08/04/2014
Entre les jours
"Pendant au moins trente secondes, tout était resté parfaitement calme. Pendant au moins trente secondes, avant que les cris ne retentissent, que leurs vies ne basculent définitivement, le monde était resté parfaitement calme."
Une famille américaine bien sous tous rapports : un père architecte, une mère au foyer, un garçon et une fille qui poursuivent leurs études. Certes, le divorce parental a quelque peu déstabilisé ce microcosme propret mais c'est surtout le renvoi de Chloé de l'université, puis sa disparition sans explication qui vont tout faire chavirer.
Roman psychologique, Entre les jours possède un sens du rebondissement et du suspense impeccables. On découvre petit à petit les causes du renvoi de Chloé et surtout on observe, fascinés, comment cette constellation familiale va devoir se réorganiser face à l'impensable. L'auteur se glisse avec aisance dans chacun de ses personnages et son écriture sensible et maîtrisée ne nous permet pas de lâcher ce roman addictif. Une réussite !
Entre les jours, Andrew porter, traduit de l'anglais (E-U) par France Camus-Pichon, Éditions de l'olivier 2014, 400 pages magnifiques.
Clara a aussi été conquise !
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (17) | Tags : andrew porter
05/04/2014
Bernadette a disparu...en poche !
"Je crois que vous me confondez avec quelqu'un qui souhaiterait vous connaître."
Bernadette, sa talentueuse fille Bee et son mari, gourou chez Microsoft ,vivent à Seattle, dans une ancienne institution où la frontière entre l'extérieur et l'intérieur est devenue plus que poreuse.
à la veille d'un voyage en famille en Antarctique, Bernadette, rattrapée par ses névroses, disparaît. Sa fille décide de se lancer à sa recherche et découvre bientôt dans son courrier tout un ensemble de documents qui vont lui permettre de brosser un portrait à 360 ° de sa mère, constituant ainsi le texte de ce roman.
Qui est vraiment Bernadette ? La pourfendeuse des mères parfaites de Seattle qu'elle appelle "les bestioles" ? Une architecte qui a étouffé dans l’œuf ses capacités créatrices ? Une femme qui n'a pas su surmonter ses échecs ? On pourrait continuer longtemps la liste de ces questions tant est riche la personnalité de cette femme hors du commun qui nous devient de plus en plus proche (et diablement sympathique !) au fur et à mesure de notre lecture.
Bourré d'un humour féroce, ce texte ne ménage pas les rebondissements et nous propose une satire hautement réjouissante d'un monde qui se voudrait parfait et lisse. Les personnages ne sont pour autant jamais présentés de manière manichéenne et l'on ne lâche pas ce roman, sauf pour en retarder au maximum la lecture des dernières pages !
06:01 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : maria semple
04/04/2014
L'exception
"-La vie bifurque constamment. Il n'est pas de personne plus mûre que celle qui change sept fois par semaine sa façon de penser."
La nuit du réveillon, son mari annonce à Maria qu'il la quitte pour un mathématicien, spécialiste comme lui de la théorie du chaos. Pour le coup, c'est bien la vie de la jeune femme qui devient chaotique ! Aidée par sa voisine Perla, haute d'un mètre vingt, conseillère conjugale et familiale (et nègre d'un auteur policier à ses heures), la jeune femme aura fort à faire pour se reconstruire psychiquement face aux événements bouleversants qui s'enchaînent.
Truffé de réflexions sur l'écriture , les liens entre la fiction et la réalité, L'exception possède un rythme enjoué , un ton qui ne sombre ni dans le pessimisme ni dans l’optimisme à tout crin. "-Si ta vie était un roman, dit-elle depuis la cuisine, une telle saturation d'événements semblerait peu vraisemblable." Et pourtant nous savons bien que la vie est souvent bien plus surprenante que la réalité.
