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09/01/2018

#MangerL'autre #NetGalleyFrance

"Peut être suis-je la mise en garde de l'espèce ? Voici ce que vous risquez de devenir avec tous ces progrès technologiques qui vous dispensent de bouger et d 'agir, vous incitent à dévorer toujours plus. Voici l'utopie imbécile à laquelle vous aspirez."

Dès sa naissance, la narratrice était obèse. Devant une telle monstruosité, la mère  a fui, cédant la place au père qui a commencé une gigantesque entreprise de gavage tant de nourriture préparée avec amour que de mensonges. Il raconte en effet à sa fille qu'elle a  dévoré in utero sa sœur jumelle, ce qui expliquerait son poids.ananada devi
Harcelée, cyber-harcelée, la jeune femme connaîtra pourtant, lors d'une deuxième naissance symbolique, un homme qui sera son exact opposé et lui fera découvrir les beautés de son corps. Mais Éros et Thanatos sont intimement mêlés et dans une société du paraître, se faire voir peut entraîner de douloureuses conséquences.
Roman de de la dévoration, de l'abondance ,de l'excès , Manger l'autre charrie, comme un fleuve furieux, les métaphores et  tend à notre société un miroir à peine déformant. Oui, nous vivons dans un monde où certains ont accès à la nourriture déversée sur nous comme d'une corne d'abondance mais où on nous enjoint la minceur, voire la maigreur.Nous nous gavons d'images mais ne jetons pas un regard sur les exclus de la société et nous acharnons sur ceux que nous considérons comme hors-normes.
Un roman au rythme soutenu, à l'écriture tantôt rabelaisienne, tantôt sensuelle, qui ne tombe jamais dans le voyeurisme ni le pathos, soulignant toutes les ambiguïtés des personnages et des relations qu'ils entretiennent entre eux. Une allégorie puissante et roborative. Un grand coup de cœur !

Et zou, sur l'étagère des indispensables !ananda devi

Manger l'autre, Ananda Devi, Grasset.2018

07/01/2018

D'après une histoire vraie...en poche

"Coiffées, maquillées, repassées. Sans un faux pli. Combien de temps pour parvenir à cet état de perfection, chaque matin, et combien de temps pour les retouches, avant de sortir ? "

En couverture ,des photos  d'une jeune fille qui pourrait être l'auteure. Le titre. De multiples références à la vie privée/publique de Delphine de Vigan (son précédent  roman basé sur l'histoire de sa mère, son médiatique compagnon, François Busnel), autant de références qui semblent accréditer l'idée de réalité. Et on entre de plain-pied dans l'histoire de cette narratrice(Delphine) qui ne parvient littéralement plus à écrire une ligne (pas même pour une liste de courses), qui va tomber sous l'emprise d’une femme , "plume" pour des people en mal de confidences.delphine de vigan
Roman d'une amitié toxique, mais aussi roman qui interroge la soif d’histoires "vraies" de notre époque, le texte de Delphine de Vigan m'a bluffée dans sa première partie. J'ai été moins enthousiaste pour la fin, moins convaincante, même si placée sous les auspices d'un maître du genre, Stephen King. Il n'en reste pas moins que j'ai dévoré ce livre.

06/01/2018

Le pique-nique des orphelins...en poche

"Elles aimaient trop Dot, et pour ce péché elle leur menait la vie dure."

Ironie du sort, c'est en emmenant ses enfants aux festivités organisées en faveur des orphelins que leur mère abandonne Karl, Mary et le nouveau-né, préférant s'envoler au sens propre du terme , dans un biplan piloté par un aviateur acrobate.louise erdrich
Nous en sommes en 1932, la dépression sévit encore aux États-Unis et les aînés, vite séparés de leur petit frère n'ont qu'une solution: se rendre chez leur tante, bouchère dans le Dakota du Nord. Seule Mary y parviendra, Karl préférant se réfugier dans le train de marchandises qui repartira sans sa sœur.
Personnalité riche et complexe, Mary parviendra vite à se forer une place dans la famille de sa tante, au grand déplaisir de sa cousine, Sita.
Sur une période de quarante ans, Louise Erdrich, dont c'est ici le second roman (dans une nouvelle traduction), utilise la forme du roman choral pour peindre une fresque familiale faisant la part belle aux femmes.Mary, Sita ou leur amie commune Celestine, ont le chic pour affronter les épreuves de la vie avec originalité et courage. Elles se trouvent souvent embarquées dans des situations improbables , parfois cocasses, parfois tragiques, mais dont elles se tirent toujours avec panache.
L'écriture magnifique et l'inventivité narrative de l'auteure font de ce récit une petite merveille à (re) découvrir sans plus attendre !

05/01/2018

La mise à nu

"En élargissant mon horizon, ma vie s'est rétrécie."

