Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

05/02/2015

Les nuits de Reykjavik

"Nuit après nuit, ils sillonnaient la ville à bord d'une voiture de police et voyaient ce qui était caché aux autres: ils voyaient ceux que la nuit agitait et blessait et terrifiait."

  Écrit a posteriori, Les nuits de Reykjavík relate les débuts d'Erlendur dans la police. Patrouilleur de nuit, il mène une existence routinière et fréquente, de loin en loin, une jeune femme.
Confronté à des situations de la violence ordinaire, il maîtrise déjà l'art de l'interrogatoire, fait preuve d'intuition et d'empathie envers les victimes . D'obstination aussi. Et ce sont ces qualités naissantes qui vont le lancer en solitaire sur une affaire classée: la mort, par noyade d'un clochard.arnaldur indridason
Les nuits de Reykjavík est un roman qui prend son temps, dans le meilleur sens de l'expression. Comme Erlendur, il creuse et avance lentement, mais sans faiblir. Pas de sensationnalisme mais le portrait, par petites touches,d 'une société et d'un homme en mutation. Un monde où les pizzas sont encore exotiques en Islande,où les clochards ne sont pas encore devenus des SDF.
Captivant.

Les nuits de Reykjavík, Arnaldur Indridason, traduit de l'islandais par Eric Boury, Métailié 2015.261 pages qu'on ne peut pas lâcher.

03/02/2015

Une main encombrante

"Avant de pouvoir ne serait-ce qu'envisager de vivre dans une maison, il devait aimer les sons qui l'entouraient. Si le bruit du vent ne lui convenait pas, ou la qualité du silence, il pouvait aussi bien tourner les talons immédiatement. Mais ce qu'il entendit lui inspira une sensation de calme."

Son père est mort, sa fille, Linda, devenue policière habite avec lui et Wallenberg, voudrait être tranquille: "Je voudrais me mettre en congé de moi-même , pensa-t-il. De cette pesanteur que je traîne et qui me mine. Je n'en peux plus."henning mankell
L'opportunité d’acheter une maison à la campagne se présente mais le sort s'en mêle et Wallenberg, explorant le jardin, bute sur une main qui dépasse légèrement du sol. Adieu havre de paix, une enquête est ouverte...
Court roman (156 pages ) nous dit l'éditeur, nouvelle pour Mankell, Une main encombrante a d'abord été un texte dont s'est inspiré la BBC pour un scénario de sa série Wallander avec Kenneth Branagh. L’écrivain l'a ensuite relu et enrichi, ce qui donne cette version.
Cet épisode, nous précise l'auteur se situe avant L'homme inquiet qui clôt la série.
Retrouver Wallander est toujours un bonheur et la réflexion de l'auteur sur son personnage est extrêmement intéressante. On y apprend entre autres les étapes de la genèse de la série, les objectifs de l'auteur et surtout la raison pour laquelle il a décidé d'arrêter la série : "Après La lionne blanche, j'ai compris que Wallender était réellement devenu un instrument. Il m'est alors apparu que j'avais tout à craindre de ce personnage car désormais , je serais sans cesse confronté au danger de privilégier le soliste. Or mon mot d'ordre était toujours: l'histoire d'abord."

Quant à des épisodes mettant en scène Linda, l'auteur n'en exclut pas l'éventualité , tout en soulignant : "à mon âge, les frontières rétrécissent. Le temps, qui manque toujours, manque encore plus. Je dois prendre des décisions de plus en plus fermes sur ce que je ne veux pas faire ."

20/01/2015

Le restaurant de l'amour retrouvé

"Et si jamais il m'était donné de cuisiner dans ce petit village paisible au cœur des montagnes, j'arriverais peut être à m'ancrer enfin dans la réalité, à vivre pleinement. Je le sentais, cette certitude jaillissait du plus profond de moi, comme un magma en fusion."

