07/02/2008
Cluedo dans la plus grande bibliothèque du monde
La délégation norvégienne, d''Hugo Boris, semble de prime
abord s'inspirer de deux schémas classiques. D'une part des gens, qui,
différents tant par leur nationalité que par leur origine sociale vont
se retrouver dans un espace qui va rapidement devenir clos,
en l'occurence un chalet nordique; d'autre part, un point commun qui
les unit, la chasse, ce qui va donner lieu à quelques récits troublants
, racontés pour se distraire, comme le faisaient les
personnages-prétextes de Maupassant dans le recueil de nouvelles Contes de la bécasse.
Mais
,d'emblée le fantastique confère une toute autre dimension à ce roman.
Cette forêt d'où est issue la majorité des livres publiés en
Europe devient une bibliothèque puis un personnage à part entière
:"Il lui semble marcher entre des piles fragiles de livres élancées
vers le ciel, se surprend à pousser les branches alourdies avec
plus de circonspection, comme s'il avait à coeur de ne pas faire
s'écrouler ces étagères de livres." les chasseurs, dont chaque
sortie ne se déroule pas normalement, seront-ils " digérés et
rejetés " par la forêt?
Livres et forêt, étroitement
imbriqués...L'auteur sème des indices comme el petit poucet et
nosu fait basculer dans un monde où le narrateur principal est
aveuglé par la réverbération de la neige et où le lecteur lui même
devient acteur: à lui d'influer, ou non, sur le cours des
événements en tranchant dans le vif et dans le dernier cahier du livre,
volontairement non massicoté....
Si
Clarabel ne me l'avait pas gentiment envoyé, je doute que
j'aurais sauté le pas vu mon aversion pour les chasseurs.
mais là, bizarrement, mon amour des mots a prévalu et je me suis
régalée avec le vocabulaire technique de la chasse, le style
puissant et efficace de l'auteur. Je me suis laissée prendre au charme
de ce roman qui traite bien plus du pouvoir des livres et des mots
que de la traque des animaux. Une réussite !
L'avis, plus nuancé, de Cuné.
06:02 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (13)
06/02/2008
"Tout était made in Vian."
Louis et Elsa forment un « bébé-couple » qui se connaît depuis 5 ans déjà et « C’est
long cinq ans, à vingt ».
Habituée par ses parents trotskystes
à manier les mots, Elsa ne supporte plus les silences de Louis. Pour mieux nier
l’évidence et/ou ou tenter de le garder, La jeune femme se lance à corps et cœur
perdu dans une histoire d’amour avec…Boris Vian. Boris Vian dont elle range la
bibliothèque et qui lui apparaît à plusieurs
reprises…
Premier roman de la jeune Lou Delachair, Boris Vian et moi fourmille d’invention
langagière et d’énergie. Le monde des parents est traité à la kalachnikof , « Et je songeais que les vieux couples
finissent toujours par communiquer par porosité, comme les jeans les jours de
pluie, quand l’eau monte jusqu’au genou » mais aussi avec beaucoup de
tendresse.
Malgré quelques longueurs et scories
d’écriture (quelques clichés côtoient de superbes images), on suit le sourire au
lèvres, les péripéties de ces amours (débutantes) qui, on le sait bien,
« finissent mal, en général . »Lou Delachair se crée
un univers poétique et dynamique et pas besoin d’être une groupie de l’auteur de
« L’écume des jours » pour apprécier ce très joli premier roman destiné aux
ados. Un talent à suivre.
06:04 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (11)
29/01/2008
Livre à part
Catherine Ternynck, dans sontrès beau texte,Chambre à part, nous
convie à une mise en mots de sa pratique de psychanalyste. Nul
discours théorique, nul voyeurisme mais une écriture au plus près du
ressenti, des émotions.
