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26/08/2021

La petite dernière...en poche

"Je m'appelle Fatima.
Je recherche une stabilité.
Parce que c'est difficile d'être toujours à côté, à côté des autres, jamais avec eux, à côté de sa vie, à côté de la plaque."

Chaque chapitre de ce court roman à résonance autobiographique commence par la même affirmation identitaire: "Je m'appelle Fatima Daas."Suivent ensuite des variations permettant de préciser l’une des multiples facettes de cette jeune femme qui creuse avec opiniâtreté le même sillon, mais en changeant les angles d'attaque. Des souvenirs affluent après ce leitmotiv et se construit ainsi, par petite touches, le portrait de La petite dernière , aimée mais peut être pas désirée, seule née en France d'une famille algérienne, adolescente qui se situe plus du côté des gars que des filles, musulmane mais qui n'honore pas son prénom, tiraillée entre toutes ces définitions et inadaptée à la vie.fatima daas
 Cette recherche identitaire , ce monologue à multiples facettes ,se clôturera d'une manière apaisée quand la narratrice arrivera enfin à  ce paragraphe fluide qui résume le livre qu'elle est en train de rédiger : "Ça raconte l'histoire d'une fille qui n'est pas vraiment une fille, qui n'est ni algérienne ni française, une musulmane je crois, mais pas une bonne musulmane, une lesbienne avec une homophobie intégrée. Quoi d'autre ? " On a envie de lui répondre  :une autrice qui emporte ses lecteurs et ne le lâche plus.

Éditions Noir et Blanc 2020

25/08/2021

#Jewishcock #NetGalleyFrance !

" Dévoilant au grand jour ce qu'on fait toujours semblant d'ignorer, à savoir qu'en vérité il est rare que les gens s'apprécient les uns les autres et que la plupart de nos constructions sociales ne reposent que sur des rapports de force ou d'intérêt."

La narratrice, Allemande qui vit à Londres, monologue tandis que le Dr Seligman ausculte ses organes génitaux. La situation est pour le moins incongrue mais le discours qu'elle tient l'est encore plus car elle attaque d'emblée sur le thème du nazisme, dézinguant avec un humour féroce de prétendues obsessions hitlériennes. katharina volkmer
Tout y passe : la langue allemande  ("- D'ailleurs ce n'est pas un hasard si le mot "plaisir" n'existe pas en allemand; nous ne connaissons que la concupiscence et la joie"), sa famille , les religions, les injonctions faites aux femmes par la société...
Elle se livre aussi sur son amant, ses préférences sexuelles et sa volonté de changer de genre, d'obtenir un Jewish Cock. Finalement, le Dr Seligman en saura plus sur elle que Jason, le pauvre thérapeute chargé de soigner celle qui a  menacé "d’agrafer l’oreille d’un collègue à son bureau " et remarque : "C’était plutôt moi qui risquais de perdre un œil à cause d’une agrafe perdue, mais ça, bien sûr, ils s’en fichent éperdument."
Une quête éperdue et obstinée d'identité qui fait fi des bons sentiments, se dévore d'une traite et vous laisse un peu groggy. C'est caustique et hautement réjouissant.
Vous l'aurez compris, une voix est née, et on a déjà hâte de lire à nouveau cette autrice qui a choisi de s'exprimer en anglais, qui n'est pas sa langue maternelle, afin d'y trouver plus de liberté. Le pari est plus que réussi.

Traduit de l’anglais par Pierre Demarty. Grasset 2021.katharina volkmer

23/08/2021

#Lacartepostale #NetGalleyFrance

"Cette famille, c'est comme un bouquet trop grand que je n'arrive pas à tenir fermement dans mes mains."

Enceinte, Anne Berest pense "à la lignée des femmes qui avaient accouché avant [elle]" et sollicite sa mère, Lélia,  pour "entendre le récit des ancêtres". Les archives accumulées par cette dernière et, en particulier, une carte postale anonyme, arrivée 10 ans plus tôt et portant les quatre prénoms des ascendants maternels assassinés dans des camps d'extermination, vont jouer un rôle essentiel dans cette quête difficile, tant du point de vue psychologique que matériel.
Ce sera aussi pour l'autrice l'occasion d'analyser ce que signifie pour elle le mot "Juif" , élevée dans une famille où la religion n'avait pas vraiment sa place, ce que signifie aussi le fait d'être identifié comme Juif en France de nos jours.
Retraçant à la fois le parcours de ses ascendants maternels, originaires de Russie , avant, pendant et après la Seconde guerre mondiale, cette quête passionnante, digne d'un polar, et réflexions plus intimes, Anne Berest réussit à ne jamais perdre notre intérêt. anne berest
Mieux encore, elle jette un éclairage sur certains points peu évoqués. J'ai ainsi pu découvrir le fonctionnement inhumain du camp de Pithiviers ou bien encore la manière peu glorieuse dont l'administration française a traité les différents aspects de l’indemnisation des survivants spoliés de leurs biens durant la guerre.
Un texte à découvrir absolument.anne berest

