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17/01/2020

Comment j'ai (vraiment) décidé d'être heureuse...en poche

"En les lisant, je me sentais moins seule. En outre, ils étaient générateurs de fantasmes."

 ça commence comme un roman de chick litt : Marianne Power semble mener une vie à la Bridget Jones, travaillant dans un magazine à Londres et menant en apparence une vie de rêve. Mais les failles sont présentes (son poids, son rapport à l'argent, ses angoisses...).
Un jour lui vient l'idée saugrenue de tester  sur un an les douze livres de développement personnel les plus en vogue , avec comme objectif de devenir juste parfaite.marianne power
Las, Marianne va vite se rendre compte que mener à bien cette entreprise, seule de surcroît, ne va sans inconvénients majeurs .Tout cela va en effet vite tourner au cauchemar car elle va devenir "une junkie accro au développement personnel"et va négliger les siens...
Si la conclusion de ce livre peut paraître simpliste (je vous laisse la découvrir), il n'en reste pas moins que ce livre a le mérite de montrer les limites d'ouvrages qui ont en commun de nous promettre le bonheur d'une manière simple et rapide, sans pour autant remettre en question le monde dans lequel nous vivons.

06/01/2020

Elmet

"Le sol regorgeait d'histoires brisées qui tombaient en cascade, pourrissaient puis se reformaient dans les sous-bois de façon à mieux resurgir dans nos vies. on racontait que des hommes verts avec des visages en feuille d’arbre et des membres en bois noueux scrutaient depuis les fourrés."

L'histoire se passe de nos jours, mais elle est en fait intemporelle car elle s'inscrit dans une problématique qui dépasse les époques. Celle d'un petit groupe qui refuse d'être ostracisé , qui n'a que faire des règles en vigueur et entend bien vivre où il veut, dans le respect de la nature, sans trop s'occuper des autres. Mais "...le géant barbu qui vivait dans les bois avec son jeune fils et sa fille belliqueuse" vont devoir se rendre à l'évidence : même dans les bois du Yorkshire, les hobereaux, et à leur tête la figure emblématique de Mr Price, font leur loi et la police n'a pas à se mêler de leurs affaires.fiona mozley
 En effet, ce père refuse que son corps, dont il usait pour gagner sa vie lors de combats illégaux, soit soumis à Mr Price, conscient que celui-ci entend juste contrôler pour se sentir exister. Il est en effet beaucoup question du corps dans ce roman et en particulier de celui de la jeune fille, Cathy, qui rejetant l'idée de devenir une victime, déclenchera la tragédie qui était en route. Celui du plus jeune fils, Daniel, narrateur à la recherche de sa sœur, est également au cœur d'une problématique différente.
Il est enfin question de la force d'une communauté qui tente de s'unir pour faire face à l'injustice, le tout dans une région marquée par le chômage, mais aussi par la poésie. Un roman au final impressionnant, tout à la fois baigné de tendresse et de violence au sein d'une nature sauvage. Une prose magique à découvrir.

 

 Elmet de Fiona Mozley, traduit de l’anglais par Laetitia Devaux,  Éditions Joëlle Losfeld 2020, 237 pages qu'on n'oubliera pas de sitôt.

23/12/2019

Shibumi...en poche

"Tout homme travaillant pour une organisation qui pollue, extrait à ciel ouvert, contamine l'eau et l'air, est un tueur."

