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06/01/2009

"Quelques sourires atroces et la nuit est terminée."

A la lisière des nouvelles composant le recueil Dead girls rôde un tueur en série de prostituées. Il ne sera jamais le héros mais apparaîtra en "guest star" ou en filigrane et finalement sera le plus dangereux quand il n'apparaîtra pas du tout...Nous ne sommes pourtant pas ici dans une atmosphère policière, les "héroïnes" de ces textes sont en effet bien trop empêtrées dans leur vie pour véritablement prêter attention à ce fait divers  décrit de manière  particulièrement atroce par les media. Des crimes en série noyés dans la masse d'informations qui dégouline des postes de télévision.Adèle, Grace, Jess et les autres prennent tour à tour la parole pour nous confier leur histoire. Certaines sont jeunes, voire très jeunes mais toutes ont basculé , on ne sait pourquoi, du mauvais côté, elles ont fait un mauvais choix, rencontré le mauvais garçon ou n'ont pas vraiment de réponse51m0jz3l4pL._SL500_AA240_.jpg
"Tu n'arrives pas à mettre le doigt sur l'événement qui l'a fait basculer de l'enfance à l'âge adulte.(...)Tu cherches une réponse qui te soulage de ta culpabilité, une preuve que tu as été , sinon innocente, du moins trompée." Ainsi s'exprime la mère d'une jeune fille apparemment sans histoire.
Deux nouvelles sur les huit qui composent le recueil Dead girls utilisent ce pronom "tu" , procédé qui a le don d'habitude ,de m'horripiler . Sans doute un écho du "tututut" cher à Jacques Salomé . Mais bizarrement ici l'usage qu'en fait Nancy Lee ne m'a pas dérangée, au contraire. J'y ai vu une manière à la fois de tenir à distance le lecteur tout en l'impliquant. Difficile en effet de définir le style de ces textes poignants montrant la détresse d'êtres qui souvent ne croient pas avoir droit à une certaine forme sinon de bonheur du moins de réconfort.  Ainsi les histoires drôles mentionnées dans chacun des textes ne seront-elles jamais racontées, leur caractère loufoque  restant de pure forme,de simples formules vidées de sens que l'on connaît déjà et qui agissent comme des mots de passe. Les informations les plus dérangeantes ne sont jamais livrées de manière explicite, au lecteur de décrypter ce qui est livré à demi-mots et sans pathos. De la grisaille sublimée par un style vraiment original! Une expérience à tenter.

Nancy Lee. dead girls. 10/ 18 .293 pages.

05/01/2009

"J'aurais fait un petit garçon très acceptable, mais j'étais une fillette désespérante."

"Pour réussir un pique-nique, il faut prévoir six homards, un roulé de tête de veau, des feuilletés  à la confiture, , beaucoup de bière, des jeunes  gens, une vieille fille pour les surveiller, trois ou quatre enfants faciles, quelques messieurs mûrs,des ruines  à visiter (rien à voir  avec les messieurs mûrs),  des fraises à cueillir, un orage en fin de journée. Tante Janet avait pensé à tout ."Ambiance champêtre donc, du moins en partie, pour Miss Charity.La campagne  est vraiment l'endroit où  l'héroïne  de  Marie-Aude Murail prend vraiment  son envol, herborisant, recueillant des  animaux,  observant sans relâche et peignant "au plus près de la fontaine."Autant d'oasis  de bonheur dans une vie très morne entre un père laconique lâchant quelques "En effet",  lourds de sens et une mère possessive, tiraillée  entre la volonté de marier sa  fille et la peur panique de ne plus la régenter. On peut comprendre que dans une  atmosphère aussi réfrigérante "Prudence,  ma soeur aînée, avait renoncé  à vivre trois heures après être  née. Quant à Mercy, venue au monde deux ans plus  tard, elle n'avait pas  voulu tenter l'aventure plus d'une semaine."Charity, elle,  tient bon gâce à  une volonté sans faille  et trouve des dérivatifs  entre  son "zoo" et ses pièces de Shakespeare apprises  par coeur, passant ainsi pour une originale dans cette bonne société policée.41VZTDqaaKL._BO2,204,203,200_PIsitb-sticker-arrow-click,TopRight,35,-76_AA240_SH20_OU08_.jpg
Ambiance urbaine en partie aussi dans ce Londres  des années 1880, où une  gouvernante à demi- folle raconte des histoires horrifiques à Charity petite fille, où l'on croise aussi bien des personnages comme sortis d'un roman de  Dickens que les dramaturges Bernard Shaw ou Oscar Wilde.
Nous suivons Charity de son enfance à l'âge adulte avec un égal bonheur, partageons ses soucis et ses  joies,  la voyons prendre une indépendance toute relative mais ô combien choquante pour certains.On ne s'ennuie pas  une seconde car Marie-Aude Murail a  su s'imprégner de l'esprit anglais, pratiquant avec doigté l'humour britannique : "Mais  Albert, je crois que c'est  la  deuxième  fois qu'elle enterre sa mère.
-Auatnt que  les choses soient bien faites."