Rinco a tout perdu en une journée: ses meubles, ses instruments de cuisine (dont une cocotte Le Creuset !), ses économies, son petit ami et même sa voix.
La jeune femme se réfugie dans son village natal où vit encore sa mère, avec laquelle elle entretient des relations tendues. Là, elle va concrétiser un projet qui lui tient à cœur: ouvrir un restaurant très particulier, "Comme une grotte secrète où les gens, rassérénés, renoueraient avec leur vrai moi."
Rinco pratique une cuisine véritablement inspirée et régénère en quelque sorte ses clients , d'une manière délicate et précise.ogawa ito
C'est donc de résilience mais aussi de bienveillance et d'amour des autres qu'il est question dans ce roman dont le titre pouvait laisser craindre le pire : mièvrerie et naïveté. Mais ici le style est poétique et imagé (beaucoup de métaphores culinaires , bien sûr) et Ito Ogawa réussit à créer un univers à la fois poétique et fantasque, avec quelques touches de rudesse , mettant l'eau à la bouche de surcroît !
Une petite merveille de délicatesse et de sérénité ! On rêverait de connaître l'adresse d'un tel restaurant !

Le restaurant de l'amour retrouvé, Ito Ogawa,traduit du japonais par Myriam Dartois-Ako Picquier poche 2015 , 253 pages succulentes.

 Le billet d'Hélène .

15/01/2015

Le chat

"C'est dans ma natudanielle poulliotre de réparer les choses."

Viviane se remet d'une histoire d’amour douloureuse et ,alors qu'elle a enfoui tout un pan de son enfance, celle-ci resurgit avec l'annonce de la mort de son père, qu’elle n'avait pas vu depuis quinze ans.
En acceptant finalement de s'occuper de l'aspect matériel de ce décès, Viviane finira par faire la paix avec son enfance et pourra aller de l'avant .
Un roman simple, mais non simpliste, lumineux et confortable, qui sait décrire l'intimité des maisons et des sentiments avec une grande justesse.
Un tout petit peu trop court, on aurait bien profité de cet univers douillet comme le qualifie si bien Cuné (merci pour ce billet tentateur ! ) un peu plus longtemps !

 Art Global, 2011

 

14/01/2015

Il pleuvait des oiseaux... en poche

"Ils s'amusaient d'être devenus si vieux, oubliés de tous, libres d'eux-mêmes. Ils avaient le sentiment d'avoir brouillé les pistes derrière eux."

Enquêtant sur un survivant mythique des grands feux ayant ravagé la région québécoise du Téminscamingue, une photographe découvre, au milieu des bois, une  petite communauté de vieux briscards. Ils ont laissé leur vie derrière eux et s'en sont offert une deuxième, au cœur de la nature.
Mais la vie de ces ermites , bravaches et frondeurs, va être bouleversée le jour où une très fragile vieille dame va venir se réfugier dans les bois...jocelyne saucier
Quelle délicatesse dans l'écriture et dans la manière dont cette histoire est racontée ! Quelle sensibilité aussi ! Il y a quelque chose de régénérant dans ce roman qui nous présente des personnages qui, vaille que vaille ont su, malgré les extrêmes difficultés qu'ils ont connues, s'arranger de la vie et tout voir avec une extrême acuité. Ni pathos, ni angélisme dans ce roman où la mort fait bien évidemment partie du parcours. L'écriture, extrêmement visuelle , nous rend présents le paysage et la fureur de ces incendies apocalyptiques dont je n’avais jamais entendu parler . Une découverte difficilement oubliable et un vrai coup de cœur ! ....,

02/01/2015

La guerre d'hiver

"Katriina considérait le mariage  comme une forme de tyrannie réciproque, comme vivre  dans un État totalitaire hautement fonctionnel . Les possibilités de choix étaient peu nombreuses , mais tant qu'on restait dans son coin  sans remettre le système en question, ça marchait."

