29/12/2008
"vous êtes petite mais venimeuse."
Lemmer a fait 4 ans de prison pour meurtre et exerce maintenant le métier d'"invisible", c'est à dire de garde du corps ,plus efficace que les"gorilles" dissuasifs ,car plus discret. Sa nouvelle mission est de protéger Emma Le Roux, persuadée d'avoir retrouver la trace de son frère censé être mort depuis longtemps. D'abord méfiant et bardé de principes protecteurs,Lemmer va peu à peu accepter de croire les élucubrations de cette femme quand on va tenter de l'assassiner...
Se déroulant sous le soleil d'Afrique du Sud, Lemmer l'invisible joue sur plusieurs tableaux avec habileté. L'histoire apparemment classique s'enrichit du contexte politique de cet Etat en construction où des communautés doivent réapprendre à vivre ensemble maintenant que la donne a changé avec la fin de l'apartheid.Il faut aussi veiller au partage des terres entre réserves destinées à protéger les animaux (et en particulier les vautours, animaux que l'auteur nous présente de manière passionnante)et territoires revenant aux autochtones spoliés.
Les relations entre les personnages principaux sont analysées avec justesse et finesse, Deon Meyer veillant à ne pas se montrer caricatural. le style est sobre et efficace,les personnages attachants, la narration pleine de rebondissements, que demander de mieux ?
Un grand Merci à Babelio et aux Editions du Seuil qui m'ont permis de faire la connaissance de cet auteur.
Deon Meyer. Lemmer l'invisible.Le Seuil. 430 pages
06:15 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (13) | Tags : deon meyer, lemmer l'invisible, afrique du sud, vautours, blaireau
26/12/2008
Heureuse surprise !
Des a priori , j'en avais plein mes poches: l'histoire , dramatique au possible , cette femme qui veille,en Afghanistan ou ailleurs, sur un homme dans le coma; le style, que je craignais lyrique.Mais Papillon avait su me tenter, Aifelle aussi (pas de billet pour l'instant ? )et quand je l'ai trouvé à la médiathèque j'ai sauté dessus.
Bien m'en a pris car Syngué Sabour, pierre de patience fait voler en éclats tous les clichés que l'on pourrait s'attendre à trouver dans un tel texte. J'y aivu une tragédie se déroulant inexorablement en un seul lieu, cette pièce où l'homme est étendu, pièce qui fonctionne comme un aimant, attirant à elle tous les protagonistes. Peu de personnages,principalement bien sûr cette femme qui se libère par la parole devant ce corps masculin qui devient peu à peu pour elle une pierre de patience, "pierre magique que l'on pose devant soi pour déverser ses malheurs, ses souffrances, ses misères...".Cette femme, tiraillée entre rébellion et soumission,soigne son mari mais en même temps l'injurie et lui assène tout ce qu'elle n'a jamais osé lui dire: "Cette voix qui émerge de ma gorge, c'est la voix enfouie depuis des milliers d'années.". Peu à peu se reconstitue l'histoire d'un mariage arrangé, mariage qui a peu de réalité , sinon aux yeux de la loi et de la religion, tandis qu'autour la guerre se déroule et parfois s'immisce dans la maison. Cette épouse sauve ses filles mais parviendra-t-elle à se préserver ?
Il y a une telle vitalité dans ce roman qu'on a envie de crier : "Vas-y, fais ce que tu dois faire !",révoltée que l'on est devant la situation qui est imposée au femmes en Afghanistan et ailleurs . Rappelons par ailleurs qu'Atiq Rahini a écrit ce roman "à la mémoire de N. A.*-poétesse afghane sauvagement assassinée par son mari."
Dans une langue fluide et poétique le romancier célèbre la victoire-même de courte durée- de la sensualité sur l'oppression politique et religieuse. Un prix Goncourt qui restera dans les mémoires .
Syngué sabour. Atiq Rahini.POL.154 pages.
*Nadia Anjuman (25 ans)
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (20) | Tags : prix goncourt 2008, syngué sabour, pierre de patience, atiq rahimi
24/12/2008
Joyeux Noël !
06:00 Publié dans Bric à Brac | Lien permanent | Commentaires (39)
23/12/2008
"Un mur peut se sauter, mais comment s'évader de soi ? "
Un peu avant ses dix-huit ans, la narratrice apprend qu'elle ne s'appelle pas Iréna Golebiowska mais qu'elle est née Estera Sternchuss dans le ghetto de Varsovie.Première scission. En outre, elle découvre que Zofia Lass s'est approprié le manuscrit de sa mère, Un mur entre nous,devenu un best-seller mondial.