Grasset 2021


 

20/08/2021

Glory...en poche

"Les flics, les avocats, les professeurs, les hommes d'église, le juge et les jurés, les gens qui ont élevé ce garçon avant de l'envoyer dans le mode - ils sont"tous coupables."

Gloria Ramirez, quatorze ans, arrive à se traîner jusqu'à la véranda d'une ferme paumée du Texas. Elle vient d'être violée et furieusement tabassée par un beau gosse de vingt ans, fils de pasteur. Il faudra tout le sang-froid et la détermination de Mary Rose Whitehead pour que cette enfant échappe à son poursuivant.
Dans cette région pétrolifère, en 1976,  l'or noir tue indifféremment les hommes et la nature. Les femmes, elles, sont majoritairement assassinées par des hommes. Programmées pour faire des enfants, elles doivent materner aussi leurs maris, être là pour leur bien-être et bien peu d'entre elles ont la chance de faire des études, enceintes dès la fin du lycée et mariées dans la foulée. Les différents groupes religieux se chargent de les maintenir dans le droit chemin. Quant au racisme, il est froidement assumé. La violence est présente, aussi bien dans le climat que dans les mœurs, en témoigne l’équipement d'une patronne de restaurant: "Derrière le comptoir, elle garde un antique pistolet à bétail paralysant, pour les problèmes courants, et un fusil à pompe pour les situations incontrôlables."Mais, heureusement, toutes les femmes ne s'accommodent pas de cet état de faits et nombre d'entre elles mettent en place des stratégies pour échapper à leur condition.elizabeth wetmore
Roman choral qui nous propose un bien belle galerie de portraits de femmes, Glory possède tout à la fois une structure efficace et des personnages aux caractères bien trempés, chacune à leur manière. Pas de bons sentiments, mais un vent de révolte qui emporte le lecteur et ne lui fera pas oublier de sitôt Corrine, Marie Rose et les autres. Un grand coup de cœur.

Glory, Elizabeth Wetmore, traduit de l'anglais (E-U) par Emmanuelle ARONSON

Éditions Les escales 2020

19/08/2021

Ma meilleure amie

"Sans doute les femmes tolèrent-elles mieux que les hommes les mouvements souterrains."

Trois  jeunes provinciales ,bien décidées à ne pas se laisser regarder de haut , partagent une colocation joyeuse, pleine de liberté , irriguée par l'amour des mots et des livres.
Helga, la narratrice ,a d'abord été séduite par Sambre,  la lumineuse qui se destinait à devenir comédienne. A ce duo s'est vite ajoutée Rosie, qui de petits boulots en petits boulots, trace sa voie sans jamais se départir d'une belle énergie.
Las, un jour Sambre claque la porte et Helga se retrouve démunie, sans modèle auquel se référer.41BLi85VfQS._SX195_.jpg
Avec un tel aperçu, on aurait pu s'attendre à un schéma tout tracé (retrouvailles, déception, nostalgie blablabla), schéma qu'évidemment, Fabienne Jacob s'empresse de dynamiter pour mieux se concentrer sur les expériences de sa narratrice au fil du temps qui passe.
Si le temps est effectivement un thème central de ce roman, c'est pour mieux souligner l'immédiateté dans laquelle baigne la jeunesse, persuadée par exemple de ne pas avoir besoin de photographies pour se remémorer.
Les sensations sont aussi extrêmement présentes, en particulier les auditives et tactiles, ce qui nous vaut de superbes passages sur la peau de la personne avec laquelle on partage un lit ou bien encore l'addiction que peuvent faire naître des draps de lin...
Un roman d'apprentissage sensuel et lumineux où l'on souligne quasi à chaque page une remarque ou un passage , un roman qui file bien évidemment sur l'étagère des indispensables.

Buchet-Chastel 2021, 209 pages .

