13/08/2012
Petit dictionnaire chinois-anglais pour amants
"Je comprends soudain que tu dois souffrir beaucoup avec moi. Parce que je suis puissante et exigeante avec les mots, moi aussi. Et le plus grave c'est que tu dois supporter mon anglais tous les jours. tu n'as pas de chance d'être avec moi."
Venue étudier l'anglais à Londres, une jeune chinoise de 24 ans va , sur un malentendu linguistique, emménager chez un londonien quadragénaire, sculpteur, végétarien et livreur.
Elle apprend "comme une folle" dit-elle et note sur un journal de bord, ayant comme entrée un mot dont elle a recopié soigneusement la définition, l'évolution de sa relation avec cet homme et ses étonnements devant la vie occidentale. Par la même occasion, le lecteur note les progrès linguistiques de Z, comme elle préfère qu'on l'appelle. Mais plus que la barrière linguistique ne serait-ce pas plutôt deux conceptions différentes d'une relation amoureuse qui risque de séparer les amants ?
Un regard étranger sur un mode de vie est toujours extrêmement intéressant et permet par la même occasion de glaner des éléments culturels sur le spectateur extérieur. De plus, ici, les caractères complexes des protagonistes confèrent une gravité au récit qui ne tombe jamais dans les pièges du pathos ou de la guimauve.
J'ai commencé ce récit avec plein d'a priori qui ont pris la poudre d'escampette très rapidment et je me suis vraiment régalée avec ce roman tout bruissant de marque-pages.
Un régal à s'offrir en poche !
Petit dictionnaire chinois-anglais pour amants, Xiaolu Guo, traduit de l'angalis (Chine) par Karine Laléchère, pocket 2012375 pages à savourer !
L'avis de Florinette qui vous enverra chez plein d'autres !
Celui de Mango.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : xialu guo
10/08/2012
Rupture...en poche
"Triste et solitaire , et incapable de casser le moule dans lequel sa vis s'était installée."
Un prof ouvre le feu dans un collège anglais.Trois élèves et un professeur tués. Suicide du meurtrier.Affaire bouclée en un rien de temps. Mais ce serait sans compter sans l'obstination de l'inspecteur Lucya May qui ne se contente pas de la version officielle qui satisfait un peu trop de monde.
Alternant les interrogatoires des différents protagonistes et la quête obstinée de Lucya, le récit avance et devient de plus en plus oppressant, brossant le portrait sans concession d'une société qui, cyniquement , sacrifie son système éducatif, détournant les yeux pour ne pas voir le harcèlement, la violence, le racisme qui la gangrène à tous les niveaux.
La solitude de Lucya, lâchée par sa hiérarchie, n'en devient que plus poignante et on avance le coeur serré au fur et à mesure que se déploie l'éventail de petites lâchetés qui, accumulées, ne pouvaient mener qu'au drame.
Une écriture qui nous ménage heureusement quelques bouffées d'humour mais pour mieux nous piéger au détour d'une information cruciale révélée quasi par inadvertance par l'un des protagonistes. Quand on croit pouvoir souffler un peu , Simon Lelic nous cueille du au creux du plexus solaire et l'on reste sonné devant cette montée de l'horreur.Un récit tendu mais qui laisse la part belle à l'humanité des personnages néanmoins. Un coup d'essai , Rupture est un premier roman, qui est un coup de maître
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : simon lelic, école
08/08/2012
L'arbre à bouteilles
"-Chérie, je te regarde, et j'ai pas besoin de câbles de démarrage."
Leonard Pine vient d'hériter de son vieil oncle cent mille dollars et une maison délabrée où" pousse" un arbre à bouteilles, censé éloigner les mauvais esprits, mais guère efficace contre les voisins indésirables qui habitent la crack house voisine. Gageons que Leonard et son ami blanc Hap sauront venir à bout de l'état déplorable de la bicoque de l'oncle comme de celle de leurs voisins, mais pas forcément de la même manière.
