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25/01/2017

Ceci est mon sang

"Trente milliards de dollars, soit 26 milliards d'euros  c'est ce que représente le marché annuel de la protection périodique, soit l'équivalent du PIB de Bahreïn, un archipel pétrolier du sud de l'Arabie saoudite qui va sans être ravi de l'apprendre."

Le titre, explicite et facétieux, donne le ton : on va parler de choses sérieuse mais avec humour. La couverture où éclate cette magnifique couleur rouge tranche sérieusement aussi avec les succédanés bleus ou verts que les publicités pour les tampons et autres serviettes périodiques se croient obligés d'utiliser.
Fi des tabous donc, Elise Thiébaut nous emmène en sa compagnie à la découverte des règles, des premières aux dernières, au fil de son histoire personnelle, dans laquelle beaucoup se reconnaîtront.Elle se réfère aussi à l'Histoire, l'économie, voire la science, sans jamais être ennuyeuse ou rébarbative.
Féministe, très drôle, ce n'est pas incompatible, l'autrice se révèle pleine d'humour et de ressources, fustigeant au passage le machisme des scientifiques, des médecins ou soulignant l'opacité entourant la composition des serviettes et tampons périodiques.élise thiébaut
On apprend plein d'infos et même les littéraires pur jus comme moi ne seront pas perdues dans les explications scientifiques, très imagées et claires.
Remarquons au passage qu 'Elise Thiébaut ayant souffert d'endométriose, fait aussi le point sur cette pathologie trop souvent méconnue.248 pages qui se dévorent toutes seules.

Ceci est mon sang, histoire des règles et de ceux qui les font, Élise Thiébaut, Éditions La Découverte 2017. Un grand coup de cœur ! Et zou sur l'étagère des indispensables !

24/01/2017

La plus folle de nous deux

"Sa joie semble calibrée selon le tableau Excel pour resurgir quand mon nom s'affichera sur l'écran."

Une journaliste de quarante-cinq ans, en vue d'écrire un livre, décide d'enquêter sur Noémie Leblond, femme politique en pleine ascension, qui pourrait entretenir quelques points communs avec NKM. Elle s'immisce dans l'entourage de cette femme en apparence parfaite,commence une relation avec un de ses jeunes conseillers, pour qui elle n'est qu'une "milf", comprendre « Mother I'd Like to Fuck » (mère que j'aimerais b..." .
Ayant grandi au milieu de malades mentaux (ses deux parents sont psychiatres), la narratrice entretient un rapport particulier avec la folie et envisage le monde politique par ce biais.hélène risser
Si j'ai beaucoup aimé l'évocation de monde de la psychiatrie, je suis restée plus réservée sur la description du microcosme politique, trop convenue à mon goût. On ne s’attache à aucun personnage (surtout pas à la narratrice qui s'aveugle avec un bel acharnement) et on reste un peu sur sa faim même si le roman se lit sans déplaisir.

La plus folle de nous deux, Hélène Risser, Plon 2017.

23/01/2017

Merci pour l'invitation

 "Vraiment ? Si je laissais ma fille décider de ce genre de choses, je sortirais avec un beagle !"

Ouvrir un livre de Lorrie Moore c'est avoir la certitude d'entrer dans un univers où la réalité est scrutée avec un grand sens du détail, non dénué d'humour.
Cette écrivaine, que je suis depuis ses débuts avec toujours autant d’enthousiasme, est aussi la reine de l'ellipse, privilégiant le moins pour en dire plus, accordant ainsi toute sa confiance à l'intelligence de son lecteur. Dès la première phrase, le ton est donné : "Kit et Raf s'était rencontrés au cours d'un mouvement pacifiste où ils organisaient des manifs et fabriquaient des pancartes contre le nucléaire, ce qui ne les empêchait nullement d'avoir à présent envie de se tuer l'un l'autre." 51YxxjK7H9L._AC_US218_.jpg
Nous voilà donc embarqués dans une histoire où les personnages, bien qu'ancrés dans le monde réel, semblent légèrement déphasés, ayant fait ou étant sur le point de faire, un pas de côté, ce qui est aussi le cas des sept autres nouvelles composant ce recueil où j'ai glané de multiples citations. Une dernière pour la route "C'est sans doute pour cette raison que la foi avait été créée : afin d'élever des adolescents sans y laisser sa peau. Et bien sûr aussi pour cette raison que la mort avait été créée :pour échapper auxdits adolescents."

Vite découvrez, si ce n'est déjà fait, cette autrice !

Merci pour l'invitation, Lorrie Moore, traduit de l'anglais (E-U) par laetitia Devaux, Editions de l'Olivier 2017, 233 pages succulentes.

