Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

04/05/2019

Ponti

"Amisa considéra son nouveau mari. Elle n'arrivait pas à l'imaginer au-delà de trente ans, pas plus qu'elle-même d'ailleurs. La jeunesse semblait infinie, surabondante et nécessaire, comme un distributeur de mouchoirs inépuisable."

Dans ce premier roman, Sharlene Teo entrecroise les récits et les vies de trois femmes à Singapour : Amisa, jeune fille pauvre dont la beauté l'a amenée à incarner l'héroïne d'une série de films d'horreur devenus cultes qui vit  maintenant recluse; sa fille, Szu, sorte de vilain petit canard, confite dans l'admiration d'une mère qui la supporte à peine et Circé, l'exact opposé de la précédente, adolescente bien dans sa peau.
Les deux jeunes filles vont nouer une amitié intense, même si tout semble les opposer.sharlene teo
Devenues adultes, elles vont se recroiser et , pour Circé, ce sera l'occasion de revenir sur la manière dont tout s'est soudain brisé.
 Sharlene Teo dépeint à merveille l’atmosphère de Singapour et la manière subtile dont peut se déliter une amitié ,mais le roman perd en intensité dramatique dans sa dernière partie et c'est dommage. Une auteure à suivre néanmoins.

Traduit de l’anglais (Singapour) par Mathilde Bach, Buchet-Chastel 2019.

Cuné a adoré.

02/05/2019

En lieu sûr...en poche

"La jeunesse, ça n' a rien à voir avec l'âge chronologique. La jeunesse, ce sont les périodes d'espérance et de bonheur."

Deux couples, devenus amis dans les années trente, se retrouvent à l’occasion d'un anniversaire, alors qu’ils ont atteint l'âge de la retraite. Ces retrouvailles sont l'occasion de retours en arrière et d'analyses fouillées des liens complexes qui les unissent.wallace stegner
Les épreuves ne leur ont pas été épargnées, et ce qui aurait pu les séparer, à savoir les différences sociales, sont ici traitées avec finesse.
D'inspiration autobiographique, ce roman traite de l'amitié avec justesse et sans manichéisme. Les personnages sont envisagés dans leur complexité et leur évolution au fil du temps est passionnante.
Un roman autour duquel je tournais depuis longtemps et que j'ai enfin pris le temps de savourer.

Traduit de l’américain par Eric Chédaille, Gallmeister Totem 2017. 414 pages.

30/04/2019

Les réponses

"Je m'y habituais, en un sens, à être ce sac de peau plein de problèmes, parce qu'avoir un corps ne vous donne pas nécessairement le droit d'en avoir un en bon état de fonctionnement. Avoir un corps ne semble vous donner aucun droit en vérité."

Couverte de dettes, Mary, qui souffre de différentes pathologies inexpliquées et utilise les services d'un thérapeute onéreux, répond un jour à une petite annonce un peu bizarre.catherine lacey
Sélectionnée, elle va participer à une expérience, à la fois artistique et psychologique, ayant pour objectif de définir les conditions nécessaires pour que l'amour dure.
Au fil des pages, nous découvrirons pourquoi Mary cherche à tout prix à préserver son passé et à protéger son identité, ce qui explique son décalage par rapport à la société new-yorkaise dans laquelle elle évolue.
Un roman fascinant et prenant, dont il ne faut surtout pas éventer l'intrigue, traitant de l'amour, de l'individu et de la notoriété.

 

Actes Sud 2019. Traduit de l’anglais (E-U) par Myriam Anderson.

De la même autrice: clic.

Un grand merci à Clara !

27/04/2019

La salle de bal...en poche

"Quelqu'un dont l'intérieur, elle le savait, se déployait sur des kilomètres, même si son extérieur était aussi fermé et barricadé qu'avant."