Mais faire le ménage et rafistoler peut mener aussi à d'étranges découvertes, un squelette pas forcément caché dans un placard par exemple...
Ce deuxième épisode des aventures de Hap et Leonard (mais le premier traduit en français, va savoir pourquoi) se déroule entièrement dans un quartier noir et pauvre où Hap fera l'expérience du racisme à l'envers si j'ose dire, y compris dans ses relations amoureuses. Pas trop déstabilisé pour autant, il aidera efficacement son compère à enquêter sur des disparitions dont personne ne se souciait trop.
La tonalité de cet épisode est très sombre mais l'humour de nos héros permet de détendre l'atmosphère et la certitude de voir le problème résolu de manière efficace réjouit d'avance le lecteur ! Un de ces romans qui vous remet le pied à l'étrier !
L'arbre à bouteilles (Mucho Mojo, soit Beaucoup de magie noire), Joe R. Lansdale, traduit de l'américain par Bernard Blanc, Folio Policier2004, 350 pages revigorantes.
Challenge Thrillers et polars chez liliba
L'avis de Dasola, qui souligne que cet Lansdale est cité chez Ken Bruen , une autre bonne référence!:)
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (20) | Tags : joe r. lansdale, noir c'est noir
06/08/2012
C 'était pas ma faute
"Tout était si diamétralement opposé au Chicago doux, agréable et bien tempéré des romans d'Henry LaMarck que ça finissait quand même par frôler la tromperie malveillante."
Parce qu'elle attend avec impatience LE livre sur le 11 septembre que tarde à rendre l'auteur de best sellers américain Henry Lamarck dont elle est devenue la traductrice allemande attitrée, Meike se rend à Chicago pour rencontrer son grand homme. Évidemment elle ignore que celui-ci l'a en horreur "Parce qu'elle passe son temps à dépiauter [ses] romans et à chercher les erreurs." L'écrivain, de son côté, est fasciné par la photo d'un trader, Jasper, qu'il tient à tout prix à rencontrer. Ce dernier évidemment, va draguer Meike et commettre une erreur de transaction, le battement d'aile du papillon qui mettra en évidence les faiblesses du système financier, rien que ça.
De malentendus en quiproquos, chaque personnage croit détenir sa vérité et se trouve embarqué dans un chassé-croisé qui se transformera bientôt en course poursuite dont l'issue, bien sûr, remettra tout en ordre mais pas forcément celui auquel on s'attendrait !
Le décalage entre la réalité et la vision qu'en a chaque personnage fait tout le sel de cette comédie parfois grinçante, dont l'auteur, par ailleurs lui aussi traducteur, maîtrise parfaitement le rythme . Son analyse des rapports entre les personnages est fine et on ne peut lâcher ce roman qui , cerise sur le gâteau parle d'écriture, de traduction et parvient même à nous intéresser au monde de la finance, ce qui pour ma part n'était pas gagné d'avance !
Merci Sylvie !
C'était pas ma faute, Kristof Magnusson, traduit de l'allemand par Gaëlle Guichenay, Métailié 2011, 268 pages pleines de surprises !
Plein d'avis chez Babelio !
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : kristof magnusson, trader, traducteur, romancier
30/07/2012
Divan
"Je me suis découvert une clairière, un espace inhabité, un coin de moi que je n'avais pas encore visité, je le laisserai s'épanouir sans intervenir."
Elle reconnaît avoir une vie agréable, son mariage n'est pas en ruines, elle peut exprimer sa créativité, mais pour la première fois elle suit une psychanalyse. Pourquoi? Elle même est bien en peine de le dire, mais la crise (de milieu de vie ?) est bien là.
Cette thérapie va se poursuivre trois ans durant, et au fil des rencontres avec son thérapeute va se dessiner le portrait d'une femme d'un peu plus de quarante ans qui a l'impression d'être une thérapie de groupe à elle toute seule car elle est plusieurs femmes en une.
