06/05/2017
Les nuits de laitue...en poche
"Désormais, Otto souffrait d'une insomnie sans fin. Ses mauvaises pensées dureraient pour toujours puisqu'il n'y aurait plus jamais de matin-désormais toutes ses nuits avaient un arrière- goût de laitue. Et Otto détestait les légumes-feuilles."
Otto et Ada "avaient passé un demi-siècle ensemble à cuisiner, à faire des puzzles géants de châteaux européens et à jouer au ping-pong le week-end (du moins jusqu'à l'arrivée de l'arthrite) dans un quartier dont les habitants sont aussi haut en couleur que leur maison jaune.
Au début du roman, Ada vient de mourir. Otto tente donc tout à la fois de lutter contre ses insomnies, tout en remettant de l'ordre dans ses pensées. En effet, selon lui, quelque chose" cloche "dans son univers peuplé de personnages fantasques et souvent "perchés", mais il n'arrive pas à élucider l'affaire...
L'aspect policier n'est ici qu'un prétexte dans ce roman enjoué et chaleureux, peignant un microcosme grouillant d'originaux en tous genres, ayant parfois des rêves plus grands qu'eux mais parvenant à enchanter leur quotidien, de manière simple et cocasse.
Un très bon moment de lecture.
Les nuits de laitue, Vanessa Barbara, traduit du portugais (brésil) par Domnique Nédellec, Zulma 2015, poche 2017 223 pages toniques !
07:42 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : vanessa barbara
05/05/2017
Vie et moeurs des familles d'Amérique du Nord
Sous forme d'abécédaire, richement illustré par des photographies d'auteurs divers, l'objectif de cet ouvrage, qu'on peut lire de façon linéaire ou pas, est de dépeindre "l'âme de cette espèce étrange mais tellement universelle : les habitants de banlieues américaines."
Las, je suis restée de marbre devant ces personnages qui ont l'air d’être observés à distance, comme des insectes vaguement répugnants , sans aucune empathie ni originalité.
06:00 Publié dans Objet Littéraire Non Identifié, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : garth risk hallberg
04/05/2017
Roland est mort ...en poche
"J'inspire. J'ai les bras en croix, un caniche qui m'attend pour aller pisser, un trou dans ma chaussette gauche, et toujours aucune perspective d'avenir professionnel. Le gros faisan m'applaudit."
Roland est mort, c'est d'abord le contraste du titre et de la couverture rose bonbon., contraste parfaitement justifié , on le verra plus loin.C'est aussi le leitmotiv qui ouvre chaque chapitre, sorte de memento mori pour le narrateur car "Je bois pour oublier que demain, Roland c'est moi."
En effet, si leur seul point commun était leur mur mitoyen, le narrateur est peut être sur le même chemin que Roland, mort seul chez lui, dans l'indifférence quasi générale. Pour tout bien, Roland laisse une caniche prénommée Mireille, en hommage à Mireille Mathieu dont Roland écoutait les chansons en boucle.
Voilà donc le voisin qui hérite de Mireille, puis de l'urne funéraire , calamités successives dont il lui faudra bien s'accommoder.
Ce pourrait être tragique, c'est follement comique car le voisin, non content d'accumuler les héritages encombrants et incongrus, est un looser fini (largué par sa copine, viré de son boulot, nanti d'une famille de frappadingues ). Le principe d'accumulation fonctionne à plein régime et le style bourré d'humour de Nicolas Robin fait le reste. Pas de bons sentiments mais un zeste de tendresse pour ce quadragénaire à qui sa grand-mère demande sans cesse "-Alors, pourquoi t'es pas marié?", "ça la chiffonne. C'est le pépin. Ne pas être marié à quarante ans, c'est la tuile dans la famille.ça cache un problème.à son époque, les hommes non mariés étaient forcément curés ou homosexuels. On demandait aux uns de parler de l’Évangile, aux autres de se taire.Mamie exige la vérité. Elle veut savoir envers qui je suis dévoué: Dieu ou Burt Reynolds."*
Nous nous permettrons juste de donner un indice: être fan de Mireille Mathieu peut présenter des avantages...Un petit plaisir déniché à la médiathèque, 183 pages dévorées le sourire aux lèvres.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : nicolas robin
03/05/2017
L'affreuse
"Mince, chacun ses soucis, je n'y peux rien.Je suis la cause involontaire de leurs inquiétudes.C'est trop lourd à porter pour moi."
Ariel Crozon a quarante neuf ans quand on lui diagnostique la maladie de Charcot (sclérose latérale amyotrophique). Maladie incurable.
Vie confortable, travail intéressant, vie affective bien remplie, tout cela va être chamboulé de fond en comble et les gestes les plus anodins vont rapidement devenir de vrais défis.