Les  illustrations  de Philippe  Dumas  ont su trouver l'esprit de  celles de Beatrix Potter-dont la vie a servi de  base à Murail- sans pour  autant les plagier et concourent à notre  plaisir de lecture.

A lire quand il fait moche  et froid, pour se réchauffer le coeur !

L'avis de Cuné qui vous enverra chez tous ceux qui l'ont  aussi beaucoup aimé !

 

Marie-Aude Murail. Miss  Charity.L'école des loisirs. Ne pas  se laisser impressionner par les 563 pages qui se lisent  d'une traite !

04/01/2009

Ricochets

Hier je vous parlais de méthode de jardinage apparemment désinvolte, laissez-moi  vous présenter celle de Thomasina Fox, héroïne du roman de  Jane Gardam,  Un amour d'enfant.

"Le  visage sombre de Thomasina vu à travers les cordes de sa raquette  avant un squash particulièrement diabolique montrait une qualité d'agressivité qu'on n'aurait jamais soupçonnée quand elle recevait dans  son salon  de shintz ou son jardin débordant de roses démodées, de buissons échevelés, d'herbes aromatiques, de dahlias  ou de jacinthes des  bois selon la  saison, de lis et de trilliums  difficiles à venir  et de "tout ce qu'il me  prend la lubie de planter". Main verte ? Absolument pas "J'achète et je prie,  c'est tout."9782213602240.gif
Mais ce n'était pas tout à fait vrai, car dans son jardin-en salopette, puis  en fuseau, puis en jean, puis  en pantalon lâche au fur et à mesure  que passaient les années-, Thomasina peinait, creusait,  taillait à longueur de journée, de semaine, de saison, désherbant,  nettoyant, régéné rant le  sol, le nourrissant de riche compostnoir, y ajoutant des toniques plus violents ("du caca de poule  de préférence"), tournant, touillant,  malaxant le tout. Deux fois l'an, elle ouvrait au bénéfice des infirmières dans le  cadre des jarisn  Nationaux. C'était une discipline tuante mais  qui  apaisait, recentrait,  apportait un grand  réconfort.Le  jardin  de Thomasina  la  récompensait amplement: les feuilles étaient comme il convient, ou luisantes ou soyeuses,les roses sans taches et sans pucerons,  prêtes à être admirées, prêtes à être photographiées.
Mais à l'intérieur de  Thomasina Fox,  que se passait-il vraiment ?  "

Oui, que se passe-t-il à l'intérieur de  Thomasina  qui vient  de perdre  sa fille  et d'hériter d'un encombrant nouveau-né que chacun se passe comme une patate chaude nous donnant ainsi l'occasion de découvrir toute une galerie de portraits à la fois caustiques et tendres ?
Jane Gardam bouscule les conventions comme seules les romancières anglaises savent  le faire, avec une férocité réjouissante !

Jane Gardam. Un amour d'enfant. Fayard  1998 .376 pages dans lesquelles je pioche régulièrement.