Louis Claret, professeur d’anglais vieillissant, accepte de poser pour un de ses anciens élèves, devenu peintre renommé.
L’occasion pour les deux hommes de revenir sur le passé, de faire le point sur leurs existences, leurs réussites, leurs échecs. l'occasion d'une Mise à nu, au sens propre comme au sens figuré. jean-philippe blondel
Si l'évocation du métier de professeur est particulièrement bien évoquée, je suis restée plus réservée sur la progression dramatique de l'ouvrage et sur le côté un peu guindé de Louis Claret pour qui je n'ai guère éprouvé d'empathie. L'impression de rester à la surface des événements et des hommes.

04/01/2018

L'étang

"Écoutez, il n'a échappé à personne à ce stade que ma tête est tournée vers les ailleurs de l'imagination et qu'elle n'est pas vraiment concernée par les circonstances présentes- toutefois personne ne peut  savoir ce qui se fabrique sans cesse dans l'esprit d'un autre et donc, pour cette raison uniquement peut être, ma façon d'être, telle qu'elle est, peut être très déroutante, déconcertante, inexplicable; même, en réalité ,offensante parfois. On se méfie facilement d'une paumée comme moi  et il arrive fréquemment qu'on m'accuse de toutes sortes d'impertinences."

 Comment rendre compte , sans lui porter préjudice, de ce recueil de textes, parfois très courts, toujours surprenants par leur langue qui mêle humour, poésie, réflexions sur les minuscules faits du quotidien avec un point de vue toujours original etdécalé ? claire-louise bennett
La narratrice s'est installée à la campagne dans une petite maison au confort rudimentaire et on se dit qu'on va avoir droit au récit de ses aventures dans ce nouvel environnement mais pas du tout On assistera certes à quelques essais de jardinage,mais pas forcément pour les raisons attendues ni pour le résultat escompté.
Tout est prétexte à des réflexions qui sortent de l’ordinaire, au gré de phrases amples qui voguent parfois d'un sujet à l'autre sans transition, mais sans jamais perdre son lecteur de vue.
Pas de récit proprement dit mais une impression d'immédiate adéquation avec cette vision du monde à nulle autre pareille. Déroutante, oui, mais jamais ennuyeuse ! Un pur bonheur de lecture pour moi mais qui pourrait en laisser d'autres sur le bord du sentier.

 

Un grand bravo au traducteur: Thierry Decottignies.

 

L'étang, Claire-Louise Bennett, Éditions de l'olivier 2018, 217 pages enthousiasmantes et piquetées de marque-pages. Et zou,, sur l'étagère des indispensables !

Une dernière citation, pour la route: " Le matin attend debout sur sa haute balançoire , déplaçant la terre d'avant en arrière sous ses ongles avec un morceau de carte vierge."

03/01/2018

Le pouvoir

"Le pouvoir de nuire, de faire mal ,est une forme de richesse."

Les femmes, grâce à un organe apparu au niveau d'une clavicule, possèdent un nouveau pouvoir: celui d'infliger une douleur fulgurante, et même la mort. Elles ne sont pour autant pas invincibles, mais la peur a changé de camp et les hommes sont devenus le sexe faible.
Aux États-Unis, en Arabie Saoudite,dans un petit État d'Europe de L'Est et bientôt aux quatre coins du monde, les femmes s’organisent, une nouvelle religion apparaît . Mais celles qui détiennent désormais le pouvoir vont-elles se comporter mieux que les hommes ?naomi alderman
En choisissant de suivre le destin de quatre personnages, dont les destins vont évidemment se croiser, Naomi Alderman axe son roman sur la politique, la religion, les médias et le banditisme. Elles montrent les liens que ces puissances entretiennent mais ne perd pour autant pas de vue le côté humain de Tunde ,jeune journaliste nigérian et unique héros masculin, Allie jeune métisse américaine au parcours chaotique, Roxy fille d' un truand anglais ou bien encore Margot, ambitieuse femme politique divorcée et mère de famille américaine.
L’enthousiasme est très présent dans la première partie montrant le"Grand Changement", tandis que la tension monte dans la seconde qui relate les dérives du pouvoir.
Les textes qui encadrent ce qui est présenté comme un "maudit livre" rédigé par un homme, augmentent la sensation de réel du roman et l’inscrivent dans une démarche présentée comme historique qui ne peuvent que susciter la réflexion. Une grand plaisir de lecture, un roman qui se dévore d'une traite et que la grande Margaret Atwood qualifie  de "fulgurant", quoi de mieux pour se précipiter  ?

Le pouvoir, Naomi Alderman, Calmann-Lévy 2018,  traduit de l'anglais (G-B) par Christine Barbaste, 392 pages époustouflantes.

02/01/2018

#LesLoyautés #NetGalleyFrance

 "Il est l'enfant de la séparation des corps et des biens, de la rancœur, des dettes irréparables et de l'alimentation pension : il connaît les règles de la diplomatie."

