26/09/2012
Oublie-moi un peu , papa !
Quand ses parents lui annoncent leur séparation, Naomi va constater , au début, un peu cruellement: "Les parents devraient se séparer plus souvent, on les connaîtrait mieux."
En effet, d'un peu lunaire et très occupé, son père va se rendre disponible le mercredi et le consacrer uniquement à sa fille. Réjouie d'abord, Noémie va très vite étouffer dans cette bulle où elle évolue seule avec son père.
Comment trouver son autonomie, son espace de liberté, faire admettre à son père que l'on a grandi, sans pour autant le blesser, voilà le défi que devra relever Naomi, dix ans.
Avec humour et délicatesse, Brigitte Smadja traite ce problème des réajustements nécessaires entre un papa poule frais éclos et sa fille qui rêve de prendre un peu son envol. Un livre réussi , à laisser traîner pour que les papas y jettent un oeil?
06:00 Publié dans Jeunesse, rentrée 2012 | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : brigitte smadja, relations pèrefille
25/09/2012
Papa was not a rolling stone
"C'est ce qu'il y a de bien avec la littérature: elle envisage le réel avant qu'il n'advienne."
Sylvie Ohayon semble être née sous le signe du tiraillement: juive par sa mère, kabyle par son père, père très vite disparu dans la nature, elle reçoit beaucoup d'amour de la part de ses grands-parents , ce qui compense l'attitude immature de sa mère.
Cette dernière se mariant avec un Daniel, cent pour cent français, la petite fille ne parviendra jamais à appeler "papa", cet homme qui l'adoptera et lui vouera une haine féroce, bien réciproque. Malgré les coups, les sarcasmes, la petite Sylvie travaille comme une forcenée à l'école, faisant même la classe à ses petits camarades de la cité des 4000 de la Courneuve. Car oui, Sylvie est une banlieusarde, mais la vision qu'elle nous propose de cette cité n'a pas grand chose à voir avec celle propagée par les média. Certes la violence est présente, surtout envers les filles, mais aussi la solidarité.Notre héroïne, passant de l'autre côté du périph , grâce à des études de lettres, intègrera un univers tout aussi étrange: celui des bourgeois parisiens.
Autobiographie survoltée, Papa was not a rolling stone possède les défauts de ses qualités : une belle énergie, beaucoup d'humour, un sens de la formule qui a fait ses preuves en publicité (domaine où Sylvie Ohayon a excellé) ,mais aussi un récit cahotique car non maîtrisé. On sent que l'auteur a voulu tout raconter, nous transmettre ses émotions mais sans vraiment prendre le temps d'organiser son récit. J'avoue aussi avoir été agacée par les répétitives leçons de vie que l'auteure tient à nous transmettre à toutes forces et par le style parfois trop relâché. Un bilan en demi-teintes donc mais un roman qui ne se lâche pas malgré tout. Vient de sortir en poche.
06:00 Publié dans Autobiographie, romans français | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : sylvie ohayon
24/09/2012
Nuits insomniaques
"-Je suis contre les raccourcis. C'est fini, ça , maintenant. Chaque fois que j'en prends un , je finis par me perdre."
Bonnie accumule les difficultés: divorcée, elle élève seule ses deux jeunes fils, tandis que son mari se la coule douce au Mexique. Vacataire à la fac, elle n'enthousiasme pas ses étudiants et , à l'orée de la quarantaine, suite à une liaison vouée à l'échec, elle se retrouve enceinte. Cerise sur le gâteau, bien qu' extrêmement fatiguée, Bonnie dort très mal .
La participation aux tests d'un nouveau médicament vont peut être lui permettre de compenser sa dette de sommeil. En tout cas, c'est dans ces circonstances qu'elle fera la connaissance de Ian, scientifique qui ne jure que par son travail et dont la vie amoureuse est un désastre.
Sur fond de pratiques à la limite de la légalité, c'est surtout aux parcours psychologiques des personnages, à leur évolution ,que s'intéresse Robert Cohen. Il se glisse avec aisance aussi bien dans la psyché féminine que masculine et l'on prend beaucoup de plaisir à partager durant ces 462 page, remplies d'humour ,ces vies qui pourraient être les nôtres et qu'il égratigne au passage. La description d'une assemblée de parents à l'école maternelle privée américaine est un petit délice !
Nuits insomniaques (Inspired sleep), Robert Cohen, traduit de l'anglais (E-U) par Lazare Bitoun, Editions Joëlle Losfeld 2011.
Merci Sylvie!
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : robert cohen
22/09/2012
Automne...en poche
"J'ai commencé à lire assez tard. J'ai commencé quand j'ai eu besoin de croire en quelque chose."