Dès lors, Iréna n'aura de cesse de mettre au point sa vengeance...
Plus que le récit d'une quête obsessionnelle, le roman de Tecia Werbowski est celui d'une quête de soi. Refoulant son identité juive , "J'étais convaincue qu'être juif vous donne le choix entre deux éventualités. S'affirmer comme Rubinstein et Romain Gary. Ou alors, rester tranquille dans son coin et ne pas se montrer différent des autres." Pour mener cette "double vie", Irena fuira jusqu'au Canada, jusqu'à ce quelle se rende compte que"depuis mon émigration, j'avais muré mes souvenirs et que je m'étais condamnée au ghetto du silence. C'est le moment du dégel pour les sentiments enfouis dans mon congélateur canadien." Le mur s'est donc d'une certaine façon matérialisé en elle.
Avec une langue sobre et âpre,en quelques courts chapitres (58 pages en tout !) allant droit au but, comme écrit dans l'urgence, Tecia Werbowski nous fait partager de manière efficace cette double recherche qui mènera enfin la narratrice vers l'apaisement. A tenter absolument.
L'avis de Lily
Celui de Sylvie.
Et de Michel.
Tecia Werbowski .Le mur entre nous. 58 pages. les Allusifs.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (13) | Tags : le mur entre nous, tecia werbowski, ghetto de varsovie, vengeance, secret, pologne, canada
22/12/2008
"Ce sont les gens qui ne savent pas être heureux qui voyagent."
"Les Américains peuvent faire le tour du monde et rester des Américains, mener exactement la même vie qu'en Amérique sans que personne ne se demande qui ils sont , ni pourquoi ils agissent de telle ou telle manière." Certains d'entre eux, dont ces Lucky Girls dont nous entretient Nell Freudenberger dans ces nouvelles vont cependant se trouver profondément changés par leurs séjour dans différents pays d'Asie.
Chanceuses, ces héroïnes des quatre premières nouvelles le sont d'une certaine manière , car issues de milieux plutôt aisés, elles peuvent choisir de séjourner à l'étranger, sans pour autant remettre en question leur identité, ce séjour étant de durée déterminée.
Pourtant, confrontée à la mère de son amant marié, l'héroïne du premier texte s'entendra dire "Vous n'étiez pas chez vous ici.(...) Personne ne savait qui vous étiez."Elle qui ne souvient même plus du prénom de sa future belle-soeur , ne rentrera pas aux Etats-unis pour le mariage de son frère ,ne pourra désormais plus ignorer l'importance de la famille en Inde...En effet, la famille américaine , en comparaison, semble bien déliquescente puisque dans la seconde nouvelle, des parents cachent à leurs enfants au bord de l'âge adulte; qu'ils sont séparés et ne savent comment leur annoncer leur divorce. Même souci du secret dans "Le professeur particulier" où une jeune fille apprendra enfin les véritables raisons du séjour en Inde de son père. Vivre à l'étranger c'est aussi l'occasion de faire ses premières armes amoureuse ou de rééclairer d'un jour nouveau le passé. Ainsi dans mon texte préféré, "Devant la porte orientale", une quadragénaire revient sur son enfance , à la fois douloureuse et enchantée, pleine d'odeurs et de couleurs, grâce à la magie d'une mère hors-norme dans laquelle finalement elle ne peut que se retrouver...
La dernière nouvelle, quant à elle, analyse par une subtile mise en abîme le processus de la création littéraire et nous montre une fois de plus que, mine de rien, les femmes sont les plus à même de se confronter à la réalité...
Riches et pleines d'émotions, les nouvelles de Nell Freudenberger réussissent le petit miracle de nous transporter dans des univers chatoyants et subtilement désenchantés.
Un grand merci à Cuné pour l'envoi !
06:00 Publié dans Nouvelles étrangères | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : lucky girls, nell freudenberger, voyages, littérature
21/12/2008
"Elle a encore mis son grain de sel dans mon autobiographie."
