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17/02/2019

Personne n'a peur des gens qui sourient

"Qui ne s'est jamais faite belle pour déjeuner avec une amie, ou même pour elle-même, afin de ne pas naufrager ? "

ça commence un peu comme dans le court-métrage de Xavier Legrand avec Léa Drucker "Avant que de tout perdre" : Gloria embarque précipitamment ses enfants (ici deux filles, dont une ado en pleine rébellion) et se réfugie dans sa maison d'enfance en Alsace, près d'un lac.véronique ovaldé
D'emblée, la tension est là. D'emblée, le lecteur échafaude des hypothèses que le récit se chargera de réfuter. De la même manière, le personnage central de Gloria gagnera en épaisseur et en amoralité jubilatoire.
Véronique Ovaldé signe ici un roman dont l'écriture est piquetée de remarques souvent très justes, un roman dense sous une apparence de légèreté, dont l'épilogue est un peu précipité car on serait bien resté encore un peu (beaucoup) en compagnie de Gloria et ses filles.
Un roman qui fait oublier l'échec de ma lecture précédente :Soyez imprudents les enfants, que je n'avais pas réussi à finir.

Merci à Clara !

Le billet de Cuné.

15/02/2019

La Meute

"- Ce n'est pas parce que j'ai une vision plus distendue des rapports entre les êtres humains que je ne suis pas une bonne amie."

Meute de louves ou de hyènes ? En tout cas six meufs que rien ne devrait relier et qui, par delà les années, les emmerdes, gardent toujours le cap de leur amitié.
Cent pour cent parisiennes (ou presque), plus acerbes que tendres, leur vie nous est donnée façon puzzle chronologique via la narratrice, Olivia.sarah koskievic
Si dans le premier tiers du roman, j'ai été séduite par l'énergie brute qui se dégage du texte, tout sauf joli, je me suis vite lassée de cette mécanique qui tourne trop souvent à vide (on se fiche un peu, beaucoup de leurs ennuis) et se termine de manière abrupte, mais sans réelle émotion. Oui, voilà bien le problème, je suis restée totalement extérieure à ce roman.


Plon 2019.

 

12/02/2019

Ce matin, maman a été téléchargée

Nous sommes en 2048. Demain, donc. Nous portons des lunettes qui "enregistrent les images et les sons, mais pas notre ressenti, encore moins notre souvenir. En cela, elles mentent. Elles ne sont qu'un reflet, elles ne stockent qu'une illusion" Telle est du moins l'opinion du narrateur , Raphaël, qui a bien d'autre soucis en tête que de convaincre sa nouvelle petite amie des défauts de ce qu'elle estime plus fiable que sa mémoire.
Jugez un peu : sa mère est morte, comme l'annoncent le titre et la première phrase du roman, calque de L'étranger. Mais, en fait, de manière quelque peu illégale, l'esprit de cette femme a été transféré dans un andréide, ce qui lui permettre de continuer à se montrer extrêmement intrusive dans la vie sentimentale de son fils. Elle peut donc continuer en toute impunité à lui pourrir la vie, utilisant toutes les ressources d'un monde où les humains laissent de multiples traces informatiques.gabriel naëj
Farci de termes techniques, ce premier roman , écrit par un professeur à la faculté des sciences de Sorbonne Université et président du comité d’éthique du CNRS, hésite trop entre l'anticipation à visée dénonciatrice, le roman de procès et l'ébauche d'une trame sentimentale. Les personnages sont tracés à gros traits et la société dans laquelle ils évoluent trop peu ébauchée pour être  totalement convaincante. Quant aux tentatives d'humour , elles tombent souvent à plat.

Merci à Buchet-Chastel et à Babelio pour cette expérience.

07/02/2019

#QuiATuéLhommehomard #NetGalleyFrance

"On a ouvert avec un meurtre bien sordide, un homme-homard découpé en morceaux, c'est original, c'est visuel, c'est gourmand. A mon avis, on a marqué des points."

Enfin un peu d'animation à Margoujols, petit village reculé de Lozère ! Un rescapé d'un cirque itinérant composé de monstres de foire et installé depuis 70 ans dans ce coin paumé a été assassiné.
Voilà qui réjouit fortement Lucie, jeune fille lourdement handicapée mais dotée d'un fauteuil surpuissant, tout autant que son cerveau  qui  s'instaure narratrice de ce récit et assistante des forces de l'ordre. Attention aux yeux et aux oreilles car  si seul le majeur droit de Lucie bouge c'est autant pour faire des doigts d'honneur à la compassion que pour communiquer par un ordinateur, à l'instar de S Hawking.jm erre
Ouvrir un roman de J.M Erre c'est embarquer dans un récit à cent à l’heure où on prend juste le temps de respirer après avoir hoqueté de rire entre deux remarques vachardes , teintées d'humour noir ( fan du politiquement correct s'abstenir). ça dégomme à tout va sur les handicapés, les sacro- saintes règles du polar, les critiques littéraires, les réseaux sociaux et j'en passe, sans pour autant perdre de vue la résolution de l'énigme. De quoi muscler nos zygomatiques avec cet excellent cru !

