04/01/2020
Tous les hommes désirent naturellement savoir...en poche
Scandé par des titres de chapitre qui reviennent tout au long du texte (Devenir, Se souvenir, Savoir et enfin Être), le roman de Nina Bouraoui alterne les souvenirs de l'enfance lumineuse en Algérie et ceux de son adolescence en France. En quête de son identité (est-elle algérienne ou française ?), la très jeune femme délaisse l'université pour fréquenter les boîtes de nuit lesbiennes, en particulier le Kat, mais n'assume pas encore son homosexualité.
Elle brosse aussi, par petites touches, le portrait d'une femme, sa mère, qui , par amour, prendra le chemin inverse de bien des français d'alors: en 1962, elle décide d'habiter avec son mari algérien dans ce pays qui vient de recouvrer la liberté. Un femme qui refusera de poser des mots sur la violence masculine qu’elle subira des années plus tard.
La violence, il en est aussi question dans les relations qui s'établissent dans le Kat , relations qui fascinent mais semblent aussi effrayer la jeune Nina.
Se voulant le portrait de l'enfance d'une jeune femme homosexuelle, le roman se révèle un peu trop léger à mon goût, n'approfondissant pas assez la réflexion et nous laissant sur notre faim
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : niba bouraoui
02/01/2020
Le sel de tes yeux
"Dans ta famille, il n'est pas tant question de s'ajuster les uns aux autres que de décréter une normalité. Comment lutter contre ceux qui ont le droit de t'enfermer, de te contraindre et de te gifler s'ils estiment que c'est pour ton bien, et s'ils estiment que le bien pour une fille consiste à aimer les garçons ? "
Alors qu'elle explore le bassin minier du Nord de la France, région dont elle est originaire, l'écrivaine photographie une jeune fille qui court. Une silhouette.
Elle lui invente un prénom , Sarah, une famille et une orientation sexuelle qui déroute cette dernière : Sarah aime les filles.
Dans ce court roman (174 pages), Fanny Chiarello s'adresse à cette adolescente qu'elle a vraiment croisée, sans pouvoir lui parler et même si elle ne la connaît pas déclare: "mais, parce que je t'écris, tu es une force pour moi- note l' ambiguïté de cette phrase, ou le t' peut aussi bien être un C.O.D. qu'un C.O.I."
Brouillant les pistes, qu'est ce qui est inventé, qu'est ce qui est réel ?, Fanny Chiarello nous livre ici un récit sensible et juste sur une jeune fille qui se confronte à une société hétéronormée ,dont on n'a même plus conscience, sauf évidemment quand on sort de la norme. Elle brosse des parents un portrait nuancé, ils aiment leur fille mais ne peuvent concevoir qu'elle déroge à ce qui est pour eux la normalité et acceptent sans sourciller que leur autre fille sorte avec un étudiant plus âgé.
N'allez pourtant pas croire que tout est plombé dans ce roman qui, s'il serre parfois le cœur, ménage auss des moments lumineux et peint avec véracité le quotidien d'une jeune femme d’aujourd’hui. Un roman plein d'espoir.
Un coup de cœur.
Le sel de tes yeux, Fanny Chiarello Éditions de l’Olivier 2020
De la même autrice: clic.
06:00 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : fanny chiarello
01/01/2020
Tous mes voeux de bonheur et de santé !
05:00 Publié dans Bric à Brac | Lien permanent | Commentaires (19)
31/12/2019
Le livre qui vous endort
Vous voulez tout connaître des différentes sortes de gravier ? Découvrir la taxinomie des microlépidoptères ?
Si les sciences ne vous passionnent pas, un peu d'histoire peut être ? Découvrez les tactiques militaires sous l'ère napoléonienne ou la vie et l’œuvre de Porphyre de Tyr .