Ella, jeune ouvrière , parce qu'elle a brisé une vitre de la filature où elle travaille depuis l'enfance, se retrouve enfermée dans un asile d’aliénés du Yorkshire.Là, elle se liera d'amitié avec Clem, une jeune femme cultivée, qui revendique sa liberté en refusant de se nourrir . Cette dernière aidera Ella à établir un lien avec John Mulligan, un Irlandais farouche et déprimé.anna hope
Nous sommes en 1911 et, en quelques mois, le destin de ces trois personnages va basculer au gré des pratiques pour le moins erratiques d'un jeune médecin, Charles. Ce dernier, dans un premier temps, se lance dans un usage thérapeutique de la musique, n'hésitant pas à organiser un bal hebdomadaire, permettant de réunir les hommes et les femmes de l'établissement, séparés le reste du temps. Mais Charles est aussi fortement intéressé par l'eugénisme, alors fort en vogue à l'époque et , ne pouvant se résoudre à assumer ses pulsions sexuelles, il basculera ensuite dans un comportement qui frôle la folie.
Ella, John et Charles, trois voix qui alternent tout au long de ce roman très maîtrisé du point de vue de la structure narrative. Chacun d'entre eux possède un objectif commun, la liberté, mais ils vont emprunter des chemins très différents pour la conquérir. On se laisse porter par le roman d'Anna Hope, empreint de sensualité et de sensibilité. On assiste, le cœur serré , aux rebondissements parfois un tantinet trop sentimentaux, mais ne boudons pas notre plaisir car Anna Hope a su éviter les écueils du roman historique et nous rendre très actuels ses héros. Un grand plaisir de lecture.
Si je connaissais déjà, via le roman de Maggie O'Farrell L’étrange disparition d'Esme Lennox, la manière dont on bridait les revendications de liberté féminines au début du XXème siècle en Grande-Bretagne, j'ai découvert l'enthousiasme suscité par l'eugénisme en Grande -Bretagne, y compris auprès de Churchill.

26/04/2019

L'étang...en poche

"Écoutez, il n'a échappé à personne à ce stade que ma tête est tournée vers les ailleurs de l'imagination et qu'elle n'est pas vraiment concernée par les circonstances présentes- toutefois personne ne peut  savoir ce qui se fabrique sans cesse dans l'esprit d'un autre et donc, pour cette raison uniquement peut être, ma façon d'être, telle qu'elle est, peut être très déroutante, déconcertante, inexplicable; même, en réalité ,offensante parfois. On se méfie facilement d'une paumée comme moi  et il arrive fréquemment qu'on m'accuse de toutes sortes d'impertinences."

 Comment rendre compte , sans lui porter préjudice, de ce recueil de textes, parfois très courts, toujours surprenants par leur langue qui mêle humour, poésie, réflexions sur les minuscules faits du quotidien avec un point de vue toujours original et décalé ? claire-louise bennett
La narratrice s'est installée à la campagne dans une petite maison au confort rudimentaire et on se dit qu'on va avoir droit au récit de ses aventures dans ce nouvel environnement mais pas du tout On assistera certes à quelques essais de jardinage,mais pas forcément pour les raisons attendues ni pour le résultat escompté.
Tout est prétexte à des réflexions qui sortent de l’ordinaire, au gré de phrases amples qui voguent parfois d'un sujet à l'autre sans transition, mais sans jamais perdre son lecteur de vue.
Pas de récit proprement dit mais une impression d'immédiate adéquation avec cette vision du monde à nulle autre pareille. Déroutante, oui, mais jamais ennuyeuse ! Un pur bonheur de lecture pour moi mais qui pourrait en laisser d'autres sur le bord du sentier.

 

Un grand bravo au traducteur: Thierry Decottignies.

25/04/2019

Un mariage anglais...en poche

"Le monde entier était devenu plus abrasif : les draps m’écorchaient la peau, les vêtements m'irritaient, tout comme les gens. Je n'éprouvais de soulagement que sous l'eau ou dans mon jardin."