"J'aimerais qu'on m'explique. Comment se fait-il que, lorqu'un couple se défait, tout ce que l'on aimait dans la relation disparaisse instantanément comme par magie, alors que toutes les petites choses que l'on détestait secrètement continuent de vous hanter après ? "Hé oui, il ne comprend pas Oliver et pour s'y retrouver il noircit du papier et cache ses mémoires dans une taie d'oreiller de marque Victoria Plum (d'où le titre français, Les confessions de Victoria Plum qui n'a rien à voir avec l'original : Taking the Devil's advice.) Evidemment, son ex-femme, Constance va trouver les dits feuillets( parce que ce qu'il a oublié de nous dire ce cher Oliver ,entre deux lamentations sur son sort, c'est qu'il habite encore chez son ex) et elle va se glisser dans l'autobiographie d'Oliver nous proposer sa version des faits...
Comme souvent chez Anne Fine, le jardin joue un rôle important et pas seulement parce que l'héroïne, Constance a pour amant un jardinier (Hello ,Lady Chatterley!), il est souvent un exutoire pour échapper à la tension ambiante (dans un autre roman d'Anne Fine, l'héroïne, à chaque contrariété passe ses nerfs en arrachant des plantes !)
Mensonges ? Vérités ? Au lecteur de se faire sa propre opinion entre deux sourires car ce roman si délicieusement british est férocement drôle. Ma première rencontre avec cette auteure et aussitôt le sentiment de faire une rencontre importante ! (1993 déjà !)
Ps:quelqu'un qui trouve important d'établir une distinction entre "pierre" et "caillou" ne peut qu'être mon amie.
Pour toutes ces raisons, allez vite fouiller dans les médiathèques et les bouquineries pour dénicher ce petit chef doeuvre !
Anne Fine. Les confessions de Victoria Plum. 273 pages en édition originale (éditions de l'Olivier). A trouver aussi chez Points -Seuil.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (22) | Tags : anne fine, les confessions de victoria plum, couple, humour, férocité
20/12/2008
"comment une chose pareille peut-elle arriver à quelqu'un avant même qu'il ait eu le temps de devenir un homme ? "
D'abord une couverture assez atroce : j'ai, dans un premier temps, cru voir une déjection canine, (change tes lunettes, Cathulu !) avant de me rendre compte qu'il s'agissait d'un char qui avait fondu ! Ensuite, le titre: La route des ossements.Va savoir pourquoi je me dis qu'il doit s'agir de la guerre en Irak. Tout cela n'est pas folichon mais bon, le nom de l'auteure, Anne Fine, emporte mes dernières hésitations et je lis la 4 ème de couv' : visiblement il s'agit de tout autre chose puisque même si le contexte n'est pas donné comme clairement historique, les mots "Glorieuse Révolution" et "Tsar" ainsi que le prénom du jeune héros , Youri, éclairent enfin les choses. Je ne suis pas trop portée sur les ouvrages historiques , mais tant pis je me lance...
Mal m'en a pris : lourd, pesant, ce récit qui ne se décide pas à choisir entre traiter de la révolution bolchévique et du système communiste mis en place en URSS de manière claire et précise et vouloir traiter de la tyrannie en général m'a très rapidement ennuyée. Anne Fine ne gagne rien à vouloir se montrer didactique.
Vite oublions cet échec et(re) plongeons-nous avec délices dans ceci ou bien faisons connaissance avec une oeuvre plus ancienne et cette fois destinée davantage aux adultes (et ceci dès demain, si tout va bien ! )
08:05 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (16) | Tags : anne fine, la routes des ossments, révolution russe, révolte, tyrannie
19/12/2008
"Personne ne sait ce que je ressens .(...)ça donne encore plus de saveur aux efforts que nous faisons pour être ensemble."
Même si Rosie a atteint ce qu'on peut raisonnablement considérer comme étant le milieu de sa vie, elle n'a toujours pas trouvé de modus vivendi avec sa tante Min qui l'a élevée dès sa naissance. En apparence du moins, car il va suffire que les deux femmes se retrouvent - Min vieillit mal- pour que, sans que cela soit concerté, elles échangent leur rôles. A Min qui vient d'atteindre soixante-dix ans et n'avait jusque là jamais voyagé ou presque ,de vivre son rêve américain . A Rosie, qui a posé ses bagages, de s'inquiéter pour sa tante , tout en se ressourçant dans une maison isolée, berceau de sa famille, bien au calme pour écrire un livre de développement personnel destiné aux quinquagénaires...
Truffé de personnages tour à tour émouvants et drôles (ah la vengeance de la fiancée qu'on laisse tomber pour une jeunette !), Best love Rosie confirme ici tout le bien que je pensais déjà de Nuala o'Falain. Ses réflexions sur la cinquantaine font mouche et l'apaisement des personnages principaux qui , chacune de manière différente, parviennent à trouver un équilibre ,même fragile, même brinquebalant, donne le sourire aux lecteurs*ou lectrices. Seul petit pincement au coeur, ce roman sera le dernier de Nuala o'Falain puisque l'auteure est décédée.