Pluie, pluie, pluie.Téquila, bière ,téquila.L'Automne est chez Mons Kallentoft placé sous le signe du liquide. Tiens d'ailleurs le corps d'un riche avocat parvenu a été retrouvé dans les douves du château qu'il venait d'acheter. Son cadavre va , comme dans les précédents romans de la série, commenter les événements mais cette fois Malin ne se contentera pas d'entendre les voix de son intuition. En effet, son addiction à l'alcool est devenue encore plus importante. De plus, la policière supporte mal l'éloignement de sa fille.Un intermède à Ténérife ne relance même pas l'intérêt.L'enquête est mollement menée,les errements de Malin ne convainquent pas vraiment et on se laisse porter jusqu'à la fin du récit plus par routine qu'autre chose...Un petit coup de mou donc.
Mon calendrier dit que l'automne c'est aujourd'hui...
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : mons kallentoft, policier
21/09/2012
Tous les matins je me lève
"Tiens, en voilà qui se foule pas, il se laisse porter."
Parfois, dans un roman languissant vient une scène ou une phrase qui vient tout sauver, tout racheter. J'étais à deux doigts de me dire que c'était le roman de Jean-Paul Dubois de trop et que cette histoire de romancier sans contraintes mais qui se "débrouillait toujours pour [se] retrouver coincé dans les embarras", qui la nuit rêve de manière répétitive de matchs fabuleux de rugby dans lesquels il se donne le beau rôle, tout en conduisant le jour de vieilles bagnoles qu'il chérit, j'allais l'abandonner quand tout à coup...Une scène de sauvetage de chien , poignante, qui vient cueillir le lecteur au plexus et la phrase finale , comme un mantra désabusé et d'un simplicité ravageuse:
'Je ne vaux pas grand chose, je ne crois en rien et, pourtant, tous les matins, je me lève."Tout est dit.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : jean-paul dubois
20/09/2012
Duboismania (tendance Jean-Paul)
"...au regard de ce qui nous attend on devrait parfois vivre avec davantage de modestie."
Il aura fallu que je me décide à terminer Une vie française, où, en plus d'un roman familial se donnant comme ossature les mandats des différents présidents de la Vème République, j'ai découvert un personnage principal selon mon coeur et de superbes pages sur les arbres, pour que je sois atteinte de la Duboismania, tendance Jean-Paul.
Avant d'arriver à cette quasi perfection du personnage masculin qui parvient à gagner sa vie presque sans s'en rendre compte, sans horaires, sans contraintes ou presque (ici il est photographe de plantes ) mais passe en contrepartie à côté de sa vie de famille, il aura fallu bien des avatars. Il s'agit souvent d' écrivains ou de scénaristes prénommés Paul, flanqués d'une femme prénommée Anna, tour à tour dépressive ou au contraire carriériste hyper active avec laquelle le héros masculin n'entretient plus que de lointains rapports. Ce couple est généralement accompagnés d'enfants, plus proches de la mère, et dans lesquels le narrateur se reconnaît rarement.
Personnages récurrents aussi dont on guette l'apparition et les diatribes inhérentes, le dentiste que le héros de Kennedy et moi n'hésitera pas à mordre pour lui faire perdre sa suffisance ( à sa décharge, dans Le Cas Sneijder, le narrateur expliquera que dans sa jeunesse les dentistes étaient de vrais tortionnaires pourvus de matériel rudimentaire...) et le psychiatre. Ce dernier, manipulé dans Kennedy et moi, peine à trouver un traitement adéquat à la dépression d'Anna dans Les accommodements raisonnables et aura un rôle beaucoup plus violent dans Le cas Sneijder. Défiance du narrateur donc par rapport à ces hommes qui semblent ne traiter les symptômes sans prendre réellement en compte la souffrance de leurs patients.
Beaucoup de tendresse se dégage de ces romans, que ce soit pour les parents du narrateur dans Une vie de famille, ou pour le vieux metteur en scène hollywoodien qu'un projet improbable va remettre en selle dans Les accommodements raisonnables. On suit le vieillissement du narrateur au fur et à mesure , il atteint la soixantaine dans Le cas Sneijder, et on le voit se détacher de plus en plus des contraintes sociales et laisser place à l'expression de sa souffrance.
On sourit, on a le coeur serré en lisant ces textes qui distillent à la fois beaucoup d'humour et de désenchantement face aux compromis auxquels nous contraint la vie.
Le charme agit presque toujours (un seul livre m'a déçue car trop prévisible, Si ce livre pouvait me rapprocher de toi, où un fils part au Canada sur les traces de son père défunt) et l'addiction est au rendez-vous !
Romans dénichés pour la plupart à la médiathèque et existant en format poche.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : jean-paul dubois
19/09/2012
Une bonne nouvelle: Babelio revient !:))
La liste des ouvrages proposés est ici !
06:00 Publié dans Bric à Brac | Lien permanent | Commentaires (5)
18/09/2012
Le démon d'après-midi
Noémie et ses amies se font un week-end entre filles au bord de la mer. Bon, elles sont aussi flanquées des ados de la première et des deux chiens et du chat de Monique qui n'a jamais voulu d'enfants, alors question tranquillité on repassera ! Entre le vin blanc et les tourteaux, c'est le moment des confidences et des souvenirs et ces femmes, au passage, égratignent gentiment les maris partis ou plan plan dont elles s'accommodent pourtant.