Quelques théorèmes mathématiques résumés vous permettront peut être de briller à la table ce soir, mais plus sûrement vous feront bâiller en moins de temps qu'il ne faut pour l'écrire car tel est l'objectif de ce livre qui se vante d'être "Le livre le plus ennuyeux au monde qui n'est ni stimulant ni intéressant mais vous saoule d'informations inutiles et vous endort en quelques lignes ".
Il n'en reste pas moins que c'est fort drôle et que les esprits aussi tordus que le mien feront leur miel de quelques - unes de ces informations, ne serait-ce que dans le domaine des curiosités linguistiques françaises !
Éclectique et humoristique, tout ce que j'aime !
Marabout 2019
06:00 Publié dans Humour | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : professeur k.mc coy, dr hardwick, julie sence-herlihy
24/12/2019
Joyeux Noël à toutes et tous !
Bonnes fêtes de fin d'année à toutes et à tous !
06:00 Publié dans Bric à Brac | Lien permanent | Commentaires (15)
23/12/2019
Shibumi...en poche
"Tout homme travaillant pour une organisation qui pollue, extrait à ciel ouvert, contamine l'eau et l'air, est un tueur."
Il faut attendre les deux-tiers du roman pour que s'affrontent pour la première fois, en une sorte de duel feutré l,es principaux protagonistes de ce roman-culte d'espionnage. D'un côté, le représentant de la Mother Company, le frustre Diamond, de l'autre , le raffiné Nicholaï Hel, assassin le plus doué de sa génération (une pièce occidentale contiendrait deux cents objets qu'il pourrait utiliser comme armes), actuellement à la retraite dans son château du Pays basque.
Auparavant, l'auteur aura savamment entretenu le suspense, relatant avec force détails le passé de son héros, Hel bien sûr, qui via des mentors japonais, s'est fixé comme objectif d'atteindre le Shibumi, forme d'excellence personnelle.
Les critiques vis à vis des États-Unis foisonnent sous la plume de Trevanian qui , dans ce texte écrit en 1979 fustige les comportements des américains, en particulier dans le domaine de l'écologie. On aurait aimé aussi qu'il soit précurseur dans les relations de son personnage avec les femmes et un peu moins outrecuidant, mais bon, nul n'est parfait, même pas Nicholaï Hel quoi qu'il puisse en penser...
Il n'en reste pas moins qu'en dépit de quelques longueurs concernant la spéléologie, ce roman est un pur régal de manipulations en tous genres , de remarques acérées : Il doit être bien embarrassant d'être vous, qui entraîne son lecteur dans ses 514 pages sans jamais le lâcher, jusqu'à un final crépusculaire.
Admirablement traduit par Jean Esch
Du même auteur : clic
06:03 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : trevanian
22/12/2019
Champion...en poche
"J'ai appris cette année qu'on pouvait vivre sans mère, sans second degré, sans manger, sans cours, sans Étienne, sans information, sans innocence, sans faute, sans aimer Hélène, sans mémoire, et parfois sans réaction. Imaginons que ça vaille aussi pour le CO2, je serais l’auteur de la découverte du siècle. Un, deux, trois."
Fabien, quinze ans, doit raconter par écrit les événements qui l'ont conduit dans ce centre de repos. tel est le marché passé avec la thérapeute qui s'occupe de cet adolescent à fleur de peau, mal embouché, qui porte sur les autres et surtout sur lui-même un regard acéré.
Très vite, façon Petit Poucet, Fabien laisse à notre disposition des indices pour nous permettre de recomposer ce qu'il nous présente comme son passé, marqué par l'impossibilité d'un deuil et la culpabilité. Masi ce narrateur est-il vraiment fiable vis à vis de ses lecteurs, voire de lui-même ?
Un roman d'une extrême sensibilité, bourré d'un humour vachard, riche en formules percutantes qui vous déchirera le cœur.
De la même autrice : clic , clic
reclic
rereclic.
05:35 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : maria pourchet
21/12/2019
Seules les bêtes ...en poche
"Les gens veulent toujours un début. Ils s'imaginent que si une histoire commence quelque part, c'est qu'elle a aussi une fin. Que l'orage a cessé, qu'ils peuvent revenir à leur routine, épargnés qu'ils ont été. ça se tient, je dis pas. Et puis ça rassure un peu."
