24/03/2020
Trois petits tours et puis reviennent
"Les hommes s'écroulaient. Les femmes faisaient front."
Jackson Brodie s'est installé dans un coin tranquille, en bord de mer dans le Yorkshire, se contentant de traquer les amours adultères la plupart du temps. Mais comme il en convient lui-même"...il n'avait jamais eu besoin de chercher les ennuis, comme Julia le lui rappelait souvent, les ennuis le trouvaient toujours."
Cet ancien militaire, ancien policier, toujours amoureux de son ex-femme Julia va donc se trouver mêlé simultanément à plusieurs intrigues que Kate Atkinson maîtrise parfaitement, sans jamais perdre son lecteur en route, ni le laisser frustré.
On retrouve avec plaisir des personnages rencontrés des années auparavant dans le roman A quand les bonnes nouvelles ? et c'est comme avoir des nouvelles d'amis perdus de vue mais qu'on n'a pourtant pas oubliés. Rassurez vous, ce roman peut se lire de manière totalement indépendante des autres aventures de Jackson Brodie.
Si les intrigues mettent du temps à se mettre en place et qu'on guette avec avidité les apparitions du héros qui, même malmené par les femmes, continue à toujours les défendre (et dans ce roman, elles en ont vraiment bien besoin), quand le récit trouve sa vitesse de croisière, on ne peut plus lâcher ce roman. Des personnages fouillés, des pointes d'humour, du suspense jusqu'à la dernière minute, que demander de plus ?
Traduit de l’anglais par Sophie Aslanides, JC Lattès 2020
'
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : katr atkinson
23/03/2020
#Modifié #NetGalleyFrance
"J'ai donc fait ce que toute femme avec un tant soit peu d'instinct maternel aurait fait en pareille circonstance: j'ai moi-même appelé les flics."
Martha, détective très privée, la quarantaine, faisant profession de détester les chiens de son compagnon, Allan, et de harceler la fille de ce dernier , Allison ("-Je ne la harcèle pas , je la soumets gentiment à la question. Libre à toi d'appeler des ...pressions, des attentions réitérées, des assauts verbaux voire...des agressions; et puis merde Allan !") qui voudrait s’incruster chez eux, n'est en rien une sentimentale.
Misanthrope, rugueuse, elle porte un jugement acéré sur la famille en général et sur la sienne en particulier.
Son chemin va une nuit croiser un adolescent particulier, fasciné par les chasse-neige et très doué pour déblayer lui-même la neige des allées, ce qui nous vaudra une scène désopilante de "duel" dans la neige !
Modifié, c'est ainsi qu'il veut qu'on l'appelle, va peu à peu s'incruster dans la vie de Martha et d'Allan et révéler les failles de la narratrice. Au récit de cette transformation se mêle aussi une enquête confiée à Martha: innocenter son jeune cousin qui fréquente le même lycée que Modifié et est accusé du meurtre de don entraîneur de soccer.
Les bons sentiments ne sont pas de mise ici et c'est avec beaucoup de subtilité et un humour ravageur que l'auteur mène son récit tambour battant, ne ménageant ni les péripéties ni les vacheries hilarantes : "Mon compagnon boxait dans la catégorie"meilleur voisin", Modifié dans la catégorie "rien à foutre"."
Un récit plein d'humour et de chaleur humaine à ne manquer sous aucun prétexte !
Grasset 2020
06:00 Publié dans l'étagère des indispensables, Les livres qui font du bien, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : sébastien l. chauzu
21/03/2020
Sous les branches de l'Udala...en poche
Fin des années 60, le Biafra et le Nigeria se déchirent dans une guerre interethnique. La jeune Ijeoma envoyée loin de sa mère (qui se remet du deuil de son mari ) tombe amoureuse d'Amina.
Amours doublement interdites du fait de l'origine de ces très jeunes filles, dont les chemins se sépareront très vite.
Ijeoma devra faire face au poids de la religion (sa mère veut la "soigner" à coups de passages de la Bible), de la société ,mais finira par devoir emprunter des chemins de traverse pour pouvoir vivre pleinement.
Roman très didactique, ce texte n'a suscité chez moi aucune empathie, par ses longueurs et par sa volonté trop affirmée de dénoncer une situation bien évidemment inadmissible. Dommage.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : chinelo okparanta
20/03/2020
Je suis le genre de fille...en poche
"On en était à "investir". Le mot me coule des mains, c'est une suée, c'est impropre, j'en conclus que c'est sale."