Écrire, sous forme de petits textes aux titres explicites, textes qui seront d'abord destinés à ses proches ou à ses médecins, avant d'être envoyés à Daniel Pennac qui jouera un rôle de passeur ,écrire c'est ici comme indiqué sur le bandeau une forme de résistance.
Pas d'autoapitoiement, mais des constats lucides,souvent plein d'humour sur le monde médical et son impuissance, la progression de la maladie, les réactions de ses proches, ses sautes d'humeur. Par petites touches, un peu à la façon dont semble progresser l'Affreuse, nous est dépeint l'inéluctable.
Un récit émouvant mais sans pathos qui donne longtemps à réfléchir.
L'Affreuse, Ariel Crozon, Ediitons Autrement 2017, 199 pages .
06:00 Publié dans Récit | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : ariel crozon, daniel pennac
02/05/2017
Le saut oblique de la truite
"A force d'efforts, de privations et d'orgueil, je n'ai réussi qu'à atteindre l'authentique statut de raté. Je n'ai pas trente ans; j'ai fait vite."
à deux doigts de ne pas "pouvoir faire autrement que de devenir architecte", alors qu'il se rêve romancier, le narrateur se rend à un rendez-vous avec son maître ès liberté, Olivier. Olivier, pour qui il a "la plus grande affection parce qu'il y a, sous le tissu de névroses qui l'enserre quelque chose de vaste, de beau et de bleu. Comme une aspiration non négociable à la liberté."
Las, l'ami n'est pas au rendez-vous. Commence alors un périple solitaire sur le GR20 corse, entrecoupé de parties de pêche à la truite et de rencontres éphémères.
Placé sous le signe de la couleur, ce roman lumineux est tout à la fois une quête initiatique d’un jeune homme à la croisée des chemins et un récit qui embarque son lecteur dans des paysages magnifiques. Avec une grande économie de moyens, des descriptions par petites touches efficaces, sans oublier quelques touches d'humour pleines d'auto-dérision, une construction maîtrisée qui fait naître l'émotion, ce premier roman est une formidable découverte.
Comme la truite, qui par un saut oblique parvient à tromper le pêcheur, le narrateur, dont on devine qu'il a beaucoup de points communs avec l'auteur, par ce roman est parvenu à conserver sa liberté, tout en prouvant son envie de vivre, ce qui n'est pas rien !
Le Saut oblique de la truite, Jérôme Magnier- Moreno (qui signe aussi la magnifique couverture), Phébus 2017.
Le billet de Ptitlapin.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : jérôme magnier -moreno
01/05/2017
Le châle de Marie Curie
"Elles devinent qu'à dormir côte à côte, elles deux si dissemblables vont échanger quelque chose à leur insu."
L'une est musulmane, kabyle, mère de douze enfants. L'autre est française, juive et reporte son affection sur son unique nièce. Tout semble donc les opposer mais le fait de partager une chambre à l'institut Curie, où elles vont être opérées d'un cancer du sein le lendemain matin , va créer entre ces femmes une subtile osmose qui les fera se rencontrer par delà les différences.
Ce roman baigne dans une atmosphère onirique, empreinte de magie,et on ne s’étonne pas de rencontrer, entre veille et sommeil, le fantôme de Marie Curie, dont le châle crée un lien entre les deux femmes d'une manière originale, par delà les frontières et les années.
En 135 pages, emplies d'humanité et d'empathie, Déborah Lévy-Bertherat nous fait partager cette nuit cruciale pour ces deux femmes, qui nous deviennent vite très proches. On embarque à leur suite dans cette traversée dénuée de tout pathos mais riche d'émotions et on en sort le cœur battant. à découvrir sans plus attendre !
Le châle de Marie Curie, Déborah Lévy-Bertherat, Rivages 2017.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : déborah lévy-bertherat
28/04/2017
Je suis si bien ici sans toi...en poche
"On aime les gens. Et ils nous déçoivent. Mais pas toujours. Parfois ils continuent à nous aimer indéfectiblement , dans l'attente qu'on ouvre les yeux et qu'on réponde à leur affection.C'est comme un "je t'aime. je t'ai toujours aimé."
Richard, artiste anglais a épousé une française très belle et très intelligente, Anne-Laure. Ils ont une petite Camille de cinq ans et vivent à Paris. Le paradis donc. sauf que Richard ne se remet pas du départ de sa maîtresse (hou, le vilain) et qu'évidemment sa femme a découvert le pot aux roses. Pour tout gâcher, Richard a vendu un tableau "L’ours bleu" un symbole important pour son couple.
Dans l'espoir de reconquérir sa belle, le voilà donc parti en Grande-Bretagne à la recherche du tableau, mais peut être aussi des secrets de l’amour qui durent.
