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02/07/2012

J'habite dans la télévision

"ça n'a rien de plaisant, de glamour, ni de drôle. pour personne, ni pour moi. Mais quoi qu'il puisse en ressortir, quoi que ça puisse donner comme trace, je sais qu'il se passe quelque chose en moi, pour de vrai Quelque chose comme mon crâne qui se remplit tous les jours d'oiseaux morts qui n'y étaient nullement avant que ça commence. Quelque chose comme une forme de réalité imposée depuis longtemps à des millions de personnes. ça ne sert peut être à rien , mais je dois persévérer. ressentir mon cerveau qui devient disponible, neurone à neurone disponible, je sais que ça n'a pas de sens pour beaucoup et pour vous. C'est juste un témoignage éperdu comme tant d'autres, sans valur ni effet. Mais c'est un  petit bout de vie ébranlée par une phrase* en juillet 2004, qui a voulu comprendre comment on la mangeait"

* Ce que nous vendons à Coca Cola, c'est du temps de cerveau humain disponible, phrase prononcée par Patrick Le Lay,PDG de TF1. Cette phrase sera le point de départ d'une expérience menée par la romancière Chloé Delaume. 22 mois durant , toute la journée, elle s'est soumise au flux de chloé delaumemessages publicitaires, de programmes de téléréalité, enregistrant ses mutations corporelles et celles de son cerveau. Ce pourrait être uniquement une tentative sociologique, voire scientifique, mais c'est surtout une expérience sur le langage comme le montre l'extrait ci-dessus.
Le vocabulaire, très précis, n'est pas toujours facile, les ruptures de tons sont fréquentes et le lecteur se perd parfois en chemin mais cela n'en reste pas moins un texte qui fait réagir et s'interroger , tant par le thème que par l'écriture. Un texte qui m'a donné envie de poursuivre ma découverte de cette auteure.chloé delaume

Merci Sébastien pour le prêt !

27/06/2012

Le chauffe-eau (épopée)

"Dans un coin sombre du garage, le chauffe-eau existait, impénétrable et muet comme un Moloch stoïque."

Une épopée contemporaine en cinquante -six pages format poche, tel est le défi ,relevé haut la main, par Antoine Martin.antoine martin,ah mon dieu quel bonheur d'avoir un mari bricoleur
En lice, deux combattants : le chauffe-eau , dont le démon s 'éveille en plusieurs étapes, et un père de famille doté de deux mains gauches , d'une caisse à outils réduite à sa plus brève expression mais prêt à lutter jusqu'au bout :" ...le père hésita très peu avant de se lancer dans l'inégal corps à corps. Y avait pas , ça serait lui ou lui.
Il n'était pas au bout de ses peines."
Vous l'aurez compris les hauts faits dont il sera ici question sont des plus quotidiens et des plus triviaux. Mais Antoine Martin, à coups d'allusions littéraires, de vocabulaire volontairement excessif , tour à tour, familier ou soutenu, crée un décalage des plus efficaces pour faire naître le sourire.
Le style est  impeccable, la dérision au rendez-vous et on suit, captivé, les péripéties de ce combat entre le chauffe-eau et l'homme. Promis vous n'ouvrirez plus votre robinet d'eau chaude sans avoir une pensée émue pour cet appareil ! Un délice à s'offrir dans plus tarder !

Le chauffe-eau, Antoine Martin, le Diable Vauvert 2012, 56 pages, 5 euros.

 


23/06/2012

les vacances d'un serial killer...en poche

"Rien que lui et les méduses. Ces bestioles, ça pique, mais au moins ça ne cause pas."

Veules, veilléitaires et vachement humains , tels sont les membres de la famille Destrooper que nous allons suivre en villégiature sur les bords de la Mer du Nord à Blankenberge, en Belgique. Dès le départ les catastrophes s'enchaînent et ils ont tôt fait de perdre en route leur porte-feuille et la grand-mère, "vieille carne" increvable. Mais la mamie n'a rien d'une chiffe molle et elle va bientôt entraîner toute sa petite famille dans une spirale de violence désinhibée et folledingue. Nous sommes ici à la croisée des Bidochon et des Simpson dans une farce qui flirte avec le grand guignol (une main gêne pour fermer un couvercle, adieu la main !). On aime ou on déteste , pas de demi-mesure !nadine monfils
Sur des airs d'Annie Cordy, Nadine Monfils nous entraîne dans une cavalcade effrénée, croquant le détail qui tue (les chaussettes blanches, soigneusement remontées) mais peignant aussi ,entre deux enterrements dans le sable ,une Mer du Nord pleine de poésie. On sent la jubilation de cette écriture qui s'emballe et on sort de là un peu étourdi mais ravi !

19/06/2012

Le bar parfait

"-Ah ! Je vois. Quand il ya marqué modération, en général, ça dégénère."