Pas de solution miracle, pas d'analyse sauvage, juste du bon sens et de la bienveillance, de l'empathie pour des personnages nuancés et pleins de vie. Un roman alerte et revigorant , plein d'humour, bref une réussite ! Et zou, sur l'étagère des indispensables !
L'exception, Adur Ava Olafsdottir, traduit de l'islandais par la talentueuse Catherine Eyjolfsson, Zulma 2014, 338 pages riches d'humanité.
Du même auteur : clic et reclic (le second sortira bientôt au format poche !)
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, Les livres qui font du bien, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (19) | Tags : audur ava olafsdottir
25/03/2014
le bruit des autres
"Je n'avais pas demandé grand chose à quiconque depuis la mort de mon mari, et maintenant que tout semblait exiger énormément de moi, sans jamais me laisser en paix, je devais me montrer vigilante. Je devais tenir les comptes plus sérieusement, tracer des lignes invisibles ."
Propriétaire d'un immeuble ancien à Brooklyn, un Brownstone, Celia, jeune veuve, tient le monde à distance et sélectionne soigneusement ses locataires. Elle a ainsi créé un microcosme apparemment harmonieux, empli de discrétion .
Las ! Une nouvelle venue , Hope, semble avoir apporté avec elle"un phénomène physique chaotique" qui a pris le pouvoir dans l'immeuble, "encouragé par le printemps, mélangeant les appétits humains avec les taillis." Simultanément , son locataire le plus âgé, un vieux conducteur de ferry ,disparaît. Bref,la belle harmonie a fait long feu et Celia ne peut plus se contenter de créer des scénarios à partir de ce qu'elle entend chez les autres .Elle va devoir renouer avec des désirs qu'elle croyait avoir oubliés et affronter un monde tout sauf aseptisé.
Premier roman, Le bruit des autres fait partie de ces livres aux thèmes subtilement dérangeants, à l'écriture élégante et puissante tout à la fois, de ces textes qu'on aurait aimés écrire tellement ils sonnent juste.
Les personnages sont à la fois parfaitement cernés tout en gardant une part trouble ,qui les rend encore plus attachants et crédibles. Bref c'est un pur délice et un énorme coup de cœur, constellé de marque-pages !
Un grand bravo à jean Esch pour la traduction !
Le bruit des autres, Amy Grace Loyd, Stock 2014, 260 pages troublantes.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (13) | Tags : amy grace loyd
15/03/2014
Enfants de poussière...en poche
"-Je me demande parfois si tu n'es pas en train d'essayer de résoudre du même coup deux mystères qui se sont produits à presque quarante ans d'intervalle."
Le cadavre d'une jeune Asiatique vient d'être trouvé en bordure de route dans le comté d'Absaroka, Wyoming.Le coupable, un géant Indien frappé de mutisme, paraît tout désigné mais notre shérif préféré Walt Longmire, n'est pas du genre à bâcler une enquête. D'autant que dans le sac à main de la victime, une photo va le replonger dans sa première enquête durant la guerre du Vietnam.
Alternant passé et présent, ce nouveau roman de Craig Johnson a le mérite de nous replacer en territoire connu, avec, entre autres, une superbe description de ville fantôme . L'humour est toujours aussi présent, Longmire observe ainsi avec attention le nouvel amoureux de sa fille : "Michael prit la dernière huître des Rocheuses*. il n'avait pas remarqué qu'il était le seul à en manger."mais les retours en arrière m'ont paru assez confus et Longmire m'a souvent donné l'impression de me retrouver dans une atmosphère à la Rambo (seul contre tous, impossible de s'en sortir mais si).
Bilan mitigé donc aggravé par tous ses Ouaip qui ponctuent régulièrement les paroles du shérif.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : craig johnson
14/03/2014
la 5ème saison
"Le cours du temps n'a plus aucun sens pour Maria Murvall.
Elle vit une saison qui lui est propre.
Une saison où tout est possible, mais où rien ne se passe. la saison où les sensations sont inversées, et où les sentiments sont morts.
cette saison a un nom.