Il faut attendre les deux-tiers du roman pour que s'affrontent pour la première fois, en une sorte de duel feutré l,es principaux protagonistes de ce roman-culte d'espionnage. D'un côté, le représentant de la Mother Company, le frustre Diamond, de l'autre , le raffiné Nicholaï Hel, assassin le plus doué de sa génération (une pièce occidentale contiendrait deux cents objets qu'il pourrait utiliser comme armes), actuellement à la retraite dans son château du Pays basque.
Auparavant, l'auteur aura savamment entretenu le suspense, relatant avec force détails le passé de son héros, Hel bien sûr, qui via des mentors japonais, s'est fixé comme objectif d'atteindre le Shibumi, forme d'excellence personnelle.trevanian
Les critiques vis à vis des États-Unis foisonnent sous la plume de Trevanian qui , dans ce texte écrit en 1979 fustige les comportements des américains, en particulier dans le domaine de l'écologie. On aurait aimé aussi qu'il soit précurseur dans les relations de son personnage avec les femmes et un peu moins outrecuidant, mais bon, nul n'est parfait, même pas Nicholaï Hel quoi qu'il puisse en penser...
Il n'en reste pas moins qu'en dépit de quelques longueurs concernant la spéléologie, ce roman est un pur régal de manipulations en tous genres , de remarques acérées : Il doit être bien embarrassant d'être vous, qui entraîne son lecteur dans ses 514 pages sans jamais le lâcher, jusqu'à un final crépusculaire.

Admirablement traduit par Jean Esch

Du même auteur : clic

12/11/2019

Les testaments

"Les uniformes, les insignes, les épinglettes, ça te raidit l'échine. Ici, les ramollos n'ont pas droit de cité ! "

Un testament olographe et des transcriptions de deux témoins (369A et 369 B), documents émis par des femmes,  constituent cette suite de La Servante écarlate, cette dystopie où une théocratie puritaine a été instaurée dans une partie des États-Unis. Là,  les femmes en sont réduites à leur rôle de reproductrices, de servantes , d'épouses ou de Tantes, instruisant les plus jeunes et les formatant.margaret atwood
Très vite, on peut  identifier celles qui sont à l'origine de ces textes, les liens qui les unissent et qui vont permettre de suivre de l'intérieur et au plus haut niveau, ou presque, la mise en place de ce régime autoritaire.
Là où le premier volume était quasiment étouffant, ici une éclaircie se devine, car le régime, gangréné par les corruptions en tous genres, est sur le point d'être détruit de l'intérieur, ou de l'extérieur, voire des deux côtés.
La construction alternée est justifiée d'un point de vue historique à la toute fin du texte et Margaret Atwood, si elle fait la part belle aux sentiments de ses héroïnes, crée une véritable tension tout au long du roman par le jeu des trahisons , des manipulations qui jalonnent son récit et le rendent tout à fait passionnant.
Une habile pirouette lui permet aussi de ne pas tomber dans la sentimentalité tout en éclairant le devenir de ses personnages. Une réussite.

Les testaments, Margaret Atwood, Robert Laffont 2049, traduit de l’anglais (canada) par Michèle Albaret-Maatsch, 532 pages passionnantes.

05/11/2019

Flammes

"Que dire ? Les gens changent.Les carrières partent en eau de boudin. Les vies regimbent. Les fiancés se tapent des consultantes en RH spécialisées dans la gestion du changement . Blondes. Le gin s'invite dans votre café, D'abord une petite pluie, puis un raz de marée. Alors je ne m'en veux pas quand il m'arrive de vexer quelqu'un , de balancer quelques taloches, de briser quelques os. Je ne ressens plus grand chose."

Parce qu'il ne veut pas que sa sœur Charlotte, comme toutes les femmes de la famille avant elle, soit "condamnée à revenir, métamorphosée et affreuse après sa mort", Levi se fixe un objectif: construire de ses mains un "cercueil apaisant".robbie arnott
Horrifiée par la nouvelle, Charlotte, bien décidée à être incinérée et non enterrée, s'enfuit,direction le Sud de la Tasmanie, l'île où se déroule cette histoire placée sous le signe des Flammes.
Commence alors un périple où la nature, les animaux et le feu jouent des rôles essentiels, où le fantastique s'insinue sans que cela semble poser problème aux personnages, tant il fait partie de leur quotidien. Des personnages qui prennent en charge chacun leur tour des chapitres, donnant à chaque fois une tonalité différente au récit.On suit ainsi le journal halluciné d'un narrateur qui sombre progressivement dans une folie meurtrière.
Des scènes prenantes, voire surprenantes, une écriture qui se renouvelle à chaque chapitre, une construction maîtrisée, tels sont les ingrédients d'un roman indispensable.