Onze ans et dix mois après sa disparition, Gil Coleman est persuadé d'avoir aperçu sa femme, Ingrid. Voulant  se pencher pour mieux la voir, le vieil homme chute. Ses filles arrivent bientôt à son chevet: la parfaite Nan, qui a endossé le rôle maternel et la cadette rebelle, Flora.
Nul ne sait ce qu'est devenue Ingrid, qui avait l’habitude de nager longuement dans la mer, pour fuir une vie  étouffante, mais dont le corps n'a jamais été retrouvé.Incertitude dont le romancier Gil Coleman s’accommodait jusqu’alors.claire fuller
Un montage en parallèle nous permet, via les lettres qu'écrivait Ingrid à Gil, juste avant de disparaître, et qu'elle glissait dans un des nombreux livres collectionnés par son époux de brosser,par petites touches, le portrait émouvant  de cette femme. Le parcours d'une jeune femme, étudiante tombée amoureuse de son professeur, qui sacrifiera ses rêves de liberté  et de création pour finir, quinze ans plus tard, seule avec ses deux filles, dans une maison de nage, au bord de la mer.
Claire Fuller n'épargne guère son héroïne, confrontée à un homme séduisant,que l'amour du risque, amènera à se montrer d'une extrême cruauté. Un roman poignant qui se déroule dans les années 90, puis au début du XXIème siècle ,mais qu'on croirait parfois daté des années 50 ou 60 tant son héroïne se laisse piéger par l'amour. Ses lettre sont néanmoins parfois terribles de lucidité et le choix des textes où elle choisit de les glisser extrêmement révélateur.Bouleversant.


Stock 2018. traduit de l’anglais par Mathilde Bach.

24/04/2019

#Enattendantlejour#NetGalleyFrance

"Il fondait ses choix sur leur opportunité politico-bureaucratique et non pas sur la différence entre le bien et le mal. Et ça, Ballard l’avait appris à ses dépens."

Bosch , son enquêteur fétiche étant parti à la retraite, Michael Connelly entame ici une nouvelle série avec une héroïne plus jeune, Renée Ballard, inspectrice affectée au quart de nuit du commissariat.
Situation frustrante car ne pouvant déboucher en principe sur le suivi, et donc la résolution d'aucune enquête. Mais on peut compter sur l'obstination et la volonté de s'affranchir du poids de la hiérarchie des héros de Connelly pour qu'évidemment cet obstacle soit contourné, fût ce au péril de sa santé.
Nous voici donc lancés sur la piste d'un agresseur de prostitué trans et sur celle de l 'assassin d'une jeune serveuse dans un ba, victime collatérale d'un règlement de compte dans un bar.mhael connelly
Dûment documenté, le roman démarre plutôt lentement mais ne nous épargne pas quelques scènes propres à susciter des sueurs froides, scènes où il ne ménage pas son héroïne. Une héroïne attachante,et pas seulement parce qu’elle a adopté un chien des rues.
Michael Connelly ne retrouve pas ici le niveau atteint avec ce qui reste pour moi son meilleur texte, à savoir Le Poète, mais en excellent faiseur, remplit sa mission : nous divertir avec talent et c'est avec plaisir que je lirai le prochain tome de cette série.

18/04/2019

Vinegar girl...en poche

"Lundi ,13h13

Salut Kate nous sommes cherché la licence pour le mariage ! (sic)
Qui ça nous ?
Ton père et moi.
Alors tous mes vœux de bonheur."

Réécriture contemporaine de la pièce de Shakespeare La mégère apprivoisée, Vinegar girl  en épure l'intrigue et la modernise.anne tyler
Plus question ici d'une aînée atrabilaire qu'il faut marier à tout prix pour que sa cadette puisse convoler en justes noces. Anne Tyler imagine un savant veuf, et quelque peu cinglé,doté de deux filles que tout semble opposer (Kate, pour qui tact , retenue et diplomatie sont des mots quasi inconnus et sa cadette Bunny tout en frivolité apparente), qui pour conserver son indispensable assistant étranger veut lui faire épouser sa fille aînée.
Pas question pour autant de la priver de nourriture ou de sommeil , comme dans la pièce de Shakespeare, pour la contraindre !
Anne Tyler, à son habitude , analyse en finesse les liens familiaux et révèle progressivement les facettes de ses personnages,bien moins caricaturaux qu'au premier abord. Elle ménage une porte de sortie plus qu’honorable à son héroïne, même si, personnellement, j'aurais préféré une solution plus radicale...
Un bon moment de lecture , divertissant et souvent drôle.

10/04/2019

Rien n'est trop beau pour les gens ordinaires

"J'avais le pouls qui battait à tout rompre, le cerveau transformé en un compost de souvenirs où vérités et mensonges copulaient dans la promiscuité."