Au cœur du Causse, une femme a disparu. Élément déclencheur ou résultante d'une séries d'histoires de solitudes âpres organisées autour de secrets que va découvrir progressivement le lecteur ?
Chacun leur tour, de l'assistante sociale aux paysans du coin, sans oublier un Ivoirien derrière son ordinateur, les personnages vont éclairer à leur façon cette disparition à laquelle ils sont liés de manière plus ou moins contingente.
Colin Niel, qu'il dépeigne la vie paysanne ou la vie des jeunes ivoiriens (en utilisant de manière très vivante leur langage) nous emporte avec lui au cœur des émotions.
Un roman très réussi , tant par sa structure très maîtrisée que par ses personnages plus vrais que nature.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : colin niel
20/12/2019
Ici tout est encore possible
"Je doute que la sécurité dans laquelle je vis corresponde à la réalité. J'aspire à l'incertitude, à davantage d’authenticité peut être, au concret. j'aimerais être capable de distinguer l'important de l’accessoire. J'aimerais faire partie d'une histoire ou de plusieurs histoires en même temps."
Tout semble paradoxal dans ce roman. En effet, l'héroïne choisit de devenir veilleuse de nuit dans une usine vouée à la fermeture car "Ici, un nouvel environnement s'offre à l'exploration. Ici, tout est encore possible."
La narratrice, cantonnée à un espace réduit, s'intéresse aux frontières, celles de son propre corps, celles de l'espace qui l'entoure et dont elle a la charge. Elle doit notamment empêcher qu'un loup (réel ou imaginaire), quittant l'espace de la forêt toute proche ,n'entre dans l'espace de l'usine.
Autre figure de l'étrange étranger, cet homme tombé du ciel des années plus tôt , un migrant sans doute, resté non identifié et dont la commune s'est employée à louvoyer pour ne pas avoir à s'acquitter de son enterrement.
C'est finalement la narratrice elle-même qui fera naître des soupçons concernant son identité auprès de la petite communauté villageoise.
Amateurs de sensations fortes, d’explications claires, passez votre chemin. Nous sommes ici au royaume de l'implicite, du non-dit et du sous texte et si l'écriture semble sans attraits, elle n'en est pas moins efficace pour sire la monotonie de ces existences volontairement étriquées. ça passe ou ça casse, mais ce texte distille près coup un charme certain.
Traduit de l'allemand (Suisse) par Françoise Toraille
Éditions Delcourt 2019.
prix Robert Walser 2019
06:03 Publié dans romans suisses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : gianna molinari
19/12/2019
Croire aux fauves
"J'ai perdu ma place, je cherche un entre-deux. Un lieu où me reconstituer. Ce retrait-là doit aider l'âme à se relever. Parce qu’il faudra bien les construire, ces ponts et portes entre les mondes; parce que renoncer ne fera jamais partie de mon lexique intérieur."
Spécialiste des populations arctiques, l'anthropologue Nastassja Martin est attaquée par un ours le 25 août 2015. Tels sont les faits .
Mais la principale intéressée préfère évoquer l'événement en tant que rencontre et échange, car si l'ours l'a défigurée, emportant en lui une partie du visage de l'humaine , elle-même estime que les frontières entre humain et animal sont poreuses et qu'elle a donc gardé en elle quelque chose de l'ours.
En effet, l'ours n'est pas n'importe quel animal, il faisait partie selon l'auteure de sa destinée, de son rêve et la rencontre était inéluctable.
L'animisme est au cœur de ce récit exigeant et poétique qui raconte tout à la fois une reconstruction mais aussi la nécessité d'instaurer "une négociation au sujet du monde dans lequel nous allons vivre."
Un récit enthousiasmant.
Éditions Verticales 2019, 151 pages troublantes
06:00 Publié dans Récit de vie | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : nastassja martin