Les années ont passé, la cinquantaine et "le climatère (la ménopause, quoi!)" sont venus et finalement la vie s'est chargée du retour de bâton sur le mari volage et les amants égoîstes. Aucune aigreur mais un féroce appétit de vie pour ces femmes dont on aimerait bien être aussi les copines !
Le ton mordant du Démon de midi s'est un peu apaisé mais on passe un excellent moment en compagnie de Noémie et ses copines !
06:00 Publié dans BD, Humour | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : florence cestac, les quinqua sont sympa
17/09/2012
Avancer
" Avec des vues pareilles, les antécédents qu'on lui connaît et s'il n'est pas d'ici là dérouté par des amours stériles ou la passion délétère des sports d'équipe, le Petit fera certainement personnage historique."
Sur son balcon, Victoria (alias Marie-Laure la feignasse, suivant l'identité que la narratrice endosse pour se parler à elle-même), jeune femme peu pressée d'entrer dans la vie professionnelle, contemple le monde et attend "La voie royale". Dans l'appartement, Marc-Ange, son ancien professeur de sociologie , homme de bonne composition , cherche le thème de son prochain ouvrage tout en tentant de s'adapter à son fils de dix ans, le Petit, enfant précoce qui tient à donner son avis sur tout ou presque. Le Petit d'ailleurs semble bien plus mature que bien des adultes qui l'entourent...
En bas de l'immeuble, un trou gigantesque , fonctionnant un peu comme un aimant et qui va drainer toute une faune intriguante. Se met ensuite tout un concours de circonstances qui va bouleverser l'existence de Victoria et la fera Avancer mais pas forcément dans la direction prévue...
Plus que l'histoire, c'est le style et les personnages qui font toute la saveur de ce premier roman enlevé et drôle.
Adresses au lecteur, sociologie sauvage hilarante d'une rencontre au café, découverte de toute une population pittoresque, des bobo au petits arnaqueurs, on entre avec délices dans un monde décalé et plein de fantaisie. Un régal !
Avancer, Maria Pourchet, Gallimard 2012, 222 pages très agréables.
06:00 Publié dans rentrée 2012, romans français | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : maria pourchet
15/09/2012
Retrouvailles...en poche.
"Nous sommes des êtres humains à l'état brut."
Onze mois de différence entre Veronica et son frère Liam. Onze petits mois qui expliquent peut être l'affection indéfectible qui les unit et les particularise dans cette famille nombreuse (ô combien !) irlandaise. Quand son frère se suicide,Veronica écrit furieusement pour remonter à la source de ce geste pour elle incompréhensible, tenter de mettre à jour la scène qui a pu déclencher le mécanisme aboutissant à cette mort.
Alternant passé et présent Retrouvailles est un roman puissant, dérangeant ,qui reconstitue le passé, non pas avec une assurance tranquille, bien peignée, lisse, (et un tantinet suspecte) mais d'une manière hirsute," à la diable",n'hésitant pas à dire qu'il s'agit peut être de souvenirs inventés, mais revenant avec obstination sur cette scène primitive qui devrait lui livrer-peut être- la clé de cette famille marquée par l'influence d'Eros.
La narratrice,surtout au début du roman utilise un langage cru, que ce soit pour parler de sa famille ou de sa relation de couple qui s'effiloche : "Il y avait des filles, à l'école, dont les familles augmentaient jusqu'au nombre conséquent de cinq ou six. il y en avait chez qui ça grimpait jusqu'à sept ou huit- ce qui était jugé un tant soit peu enthousiaste-et puis il y avait les pitoyables comme moi, avec des parents totalement désarmés qui se reproduisaient comme on irait aux chiottes."Mais cette violence n'est là que pour montrer le maëlstrom d'émotions de Veronica, qui triture les phrases, malmène son mari et embarque le lecteur ,parfois abasourdi mais totalement conquis dans une lecture qui le laisse un peu groggy mais en même temps séduit.
Au diable les bons sentiments ! "Le truc merveilleux quand on est élevé à la diable, c'est qu'il n'y a de reproches à faire à personne. Nous sommes entièrement élevés en plein air. Nous sommes des êtres humains à l'état brut. Certains survivent mieux que d'autres, c'est tout."Pourtant il y a de l'amour qui court tout le long de ce livre, un amour qui ne dira son nom que quand la narratrice aura enfin trouvé l'apaisement.
Quant au style, il est tout à la fois sensuel, le passé étant très lié aux sensations,cru, cahotique, fougueux et plein d'humour féroce. On se laisse embarquer dans ce roman comme on ferait un tour dans une essoreuse à plein régime et on en sort étourdi mais bourré d'énergie.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : anne enright, irlande, famille