Les conflits de loyautés, Hélène connaît bien. Dans sa chair même, ils se sont inscrits. Aussi quand cette prof de collège repère la pâleur excessive de Théo,  jeune garçon de douze ans,son épuisement, elle essaie de tirer la sonnette d'alarme au sein de son établissement. Mais peut être son expérience personnelle a-t-elle biaisé son identification du problème et ses propres réactions.delphine de vigan
Les loyautés dans le couple, dans les relations amicales, Delphine de Vigan les explore en un roman choral qui donne la parole à toute une constellation de personnages évoluant autour de cet enfant en danger. Ces loyautés, ajoutées à des difficultés de communication,  elles nous empêtrent, elles vont peut être empêcher de  sauver Théo.
Court roman qu'on ne peut lâcher, Les Loyautés ne donne jamais la parole à son personnage principal dont les actions, les réactions, les sentiments sont pris en charge par un narrateur extérieur. Comme s'il n'était déjà plus un sujet agissant , tout englué qu'il est dans une situation qui le le dépasse.
On s'identifie, on entre en empathie et on tourne sans s'en rendre compte les pages de ce roman aussi réussi dans son analyse psychologique que dans son écriture.

Les Loyautés, Delphine de Vigan, jean-Claude Lattès 2018 delphine de vigan

01/01/2018

Bonne année !

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31/12/2017

L'aube sera grandiose

"Elle l'a serrée très fort et j'ai senti passer, entre elle et moi, comme un courant électrique puissant, une onde chargée d'un incroyable désir de vivre que rien ne pourrait empêcher. Pas même le chômage. Pas même la pauvreté. Pas même la solitude."

Quand Titania, écrivaine, embarque sans prévenir sa fille de seize ans, Nine, vers une destination inconnue, une cabane cachée au bord d'un lac, cette dernière regimbe. Sans réseau, comment supporter ce huis-clos avec sa mère ?anne-laure bondoux
Ce que Nine ignore c'est que Titania rejoue avec elle une scène qu'elle-même a vécue quand sa propre mère, Rose-Aimée ,lui a dévoilé un secret familial. Dorénavant, c'est à Titania de passer le relais et de narrer à sa propre fille une histoire familiale pleine d'amour et de cahots.
Récit d'une nuit blanche, L'aube sera grandiose est un roman fluide qui nous tient en haleine, une magnifique histoire de transmission, une magnifique  histoire d'amour entre des mères atypiques et leurs enfants. L'occasion aussi de se replonger, pour qui les ont connues, dans les années 70, là où tout était plus lent, là où l'ennui n'était pas sauvagement combattu à l'aide d'écrans. Un grand coup de cœur pour terminer l'année.

 

Je vous souhaite à toutes et à tous des aubes grandioses en 2018.

30/12/2017

Défense de Prosper Brouillon

"Qui s'aventure dans un livre de Prosper Brouillon doeric chevillardit s'attendre à éprouver quelques secousses. Ce n'est pas une lecture de tout repos. La vérité vous saute à al gorge  comme un lynx et vous lacère le visage de rides profondes : vous avez vieilli d'un coup, à moins plutôt que ces rides ne soient les cicatrices attestant une sur-sollicitation des muscles zygomatiques affectés à des tâches  qui excèdent leurs forces (utilisez de préférence vos biceps dorénavant pour soulever des enclumes)."

Un centon nous rappelle Wikipédia,  est une œuvre littéraire et/ou musicale constituée d'éléments repris à une ou plusieurs autres, et réarrangés de manière à former un texte différent.
Ce n'est pas exactement ce à quoi s’emploie ici Eric Chevillard qui, réutilisant les citations d’œuvres romanesques qu'il avaient critiquées dans ses chroniques du Monde, leur invente un auteur commun: Prosper Brouillon, romancier éreinté par la critique (qu'il tacle aussi au passage), mais adulé par les lecteurs. Il feint donc ici ironiquement de prendre sa (leur) défense, pour mieux l'(les) éreinter avec humour. Usant d 'un langage parfois pompeux, abusant des hyperboles, Chevillard se livre à un réjouissant jeu de massacre, citations à l'appui.
Grâce à l'efficacité d'un moteur de recherche, je me suis amusée à identifier les trois -quarts environ des auteurs des sus-dites "perles". En voici quelques-uns: Eric Neuhoff arrive en tête des citations misogynes rien moins que puantes (au sens propre du terme hélas), talonné de près par Beigbeder (qui semble vouer une rancune tenace à Chevillard). Alexandre Jardin est lui aussi abondamment cité. Deux femmes, dans des genres très différents dans ce palmarès: Eliette Abécassis et Denise Bombardier.

Un grand plaisir de lecture pour terminer l'année en beauté et ne pas oublier que la gloire est souvent éphémère.

Papillon m'avait donné envie: clic.