 

03/01/2009

On peut toujours rêver !:)

"On y sème 65 kilos de graines tous les ans en mars." Glups ! Le  temps  d'avaler sa salive et nous poursuivons la  visite de  ces vingt-trois jardins d'exception, ouverts au public et dont les âmes sont toutes des femmes.51hKJE3y3gL._SL500_AA240_.jpg
Ces domaines , elles en ont souvent hérité et souvent sont venues au jardinage un peu par hasard. Mais à  les voir toutes, quel que soit leur âge , cela semble leur réussir !  Ainsi Rosamée Henrion,"Infatigable, (...) trouve l'énergie chaque matin pour supprimer toutes les  fleurs fanées, désherber et tailler  la moindre petite pousse vagabonde!" du  Jardin de Plessis Sasnière (3,5 hectares quand même,situés en Touraine).
Sans façons, elles nous avouent leurs échecs,  visiblement créer une mare n'est pas une bonne idée, et nous confient leurs astuces. certes, nous ne disposons pas toutes (et heureusement !) de  jardins de  plusieurs hectares mais nous pouvons déjà rêver en admirant les très belles photos, utiliser les astuces à notre échelle  et ,pourquoi pas , programmer les  prochaines vacances en fonction de ces jardins situés en Touraine, Picardie,  Normandie, Bretagne , Auvergne  Orléanais, Bourgogne,Dordogne, Ile-de-France, Maine ou Provence ...

Un grand merci à Cath pour  ce voyage immobile !

Ps:  Je vous livre une astuce de Louise Courteix, de l'arboretum de Balaine, sa désinvolture apparente m'a rappelé  un personnage  de  Jane  Gardam dont je vous parlerai demain, si  tout va bien :  " Ma  technique de  planation est simple. Je lance les bulbes [de cyclamens] à la volée et je les plante là où  ils  tombent. Le  dessus du bulbe doit affleurer le sol. J'ajoute au-dessus à peine 5 mn de terreau et j'évite surtout de piétiner ensuite les zones plantées. Ces cyclamens  se  naturalisent  très bien et j'en replante chaque année  seulement une centaine car je n'ai pratiquement pas de dégäts avec les mulots. ces derniers ont tellement à manger dans le parc qu'ils ne touchent pratiquement pas  aux bulbes! C'est le  secret de la biodiversité : plus on a d'espèces (de fruits,  de plantes à graines...)  moins on a  de dégâts avec la petite faune."

Leurs secrets. B.  Boudassou (textes), B. Pichon  (photos). Larousse

 

02/01/2009

La ronde des jours


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31/12/2008

Bilan 2008

Championne hors catégories : Kate Atkinson, dont j'ai tout lu, qui ne m'a jamais déçue et qui avec son dernier roman paru en France confirme  tout le bien que je pense d'elle : A quand les bonnes nouvelles? m'a fait pleurer, m'a fait rire, m'a secouée ...Comment ça, vous ne l'avez pas encore lu ? !

En 2008, les garçons nous auront confié leurs secrets et cela s'est avéré souvent fort drôle . En tête de liste, Colas Gutman et son hilarant Journal d'un garçon,

talonné par Claudine Desmarteau et son Petit Gus où chacun peut se reconnaître.

Dans les policiers, bien sûr c'est Stoney qui se taille la part du lion avec Dérive sanglante. Un homme comme nous en rêvons toutes !

Un excellent cru cette année, ma foi !

En attendant la rentrée de janvier, rentrée littéraire bien sûr- je piaffe déjà !- je vous souhaite à tous une douce année 2009 ! Bises !

30/12/2008

"Elle écrase son chagrin contre la vitre."

Ouvrir un livre de Françoise Lefèvre c'est pousser la porte d'une maison amie, entrer dans un univers où la douleur n'est pas exclue mais où elle est apprivoisée.  L'écriture à la fois poétique et sensuelle de cette auteure nous accompagne tout au long du parcours de La grosse : son installation dans cette maison de garde-barrière, son amitié avec un vieil homme aux portes de la mort mais chérissant la vie. Pauvres tous deux mais riches d'amour et prodigues de cet amour, réussissant à créer une sorte de paradis en marge de la ville et de la mesquinerie de ses habitants...Mais tout va se dégrader et Céline connaîtra une Passion proche de celle de Marie-Madeleine...
Ce livre, très court, est riche de phrases qu'il faut laisser infuser, au hasard :51nBKuOWm8L._SL500_AA240_.jpg

"Elle sent les arbres qui poussent dans sa tête. La pluie fine gonfle ses cheveux comme dans une mansarde d'amour. Les yeux dans le ciel, elle boit la campagne comme une liqueur verte."

"C'est inouï le nombre de gens qu'il faut chasser de sa  route pour qu'ils ne viennent pas piétiner les  joies  minuscules d'une journée."