Berthold Sidebottom, acteur qui ne partage avec George Clooney que la date de naissance (et en aucun cas la notoriété), a dû retourner vivre chez sa mère. Las, quand celle-ci décède, pour conserver son logement, à cause d'un stupide loi locative,  il doit adopter une vieille dame originaire d'Europe de l 'Est et tenter de gruger les services sociaux.
Quant à Violet, jeune métisse , elle occupe un appartement dans le même immeuble que Bertie et s'apprête à faire ses premiers pas dans le monde de la finance à Londres.  En bas de ce bâtiment dont l'architecte  affirmait que :" Rien n'est trop beau pour les gens ordinaires",une cerisaie ,que la municipalité entend bien sacrifier sur l'autel de l'immobilier, va peut être les réunir. C'est du moins ce qu'espère Bertie.marina lewycka
Désillusions, corruption  sont au programme dans ce roman où des exilés se croisent dans l'immeuble, personnage central de ce roman. C'est tout un monde de gens modestes devant se battre contre la crise économique, les règlements absurdes et les contrats à zéro heure qui nous est donné à voir.Si j'avoue avoir été quelque peu lassée par la retranscription des discours de la vieille ukrainienne qui multiplie à l'envi les à peu près et les confusions historiques et/ou géographiques, j'ai retrouvé avec plaisir la plume de l'autrice de Une brève histoire du tracteur en Ukraine et son empathie pour les gens de toutes origines.

03/04/2019

Chant des âmes sans repos

"Peut-on vivre sans avoir de nom, pensa-t-elle. Et, si c'est le cas, est-on encore un être humain ? "

Eva, divorcée depuis plusieurs années de Svante, est accusée du meurtre de ce dernier. Difficile pour elle, d'expliquer à la police que, ce n'était pas vraiment par hasard si  elle se trouvait dans la quartier chic , aménagé au sein de ce qui fut autrefois les plus grand  hôpital psychiatrique d’Europe, Beckomberga, là où son ex-mai venait d'emménager avec sa nouvelle (et très jeune) compagne.tove alsterdal
La seule personne qui pourrait innocenter Eva est une jeune femme Rom, témoin de l'agression dont ont été victimes Svante et son ex-épouse. Mais impossible de la retrouver, selon les dires de la police.
 Des cadavres sont bientôt exhumés dans le parc de l'ancien hôpital psychiatrique, découvertes macabres semant le trouble au sein de la communauté privilégiée des nouveaux habitants.
Situant son personnage principal à l'intersection de différentes communautés, celle des Roms, celle des soignants et soignés de Beckomberga, celle des privilégiés suédois, sans compter celle des jeunes européens , avides de nouveaux fonctionnements de société, Tove Alsterdal  'en oublie pas pour autant son suspense et résout son énigme d'une manière intéressante. Dommage qu'elle n'ait pas soigné autant la psychologie de ses personnages, et en particulier celle d'Eva. Instructif et prenant néanmoins.

Traduit du suédois par Johanna Brock et Erwan Le Bihan. le Rouergue 2019, 452 pages.

De la même autrice sort aujourd’hui en poche Tango fantôme.

"L'histoire se répétait : encore une fois, elle se retrouvait dans l’ombre de sa sœur, qui prenait toute la place."

Helene Bergman croyait avoir coupé tout lien avec sa famille dysfonctionnelle: une mère disparue en Argentine lors de la "Guerre sale", un père irresponsable et alcoolique. A peine entretenait-elle quelques liens distants avec sa sœur Camilla, dite Charlie.
Mais quand cette dernière tombe d'un balcon, du onzième étage, même si la police conclut rapidement à un suicide, Helene va mener sa propre enquête, partant sur les traces de sa sœur dont elle découvre rapidement qu'elle avait effectué  récemment un voyage en Argentine.
Alternant les époques, le roman de Tove Alderstal rafraîchit nos connaissances sur la situation politique en Amérique du Sud dans les années 70 et brosse le portrait de femmes qui, maladroitement, tentent de se construire un destin.tove alsterdal
L'héroïne  n'est en rien attachante, la description des personnages secondaires est un peu superficielle mais,
en dépit de longueurs dans le début du roman, je me suis laissée prendre par l'intrigue, faisant fi de quelques invraisemblances.

Pas encore un coup de cœur pour ce roman policier lu dans le cadre du Grand Prix des lectrices de ELLE.