 

La guerre d'hiver,historiquement, a opposé la Finlande  à L’URSS de novembre 1939 à mars 1940. Ici, il s'agit de la "série d'erreurs" annoncée  par la première phrase du roman qui aboutira , on le sait d'emblée, au divorce de Katriina et de Max, couple en apparence idéal. Lui est un sociologue qui a eu son heure de gloire dans les années 90. Elle est DRH dans un hôpital. leurs deux filles ont quitté le nid familial et vivent leurs vies , de manière bien différentes.philip teir
Alternant les points de vue, Philip Teir , par son observation subtile et acérée des relations humaines, brosse un portrait tout en nuances de ses personnages, tout en les reliant à la réalité sociale non seulement de la Finlande , mais mondiale , s'intéressant aussi au mouvement des indignés de Londres.

Une manière originale et prenante de relater ce qui aurait pu être d'une banalité confondante : l'échec annoncé d'un couple aux alentours de la soixantaine. Un bon roman,dévoré d'une traite.

La guerre d'hiver, Philip Teir, traduit du suédois (Finlande) par Rémi Cassaigne, Albin Michel 2015.376 pages subtiles et prenantes.

21/12/2014

Un monde flamboyant

"Ce qui m'intéressait, c'étaient les perceptions et leur mutabilité, le fait que nous voyons surtout ce que nous nous attendons à voir."

Harriet Burden a toujours détonné, que ce soit par son physique, son intelligence , son intérêt pour la science, la philosophie, débordant ainsi de la pratique artistique -méconnue- qui était la sienne. siri hustvedt
Cantonnée à son rôle d'épouse d'un célèbre galeriste et de mère de famille, "Harry", son surnom ô combien révélateur, devra passer par l'épreuve de la dépression à la mort de son époux avant de se lancer dans une entreprise devant aboutir (entre autres) à la révélation du sexisme du monde de l'art.
Mue par une saine colère et une grande énergie , Harry passe ainsi un pacte faustien avec des artistes masculins qui lui serviront de "masques". Mais l'entreprise ne sera pas sans risques.
Roman choral, empruntant la  forme d'une enquête universitaire menée a posteriori après la mort Harry, variant les points de vue ,Un monde flamboyant est un texte enthousiasmant à plus d'un titre :
résolument féministe (et ce n'est pas un gros mot), riche , sans jamais être indigeste, intelligent et bien mené, avec des personnages attachants et une fin extrêmement émouvante ,le tout,bien sûr, avec le style élégant de l'auteure. Un énorme coup de cœur ! Et ou, sur l'étagère des indispensables !


 

le billet enthousiaste de Papillon !

 

18/12/2014

La faute

"Elle sait que je fais de gros efforts pour m'améliorer en tant que mère, même si je ne pourrais jamais rivaliser avec elle."

Roman de la culpabilité , annoncé d'emblée par le titre français, La Faute (en VO :Just What Kind of Mother Are You? , encore plus accusateur , selon moi ) fait la part belle à la psychologie plus qu'au polar , même si le personnage de la policière est tout sauf secondaire .Les personnages féminins y ont la part belle et le processus d'identification fonctionne à merveille.paula daly
Chacune d'entre nous  peut en effet se reconnaître dans ce personnage de mère de famille débordée entre sa famille et son refuge pour animaux,( ce qui nous vaut entre autres de belles tirades sur les maîtres inconscients, frappées au coin du bon sens ), placée dans une situation intenable .
L'intrigue est plus sophistiquée qu'il n'y paraît à première vue, Paula Daly sait raconter une histoire, même si la langue qu'utilise ses personnages flirte souvent avec le trivial, ce qui peut être dérangeant. Certaines scènes sont à mon avis ratées, mais on est totalement tenu en haleine et on dévore d'une traite ce roman à la fois facile, populaire ( rien de péjoratif pour moi dans cette appellation) et hautement addictif.