Le billet enthousiaste de Cuné  !

22/01/2017

Blonde à forte poitrine...en poche

"Changer de corps pour changer de vie. Depuis ses débuts, c'est en modifiant son aspect physique qu'elle a forgé son destin."

Fantasme par excellence, la Blonde à forte poitrine draine à la fois des idées de candeur et de luxure. Cette synthèse improbable, l'héroïne de Camille de Peretti la réussit pour son plus grand malheur. camille de peretti
S'inspirant du destin d'Anne Nicole Smith, bimbo qui épousera un sugar daddy millionnaire quasi nonagénaire, l'autrice dissèque ici le destin d'une femme emblématique qui, manipule un corps qui en fait jamais ne lui a appartenu,car elle lui a fait subir de nombreuses violences pour l'adapter aux désirs masculins. D’éprouvantes descriptions d’opérations de chirurgies esthétiques nous font bien prendre conscience que ces actes  n'ont rien d'anodin et entraînent des conséquences  à plus ou moins long terme.
La tragédie file à toute allure, décrivant les multiples facettes d'une femme qui avait tout à la fois besoin de protéger ses enfants et  de se faire protéger elle-même mais,victime de son physique, s'y est prise d'une manière fort dangereuse.
Un roman prenant qui dépasse largement le cadre de l'anecdote et peut s'appliquer à d'autres blondes à fortes poitrines. Un bon moment de lecture.

21/01/2017

La fin d'une imposture...en poche

"D'une certaine manière, elle admirait sa vigilance constante et sa paranoïa absolue."

Profitant de la détresse d'une famille en plein bouleversement (adultère du père, mort accidentelle du fils en Thaïlande), un jeune homme, Jed, s'introduit dans ce nid perturbé via Maddie, la fille de la maison, adolescente en pleine dépression.
Si Rosalie, la mère, est d'abord enchantée par ce jeune homme qui semble leur apporter juste ce dont ils ont besoin en ce moment douloureux, elle va vite se rendre compte de l'emprise nocive qu'il exerce et des mensonges qu'il profère. Elle décide donc de partir à la recherche de la vérité, au risque de faire éclater définitivement sa famille.kate o'riordan
Description d'une emprise psychologique, La fin d'une imposture est aussi un récit fertile en rebondissements, angoissant ,et qui n'hésite pas à repousser les limites de la bienséance. L'auteure enferre ses personnages dans des choix douloureux, mais peint une mère de famille au caractère bien trempé qui n'a pas peur d'affronter ses erreurs. Un coup de cœur !

 

20/01/2017

Recherche femme parfaite...en poche

"La folie, me dit-elle, c'est de faire toujours la même chose, mais en espérant qu'un jour il y ait un résultat différent."

Julie est une femme parfaite , mère, épouse , qui mène sa carrière tambour battant. Elle est profondément admirée par sa voisine, la narratrice,  photographe beaucoup plus bohème:"C'était insensé tout ce qu'elle était capable de faire en une seule journée. Avec gentillesse et l'air de ne pas faire d'efforts . Sans se plaindre . Et le sourire aux lèvres, s'il vous plaît !".
Mais un jour la belle mécanique s'enraye : Julie craque et se retrouve internée à Ste Anne. Diagnostic: "épuisement maternel aigu". anne berest
La narratrice commence alors une quête de femmes parfaites, cooptées par d'autres femmes, qu'elle photographiera en vue d'une exposition à Arles. Mais ce qu'elle trouvera au bout de sa recherche n'aura rien à voir avec le but attendu.
Avec humour et empathie, Anne Berest brosse le portrait de femmes de tous âges qui ont fort à faire avec leur féminité et la perfection qu'elles s’obstinent à atteindre, ou pas...Un roman joyeusement féministe, mené tambour battant , plein d'optimisme, de références et de conseils iconoclastes. Une galerie de personnages hauts en couleurs, (notamment une conseillère: Marie-Amélie Roussel,"sorte de psychanalyste concrète" qui vous donne son avis sur les choses" que j'ai tout particulièrement adorée) ,qui donne la pêche ! Un coup de cœur !

19/01/2017

C'est dimanche et je n'y suis pour rien...en poche

Le mort est le compagnon idéal, jamais jaloux, hargneux, mal luné, le mort ne vous décevra jamais. Il vous laissera lui tailler son costume de héros."