18/08/2021

Monsieur Durant et autres histoires de couples

"Il ferait beau voir que nous accueillions une femelle- pas pour tout l'or du monde ! "

Dorothy Parker est connue pour sa langue acérée et quand elle s'en prend à d'apparents couples ou familles parfaites , c'est un pur régal pour celles et ceux qui apprécient une plume trempée dans l'acide.31H-7NT9zeS._SX195_.jpg
Dans le premier texte de ce recueil de trois , "Monsieur Durant ", elle brosse le portrait d'un homme  très satisfait de lui-même et de son rapport aux femmes, femmes qu'il traite de la manière la plus abjecte sans jamais y trouver à redire ,ni se remettre en cause. Il y avait longtemps que je n'avais rencontré un personnage aussi odieux !
Des textes courts et efficaces qui restent toujours d'actualité tant la vision de  Dorothy Parkerexcelle à débusquer les faux-semblants et les hypocrisies dont beaucoup se satisfont.

 

Éditions Sillage 2021, 76 pages à dévorer d'urgence !

 Traduction Martial Doré

12/07/2021

Mrs Caliban ...en poche

"Il était toujours d'une politesse scrupuleuse. Maintenant qu'elle connaissait les méthodes brutales  avec lesquelles on lui avait inculqué les bonnes manières à l’institut, ces petites marques de civilité lui paraissaient aussi poignantes que s'il s'agissait de cicatrices sur son corps."

 

Dorothy  a perdu son enfant, son chien et son mariage est en train de sombrer.
Qu'est ce qui peut bien  la sauver  ? rachel ingalls
Un monstre, répond Rachel Ingalls dans cet époustouflant roman de 138 pages où , sous des airs policés, elle dézingue à tout va la société américaine, son hypocrisie, sa duplicité , ses médecins qui entendent traiter les dépressions féminines à  grands coups de petites pilules .
Il est aussi question du désir féminin, de l'altérité et ce n'est pas un hasard si la seule personne à comprendre Dorothy est le jardinier hispanique et écolo avant l'heure.
Un roman féministe et plein d'humour où l’héroïne porte un foulard pour protéger ses cheveux des odeurs de cuisine mais se donne avec un très grand naturel à un monstre vert qui adore faire le ménage . Dévoré en une bouchée. Traduction aux petits oignons de Céline Leroy.

Une écrivaine à (re) découvrir de toute urgence ! 10/18 2021

07/07/2021

15 ans déjà !

Le temps a filé, la motivation parfois aussi, l'énergie, mais bon, on verra !

Merci pour vos commentaires, votre fidélité et ...vos idées de lectures qui font grimper ma Pal !

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03/07/2021

Je préfère les génies aux abrutis

Selon ses dires, elle n'a eu qu'une couverture de magazine (celle de Télérama) mais Anémone, même à la fin de sa vie a toujours suscité un  intérêt bienveillant de la  part du public. Que ce soit pour ses rôles dans des comédies à succès ou dans des rôles plus dramatiques.anénome,laurent brémond
Pas du tout grisée par le succès, cette rebelle dès le plus jeune âge a bientôt pris es distances avec une profession dont les aspects négatifs lui pesaient trop, métier qui lui reprochait par ailleurs son franc-parler et ses prises de position en faveur de l'écologie.
Ces entretiens réalisés à lafin de sa vie avec Laurent Brémond lui auront permis de faire le point et de livrer ses vérités. On est heureux de la retrouver telle qu'en elle-même.

Merci à l'éditeur et à Babelio.anénome,laurent brémond

 

Robert Laffont 2021.

 

02/07/2021

Mes 18 exils

"J'étais donc une française en mode-gruyère , avec des trous qui prenaient plus de  place que la masse de fromage. L'histoire d'une vie n'est-elle pas remplie de lacunes, d'ignorance, d'insuffisance , d'humiliation, de vide ? "

Quel plaisir de retrouver Susie Morgenstern dans ces 18 exils qui pour certains sont prévisibles, au vu de son itinéraire et d'autres plus surprenants.susie morgenstern
Susie, comme à son habitude, s'y livre à la fois avec beaucoup de franchise et de délicatesse, n'hésitant pas à évoquer des thèmes comme la masturbation ou le désir sexuel chez les femmes âgées. Elle y évoque aussi la maladie et sa manière , très souriante, d'y faire face alors qu'à l'intérieur l'angoisse rôde.
Éternelle optimiste en apparence, elle égraine néanmoins les regrets de sa vie et envisage même l'organisation de son enterrement. car le dernier exil n'est-il pas la mort ?
Un livre facile à lire mais bien moins léger qu'il y paraît.

L'iconoclaste 2021