Dès
la montée de l'escalier, dès l'entrée dans la Chambre, cette Chambre,
si vivante , si réceptive et si bien transcrite par la plume de
l'auteure, le dialogue s'engage.Nécessité pourtant pour l'analyste de
se tourner parfois, pour une respiration, vers l'extérieur: un
mystérieux chat blanc qui passe, voire accompagne les visiteurs ou plus
le souvent l'Arbre qui est "au dehors, le tiers sans lequel dans la
Chambre, il n'y aurait pas d'échange, de rencontre possible."
Le
lecteur glane au fur et à mesure des réflexions dans ces fragments comme autant de
lumignons susceptibles d'éclairer son chemin : "On
ne peut imaginer le nombre de gens qui vivent mal logés en
eux-mêmes. certains n'ont pas su prendre soin du lieu.
D'autres n'ont jamais imaginé qu'on pouvait être bien chez soi et se
sont accomodés. Il faut dire que la tolérance des hommes aux espaces insalubres est extrême, déconcertante.".Ou bien encore: "Le monde irait-il mieux si l'on renonçait
à vouloir le faire parler? Si l'on acceptait, de temps en temps, de le
prendre dans ses bras et de le bercer en silence? ".Et c'est
ce que chacun des visiteurs vient peut être chercher dans la
Chambre...
Une écriture charnelle et puissante à laquelle on ne peut rester indifférent. Une très belle rencontre.
Catherine Ternynck - Chambre à part (dans le cabinet du psychiatre)
Ed. Desclée de Brouwer "Littérature ouverte"
Déjà vendu dans le Nord-Pas-de-Calais, sortie nationale en Mars 2008
Merci à Cuné pour cette découverte qui va m'accompagner longtemps.
06:18 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (16)
21/01/2008
Du rififi dans le monde de l'art.
Voilà ce que c'est que d'avoir beaucoup aimé un roman d'un auteur : on risque la déception au suivant ! Toiles de maître, d'Hannelore Cayre, dont j'avais adoré Ground XO ne m'a pas autant convaincue.
J'ai
deviné très vite quel problème historique était sous-jacent, les
personnages m'ont semblé manquer de relief, bref, je n'aurais pas
dû commencer par le dernier roman en date (bien meilleur à mon avis)
mais respecter l'ordre de parution, j'aurais alors pu écrire que
l'écriteure d'Hannelore Cayre allait en se bonifiant ,( comme le
cognac ? )
06:10 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (10)
18/01/2008
Brumes
Si Cruelles natures se donne d'abord des allures buccoliques
avec son personnage d'écologue,jadis renommé, qui se balade dans la
Brenne, consignant soigneusement les cadavres d'animaux qu'il rencontre
en chemin, le lecteur qui se sera déjà frotté à l'univers de Pascal
Dessaint sait bien que cette atmosphère brumeuse ne peut recéler que de
noirs desseins...
En contrepoint, les paysages du Nord et quelques
habitants de la région de Dunkerque, trois jeunes dont on devine
rapidement qu'ils ne se contenteront pas de voyager par
procuration avec les pigeons voyageurs, trois jeunes qui vont partir en
vrille ...
Tout l'art du romancier sera d'arriver à croiser ces
destins que tout semble éloigner et à semer mine de rien des indices
destinés à nous montrer que tout n'est pas forcément comme nous le
croyons car si "Après quelques instant de discussion et parfois même
d'un seul regard, il semble qu'on est en mesure de tout percevoir
de certains hommes et qu'il n'y a pas grand chose à
espérer sous la surface. Pour d'autres, en revanche, tout se
situe en profondeur. ceux-là ne se dévoilent jamais totalement et
obligent à l'effort."
Fourmillant de noms d'oiseaux et de plantes,
ce roman donne l'irrésistible envie de partir se promener dans la
région évoquée mais l'auteur signale dans sa postface qu'il est
resté "vontairement vague afin de préserver la tranquillité des hommes
et des animaux".