Léonore, la quarantaine venue, entreprend un voyage au Portugal , pays de son amour de jeunesse, tragiquement disparu.carole fives
Elle n'a rien construit, a abandonné ses rêves de peinture et semble caparaçonnée dans la culpabilité d'un passé douloureux.
Ce voyage, suivi au jour le jour, lui permettra-t-il de prendre son envol et de faire la paix avec elle -même ?
Dans un style à la fois enjoué et sensible, Carole Fives entrelace passé et présent, faisant revivre avec acuité les sentiments exacerbés de la jeunesse. Nous suivons pas à pas son héroïne, comprenons ses réticences, ses peurs et découvrons aussi tout un pan trop mal connu de notre histoire: celle des Portugais venus s'installer en France.
Un roman qui fait battre le cœur mais ne sombre jamais dans le pathos. Une réussite qui confirme tout le bien que j'avais déjà écrit sur les différentes œuvres de Carole Fives !

18/01/2017

Nue sous la lune

"J'étais ton inséparable jouet, ton yo-yo, et tu me maniais à la perfection."

Une femme a tout abandonné, son talent de sculpteur en particulier, pour se mettre au service, dans tous les sens du terme, d'une sorte de géant de la sculpture. Ce dernier, à la tête d'une communauté artistique où il accueille ses disciples, règne sans partage sur son cœur et son corps.
De cette emprise, elle tente de se défaire au début du roman.violaine bérot
Récit à la première personne, Nue, sous la lune, est un texte à la fois fiévreux et maîtrisé où une femme analyse avec minutie son enfermement volontaire dans une relation toxique. Il est parfois difficile de  faire prendre la mesure de tels liens mais Violaine Bérot,  en 118 pages denses , y parvient avec brio.

Nue, sous la lune, Violaien Bérot, Buchet-Chastel 2017, 118 pages piquetées de marque-pages.

17/01/2017

Garder la tête hors de l'eau

"C'était ma faute. Pourquoi est-ce que je l'avais écouté ? Et pourquoi est-ce que je l'écoutais tout court ? Il avait failli assassiner mon premier béguin, il m'avait diagnostiqué un problème oculaire imaginaire, et il avait l'art des plans foireux et des catastrophes."

Nicolaïa Rips a grandi entre une mère ancienne mannequin, voyageuse intrépide sédentarisée, métamorphosée  en peintre reconnue et un père avocat devenu romancier, spécialiste en catastrophes (cf la citation supra) dans le Chelsea Hotel.nicolaïa rips
Si dans les années 2000, les célèbres résidents de ce lieu mythique ont mis les voiles depuis longtemps, il n'en reste pas moins que cet endroit est toujours fréquenté par une faune haute en couleurs et surtout bien plus chaleureuse que les camarades de classe , bien trop conventionnels de l'auteure.
Ces derniers lui mènent la vie dure et il faut tout l'humour de la jeune fille pour Garder la tête hors de l'eau, ainsi que des moyens forts peu conventionnels, suggérés par ses parents et amis du Chelsea Hotel.
Une autobiographie échevelée, extrêmement drôle, enlevée, qui se dévore d'une traite. Nicolaïa Rips a dix-huit ans et on lui souhaite volontiers un bel avenir dans le domaine artistique.

Garder la tête hors de l'eau , Nicolaïa Rips,Traduit de l’anglais (États-Unis) par Cécile Dutheil de la Rochère, Fayard/Pauvert, 312 pages.nicolaïa rips

 

16/01/2017

Génération

"Le mariage est une tombe pour la femme."

Centré sur le printemps et l'été 2010, Génération est un roman choral qui évoque aussi le passé (1958), 2016 et se projette même en 2027, un peu difficile à résumer sans en révéler trop.paula mc grath
Ses personnages sont variés mais ont souvent comme point commun d'avoir quitté leur pays d'origine, de façon provisoire ou définitive. L'une des héroïnes est une irlandaise, Aine,  qui envisage de s'installer dans une ferme bio au cœur de l'Illinois, pour travailler gratuitement , échapper à sa vie étriquée de femme divorcée. Tant pis si elle ne connaît que trop superficiellement Joe, le propriétaire de la dite exploitation, qui se révèle beaucoup moins avenant que prévu , voire potentiellement dangereux.
Avec subtilité, Paula Mc Grath tisse des liens entre les époques et les personnages, sans jamais perdre son lecteur en route. On s'attache immédiatement à chacun d'eux, parfaitement croqué, on a plaisir à les retrouver au fil du texte et à constater leur évolution. L'écriture est précise et,pour un premier roman, on ne peut qu'admirer la perfection de la narration. Un grand coup de cœur !

Génération, Paula Mc Grath, traduit de l’anglais (Irlande) par Cécile Arnaud, Quai Voltaire 2017, 224 pages addictives.

L'avis enthousiaste de Cuné !