15/02/2010
février
"Helen était ce que leurs grands-mères auraient appelé une dame."
"Il lui paraissait important de savoir ce qui était vrai en elle. Comment exprimer à quel point sa vie n' avait été qu'un tumulte de plaisir; comment dire qu'elle avait perdu quelque chose d'énorme, qu'il lui était resté un trou béant au beau milieu de la poitrine, et que le vent soufflait à travers."
Ce trou béant c'est la disparition de son jeune mari lors du naufrage d'une plate-forme pétrolière au large de Terreneuve qui l'a creusé.
Helen, alors enceinte de son quatrième enfant a dû faire face, même si , vingt-six ans plus tard, elle est toujours taraudée par des images forcément imaginaires du drame.
Un coup de fil dans la nuit de son fils John ,qui vient de se découvrir futur père sans l'avoir voulu, va lui permettre de se replonger dans le passé mais aussi de se donner une chance de ne pas vieillir seule.
Les éléments et en particulier l'eau bien sûr jouent un rôle essentiel dans ce roman jamais larmoyant qui alterne passé et présent.
Hélène est une femme pleine de vie qui refuse de perdre sa sensualité, même si elle l'a longtemps mise sous le boisseau, et qui est prête à offrir tendresse et plaisir. Un magnifique portrait de femme porté par une écriture charnelle.
Février, Lisa Moore, traduit de l'anglais (canada) par Carole Hanna, Plon, 273 pages pleines d'humanité.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : lisa moore, terreneuve, femme
05/02/2010
La commissaire n'aime pas les vers
"Un autre meurtre ? Pire encore, c'était sa mère."
Un clochard surnommé Victor Hugo assassiné alors qu'il voulait confier aux Académiciens un poème inédit (et sulfureux) de Baudelaire, même si La commissaire n'aime point les vers, il lui faudra élucider cette affaire dont vont très vite s'emparer les médias.
Assistée du très craquant lieutenant Augustin, Viviane Lancier, entre deux régimes et quelques cadavres, mène l'enquête et nous devient de plus en plus sympathique, volant même parfois la vedette à l'intrigue ,au demeurant fort bien troussée et documentée.
On regrettera juste l'ultime suggestion de la commissaire à l'assassin-pas vraiment justifiée- ainsi qu'une volonté un peu trop affichée de finir à tout prix sur une minute d'émotion.
Nonobstant ces quelques réserves, j'ai passé un excellent moment avec ce polar bon enfant et je me réjouis d'avance d'en lire la suite, annoncée en 2011.
La commissaire n'aime point les vers, Georges Flipo, La table ronde, 297 pages qui filent à toute allure.
Plein d'avis : Lou
L'avis de Papillon
celui de Leiloona ,
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (18) | Tags : georges flipo, baudelaire, roman policier
04/02/2010
Hypothermie
"...un décès discret, une mort presque polie."
Maria, une femme fragilisée par le décès de sa mère, se suicide. Suicide confirmé par la police. Rien qui justifierait une enquête et pourtant, alerté par une amie de la défunte, Erlendur va découvrir que Maria avait tenté d'entrer en contact avec sa mère par l'intermédiaire d'un médium. En outre, le mari médecin n'est peut être pas aussi éprouvé qu'il le paraît.
En parallèle, en vieux limier obstiné qu'il est, Erlendur , toujours marqué par la disparition de son frère, poursuit ses investigations sur de vieilles enquêtes non résolues , faisnt preuve d'une compassion sans pareille auprès des familles des disparus.
Il doit aussi faire face aux sollicitations de sa fille qui veut à toutes forces lui faire rencontrer son ex-épouse.
Le croisement des diffrentes intrigues fait toute la saveur de cet opus subtil et fertile en rebondissements. L'auteur est ici au meilleur de sa forme. A ne rater sous aucun prétexte.
Hypothermie, Arnaldur Indridason, Métaillé noir, 295 pages remplies d'humanité.
Arnaldur Indridason
En présence de son traducteur Eric Boury
5 février 16h
Rencontre à la Librairie de Paris
(7-11 place de Clichy, 75017 Paris)
6 février 11h30
Rencontre à la Librairie L'Arbre à Lettres Mouffetard
(2 rue Edouard Quenu, 75005 Paris)
l'avisd d'Aifelle.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (26) | Tags : arnaldur indridason, vie après la mort, disparitions, suicide
03/02/2010
Les variations Bradshaw
"Elle admire les gens qui ne se conforment pas à ce qu'on attend d'eux."