A la recherche du Bar parfait, un marathonien du blanc parcourt les rues de Paris avec comme trame le plateau de jeu d'un Monopoly: "Un sacré jeu de pistes. Ce tracé de capitalisme immobilier allait devenir un jeu de l'oie bourré, alcoolisé." Jeu de pistes donc, entrecoupé par des dialogues de malfrats qui semblent préparer un coup.Prétexte à un vagabondage amoureux des bars pour dénicher "l'ultime " et l'occasion de profiter du verbe goûtu de Jean-Bernard Pouy !jean-bernard pouy,troquet,bistrot,rade

Le bar parfait, jean-Bernard Pouy, Lés éditions Atelier n°8 2011, 66 pages gouleyantes !

Déniché à la médiathèque.

15/06/2012

La commissaire n'aime pas les vers...en poche

"Un autre meurtre ? Pire encore, c'était sa mère."

Un clochard surnommé Victor Hugo assassiné alors qu'il voulait confier aux Académiciens un poème inédit (et sulfureux) de Baudelaire, même si La commissaire n'aime point les vers, il lui faudra élucider cette affaire dont vont très vite s'emparer les médias.georges  flipo
Assistée du très craquant lieutenant Augustin, Viviane Lancier, entre deux régimes et quelques cadavres, mène l'enquête et nous devient de plus en plus sympathique, volant même parfois la vedette à l'intrigue ,au demeurant fort bien troussée et documentée.
On regrettera juste l'ultime suggestion de la commissaire à l'assassin-pas vraiment justifiée- ainsi qu'une volonté un peu trop affichée de finir à tout prix sur une minute d'émotion.
Nonobstant ces quelques réserves, j'ai passé un excellent moment avec ce polar bon enfant et je me réjouis d'avance d'en lire la suite !

14/06/2012

Le corail de Darwin

"Cette île, c'est un coeur qui bat."

Vigdis est pleine d'énergie, "franche du collier" et vit en Islande, un pays en perpétuelle création, une île est d'ailleurs née en même temps que la jeune femme . Livia , plus secrète, habite Rome, une ville plus tournée vers les vestiges de son passé que vers l'avenir. Toutes deux, grâce à un site d'échange de maisons, vont découvrir ce qu'elles ignoraient désirer.brigitte allègre,rome,islande,communication
Il est beaucoup question de communication dans ce roman. En effet, d'une part,  par l'intermédiaire des mails, les jeunes femmes vont tisser une relation qui les amènera à se livrer davantage que si elles s'étaient rencontrées. D'autre part, Livia entretient des "conversations à bouche close" avec son mari, éloigné par son travail et avec lequel elle communique par l'intermédiaire de listes de livres enregistrés sur une liseuse électronique. Quant au père de la jeune italienne, ressassant un événement culpabilisant du passé, il rédige des feuillets chaotiques d'où émergera peut être une vérité.
 L'analyse de cette appropriation des lieux de l'autre, de cette incursion dans l'intimité d'étrangers que l'on ne croisera pas,  en particulier de l'espace romain par Vigdis est  aussi menée de manière subtile.
J'ai mis un peu de temps à entrer dans ce texte , mais ensuite plus moyen de le lâcher ! Le style de Brigitte Allègre est précis, riche, sans être précieux et son roman très bien structuré. Elle arrive à créer des atmosphères et des personnages qui captivent, et on a vraiment l'impression de partager leurs vies et leurs sentiments. L'analyse est fine, le style superbe, un pur régal !

Le corail de Darwin, Brigitte Allègre, Actes Sud 2012, 390 pages (hérissées de marque-pages) pour trouver sa demeure. Et zou, sur l'étagère des indispensables  ! Et zou, dans la foulée, j'ai commandé son premier roman !

10/06/2012

Ma vie pour un oscar

"Juste le temps nécessaire à Bogus pour retrouver sa forme inhumaine."

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En devenant l'assistante d'une star hollywoodienne, John Bogus, La jeune Camille, autocentrée et mégalo (elle rêve d'un Oscar) va découvrir l'envers du décor . De l'organisation de la participation de son patron à la cérémonie des oscars à celle d'un voyage humanitaire, nous connaîtrons tout de l'autre face de cet acteur obsédé par son apparence et entouré par une cour de parasites. Mais Camille , en manière d'ego est de taille à se défendre ! :"Ses cousins se demandent pourquoi je ne suis pas mariée et ce que je fabrique à 6 h 15 du matin, assise à l'arrière de leur camionnette à attendre le livreur de journaux avec ma gueule de fille à papa et mes diplômes qui dépassent de mes leggings de yoga. Un cliché ambulant assumé dans une ville désinhibée par la banalité de l'outrance." L'héroïne n'a rien d'une Bécassine et c'est ce qui fait tout le sel de l'histoire.
Dans sa présentation (clic) l'auteure, qui a elle même été l'assistante d'un acteur américain ,assure avoir voulu écrire un roman qui ne se lâche pas. Mission accomplie de ce point de vue. La satire est amusante, même si un peu superficielle, et qui se plaindrait de pénétrer dans les coulisses du rêve hollywoodien ?
Mais j'ai surtout été séduite par l'aplomb (qui peut parfois être agaçant) de cette jeune femme qui a tout pour elle, le sait et en joue parfaitement. Un roman d'été qui remplit parfaitement son contrat.