C'est la cinquième saison."
La cinquième saison et sans doute la saison de trop. En effet, si la relation amoureuse de Malin Fors est envisagée de manière réaliste et fouillée, on aurait aimé en dire autant de la résolution de l'énigme qui courait tout au long des différents épisodes de la série.
Outrée au delà du raisonnable, elle perd ici toute crédibilité et les descriptions des sévices ne font qu'accroître le sentiment de malaise qui s'empare du lecteur. Ouvrant un livre noir, on ne s'attend évidemment pas à du confort mais pas pour autant à de la complaisance. Un final à oublier donc.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : mons kallentoft
13/03/2014
Dieu me déteste
"Être mourant, si on regarde bien, c'est plutôt lassant.ce qui est vraiment intéressant, c'est de vivre ici, beaucoup plus intéressant que je l'aurais cru , quand on m'a amené ici de force et que je jurais et me débattais tout ce que je pouvais."
Celui qui s'exprime ainsi c'est Richard Casey, dix-huit ans dans quelques jours. Bien qu"otage des soins palliatifs" d'un hôpital New-yorkais, lui et son amoureuse Sylvie, quinze ans, malgré la maladie, la perte des cheveux, le corps qui lâche dans tous les sens, ont une furieuse envie de faire des conneries, de s'aimer malgré tout, de vivre quoi !
Halloween et l'intervention d'un oncle hors-normes vont précipiter les événements et entraîner nos héros dans un tourbillon joyeux, souvent émouvant, plein d'une féroce rage de vivre malgré tout. Roméo luttant contre le dragon qui veille sur sa bien-aimée, Richard nous fait vibrer et allume plein d’étoiles dans nos yeux.
Jamais de sensiblerie ni de pathos, le monde hospitalier est peint de manière très juste et la fin est juste époustouflante. Un livre bourré d'énergie , d'empathie et de pudeur qui glisse , zz, sur l'étagère des indispensables. On n’est pas prêts d'oublier cette galerie de personnages et cet amour ardent ! Un grand et beau coup de cœur !
Dieu me déteste, Holly Seamon, traduit de l'anglais (E-U) par Marie de Prémonville,Éditions La Belle colère 2014, 277 pages enthousiasmantes !
Le billet de Clara.
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (24) | Tags : hollis seamon
08/03/2014
L'arrogance des vauriens
"ô pouvoir s'élancer dans le chaos"
Dans le Londres d'après-guerre, une jeune femme tente tout à la fois de survivre à cette période de restrictions et de destructions et d'éviter de se laisser consumer par une passion enfuie. Il lui faut se consacrer à un double objectif: assurer sa survie matérielle et celle de ses enfants (nous apprendrons à la toute fin du texte qu'ils sont quatre) et surtout "Je ne dois pas dévier de mon objet, qui consiste à anéantir l’amour, pour qu'ainsi je puisse en tolérer la douleur; ou plutôt à cesser d'éprouver tout sentiment pour qu’ainsi je puisse porter la douleur, et que l'amour, peut être , renaisse sous une forme nouvelle".
Que le lecteur ignore ce qui s'est déroulé sous le pont rouge de Brooklyn, leitmotiv de cette tentative éperdue de désamour, peu importe, à chacun de projeter sa propre histoire, son propre ressenti. Ce qui est essentiel, c'est cette volonté farouche de lutter contre le désespoir, les injonctions que la narratrice s'adresse à elle même, les rencontres, les dialogues parfois triviaux qui remettent les faits en perspective : "Mademoiselle Smart, vous n'êtes pas seule à avoir eu quatre enfants."Les occurrences de l'amour s'effacent peu à peu mais le fardeau demeure et avec lui une question : "L'amour peut-il exister sans nécessité ? "
La présentation de ces textes en prose poétique où alternent la vie quotidienne, le patron harceleur, les pintes dans les pubs et la puissance de cette langue parfois hallucinée, elliptique et puissante pour tenter d'abolir l'amour est nécessaire pour éclairer les lecteurs français qui ignorent totalement qui est Elizabeth Smart. Elle entretint une relation passionnée avec un poète , George Baker, qui lui fit quatre enfants mais ne divorça jamais de son épouse. L'arrogance des vauriens, paru pour la première fois en 1977, est en quelque sorte la suite d'un premier texte qui rendit célèbre Elizabeth Smart à sa parution en 1945 à la hauteur de Grand Central, Station, je me suis assise et j'ai pleuré.