Le couple central des Variations Bradshaw vient, depuis peu, d'inverser les rôles. Thomas a troqué un métier lucratif contre le statut de père au foyer. il en profite aussi pour prendre des leçons de piano. Sa femme, Tonie, à l'orée de la quarantaine, vient d'accepter un poste administratif dans l'université où elle enseignait auparavant, faisant ainsi le choix de se "délester du fardeau des émotions."
Autour d'eux le reste de "l'orchestre familial" joue sa partie ,avec ses tensions, ses épisodes comiques -en autres un hilarant départ en vacances- ou dramatiques.
Autant de couples, autant de configurations pour affronter ses désirs, ses émotions, ses ambitions, assumer ses choix, ses regrets.
Tout au long des 32 chapitres (autant que les variations Goldberg) Rachel Cusk se penche avec un humour décapant sur ses personnages de la classe moyenne qu'elle nous peint ,avec ce charme british que nous apprécions tant , dans leur intimité, leur quotidien qui parfois dérape. Une réussite qui nous fait largement oublier la déception d'Egypt farm et retrouver tout le plaisir éprouvé à la lecture d'Arlington park.
Les variations Bradshaw, Rachel Cusk, traduit d el'anglais par Céline Leroy, Editions d el'Olivier 2010. 281 pages pétillantes, orchestrées de main de maître.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (24) | Tags : rachel cusk, échange des rôles, famille, humour anglais
02/02/2010
Si j'étais Fifi brindacier
Fifi Brindacier ayant été la première héroïne à la fois féministe et gentiment rebelle de mon enfance, je me réjouissais à l'idée de lire Si j'étais Fifi Brindacier de la coréenne Yoo Eun-sil.
Las, j'ai trouvé le texte répétitif et plat, et j'ai abandonné au bout d'une cinquantaine de pages cette histoire languissante où une enfant remarque la, je cite ,"sollicitude" inhabituelle de sa mère. Même l'idée de cette petite fille de 10 ans qui découvre le pouvoir magique de la lecture n'a pu me décider à poursuivre. Dommage car les illustrations toutes douces sont fort plaisantes.
Si j'étais Fifi Brindacier, Yoo Eun-sil, Picquier jeunesse, 194 pages.
L'avis enthousiaste de Gawou.
06:00 Publié dans Jeunesse | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : littérature coréenne, yoo eun-sil
01/02/2010
L'avant-dernière chance
"Charles, mon ami, le Tour a besoin de toi."
Comment un papy de 83 ans, Georges, parti faire le tour de France avec son voisin Charles (un jeunot de 76 ans) va -t-il renouer des liens avec sa petite-fille, stagiaire sur un tournage de télé à Londres ? A coups de texto bien sûr ! C'est là le propos au demeurant fort sympathique de ce premier roman qui n'évite pas certains écueils (style un peu trop appliqué, dialogues un peu guindés ) et frôle de justesse la lassitude des descriptions de cette épopée en relançant l'action in extremis, mais compose néanmoins une jolie parenthèse.
L'avant-dernière chance, Caroline Vermalle, Calmann-Lévy, 246 pages.
Le blog de l'auteure qui vous mènera vers plein d'autres billets.
Keisha vient d'en parler ici.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (15) | Tags : caroline vermalle, tour de france, grand-pèrepetite fille
31/01/2010
long week-end
"C'est à cela que menait la liberté ? "
Qu'est-ce qu'une famille ? Est-ce cette femme, Adele, qui ne peut se résoudre qu'à de brèves incursions dans le monde extérieur et qui vit quasiment retranchée en compagnie de son fils de treize ans , Henry ? Fils qui s'efforce sans cesse de lui redonner le sourire . Est-ce cette famille recomposée qui s'efforce de correspondre aux clichés en vogue en s'imposant des rituels qui ne satisfont personne ? Où est-ce plutôt ce trio improbable constitué par ce preneur d'otages et ceux avec qui il s'est enfermé, Adele et Henry, en ce Long week-end du Labor Day ?
Rien ne se déroule comme prévu dans ce roman sobre, où le suspense tout autant que l'évolution des personnages se révèlent d'une efficacité redoutable . Toute mère d'un ado de 13 ans se devrait de lire ce très joli portrait d'un homme en devenir.
Long week-end, Joyce Maynard, Editions Philippe Rey. 283 pages apaisantes.
Roman lu dans le cadre du programme Masse critique de Babelio; merci à Guillaume et aux éditions Philippe Rey, particulièrement rapides !
A noter que ce roman a bien failli ne jamais paraître, l'auteure ayant été mise au ban des maisons d'éditions américaines. Son erreur ? Avoir publié auparavant un roman où transparaissaient des echos de la vie pour le moins étrange qu'ellle avait menée en compagnie du romancier américain, Salinger. Il ne fait pas bon égratigner les mythes ...