Avec un seule tortue et une voiture, Dessaint arrive à créer un suspense tellement insoutenable que je n'ai pas résisté; je suis allée directement à la fin du livre pour voir si l'animal s'en sortait !
Seule restriction :un passage scatologique dont je cherche encore l'utilité...
le site de l'auteur, originaire du Nord et on se demande pourquoi, installé à Toulouse ...
06:05 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (14)
16/01/2008
Maison pleine de charme cherche acquéreur
Quatre personnages en quête de maison. Quatre personnages en
quête d'une place dans le monde, un endroit où se retirer, un endroit
où se sentir enfin soi même...
Pour certains cette quête se trompe
d'objet, ce n'est pas une maison qu'ils cherchent vraiment mais
un nouveau souffle à leur vie. Pour d'autres,cette maison sera le
révélateur que tout ne va pas bien dans leur existence.Pour un
troisième personnage enfin, cette maison n'était qu'un chiffon agité
pour détourner l'attention mais , les charmes du Vexin sont puissants !
L'actuel propriétaire de la maison, qui croit manipuler les uns et les
autres, les rudoyant et les charmant tour à tour , se trouvera peut être
lui aussi mis à nu par cette maison qu'il ne connaît pas
vraiment...
Deux hommes, deux femmes à des moments charnières de
leur existence queAgnès marietta sait rendre attachants même si
j'aitrouvé que les persannages masculins étaient mieux croqués, peut
être parce que moins encombrés de monologues intérieurs que ceux de
l'écrivaine ,"mauvaise-mère", "mauvaise-fille" ou de la femme parfaite
qui se rend compte soudain qu'elle est en train de passer à côté
de sa vie .Alléger un peu leurs pensées aurait donné davantage de
rythme peut être à l'ensemble.
Il n'en reste pas moins que j'ai passé un très joli moment avec les personnages de N'attendez pas trop longtemps.
06:13 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (12)
30/12/2007
Pour les fans de...
Marie Desplechin avec "Copie double" et Malika Ferdjoukh
avec "Le mystère de Greenwood" sont toutes les deux dans le "Je
bouquine"-premier magazine de lecture pour les ados- de Janvier.
Si
je ne suis pas trop rentrée dans le roman de Desplechin, histoire
d'une fille qui en imite en tout une autre, pas assez creusée à mon
avis, j'ai savouré le récit à la limite du fantastique de Malika
Ferdjouhk.
Si vous aimez les histoires se déroulant dans la lande
anglaise, pleines de mystères etde brumes, précipitez-vous chez
votre marchand de journaux !
08:47 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (11)
26/12/2007
Faits d'hiver # 3
Mc Cash n'aime pas Noël. Mc Cash n'aime pas grand monde d'ailleurs, sauf le leader du groupe Clash et en particulier La jambe gauche de Joe Strummer.
Même
s'il vient de donner sa démission de la police,se laisse pourrir sur
pied et envisage de passer de l'autre côté,un courrier providentiel
vient lui apprendre qu'il est père d'une petite fille.Cela le met
plutôt en rogne mais la curiosité est la plus forte et le voilà parti
en Bretagne pour si ce n'est rencontrer mais du moins apercevoir sa
fille."Une orpheline retrouve miraculeusement son père, ancien
activiste expulsé d'Irlande et devenu inspecteur de police pour se
racheter un avenir affectif en toc massif,mais comble de malchance, le père,gangrené jusqu'à la moelle, préfère se tirer une
balle dans l'oeil !"Voilà comment le personnage principal ironise sur la situation.
Mais MCCash le borgne trouve toujours le moyen de se fourrer dans les ennuis et les cadavres pleuvent bientôt autour de lui...