Pas d'indications de temps, de cette analysée nous ne saurons rien d'autre que ses épanchements à son thérapeute et ce sera au lecteur de combler les pointillés, d'ajuster les différentes indications qu'elle nous donne. C'est à la fois un peu frustrant mais également très intéressant car le portrait reste sans cesse en évolution et ne sera jamais figé.
L'écriture est élégante et l'on s'attache à cette femme dont certaines facettes nous ressemblent souvent.On reste juste sur sa faim car le livre est trop court (158 pages seulement) et l'on serait bien resté un peu plus longtemps en aussi charmante compagnie.
Divan, Maria Medeiros, traduit du brésilien par Marcia Corban, Pocket 2012.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : maria medeiros, psychanalyse
26/07/2012
Vanilla Ride
"J'ai des scrupules , mais ils sont du genre flexibles."
"Les jumeaux du désastre", ainsi sont surnommés par certains Hap Collins, le blanc hétéro démocrate et Leonard Pine, le black gay républicain. Bastonneurs en diable, ces péquenauds de l'East Texas , comme il se définissent eux-mêmes, peuvent aussi avoir la gachette facile, surtout quand il s'agit de rendre service à un de leur vieux pote. Evidemment, les événements vont prendre une tournure plus compliquée et nos deux héros, forts en gueule et à l'humour décapant vont aller se fourrer dans un joli pétrin, qui les mettra aux prises avec la Dixie Mafia et leur donnera l'occasion de découvrir qui se cache derrière ce patronyme de Vanilla Ride (ne comptez pas sur moi pour vous le dévoiler !).
On ne s'embarrasse ni de stratégie ni de psychologie dans ce roman qui fonce sur les chapeaux de roue mais on passe un excellent moment avec Joe R. Lansdale, son humour et ses métaphores pas piquées des vers.
Si on m'avait dit que j'achèterais un jour un roman avec ce type de couverture ! Mais je l'ai fait et je me suis ré-ga-lée ! Merci Gwen pour cette découverte !
Vanilla Ride, Joe R. Lansdale, Folio policier 2012, 384 pages qui ne font pas dans la dentelle , qui dépotent et sont jubilatoires !
- Cycle de Hap Collins et Leonard Pine
- Savage Season, 1990)
- L'arbre à bouteilles (Mucho Mojo, 1994), Gallimard, Série noire, 2000
- Le Mambo des 2 ours (Two-Bear Mambo, 1995), Gallimard, Série noire, 2000
- Bad Chili (Bad Chili, 1997), Gallimard, Série noire, 2002
- Tape-cul (Rumble Tumble, 1998), Gallimard, Série noire, 2004
- Veil's Visit (1999)
- Tsunami mexicain (Captains Outrageous (2001), Gallimard, Série noire, 2007
- Vanilla Ride (d'abord annoncé sous le titre : Blue to the Bone 2009), Gallimard, Folio policier, 2012
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : joe r. lansdale, hap collins, leonard pine
03/07/2012
Les oreilles de Buster
"Le mensonge ne se laisse pas noyer dans l'amour."
En apparence Eva, cinquante six ans , mène une vie paisible , vie qu'elle partage avec Sven et une vieille dame acariâtre dont elle s'occupe. Le cadeau d'un journal intime que lui fait sa petite-fille va néanmoins chambouler de fond en comble cette vision car elle l'avoue ex abrupto en le rédigeant le soir: Eva a tué sa mère.
Revenant sur son passé, la quinquagénaire revit les émotions d'alors et nous offre un portrait de femme pugnace et tenace mémorable, oscillant entre cruauté et sensibilité extrême.
Une narration qui, en outre, ménage des surprises quasiment jusqu'à la fin ! Vite, passez un excellent moment avec Eva !
Les oreilles de Buster, Maria Ernestam, traduit du suédois par Esther Sermage, Gaïa 2011.
Des avis sur babelio
Plein d'autres avis chez Theoma (merci !)
Merci Sylvie !