Flammes, Robbie Arnott, traduit de l'anglais  (Australie) par Laure Manceau. Actes Sud 2019, 253 pages ensorcelantes.

 

22/10/2019

#Automne #NetGalleyFrance

"Il faut toujours être en train de lire, dit-il. Même quand on ne lit pas réellement. Sinon, comment lirions-nous le monde ?  Considère ça comme une constante."

Automne, premier volume d'une tétralogie dont le deuxième volume est déjà paru en Grande-Bretagne, raconte l'amitié improbable entre Daniel, féru d'art et Elisabeth, jeune femme qui vient faire la lecture au centenaire dans sa maison de retraite.ali smith
Leur lien, quasi filial, est né quand Daniel était le voisin de la jeune Elisabeth. Lors de leurs promenades, Daniel , par petites touches,a su éveiller sa curiosité sur le monde de l'art et ,des années plus tard Élisabeth deviendra une spécialiste de la seule femme représentante du pop Art anglais, Pauline Boty.
Le roman, à l'écriture poétique, explore les thèmes du temps et des saisons, sur fond de Brexit, glisse avec subtilité d'une époque à une autre, suggérant au passage, par des détails du quotidien, que la Grande-Bretagne se rapproche de plus en plus de certains des ouvrages que lit Elisabeth (Le Meilleur Des Mondes, par exemple). Nos démocraties sont en danger, mais comme la mère de l'héroïne, rien ne nous empêche de manifester notre désapprobation par des actes symboliques. Un roman que j'ai savouré et dont j'ai déjà hâte de lire la suite.

16/10/2019

My absolute darling ...en poche

"Elle pense, Tu es vouée à commettre des erreurs, et si tu n'es pas prête à en commettre, tu seras à jamais retenue en otage au commencement des choses, il faut que tu arrêtes d'avoir peur, Turtle. Tu dois t'entraîner à être rapide et réfléchie, ou un jour, l'hésitation te foutra en l'air."

Si Julia (alias Turtle ,alias Croquette ,alias Connasse) semble jouir d'une grande liberté pour une jeune fille de quatorze  ans(elle se balade seule en pleine nature avec des armes ), la réalité est toute autre à la maison.
En effet, elle vit dans un huis-clos délétère avec son père, manipulateur hors pair qu'elle déteste et aime à la fois quels que soient les actes qu'il lui fasse subir.gabriel tallent
Refusant les main tendues qui s'offrent à elle, Turtle ne veut compter que sur elle, quitte à repousser, pour mieux le sauver, Jacob, un lycéen qu'elle ne laisse pas indifférent.
Gabriel Tallent, dont c'est le premier roman, instaure d'emblée un climat à la limite du supportable et montre bien l'ambivalence des sentiments qui anime son héroïne. A l'instar de Turtle, qui pourtant le connaît bien, notre cœur bat chaque fois que Martin, son père, entre en scène tant ses réactions sont imprévisibles. Si l'on peut déplorer quelques longueurs, il n'en reste pas moins que nous assistons ici à un véritable tour de force, tant du point de vue de l'auteur que de la traductrice, Laura Derajinski.

06/09/2019

Je m'appelle Lucy Barton...en poche

"Je me répétais que tous les cinq nous avions vraiment formé une famille malsaine, mais je voyais aussi combien nos racines étaient farouchement entremêlées autour de nos cœurs."

Hospitalisée, se sentant seule ,loin de son mari pris par son travail, loin de ses filles, Lucy Barton a la surprise de voir débarquer sa mère à son chevet. Issue d’une famille extrêmement pauvre, sans relations sociales, sans culture, sans expression de sentiments, Lucy a su tracer sa route, échapper à la solitude et devenir écrivain.elizabeth strout
Pendant cinq jours, entre veille et sommeil, les deux femmes vont échanger de petits riens, mais, avec une extrême pudeur, trop de non-dits trop profondément enkystés empêchant toute expression directe, Lucy comprendra la profondeur des liens qui la lient à toute sa famille , aussi dysfonctionnelle qu'elle ait été. Un magnifique portrait de femme par l'auteur d'Olive Kitteridge. clic.