Scandés par l'anaphore qui donne son titre au roman, les chapitres brossent le portrait impressionniste, drôle, souvent, agaçant parfois d'une femme divorcée, qui travaille et dont la fille est adolescente.
Trop accommodante, pour les uns, trop passive pour les autres, elle n'a pas une bonne image d'elle-même et peine à correspondre aux diktats de la société.
Elle rejoue la nuit les dialogues qu'elle aurait pu tenir "mais [son]imagination de perdante les fait tourner à [son] désavantage." Elle nous ressemble souvent et cet exercice de quasi autoflagellation pourrait tourner à vide si les derniers chapitres ne jetaient une ombre émouvante sur l'ensemble. Un roman qui me réconcilie avec l’œuvre de Nathalie Kuperman.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans français | Lien permanent | Commentaires (0)
19/03/2020
#Lebosquet #NetGalleyFrance
"Tout le long des routes antiques, les morts invitaient les vivants à ne pas s'attarder, aussi longtemps qu'ils pouvaient encore parcourir du chemin."
Ayant beaucoup aimé le précédent roman d'Esther Kinsky, c'est avec enthousiasme que j'ai entamé la lecture de ce roman, composé de trois voyages en Italie à des époques différentes de l'existence de la narratrice, tous trois marqués par le deuil et la solitude, mais aussi l'amour.
Si la langue d’Esther Kinsky est toujours aussi précise et élégante dans la description de la nature, des paysages, des saynètes racontées, la magie n'a cette fois pas opéré et je suis restée sur le bord du chemin.
Grasset 2020
De la même autrice: clic.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : esther kinsky
18/03/2020
#Femmesinvisibles #NetGalleyFrance
"Le consensus est net: les femmes sont anormales, atypiques, tout simplement ratées. Pourquoi ne peuvent-elles pas ressembler un peu plus aux hommes ? "
L'humanité vit dans un monde conçu par et pour les hommes. Tant pis pour les femmes dont le poids, la taille, les besoins spécifiques ne sont pris en compte ni par les architectes, ni par les scientifiques, ni par les techniciens et encore moins par les politiciens.
Tant pis si les ceintures de sécurité ne sont pas prévues pour nous( et encore moins pour les femmes enceintes ) et si cela augmente le risque d'être blessées dans un accident car notre masse graisseuse et notre masse musculaire ne sont pas réparties comme celles d 'un homme de 70kg. Tant pis si les médicaments, majoritairement testés sur des hommes sont moins efficaces sur nous et tant pis encore si nos problèmes de syndrome prémenstruels ne donnent pas lieu à des recherches spécifiques, faute de moyens financiers mis en œuvre. Une des raisons de ce phénomène ? La simplicité recherchée. mais "La simplicité coûte moins cher. Mais la simplicité ne reflète pas la réalité."
La liste de ces dysfonctionnements est longue et solidement étayée par de nombreuses études citées par l'autrice de cet essai qui souligne l'absence de données genrées ou leur non-exploitation. Quelques petits progrès permettent de garder l'espoir que cette situation rageante évolue car elle permettrait non seulement de faciliter la vie des femmes , mais entraînerait aussi des économies dont chacun pourrait bénéficier.
Éditions First 2020
06:00 Publié dans Essai, l'étagère des indispensables | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : caroline criado perez
17/03/2020
#Dehorslatempête #NetGalleyFrance
"Comme après une jachère amoureuse, je me sentais à nouveau disponible pour une rencontre avec un livre, un genre ou un écrivain. Mais c'était décidé, jamais plus je ne lirais d'histoires. C'est ainsi que la poésie est devenue ma méthadone."
Nombreuses sont les métaphores marines qui irriguent ce livre appartenant à la collection Le Courage. Normal, l'un des romans préférés de Clémentine Mélois est Moby Dick.
Dans son panthéon personnel figurent aussi Simenon et son héros Maigret dont elle analyse avec finesse la consommation alcoolique, qui l'amènera à consommer un alcool démodé, car lire entraîne bien des expériences sensuelles.
Au gré des ses humeurs, de ses souvenirs , de ses digressions, nous partageons son amour tant pour les livres que pour la lecture.
Les livres addicts ne pourront que craquer pour ce livre où beaucoup se reconnaîtront, en particulier dans une liste où elle confesse certaines habitudes liées aux livres...