 

 Ma vie pour un Oscar, Aurélie Lévy, Plon 2012, 151 pages tout sauf naïves.

Quant aux curieuses qui se demande quelle est l'identité de ce mystérieux acteur, quelques secondes de recherche  sur le net devraient suffire...:)


18/05/2012

Grandir...en poche

Bien sûr, il y eut des fêlures , mais quand la mère, âgée, devient fragile, que la relation de "dépendance" commence à s'inverser, c'est l'occasion pour chacune d'elle de Grandir d'une manière différente et d'apprivoiser le temps qui passe .sophie fontanel
Avec beaucoup de pudeur et d'élégance Sophie Fontanel nous livre ce beau récit entremêlant souvenirs heureux et découverte d'un tout autre univers, celui de la vieillesse et de ses aléas, en complet décalage avec le monde futile de la monde dans lequel évolue la narratrice.
Des chapitres courts, comme autant de vignettes, pour dire la tendresse et les jolies choses dont il faut se souvenir, pour s'en servir comme d'un viatique.
A mille lieues de l'univers habituel (chichiponpon )de l'auteure.

04/05/2012

L'échappée belle...en poche

(La première version de ce texte était paru chez Fr*nce L*isirs , il y a quelques années)

Ce "rab de bonheur" que vont s'octroyer, en se faisant la belle d'un mariage ,une fratrie de frères et soeurs que la vie a quelque peu malmenés, n'a rien perdu de son charme. Si les francs ont cédé la place aux euros, si meetic est apparu dans le monde de la célibattante, rien que de très normal. Mais je n'ai pas supporté le langage que se croit parfois obligée d'employer Gavalda. Et là, je suis allée dénicher la version 2001 où l'on trouve, entre autres, : "Sitôt la guitoune du péage franchie, j'ai enfoncé ma cassette dans l'autoradio", devenu en 2009, "Sitôt la guitoune du péage franchie, j'ai enquillé la zique dans l'autoradio."Et je vous passe l'écriture phonétique de lexique à la mode qui a le don de m'énerver. Franchement, je n'en vois pas l'utilité. Les bornes, style "mille bornes" imprimées pour séparer les étapes du récit ne m'ont pas paru absolument indispensables non plus.anna gavalda
Par contre, ne pas louper , comme dans les génériques de films, la dernière intervention d'un personnage, après la fin du roman, clin d'oeil facétieux qui m'a permis de relativiser mes agacements précédents. Quelques péchés véniels donc qui n'empêcheront pas les lecteurs moins pointilleux que moi de se régaler.

Existe aussi en livre-audio (non testé)

Dans son chat avec des internautes, Anna Gavalda nous apprend même que dans des chapitres supplémentaires, elle nous donne des nouvelles des personnages. Affaire à suivre...

23/04/2012

Forêt noire

Tout au long de Forêt noire  Valérie Mréjen égrene des récits de morts violentes, soudaines, accidentelles, des suicides inattendus. Sans transition aucune, ces récits plutôt courts génèrent tout à la fois, malaise, fascination et réflexions.
Malaise car l'auteure choisit un thème bien évidemment dérangeant ; fascination car l'accumulation de ces morts n'engendre jamais de voyeurisme, tel est le mystère du style de Valérie Mréjen qui sait trouver la juste distance et le ton juste pour évoquer la mort.41zTKuOcOZL._SL500_AA300_.jpg
La mort surgit là où on ne l'attendait pas et les fantômes ne nous quittent jamais vraiment,il faut s'en accommoder. Ainsi une balade avec un spectre prend-il une allure tout à fait banale et engendre une réflexion sur les nouveautés que la morte n'avait pu connaître et la manière dont elle pourrait les appréhender.
On croise  aussi certains personnages plusieurs fois, et en particulier un couple mère-fille, relation complexe et très finement analysée, respiration entre deux récits où nous pourrons aussi identifier certaines personnalités publiques jamais nommément citées.
Une écriture sur le fil du rasoir, d'une trompeuse simplicité , qui réussit le pari improbable de nous faire relire ce livre à peine l'avons-nous terminé.

Juste un extrait pour vous donner envie:

"        Dans l'entourage de son nouvel ami, on se demande comment se rendre utile, quels mots consolants prononcer , quelle dérisoire brindille ajouter au barrage qu'on aimerait bien contribuer à bâtir en vain pourtant contre un raz de marée de tristesse dont la puissance nous échappe forcément: rien d'autre à faire sans doute que d'envoyer sporadiquement des signes de présence en espérant que cette douleur finisse avec le temps par s'estomper et lui laisse un peu de répit."

Forêt noire, Valérie Mréjen, P.O.L 2012, 124 pages qui vont forcément se faufler sur l'étagère des indispensables. Mais écoutez plutôt l'auteure :