Je m'appelle Lucy Barton, Elizabeth Strout,

05/09/2019

Miss Islande

"- Tu n'as toujours pas avoué à ton poète que tu écris ?
Elle aurait aussi bien pu me demander: Est-il au courant que tu caches en toi une bête sauvage qui n'attend que d'être libérée ? Un écrivain est-il capable de comprendre un autre écrivain ? "

Elle aurait pu choisir de se présenter, comme  d'aucuns le lui conseille à l'élection de Miss Islande, ou plus simplement endosser, comme son amie Isey, le destin de mère de famille. Mais Hekkla, qui écrit avec une facilité déconcertante, veut accomplir son destin d'écrivain.
La voilà donc qui quitte son père et sa campagne pour aller de petit boulot en petit boulot à Reykjavik. Là elle retrouve son meilleur ami, Jon John, homosexuel qui , comme elle espère pouvoir déployer ses ailes  dans la capitale.audur ava olafsdottir
Mais en 1963, dans ce tout petit monde qu'est alors l’Islande, certes irrigué par la poésie, une femme écrivain et un jeune homme considéré de par son orientation sexuelle comme "...un criminel, un déviant, un malade [...] une infamie." vont avoir du mal à se frayer un chemin.
Par petites touches subtiles, sans jamais donner de leçons, Audur Ava Olafsdottir montre ce que l'on n’appelait pas encore le harcèlement sexuel, la condition des femmes qui n'avaient pas encore accès à la contraception, l'aliénation des mères de famille et la mise au banc des minorités sexuelles, mais aussi la bohème des apprentis poètes.
Ses héros sont lumineux, et si l'on connaît rarement les pensées de Hekkla, on les devine grâce aux lettres de son amie. Tous les personnages sont croqués à ravir et même si la décision finale de la jeune femme est frustrante, elle s'inscrit parfaitement dans la logique de l'époque. Un très grand bonheur de lecture et une héroïne qu'on n'oubliera pas de sitôt.
L'étagère des indispensables, bien sûr.

Magnifique traduction d'Eric Boury.  Zulma 2019, 268 pages et plein de marque-pages.

Cuné est enthousiaste : clic

 

01/09/2019

Le pouvoir...en poche

"Le pouvoir de nuire, de faire mal ,est une forme de richesse."

Les femmes, grâce à un organe apparu au niveau d'une clavicule, possèdent un nouveau pouvoir: celui d'infliger une douleur fulgurante, et même la mort. Elles ne sont pour autant pas invincibles, mais la peur a changé de camp et les hommes sont devenus le sexe faible.
Aux États-Unis, en Arabie Saoudite,dans un petit État d'Europe de L'Est et bientôt aux quatre coins du monde, les femmes s’organisent, une nouvelle religion apparaît . Mais celles qui détiennent désormais le pouvoir vont-elles se comporter mieux que les hommes ?naomi alderman
En choisissant de suivre le destin de quatre personnages, dont les destins vont évidemment se croiser, Naomi Alderman axe son roman sur la politique, la religion, les médias et le banditisme. Elles montrent les liens que ces puissances entretiennent mais ne perd pour autant pas de vue le côté humain de Tunde ,jeune journaliste nigérian et unique héros masculin, Allie jeune métisse américaine au parcours chaotique, Roxy fille d' un truand anglais ou bien encore Margot, ambitieuse femme politique divorcée et mère de famille américaine.
L’enthousiasme est très présent dans la première partie montrant le"Grand Changement", tandis que la tension monte dans la seconde qui relate les dérives du pouvoir.
Les textes qui encadrent ce qui est présenté comme un "maudit livre" rédigé par un homme, augmentent la sensation de réel du roman et l’inscrivent dans une démarche présentée comme historique qui ne peuvent que susciter la réflexion. Une grand plaisir de lecture, un roman qui se dévore d'une traite et que la grande Margaret Atwood qualifie  de "fulgurant", quoi de mieux pour se précipiter  ?

traduit de l'anglais (G-B) par Christine Barbaste