Grasset 2020.
De la même autrice: clic
06:00 Publié dans Essai, l'amour des mots | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : clémentine mélois
16/03/2020
Dans la lande immobile
"Je me laissais aller à penser que d'une certaine manière , les connaissances de nos ancêtres coulaient dans nos veines, qu'avec le temps, j'oublierais quelles puissance s’étaient opposées dans la guerre de Succession d' Espagne et comment résoudre des systèmes d'équations, mais me rappellerais comment filer la laine et moudre du grain, lire dans le vol des oiseaux et la pousse des plantes pour savoir ce qui se passait au-delà de ma vue. Les talents de mon père: inutiles à part dans un but archéologique."
Coincé derrière le volant de son bus, Bill, fervent nationaliste du nord de l'Angleterre, n'a qu’une passion : l’archéologie.
Véritable tyran domestique, frustré de ne pouvoir exploiter son "expertise autodidacte", il impose à sa femme et sa fille, Silvie, un séjour où, en compagnie d'un professeur d'université et d’étudiants, ils vivront une vie au plus près de celle des hommes et femmes de l'âge de fer.
Mélange de survivalisme et de sexisme, le séjour va bientôt prendre une tournure dramatique quand les hommes se mettront en tête de rejouer un sacrifice humain...
Racontée du point de vue de Silvie, adolescente intelligente et observatrice, le récit instille par petites touches une violence sourde, contrebalancée par l'émancipation prônée par la seule étudiante du groupe, Molly, qui propose à Silvie d'autres modèles familiaux. Différences sociales, emprise sont aussi en jeu dans ce roman bref et prenant où la nature joue aussi un rôle important. Une magnifique découverte.
Traduit de l’anglais par Laure Manceau, Actes Sud 2020, 138 pages qu’on ne lâche pas.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : sarah moss
13/03/2020
En attendant le jour...en poche
Bosch , son enquêteur fétiche étant parti à la retraite, Michael Connelly entame ici une nouvelle série avec une héroïne plus jeune, Renée Ballard, inspectrice affectée au quart de nuit du commissariat.
Situation frustrante car ne pouvant déboucher en principe sur le suivi, et donc la résolution d'aucune enquête. Mais on peut compter sur l'obstination et la volonté de s'affranchir du poids de la hiérarchie des héros de Connelly pour qu'évidemment cet obstacle soit contourné, fût ce au péril de sa santé.
Nous voici donc lancés sur la piste d'un agresseur de prostitué trans et sur celle de l 'assassin d'une jeune serveuse dans un ba, victime collatérale d'un règlement de compte dans un bar.
Dûment documenté, le roman démarre plutôt lentement mais ne nous épargne pas quelques scènes propres à susciter des sueurs froides, scènes où il ne ménage pas son héroïne. Une héroïne attachante,et pas seulement parce qu'elle a adopté un chien des rues.
Michael Connelly ne retrouve pas ici le niveau atteint avec ce qui reste pour moi son meilleur texte, à savoir le Poète, mais en excellent faiseur, remplit sa mission : nous divertir avec talent et c'est avec plaisir que je lirai le prochain tome de cette série.
06:04 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : michael connelly
12/03/2020
#Ungarçonsurlepasdelaporte #NetGalleyFrance
"Je comptais sur l'effet voiture. Tu sais, quand les enfants qui refusent de parler à leurs parents s'épanchent dès qu'ils sont dans un véhicule en mouvement. Comme si ce qu'on disait dans une voiture ne comptait pas."
Micah Mortimer, crack en informatique, s'est organisée une petite vie routinière entre son emploi de factotum dans l'immeuble où il réside et sa petite entreprise de dépannage à domicile. Rien de bien glorieux.
Mais s'il est doué pour tout ce qui concerne les ordinateurs, il l'est beaucoup moins en matière de relations sociales. Aussi quand un jeune homme se présente à sa porte, persuadé que Micah est son père biologique, le quadragénaire ne saute pas de joie.
Arrivés là on craint le pire, le roman qui part sur des rails bien huilés, mais Anne Tyler, en observatrice bienveillante et expérimentée de la famille, sait dans ce court roman (208 pages) éviter les écueils d'un roman trop prévisible, tout en préservant le plaisir de son lecteur.
Une lecture confortable.
Phébus 2020, traduit de l’anglais (E-U) par
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : anne tyler