Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

01/10/2013

Moment d'un couple

"Dire je t'aime, pense Juliette, c'est s'inscrire dans la durée, pas comme dire j'ai envie de toi ou je suis bien avec toi."

Moment d'un couple est un roman troublant à plus d'un titre. D'abord par son thème: un homme trompe sa femme et la maîtresse, une femme politique en vue, commence à les harceler, lui et son épouse. Le tout est envisagé du point de vue de l'épouse trompée qui bien évidemment souffre, croit frôler la folie mais garde néanmoins la tête froide et se bat , pied à pied pour garder son homme. Elle analyse, se découvre stratège et surtout prête à défendre ses enfants comme une tigresse.nelly alard
 Dérangeant ensuite, parce qu'évidemment on se dit que c'est une histoire inspirée de faits réels et qu'enfin la mine d'infos qu'est internet nous permet même de mettre un nom -connu- sur la maîtresse en question qui, de surcroît avait publié un roman présentant son point de vue sept ans auparavant. Ce dernier aspect a quelques peu parasité ma lecture mains, néanmoins, je n'ai pas lâché ce roman qui fouaille, appuie là où ça fait mal et présente une vison sans concessions du couple. à quand le roman du mari ?!

 

Un grand grand merci à Cuné !

L'avis de Clara (qui n'a pas aimé les cinq dernières pages. Perso, je les trouve extrêmement logiques...) qui vous enverra vers plein d’autres billets.

29/09/2013

la petite Borde

"Nous traînions notre enfance au milieu des adultes. Sans bien tout comprendre. un somnambulisme, dans les paroles et l'épaisse couche de fumée des cigarettes."

Par petites touches, en tableaux précis et intenses, Emmanuelle Guattari essaie d'être au plus près d'une enfance qui s'est déroulée dans les années soixante à La Borde, établissement psychiatrique hors normes, où exerçait son père, psychanalyste et philosophe.emmanuelle guattariCeux qui chercheront ici un témoignage sur l'expérience de cette clinique resteront sans doute sur leur faim, tant il est vrai que pour les enfants la notion de normalité ne peut se forger qu'en se confrontant avec d'autres expériences. Ici, l'auteure a choisi de  se situer à hauteur d'enfant et restitue avec une grande économie de moyens, un univers où l'enfance cesse quand les jambes restent coincées entre le banc et la table.
Un texte fragmenté qui évoquera plein de souvenirs à ceux qui ont grandi dans les années 60 et brosse en pointillés le portrait d'une famille pleine de fantaisie et de respect des autres. Le genre de livre qu'on chérit ou qui nous laisse sur le bas-côté. Il m'a fait du bien.

23/09/2013

Les mutilés

"L'existence ne serait qu'une succession de pertes de pouvoirs depuis la toute puissance de l'enfance."

Le jour où son mari  tente de la tuer, Lucyle , qui en apparence possédait tout, richesse, amour, position sociale, commence à vivre. Elle fait alors voler en éclats les images factices de son couple idéal, de sa famille qui a tout fait pour gommer un passé marqué par la douleur extrême et s'insurge contre une société dans laquelle pullulent Les mutilés.marianne vic
Les mutilés, ce sont ceux qui, comme sa sœur, vivent dans leur corps des amputations, mais aussi, plus nombreux, tous ceux qui se laissent broyer par les habitudes, les fausses valeurs, la violence d'une société , la rage de posséder et font fi de leurs émotions .
L'héroïne remonte alors le cours de son histoire familiale pour tenter de s'alléger  du "fardeau  des disparus et des moments immarcescibles auxquels ils sont reliés." et renouer avec la grâce et la lumière.
Diatribe d'une extrême violence contre notre société des apparences et de l'argent ,  analyse féroce du jeu social, le premier roman de Marianne Vic sacrifie un peu la progression de son récit et la densité de ses personnages. En revanche, la beauté et la richesse de la langue, la pertinence de sa réflexion font qu'on ne peut lâcher ce roman (sauf pour consulter un dico !) tout constellé de marque-pages ! Une découverte coup de cœur -coup de poing !

Juste un passage parmi tant d'autres, pour vous donner envie:

"    La pléonexie* engendre deux empêchements majeurs: celui d'aimer, celui de mourir.
      Plus on possède, plus on idolâtre la prospérité, plus on se sédentarise, cherchant désespérément à s'enraciner contre l'instabilité de toutes choses, à aller contre le mouvement inexorable de l'univers.
      Pauvres êtres , mus seulement par le désir d'avoir plus ou paraître mieux que les autres, toujours plus, toujours mieux...Des nains possédants qui croient ainsi conjurer l'absurdité de l'existence. Êtres pornographiques aux trajectoires sans horizon, en état de frustration permanentes, qui ne savent plus mourir ou aimer.

   Y-a-t-il encore des êtres dont la préoccupation serait ailleurs ? "....

*La pléonexie (du grec πλεονεξία, pleonexia) est le désir d'avoir plus que les autres en toutes choses.