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (17) | Tags : joyce maynard, prise d'otages, famille
30/01/2010
les années
"Une coulée suspendue"
"Ce ne sera pas un travail de remémoration, tel qu'on l'entend généralement, visant à la mise en récit d'une vie, à une explication de soi. Elle ne regardera en elle même que pour y retrouver le monde , la mémoire et l'imaginaire de jours passés du monde , saisir le changement des idées, des croyances et de la sensibilité, la transformation des personnes et du sujet."
Annie Ernaux revient à plusieurs reprises dans Les Années sur son projet d'écriture et la nécessité de l'utilisation du pronom "elle". Je n'ai pas été gênée par ce pronom et me suis laissée emporter d'une seule coulée dans le flot continu du texte, scandé par la description de photos de la narratrice, comme autant de balises pour se poser un peu et prendre la mesure du temps passé.
Toutes mes craintes (retrouver les événements déjà traités dans les premiers romans d'Annie Ernaux que j'avais lus à leur sortie, se perdre dans cette évocation d'un passé qui ne m'appartient que partiellement) se sont envolées et j'ai dévoré d'une traite cette évocation d'une vie qui est aussi un peu la nôtre.
Vient de sortir en poche
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (16) | Tags : annie ernaux
29/01/2010
Park life
"...il m'a semblé que nous étions intimes , comme si elle avait le double de la clé de ma chambre."
Un jeune employé, seul ou accompagné de son collègue senior, a pour habitude de se ressourcer dans un parc niché au milieu des buildings de Tôkyô. Nous allons l'accompagner au fil de ses rencontres et comme lui frôler les vies des différents personnages plus ou moins pittoresques qu'il y croise.
Ce très court roman (115 pages) est surprenant à plus d'un titre. D'abord parce que l'intrigue est très ténue mais suscite néanmoins notre intérêt de bout en bout. Il est ici question d'un héros -dont l'anonymat ne sera jamais levé- qui éprouve des difficultés à établir des relations amoureuses dans la réalité mais semble davantage doué pour la vie virtuelle, de couples qui, apparemment ne peuvent vivre ensemble, même s'ils s'aiment , mais tout cela est évoqué en pointillés et non de manière pesante.
Que l'action se déroule au Japon est également intéressant car cela nous permet de percevoir les différences culturelles. Ainsi notre salary man feint -il d'entretenir une conversation intime au téléphone portable à voix haute pour gêner et ainsi déloger le couple qui occupe "son " banc"...
Enfin, même si la traduction est parfois ampoulée (Gérard Siary qui signe aussi la postface semble particulièrement friand de verbe "muser"), elle ne parvient pas à dénaturer la délicatesse du style. Bref, un très joli moment de lecture.
Park life, Yoshida Shuichi, traduit du japonais par Gérard Siary et Mieko Nakajima-Siary, Picquier poche, 2010. 115 pages, une petite bulle de délicatesse.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (18) | Tags : yoshida shuichi, japon, relations humaines
28/01/2010
Fugues
"Ma vie était soudain traduite, plus facile à comprendre."
Tout le charme (au sens fort du terme) de ces neuf histoires composant le recueil Fugues repose sur l'atmosphère particulière qu'excelle à créer Lauren Groff.
Qu'elle situe son action en 1918 à New-York, de nos jours dans la petite ville de Templeton* ou durant la seconde guerre mondiale en France, qu'elle évoque une vie entière ou un instant fort, Lauren Groff fascine toujours le lecteur par sa capacité à le troubler.Peut être est-ce dû à son style imagé , alternant poésie et rudesse mais aussi à sa capacité à souligner à la fois la force et la vulnérabilité de ces héroïnes. Ces dernières assument leur sensualité tant bien que mal dans une société où la découverte d'un bordel va jeter le discrédit sur toute la population masculine d'une petite ville provinciale...
On ne trouvera pas ici de nouvelles à chute comme souvent chez les français , mais bel et bien un écho des textes si insaisissables de Lorrie Moorre (d'ailleurs créditée dans les remerciements).
On se laisse envoûter. Ou pas. Seul le dernier texte , qui m'a trop fait penser à "Boule de Suif " de Maupassant m'a vraiment déçue,le reste du temps je me suis laissée bousculer d'un univers à un autre, le sourire aux lèvres.
Fugues, Lauren Graff, éditions Plon, 264 pages .
* Déjà évoquée dans son premier roman, billet ici. (sortie au format poche en mars)
Cuné a été déçue.
06:00 Publié dans Nouvelles étrangères | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : lauren groff, femmes