Un grand coup de cœur et une œuvre à découvrir d'urgence !
L'arrogance des vauriens, Elizabeth Smart, traduit de l’anglais (canada) par Marie Frankland, Les Allusifs 2013 , 124 pages qui font chavirer le cœur mais ne sont jamais désespérantes.
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07/03/2014
Le tueur hypocondriaque...en poche
"Je suis une espèce de miracle de la médecine comme l'autopsie de mon corps le montrera aux yeux stupéfaits du public dans un futur proche."
Affligé des maux les plus improbables, Le tueur hypocondriaque rate systématiquement sa cible. Il est vrai que loucher ne lui facilite pas la tâche. Pas plus d'ailleurs que d'autres infirmités qui se révèlent à l'improviste dans les circonstances les plus fâcheuses.
En effet, à ces divers maux s'ajoute une poisse tenace qui n'entraîne que de cuisants échecs. à deux doigts de mourir notre héros parviendra-t-il à accomplir sa dernière mission ?
J'avoue, si j'ai commencé cette lecture avec le sourire, je craignais un peu le comique de répétition, dont je ne suis pas friande. Mais l'auteur a su se jouer de cet obstacle en réservant bien des surprises à son lecteur . On passe donc un excellent moment, à la fois touchant et plein d'humour avec ce tueur dont nous partageons, il faut bien l'avouer quelques travers.
Un roman, qui, une fois commencé, ne peut être que dévoré !
L'avis enthousiaste de Clara !
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06/03/2014
Attention au parquet !
"D'une certaine façon, je prenais conscience que j'étais en train de mettre de mettre fin à mon amitié avec Oskar de façon préventive. Je savais que le parquet, le sofa, les chats allaient être source d' ennuis et j'étais certain qu'ils allaient avoir un effet négatif sur notre relation et la transformeraient à jamais."
Oskar, compositeur de musique a placé sa vie et son appartement sous le signe de la perfection et du bon goût. à mille lieues donc de son ami, rédacteur de brochures informatives, qui est "l'incarnation du chaos". C'est pourtant à ce dernier qu'Oskar va confier les clefs de son logement, le temps de régler son divorce à l'autre bout du monde. Mais la confiance cède le pas à la maniaquerie et le narrateur va vite se rendre compte que l'appartement est truffé de messages de recommandations concernant particulièrement le précieux parquet, recommandations de plus en plus intrusives...
Les événements vont alors pouvoir s'enchaîner à toute allure, le narrateur tombant de Charybde en Scylla, ne maîtrisant plus grand chose dans un univers où l'entropie va reprendre ses droits. En sept jours, plus un qui remettra tout en perspective, Will Wiles se plaît à torturer son narrateur qui croyait pouvoir repartir de zéro dans un univers en apparence aussi parfait mais où "Les faits étaient si élastiques."que l'Absurde ne pouvait que régner.
Qui d'entre nous ne voudrait adhérer à la profession de foi - radicale - d'Oskar: "Si j'arrivais à créer un îlot de perfection, il en découlerait que le reste de ma vie serait également parfait" ? L'auteur, par ailleurs rédacteur en chef d'une revue d'architecture et de design, nous met en garde avec un humour décapant contre une telle obsession ! Un premier roman jubilatoire !
Attention au parquet !, Will Wiles, traduit de l'anglais par Françoise Pertat, Liana Lévi 2014, 297 pages marquetées de marque-pages!
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (13) | Tags : will wiles