Courtney Maum, qui fait de Paris un personnage à part entière et sait exploiter le caractère romantique de cette ville, parvient même à ne pas rendre Richard totalement antipathique. En dépit de quelques longueurs, cette comédie romantique est attachante,par ses personnages principaux ou secondaires. Mention particulière pour ces vieux couples à qui l'artiste tente d'extorquer les secrets de durée de leur couple. Une bonne idée de lecture pour les vacances.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : courtney maum
27/04/2017
Sanglier
"Quand il y a un coup de vent les ondulations deviennent une sorte de course folle, mais qui fait du surplace,- il n'empêche que parfois, on se surprend à croire que le champ va sauter la haie du fond.Cela fait une chorégraphie de bancs de poissons, en plus élégant."
Pourquoi son employeuse a-t-elle prêté à Sybille, clerc de son état, sa maison de campagne dans le Morvan pour une semaine ? Le mystère demeure entier et peu importe.
Ce qui importe est la manière dont la jeune citadine (qui ne connaît que quelques noms de végétaux et d'animaux), va progressivement lier connaissance avec les quelques habitants et surtout va se fondre dans la nature, redécouvrant son corps , les éléments et les sensations. Un parcours initiatique qui parlera à tous les amoureux de la nature et du style. On a souvent envie de suivre Sybille, voire de l'imiter...
En apparence,il ne se passe presque rien, l'écriture ne fait pas d'effets de manches mais distille une vraie poésie qui fait qu'une fois le roman dévoré d'une traite, je l'ai aussitôt relu pour mieux le savourer. Un grand coup de cœur !
Sanglier, Dominique Rameau, éditions José Corti 2016.
Et zou sur l'étagère des indispensables !
Un premier roman écrit par un écrivain né en 1947,roman déniché à la librairie du Cyprès à Nevers, où il était mis en valeur. Là, j'ai trouvé ce que je ne cherchais pas, rejoignant ainsi sans le savoir ce qui était écrit dans le texte de Dominique Rameau...
Laissez-vous enchanter à votre tour.
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, romans français | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : dominique rameau
25/04/2017
Avalanche/Une histoire d'amour
"Toute à la FIV, j'ai laissé le monde rétrécir autour de moi."
à trente-huit ans, après avoir renoué avec l'homme dont elle était amoureuse étudiante, la romancière australienne Julia Leigh se lance dans un processus devant aboutir ,en principe, à une grossesse.
D'emblée, elle prévient qu'il ne s'agit pas d'une œuvre de fiction et que "sa propre interprétation de l'histoire peut différer de celles d'autres personnes dépeintes dans le livre."
Elle n'omet rien des dimensions éthiques, corporelles et financières d'un projet qu'elle sera finalement amenée à porter seule, projet sur lequel ne se porte pas que des regards bienveillants : "Dans l'imaginaire public-tel que je le perçois-les femmes qui font des FIV n'ont droit qu'à une sympathie mitigée, pas si différente de celle qu'on montre aux fumeurs à qui l'on diagnostique un cancer du poumon. Implicitement: "vous l'avez bien cherché, alors qu'est-ce que vous espériez ? "
En 132 pages, denses et lumineuses, Julia Leigh parvient à donner à cette expérience forcément intime une dimension riche d'humanité qui intéressera même ceux et celles qui n'ont pas été confrontés à cette problématique.
Avalanche/Une histoire d'amour, Julia Leigh, traduit de l'anglais (Australie) par Laurence Kiefé, Christian Bourgois 2017.
De la même autrice: clic (il est depuis sorti en poche).
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : julia leigh
24/04/2017
La vie étoilée d'Ethan Forsythe
"Mais les secrets sont semblables à des cicatrices: ils s'estompent et deviennent moins rugueux, cependant, quoi que vous fassiez pour les camoufler, ils ne disparaissent jamais complètement. Les lésions persistent. Sa cicatrice était toujours là, les secrets également.
Ethan, féru d'étoiles et de physique, bien qu'il n'ait que douze ans, vit seul avec sa mère à Sydney. Il ignore tout de son père, mais une enveloppe va le mettre sur sa piste car ce dernier est revenu en ville.
Avec délicatesse et tendresse, Antonia Hayes nous dépeint le portrait d'un préadolescent doté d’une intelligence et d'une imagination hors-normes ,mais qui a frôlé le pire dans sa toute petite enfance. Un drame auquel son père ne semble pas étranger. Saura-t-il lui pardonner ?
Antonia Hayes, malgré quelques longueurs , compréhensibles car c'est son premier roman, traite d'un thème qui concerne des milliers d’enfants dans le monde, en l'intégrant à un roman d'apprentissage plein de sensibilité. Un petit bonhomme qu'on n’oubliera pas de sitôt, surtout quand il se lance dans des expériences farfelues mais dangereuses !
La vie étoilée d'Ethan Forsythe, Antonia Hayes, traduit de l’australien par Cyrielle Ayakatsikas, Autrement 2017, 490 pages.
06:04 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : antonia hayes