L'intrigue
est plutôt paresseuse, on se doute bien que le père bougon en
diable va finir par se laisser attendrir par sa fille mais c'est
surtout le style de Caryl Férey qui donne tout son punch au roman , "Le contenu des dossiers s'avérant aussi trépidant que la vie d'un gravier..." , ainsi que les personnages,que ce soit ce ronchon de Mc Cabe ou l'assistante sociale pas piquée des vers qu'il rencontre sur son chemin. Le tout scandé par des titres de Clash qui donnent leur nom aux chapitres , "Rock the Casbah", nous valant un petit détour au Maroc, où Mc Cab , fidèle à lui même, s'étonne que les gens dans la rue lui sourient : "Mc Cabe s'était même demandé un moment s'il n'était pas suivi par une espèce de clown à la con, mais il finit par s'y faire".
Je vous souhaite plein de sourires dans la rue...
06:03 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (19)
21/12/2007
Un effondrement
Ecrire sur la dépression ,c'est écrire sur le fil du rasoir : ne pas
tomber dans l'auto-apitoiement tout en arrivant à faire partager
aux lecteurs ce que l'on a vécu (je doute qu'on puisse écrire sur ce
thème sans l'avoir approché au plus près).
Ghislaine Dunant ,en évitant le second écueil typique , "Regardez comme je suis plus fort(e)maintenant",n'exhibe pas cet effondrement
comme d'aucuns leur douleur. Elle y revient, presque de manière
clinique, presque comme si elle parlait d'une autre et cette autre
c'est elle même, mais il y a longtemps déjà...
On frémit, en lisant
que dans les années 70 on pratiquait encore en france les
électro-chocs,on a envie de secouer ses soignants qui ne parlent pas ou
presquepas aux malades, qui n'expliquent rien du traitement subi par
les patients.
Une écriture qui, parfois, m'a rappelé celle de
Duras. Une écriture au plus près de cet engourdissement provoqué
par les médicaments, une recherche mais "Comment pouvais-je dire au
médecin que j'avais perdu quelque chose, il me manquait quelque chose
pour faire tout ça et je ne savais pas ce que c'était? ".
Un livre
qui nous entraîne avec lui et que je n'ai pas su lire d'une
traite, éprouvant le besoin de "bouffées d'oxygène". Une écriture très
belle comme assourdie.
L'avis de Cuné que je remercie encore pour cet envoi.
06:32 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (17)
19/12/2007
"les enfants sont formidables"J.martin
Pour une fois, Christophe n'est pas parti en vacances en
famille. Au fil des lettres que lui envoie son petit frère , nous
découvrirons, en creux, les raisons de cet exil
involontaire.
Portrait épistolaire à une seule voix, Les lettres de mon petit frère
aborde avec délicatesse un sujet encore délicat : "A mon avis,
la faute grave, c'est quand cette idiote de Sylvie est allée lui
raconter qu'elle vous avait vus, toi et Florian , en train de
vous embrasser sur la bouche." Et d'ajouter"Bon, Si on n'a plus
le droit d'embrasser ses copains où on veut autant aller en
prison tout de suite." réaction plus naturelle et
rafraîchissante, y a pas.
En attendant, les vacances sans Christophe
tournent au fiasco : maman rate ses coquillettes, papa fait
chavirer le bâteau car il ne sait pas naviguer sans son
fils aîné, sans compter le estivants qui détruisent
le mur séparant la plage de la maison louée et qui engagent une lutte sans merci contre les parents, bien
décidés à défendre leur territoire, fût-ce au prix d'ordures qui
remplissent le jardin. Chacun interprétera comme bon lui semble
ces symboles...
Les parents et les enfants somatisent à qui mieux
mieux et surtout cet exil forcé empêche Christophe de tenir sa
promesse: être là quand son petit frère tombe amoureux...
Heureusement , tout rentrera dans l'ordre,(demanière un peu trop iédéalisée mais bon ) et chacun retrouvera la sérénité.
Un
petit livre (par la taille ), tout en sensibilité et qui montre que
souvent les enfants sont plus tolérants que les adultes... Un gros coup de coeur !
L'avis de In cold blog
06:02 Publié dans romans français | Lien permanent | Commentaires (19)