 Un énorme merci aux viles tentatrices qui m'ont donné envie de lire ce roman : Clara et Cuné ! Je semble être sortie de ma mauvais passe, merci les filles ! : )

08/12/2014

La femme d'un homme

"ça ne sert à rien de construire un mur de mots. Les mots sont comme des outils, facilement convertibles en armes, qui bâtissent des clôtures là où elles ne sont pas  essentielles. La vie ne se résume pas aux mots. Les gens, par nature, baignent dans l’ambivalence, entraînés par des vents capricieux et agités."

Beaucoup de non-dits dans le couple en apparence idéal que forment depuis vingt ans, Todd, promoteur immobilier ambitieux, et Jodi, thérapeute à mi-temps. Un élément perturbateur, dont Jodi veut à tout prix minorer l'importance, va rompre cette belle harmonie et entraîner le couple dans un maelstrom d'émotions et de situations qu'ils ne parviendront plus à maîtriser.a s a harrison
The silent wife, titre original du roman, rend bien compte de la manière si particulière de l'héroïne de gérer ses émotions et sa vie. Tant de perfection,( elle est très classe, veut faire de sa vie un modèle de perfection et pour cela sélectionne soigneusement ses patients pour ne pas sortir de sa zone de confort et de compétence ),  des apparences aussi  lisses, ne peuvent évidemment que cacher un grand bazar intérieur que le lecteur découvrira progressivement, même s'il ne sera jamais clairement nommé.
Et c'est ce que j'ai aimé dans ce thriller psychologique où, à mon avis, la psychologie domine largement: si comme l’écrit Cuné, on flirte avec les clichés, les personnages sont beaucoup plus fouillés qu'il n'y paraît et cette volonté de ne rien nommer précisément est extrêmement efficace du début à la fin. Une narration fluide, des rebondissements surprenants, un pur régal piqueté de marque-pages !

La femme d 'un homme, A S A Harrison, traduit de l'anglais par Audrey Coussy, Livre de poche 2014.

02/12/2014

Petit enfer dans la bibliothèque

"La déflagration avait projeté un exemplaire de L'Amour au temps du choléra sur son visage avec tant de force qu'un œil avait été touché et que le texte du roman  s'était imprimé su rune joue  et le front de façon définitive. ça lui donnait une mine austère , mais au moins avait-il de la lecture quand il se rasait."

Quand un auteur a la gentillesse de résumer son roman page 13, on ne va pas se gêner : "Les événements décrits dans ces pages se sont déroulés au cours d'une semaine très chargée de la fin de l'été 2004. Une semaine qui avait débuté par une expédition à Swindon pour dénicher un boulot et s'était terminée par des torrents de feu purificateur tombant des cieux, une révision du budget opérationnel des services des bibliothèques du Wessex et par la mort de Gavin Watkins abattu par d'un coup de feu par mon fils. ce dernier point était particulièrement déprimant-surtout pour Gavin." Prolepse ultime ou sabordage masochiste ? Je l'envisagerais plutôt comme l'ossature solide d'un roman foisonnant de surprises, d'humour et d'amour forcené des livres et de la littérature.jasper fforde
C'est toujours un plaisir fou de retrouver Thursday Next, devenue au fil du temps et des aventures une quinquagénaire un peu cabossée , mais toujours partante pour affronter Goliath et ses sbires. Jasper Fforde utilise en virtuose ce que lui permet la littérature en matière de surprises,  crée des personnages haut en couleurs, un univers complètement fou, paradis ou enfer des bibliothécaires,nous plonge dans la perplexité, nous embrouille et , hop à quelques encablures de la fin , tout devient clair mais pas totalement résolu car un nouveau volume est en vue ! Un pur régal, hautement addictif !

Petit enfer dans la bibliothèque, Jasper Fforde, traduit de l’anglais par Jean-François Merle, Fleuve éditions 2014, 408 pages piquetées de marque-pages.