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (14) | Tags : marie ernestam
30/06/2012
Witch
"C'était une bonne âme honnête que l'intellect n'encombrait pas."
Les offres spéciales de l'été ont ceci de bon qu'elles nous permettent de découvrir des romans vers lesquels on ne serait pas allés spontanément...
Une jeune femme, terroriste internationale et travaillant aussi à son compte, est rentrée en Grande-Bretagne , de manière fort peu discrète. Aussitôt son "plus grand fan" Dominic Elder, reprend du service au sein des services secrets britanniques car un sommet international va alloir lieu à Londres. Quelle sera la victime de celle que personne ne peut décrire avec précision et qui a été surnommée Witch (sorcière )?
Witch de Ian Rankin a été le roman parfait pour cette fin d'année scolaire et les deux neurones qui me restent : un intrigue prenante, de l'humour, un style agréable qui nous porte tranquillement, pas de voyeurisme dans l'expression de la violence , des personnages attachants et une relation complexe unissant la femme fatale et celui qui la traque, que demander de plus?
En prime, le roman ayant été écrit dans les années 90 , on replonge dans un univers dépourvu de téléphones portables, ce qui paraît tout à fait exotique !
L'exotisme apparaît également dans la vision des françaises: Dominique, une jeune femme qui travaille à la DST roule ainsi en 2CV et porte un béret et des gants rouges (? *) en plein mois de juin à Londres !
Bref, un roman classique et agréable qui remplit parfaitement son contrat !
Gratuit pour deux livres de poche achetés en ce moment.
* Tatiana Golovin qui a créé le buzz avec ses gants quand elle commentait Roland Garros aurait-elle lu ce livre ? :)
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : ian rankin
28/06/2012
Les oranges ne sont pas les seuls fruits
"L'incertitude était pour moi ce que l'aardvark* est pour les autres gens."
Paru pour la première fois en 1985 (et adapté pour la Télévision britannique en feuilleton), Les oranges ne sont pas les seuls fruits est la version romanesque de Pourquoi être heureux quand on peut être normal ?**
Ce roman insiste davantage sur la dimension religieuse du personnage de madame Winterson (si obnubilée par ses pratiques religieuses qu'elle ne se rend pas compte que sa fille adoptive est devenue sourde !) et n'hésitant pas à organiser un exorciste quand elle se rend compte de l'homosexualité de cette dernière.
J'ai nettement préfé l'autobiographie de Jeanette Winterson, qui revient davantage sur sa "libération" grâce à la littérature et relate sa recherche de sa mère biologique.
Merci Sylvie !
*petit fourmilier d'Afrique.
**qui vient d'obtenir le prix Marie-Claire.
Jeanette Winterson à écouter ici.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : jeanette winterson
26/06/2012
L'aérodynamique du porc
"J'aime assez cette sensation d'être rassasié et flapi."
Premier roman de mon chouchou Patrick Gale, L'aérodynamique du porc contient en germe des thèmes qui seront ensuite exploités et enrichis : les relations familiales, la découverte de l'amour homosexuel. Mêlant ici deux intrigues qui finiront par se nouer in extremis, ce roman, parfois un peu maladroit , parfois un peu bavard,fait la part belle à l'espièglerie et à la fantaisie un peu foutraque.
Comme d'habitude un très joli portrait de mère , avec laquelle je me suis trouvée un point commun : "Evelyn dormait la fenêtre ouverte car elle appréciait un lit bien chaud dans une pièce fraîche. Elle ouvrait toujours les rideaux avant de se coucher , de façon à être réveillée par le soleil. Ce matin-là , il se déversait à flots dans la pièce et elle s'éveilla au chant des oiseaux. elle s'habilla en vitesse et s'éclipsa."
Quant au porc du titre, il désigne en argot un policier (une des héroïnes est une jeune policière qui tarde à se reconnaître lesbienne) mais peut être compris de bien d'autres façons. à réserver aux inconditionnels sans doute.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : patrick gale