 

Buchet-Chastel 2019

05/02/2019

Alto Braco

"On ne voulait pas vivre à Lacalm mais on voulait y mourir."

Deux sœurs dures au travail , Douce et Granita, ont élevé leur petite fille, maintenant trentenaire, Brune, tout en tenant de main de maître, leur café parisien.
Originaires de l'Aubrac, ces trois femmes sont très fortement marquées par ce territoire si particulier, même si la plus jeune s'en défend. La mort de Douce et son enterrement dans le pays de sa jeunesse vont faire ressurgir tous les secrets du passé.vanessa bamberger
Sur un schéma classique de retour au pays, Vanessa Bamberger multiplie les révélations en cascade (pas moins de trois révélations), tout en décrivant à merveille les paysages de cette région âpre et sauvage où les paysans et leurs bêtes ont bien du mal à survivre.
Si l'auteure s'est visiblement bien documentée (en particulier sur les vaches) et réussit à introduire de manière fluide ces informations dans le récit, ce dernier manque en revanche de densité et connaît quelques baisses de régime.
Un roman que j'ai néanmoins pris plaisir à lire.

 

Liana Lévi 2019.

L'avis d'Hélène

31/01/2019

Pars, s'il le faut

"(J'aime bien m'autoapitoyer ,parfois. Si je ne le fais pas, qui va le faire ? ) "

Cette fois, elle a quitté Paris, qu'elle aime tant, et s'est installée à Sète. Mais ce n'est jamais facile de "tout quitter". Pas facile de se recréer un lieu à soi, d'apprivoiser une nouvelle ville,  surtout quand on a pris la décision saugrenue de ne plus avoir de chien.marie-ange guillaume
Parce que les chiens (et les chats aussi) , tiennent une place important dans la vie de Marie-Ange et qu'elle en parle toujours avec beaucoup de tendresse et d’humour (la page 149 où elle croque tour à tour chien et chat est un pur régal !) Sa marque de fabrique l'humour et cela lui permet de tenir en équilibre, elle qui se sent si peu équipée pour la vie, et ce depuis l'enfance.
Alors, c'est l'occasion de revenir sur certains épisodes de sa vie, parfois joyeux avec les copains de "Pilote", parfois douloureux ( cette rédactrice en chef d'un magazine féminin qui lui tient un double discours pour mieux la déstabiliser et la virer) avec "Elle" qui appartient au passé et "Je"qui tente de se bricoler une nouvelle vie, vaille que vaille.
Ouvrir un roman de Marie-Ange Guillaume, c'est comme avoir des nouvelles d'une amie chère, qu'on a un peu perdue de vue, mais avec qui la conversation reprend aussitôt, de manière fluide, parce qu'avec ses failles, ses remarques si pertinentes, sa franchise souvent désarmante: "J'ai toujours eu une belle nature de toxicomane. L'addiction est mon hobby.", elle possède une manière bien à elle de manier les mots et on en redemande. *

Merci à l'éditeur Le Passage et à Babelio.

*Du coup, je me suis commandé un des ses livres et un autre qu'elle cite

 

30/01/2019

Les rêveurs...en poche

"...la même absence de liberté, et surtout d'intérêt de leur famille à l'égard de de ce qu'ils étaient vraiment."

Une fille-mère et un bisexuel comme parents , même dans les années 70, voilà qui n'était pas courant. Famille hors-normes donc pour des enfants qui ne rêvent que de normalité, mais qui, bon an , mal an vont devoir s'accommoder d'une drôle de famille où l'amour et l'art sont très présents.
La douleur, la dépression, deux tentatives de suicide mais la vie qui malgré tout reprend le dessus et une écriture très touchante font de ce premier roman, à tendance autobiographique, une entrée en littérature plutôt réussie.isabelle carré
Isabelle  Carré,dont le sourire lumineux joue beaucoup dans le formidable capital sympathie dont elle bénéficie, révèle à demi-mots ses failles mais montre aussi que les enfants d'homosexuels ne vont ni moins bien ni mieux que ceux d'hétéros. Un très bon moment de lecture.