16/09/2013

Faillir être flingué

"Il lui semblait parfois marcher pour dénouer ou atteindre en lui une place vide et douce, éloignée des courants, un apaisement."

Qu'elle s'attaque à bras le corps au roman épique médiéval (Bastard batlle) *ou au récit de science fiction Le dernier monde)* , Céline Minard a le chic pour s'emparer d'un genre et se l’approprier. Dans Faillir être flingué, c'est sur le western qu'elle a jeté son dévolu.
J'en vois d'ici certain(e)s faire la grimace, mais oubliez tous vos préjugés sur ce genre et précipitez-vous sur Faillir être flingué , un roman qu'on ne peut lâcher tant il est à la fois dense, fabuleusement écrit et fertile en rebondissements !céline minard,western
La romancière y alterne scènes contemplatives, scènes de genres (l'arrivée en chariot, l'attaque de la diligence , le héros solitaire dans la ville en butte à ses ennemis...) pour mieux les dynamiter et leur insuffler fraîcheur et énergie. Elle y observe aussi la sédentarisation de ses personnages ainsi que "la propriété, sa nature et sa circulation problématique". En effet, au gré des aventures, les objets passent de mains en mains, de même qu'amitiés et inimitiés évoluent au fil du temps. Nous sommes en territoire connu, du moins le croyons nous, mais Céline Minard se plaît à nous mener où bon lui semble et c'est tant mieux ! Purement jubilatoire !....,

*lus mais non chroniqués.

 

Du même auteure, clic !

10/09/2013

La transcendante

patricia reznikov"Au final, une leçon accélérée de vie. Et de mort."

Un seul livre a échappé à l'incendie de l'appartement de Pauline: La lettre écarlate de Nathaniel Hawthorne. Pour tenter de renaître, la jeune femme part à Boston, en Nouvelle- Angleterre, sur les traces de cet auteur.
Là elle rencontrera des êtres étonnants qui s’accommodent de l'existence de bien étranges façons ,mais sauront la remettre sur le chemin de la vie, souvent par le biais de la littérature.
Elle est tout sauf sympathique, Pauline, elle est rugueuse, écorchée, lucide, et part au quart de tour, même avec ceux qui voudraient l'aider.Mais pourtant, on la suit sans faiblir dans cette quête éperdue d'elle-même. On glane au passage plein d'infos, jamais indigestes sur Hawthorne, Melville Thoreau , ainsi que plein d'indications sur des endroits parisiens magiques.
Un roman qui échappe de peu au coup de cœur mais qui est un excellent moment de lecture.

La transcendante, Patricia Reznikov, Albin Michel 2013, 276 pages piquetées de marque-pages...,

01/09/2013

Que nos vies aient l'air d'un film parfait...en poche

"Des mots qui forcent le passage, qui entrent dans la tête pour t'obliger à faire ce qu'ils disent..."

Un petit frère, une grande soeur, victimes collatérales du divorce de leurs parents. La mère , peu équilibrée et très manipulatrice, le père , aimant mais dépassé par les événements, la soeur, qui bien malgré elle va causer l'éloignement de la fratrie, prennent tour à tour la parole. Chacun présente sa version des faits, seul le cadet se tait. Pendant de longues années. La dernière partie du roman , sous forme de lettre viendra remettre en perspective cette séparation.carole fives
Très peu de pages, 119, mais une émotion à fleur de peau et une écriture qui tord le coeur du lecteur. Un livre  avec en toile de fond les années 80 et en bande sonore les ritournelles pop sucrées et légèrement désenchantées de cette époque. Un de mes coups de cœur de la rentrée littéraire 2012 !

30/08/2013

Banquises...en poche

"...une terre qui s'efface, une femme qui disparaît."

 Sarah en 1982 a quitté la France pour le Groenland. Elle n'est jamais revenue. Sa soeur Lisa part, vingt-sept ans plus tard , sur les traces de celle dont l'absence , pendant des années, a influé sur sa vie et celle de leurs parents.41lx09bdeYL._AA160_.jpg
"Les lieux ne retiennent rien, il dit. Lisa n'a pas envie de le croire." Et pourtant cette banquise qui disparaît , sous l'effet du réchauffement climatique et que l'auteure décrit longuement ,est bien le symbole de cette quête vouée à l'échec mais pourtant nécessaire pour clore une histoire qui n'en finit pas de ne pas finir. En effet les parents , surtout la mère ne peuvent se résoudre à admettre la disparition de leur fille aînée.
Valentine Goby peint avec acuité les révélations qui se fraient un chemin dans les paroles échappées, les souhaits impossibles à réaliser, la vie qui continue malgré tout, chacun adoptant des stratégies différentes pour supporter cette situation , peignant "les minces frontières [qui] commencent à séparer le père, la mère, Lisa. De fines cloisons par lesquelles ils se préservent les uns des autres, de la contamination, délimitant des territoires distincts et des espaces ténus pour se frôler."
Le père, peut être encore plus que la mère m'a infiniment touchée, dans sa manière pudique , poétique et pragmatique de trouver une issue de secours. Une écriture sur le fil du rasoir, un roman qui appuie là où ça fait mal.Une douleur exquise.