Un livre à chérir.

 

L'avis de Florinette qui a remis ce livre-voyageur sur les rails ...ce dont je la remercie chaleureusement !

 

29/12/2008

"vous êtes petite mais venimeuse."

Lemmer a fait 4 ans de prison pour meurtre et exerce maintenant le métier d'"invisible", c'est à dire de garde du corps ,plus efficace que les"gorilles" dissuasifs ,car plus discret.  Sa nouvelle mission est de protéger Emma Le Roux, persuadée d'avoir retrouver la trace de son frère censé être mort depuis longtemps. D'abord méfiant et bardé de principes protecteurs,Lemmer va peu à peu accepter de croire les élucubrations  de cette femme quand on va tenter de l'assassiner...414aHGs5iAL._SL500_AA240_.jpg
Se déroulant sous le soleil d'Afrique du Sud, Lemmer  l'invisible joue sur plusieurs tableaux avec habileté. L'histoire apparemment classique  s'enrichit du contexte politique de cet Etat en construction où des communautés doivent  réapprendre à vivre ensemble maintenant que la donne  a changé avec la fin de l'apartheid.Il faut aussi veiller au partage des terres entre  réserves destinées à protéger les animaux (et en particulier les vautours, animaux que l'auteur nous présente de manière passionnante)et territoires  revenant aux autochtones spoliés.
Les relations entre les personnages principaux sont analysées avec justesse et finesse, Deon Meyer veillant à ne pas se montrer caricatural.  le style est sobre et efficace,les personnages attachants,  la narration pleine de rebondissements, que demander de mieux ?

Un grand Merci à Babelio et aux Editions du Seuil qui m'ont permis de faire la connaissance de cet auteur.23703002_p.jpg

 

Deon Meyer.  Lemmer l'invisible.Le Seuil. 430 pages

 

 

 

26/12/2008

Heureuse surprise !

Des a priori , j'en avais plein mes poches: l'histoire , dramatique au possible , cette femme  qui veille,en  Afghanistan ou ailleurs, sur un homme dans le coma; le style, que je craignais lyrique.Mais Papillon avait su me tenter, Aifelle aussi (pas de billet pour l'instant ? )et quand  je l'ai trouvé à la médiathèque j'ai sauté dessus.
Bien m'en a  pris car Syngué Sabour, pierre de patience fait voler en éclats tous les clichés que l'on pourrait s'attendre à trouver dans un tel  texte. J'y aivu une tragédie se déroulant inexorablement en un seul lieu, cette pièce où  l'homme est étendu, pièce qui fonctionne comme un aimant, attirant à elle tous les  protagonistes. Peu de personnages,principalement  bien sûr cette femme qui se libère par la parole devant ce corps masculin  qui devient peu à peu pour elle une pierre de patience, "pierre magique que l'on pose devant soi pour déverser ses malheurs, ses souffrances, ses misères...".Cette femme, tiraillée entre rébellion et soumission,soigne son mari mais en même temps l'injurie et lui assène tout ce  qu'elle n'a  jamais osé lui dire: "Cette voix qui émerge de ma gorge, c'est la voix enfouie  depuis des milliers d'années.". Peu à peu se reconstitue l'histoire d'un mariage arrangé,  mariage qui a  peu de réalité , sinon aux yeux de la loi et de la  religion, tandis qu'autour la guerre se déroule et parfois s'immisce dans la maison. Cette épouse sauve ses filles mais parviendra-t-elle à  se préserver ?51ObmiTbmyL._SL500_AA240_.jpg
Il y a une telle vitalité dans ce roman qu'on a envie de crier  : "Vas-y, fais ce que tu dois faire !",révoltée que l'on est devant  la situation qui est imposée au femmes en Afghanistan et ailleurs . Rappelons par ailleurs qu'Atiq Rahini a écrit ce  roman "à la mémoire de  N. A.*-poétesse afghane sauvagement assassinée par son mari."
Dans une langue fluide  et poétique le romancier célèbre la victoire-même de courte durée- de la sensualité sur l'oppression politique et religieuse. Un prix Goncourt qui restera dans les mémoires .

Syngué sabour. Atiq Rahini.POL.154  pages.

 

*Nadia Anjuman  (25 ans)

24/12/2008

Joyeux Noël !

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