Donnez-moi un roman où le héros trouve sa demeure et où ,en plus, rôde un chien et je suis la plus heureuse des lectrices !
* ce livre m'a été prêté par mon beau-frère, que je remercie au passage, et qui l'a beaucoup aimé aussi.
L'avis de Cuné qui le place en bonne position dans son classement 2008.
Celui de Kathel qui vous mènera vers plein d'autres (dont celui de Bellesahi !)
Nuala o' Falain . Best Love Rosie. Editions Sabine Wespieser.529 pages qui coulent de manière fluide...
06:00 Publié dans Les livres qui font du bien | Lien permanent | Commentaires (29) | Tags : nuala o'falain, best love rosie, irlande, milieu de vie, cinquantaine rugissante
18/12/2008
"Le dernier lauréat du Booker écriture rapide a été disqualifié après avoir été contrôlé positif à la cartlandromine."
"Eh bien, ce matin, j'étais sur les traces d'un animal mythologique en suivant la piste des tartes à la crème à travers l'Ouest, et cet après-midi, un croiseur cuirassé du XXVIème siècle atterrit dans le Nebraska. Vous en trouvez pas ça insensé, vous ? "Non, puisque celle qui s'exprime ainsi c'est la fameuse Ospec Thursday Next qui va (un peu) raccrocher les crampons et quitter le monde agité de la fiction pour rentrer chez sa mère, le petit Friday sous le bras. Elle trouvera également sa grand-mère qui ne pourra mourir qu'après avoir lu les 10 classiques les plus ennuyeux...
Evidemment, entre deux tranches de battenberg cake, un duel entre cow-boys, une apparition de Saint (pas si saint que ça d'ailleurs...), un dictateur qui veut détruire tous les livres danois et une partie (cruciale pour le sort de l'humanité) de croquet , jeu beaucoup plus percutant qu'on pourrait le croire, Thurday devra aussi essayer de récupérer son mari, tout en essayant de supporter les tergiversations du véritable Hamlet...Mine de rien l'auteur nous alerte sur certains dangers, hélas toujours d'actualité, et ce n'est pas pour gâcher notre plaisir, loin s'en faut.
J'ai retrouvé, après la petite baisse de régime du volume précédent, le monde foufoufou de Jasper Fforde avec un plaisir sans égal. Inventivité, rythme trépidant, on ne s'ennuie pas une minute ! Mention spéciale pour les fac-similés d'articles ouvrant chaque chapitre.
Sauvez Hamlet ! Jasper Fforde.10/18 .471 pages trépidantes !
L'avis de Chiffonnette. (descendre jusqu'au 2 décembre )
Celui de Karine
N'hésitez pas à signaler vos billets, que je les mette en liens !
06:04 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (17) | Tags : sauvez hamlet, jasper fforde, thursday next, battenberg cake, humour
17/12/2008
"...c'est l'antagonisme qui crée la beauté."
Ah, il l'a mauvaise Mohamed ! Non seulement sa fille "unique et préférée" Myriam poursuit ses études loin de lui à Toulon, mais en plus elle vient de lui forcer la main pour qu'il cohabite avec son amoureux, un nommé Gaston Leroux (comme l'auteur, pas la chicorée), un Gaulois pur jus ! Forcément, ça va faire des étincelles (d'autant plus que Mohamed est artificier...).
Alors, pour retrouver sa sérénité, le père bougon se réfugie dans les contes et légendes qu'ils partageaient avec sa fille quand elle était petite, des contes qui tissent un lien entre le passé de 'Algérie et le présent parisien. Mais attention, ces contes qui s'entremêlent savamment avec la réalité,il y parle "avec des mots d'aujourd'hui.ça va vite, il fait swinguer les phrases et les mots d'argot.", ils ne sentent pas la naphtaline !
Commencé sur un mode humoristique et léger, le roman,au fil des récits du passé algérien gagne en gravité et profondeur. On sourit d'abord de ce père qui ne veut pas admettre que sa fille n'est plus à lui tout seul. On a le coeur serré quand le roman se termine et on se sent un peu orphelin à l'idée de quitter ces personnages croqués avec la verve d'Akli Tadjer.
Akli Tadjer. Il était une fois peut être pas. JC Lattès.327 pages
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : akli tadjer, il était une fois peut être pas, algérie, lien père fille