24/01/2019

#Belle-Fille #NetGalleyFrance

"Je suis orpheline. Je le suis peut-être d'autant plus que c'est à l'instant où je te perds que je comprends que tu avais été un père."

Son nom ne figure jamais dans le texte de cette lettre jamais envoyée (c'est le principe de cette collection), mais la photographie du bandeau et les indices disséminés identifient clairement celui dont l'autrice est La belle-fille : Jean Carmet.41vBXrnRCAL._SX195_.jpg
Comment une adolescente, puis une femme arrive-t-elle à louvoyer entre un père génétique épisodiquement présent (vu son métier et son parcours) et l'amant de sa mère qu 'elle rejette d'emblée dans un premier temps mais avec lequel seront tissés des liens d'affection profonds ?
Et pourtant, il n'est pas toujours facile à vivre Jean Carmet ! Tour à tour généreux ou tyrannique, vivre à ses côtés n'était pas une sinécure . Ceux qui cherchent un portrait fouillé de l'acteur en resteront pour leurs frais,  car il n'est ici envisagé que par le biais de sa relation à l'autrice.
Soyons honnête, c'est plus pour cet acteur atypique que pour le thème en lui-même que j'ai lu ce livre, mais au final la manière dont Tatiana Valle , fille d'artistes , comédienne,  épouse de metteurs en scène et mère de comédiens (même si les prénoms sont changés, en un clic on les identifie) relate sa vie souvent chahutée a su me toucher.

17/01/2019

La petite danseuse de quatorze ans ...en poche

"Sa statuette, qui emprunte aux techniques médicales et aux fabrications d'objets courants est donc aussi et avant tout une immense réflexion sur la puissance de la création et en particulier de la sculpture."

Nous avons tous en tête tous la sculpture de Degas, reproduite à de très nombreux exemplaires .Mais qui connaît l'identité de La petite danseuse de quatorze ans qui posa pour le sculpteur ?
Dans cette enquête, Camille Laurens s'attache à retracer la vie en en apparence "minuscule" de Marie van Goethem et, à travers elle,à brosser le portrait de toutes ces petites filles pour qui la danse représentait plus un moyen de survie ,via l'exploitation éhontée de leurs corps, qu'un art exaltant.camille laurens
L'auteure s’attache aussi à la manière dont l’œuvre elle-même a été accueillie, de manière très violente au début, avant de connaître une renommée mondiale.
Très documentée , tour à tour émouvante et révoltante, cette enquête analyse aussi les relations entre l'artiste, son modèle et la manière dont une œuvre est reçue par le public. Un document passionnant qui se dévore comme un roman.

La petite danseuse de quatorze ans, Camille Laurens

15/01/2019

Délit de gosse

"Bien sûr que Jeanne avait raison. On finirait nécessairement par avoir le même regard ballant entre terre et ciel, la gosse et moi, ça tombait sous le sens."

Réalisatrice en devenir, Jeanne décide de profiter du mariage de son petit frère, Ernest, pour effectuer auprès de son ancien fiancé un braquage de gamètes. Pas question en effet pour elle d'envisager autre chose qu'un rapport sexuel afin de concevoir "la gosse" dont rêvent Jeanne et sa compagne.
Aidées de leur ami gay, Mano, les jeunes femmes mettent alors au point un scénario rocambolesque, extrêmement précis et visuel, qui se déroulera dans le manoir familial du clan de Jeanne, dans le Périgord. Mais gare à ceux qui oseraient se mettre en lumière et franchir la lisière de ce qui reste tolérable aux yeux d'une famille engluée dans ses traditions et ses préjugés.isabel ascencio
Isabel Ascencio aurait pu choisir la voie documentaire pour traiter ce thème ,mais elle a préféré une manière à la fois plus poétique, par la langue et plus ancrée dans l'univers de la création artistique, dans lequel ses héroïnes vont parvenir par des chemins très différents.
Ce n'est pas un hasard, si en choisissant de raccourcir ses nom et prénom, la braqueuse de gamètes endosse l'identité de Jeanne Duval , maîtresse mulâtre de Baudelaire qui a été effacée ,ou plutôt juste recouverte de peinture sur un tableau où elle figurait derrière son amant , tant elle inspirait à la fois de fascination mais aussi de honte. Croyant choisir un nom d'artiste, la jeune réalisatrice optait en fait pour un nom "de paria" comme le souligne Marie, qui vient de soutenir une thèse sur cette femme dont elle partage la couleur de peau.
Un roman sensible et lucide sur une société qui peine à évoluer.



 Le Rouergue 2019.