'on trouve une réflexion intéressante et pertinente.
Je note particulièrement ce passage : "J'ai pensé (...)à cette journée où j'avais curieusement plein de temps à ma disposition. Je me suis dit que je devrais réapprendre à en perdre intelligemment, m'organiser seule, par-ci par-là , une rupture volontaire avec cette partie de moi qui veut à tout pris être efficace et productive."
Petit éloge de la rupture, Brina Svit, folio 2 euros.111 pages qui donnent envie d'aller plus loin avec cette auteure.
06:00 Publié dans Rentrée 2009 | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : brina svit, amitié, amour, langue, écriture
16/09/2009
Les derniers Indiens
La quatrième génération de paysans auvergnats. La dernière. Car il ne reste qu'eux, le frère et la soeur Santoire qui mènent une vie de plus en plus étriquée , mécanique, assourdie, tandis qu'en face d'eux une tribu pleine d'énergie,d'esprit d'entreprise, une tribu bruyante, brouillonne et colorée vit pleinement.
Avec une grande économie de moyens, Marie-Hélène Lafon nous peint la vie de cette famille qui s'enorgueillit d'être Les derniers Indiens , les derniers survivants d'une époque révolue, qui ont à peine ressenti les soubresauts de l'Histoire et ont su étouffer dans l'oeuf les élans et les frustrations qu'ils s'imposent eux-mêmes. Seul un vêtement bien repassé et soigneusement rangé viendra peut être éclairer d'un jour nouveau tout le roman...
Les derniers Indiens. Marie-hélène Lafon.Vient de sortir en folio.167 pages drues.
L'avis de Baratin (qui nous manque!!!!).
Celui de Clarabel.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : marie-hélène lafon, cantal, campagne