29/08/2013

Chambre 2

"J'assiste à la naissance d'une mère. C'est presque plus émouvant que la naissance d'un enfant."

Quand on passe dans le couloir d'un hôpital, on entr'aperçoit des fragments de vie, et l'on se sent un peu gêné, un peu voyeur. Rien de tel dans le roman de Julie Bonnie où Béatrice nous fait partager son quotidien, parfois émouvant, parfois douloureux, dans une maternité. julie bonnie,maternités
Mais plus qu'une galerie de portraits de mères en devenir, c'est aussi le récit de'une tentative de normalisation d'une femme, la narratrice qui, quittant le monde du spectacle où elle mettait en scène son corps , affronte une réalité où la nudité, si elle est prise maintenant au sens figuré, est beaucoup plus cruelle : "Douze heures dans la chair humaine, nue dans la neige, nue dans le feu, nue quand il est vital de se couvrir."
Les souvenirs de son passé artistique ne sont en rien enjolivés mais s'opposent néanmoins à un quotidien où la violence et le silence s'imposent aux corps des femmes. Une écriture puissante et charnelle. Un grand coup de coeur !....

Chambre 2, Julie Bonnie, Belfond 2013, 187 pages piquetées de marque-pages !

Lu dans le cadre de l'opération On vous lit tout chez Libfly ! Merci à Libfly, au Furet du Nord et à l'éditeur !julie bonnie,maternités

Le billet de Clara, elle aussi conquise !

26/08/2013

La grâce des brigands

"Cette dernière passion, ça ne faisait pas un pli, l'entraînerait loin de Lapérouse, puisque les livres servent, comme on le sait, à s'émanciper des familles asphyxiantes."

 Maria Christina Väätonen, qui s'est auto-attribué le titre de vilaine sœur, a quitté son grand Nord et sa famille étouffante dès seize ans pour s'installer à Santa Monica . Quand le roman commence,  le 12 juin 1989, elle reçoit un coup de fil de sa mère qui va la faire revenir sur son passé et sur la manière dont, dans les années 70, elle est devenue une très jeune écrivaine à succès.véronique ovaldé
Quel bonheur que ce livre ! Un je ne sais quoi m'avait toujours retenue dans mon appréciation des précédents romans de Véronique Ovaldé mais ici toutes les restrictions ont été balayées !
Le premier chapitre qui explique l'inclination de l’héroïne pour ce quartier de Los Angeles où elle habite est une pure merveille ! Nous sommes avec elle en train de siroter des sangrias, de sentir le vent frais qui vient des jardins... et ce sera comme cela tout le long du texte car Ovaldé a un don visuel certain. Cet éloge sensuel fonctionne d'ailleurs en contrepoint de la liste sèche et  pleine de rigueur de "La vulgarité selon Marguerite Richaumont", la mère de l'héroïne. Les titres des chapitres , "L'encombrant désespoir des fillettes", " Mettre le bras entier dans un trou d'alligator", le style, plein de cette Grâce des brigands vantée dans le texte, font de  ce roman d'émancipation féminine une pure merveille, jamais pesante, où les épreuves sont racontées avec justesse, sans auto-apitoiement et avec toujours une pointe d'humour. Une écrivaine qui a atteint une aisance dans l'écriture que nombre de ses confrères lui envieront !

Un grand coup de cœur, constellé de marque-pages, et qui file d'un seul coup d'un seul sur l'étagère des indispensables !

La grâce des brigands, Véronique Ovaldé , l'olivier 2013, 284 pages de bonheur !

 

Ps: ne pas lire la 4 ème de couv' qui en dit beaucoup trop !

23/08/2013

Lucia Antonia funambule

"Le fil ou la marée montante qui envahissait les herbiers : lequel me portait ? "

Après le décès de sa jumelle ,funambule comme elle, Lucia Antonia revient dans un carnet, sous formes de (très) courts chapitres,  sur son cheminement, depuis ses premiers pas sur le fil qui la berçait déjà enfant , jusqu'à l'époque actuelle.daniel morvan
Ayant quitté le cirque familial, elle va s'installer entre sable et mer sur une presqu'île où elle va faire la connaissance de personnes aussi dissemblables que poétiques.
Comment rendre compte de la beauté, de la délicatesse de ce texte lumineux, fragile et envoûtant ? Même s'il est ancré dans le réel, par quelques notations permettant de le situer dans l'espace et dans le temps, ce roman est intemporel et acquiert presque la dimension de conte. Daniel Morvan a réussi à bâtir apparemment sur presque rien un univers où le lecteur entre dans une nouvelle dimension. Un très joli livre qui plaira aux amoureux de la poésie !

Lucia Antonia, funambule, Daniel Morvan, Zulma 2013, 129 pages cristallines.